III. L'ALTERNATIVE PROPOSÉE PAR VOTRE COMMISSION
La crise
de croissance que connaît l'archéologie préventive depuis
plusieurs années exige à l'évidence une clarification de
son cadre juridique comme de son organisation administrative. Or, votre
rapporteur constate que le projet de loi ne constitue qu'une réponse
partielle aux difficultés que connaît depuis plusieurs
années cette discipline.
Si le projet de loi permet de satisfaire sur certains points les attentes
légitimes des archéologues et des aménageurs, il
présente de nombreuses faiblesses auxquelles votre commission a
souhaité remédier :
- en précisant le cadre dans lequel s'exercent les compétences de
l'Etat en matière de fouilles préventives ;
- en refusant le principe du monopole afin, notamment, de permettre aux
collectivités territoriales de se doter de services
archéologiques ;
- et en aménageant le mode de financement de l'archéologie
préventive.
A. PRÉCISER LE RÔLE DE L'ETAT
Une des
principales lacunes du projet de loi est de ne pas préciser les
conditions dans lesquelles l'Etat prescrit des fouilles préventives.
L'article 1er bis adopté par l'Assemblée nationale s'en tient
à un rappel très général des compétences de
l'Etat et ne remédie en rien à l'inadaptation du cadre juridique
actuel aux exigences de l'archéologie de sauvetage. Sous réserve
de la procédure de désignation du responsable de fouilles, il
n'apporte en effet aucune modification aux dispositions législatives en
vigueur, dont l'articulation avec le projet n'apparaît pas au demeurant
clairement.
Votre commission a donc souhaité préciser les conditions dans
lesquelles s'exercent les compétences de l'Etat en matière de
prescriptions de fouilles préventives afin de leur conférer un
cadre juridique propre
.
• Dans la logique de la remise en cause du monopole
conféré à l'établissement,
il appartiendra
à l'autorité administrative et à elle seule de
désigner le responsable de fouilles
. Celui-ci pourra être
choisi parmi les personnels de l'établissement mais également au
sein de services de collectivités territoriales ou éventuellement
de structures de droit privé (associations, entreprises...). On en
revient là à l'esprit de la loi de 1941.
Lors de la prescription des opérations archéologiques, seront
précisés les délais dans lesquels seront
réalisées les fouilles. Cette disposition permet de
répondre aux attentes des aménageurs soucieux d'anticiper le
coût et la durée des fouilles archéologiques.
•
Afin de renforcer les garanties scientifiques dont doivent
être entourées les prescriptions de l'Etat, il est prévu
une procédure consultative
calquée sur celle qui
prévaut depuis 1994. La consultation d'une instance scientifique devrait
être de nature à lever les soupçons sur une administration
qui serait à la fois " juge et partie ". En effet, le poids
que représentera l'établissement public, doté ou non de
droits exclusifs, risque de marginaliser encore les services régionaux
d'archéologie et de favoriser une confusion des genres,
préjudiciable aux intérêts scientifiques comme aux
exigences du développement économique.
Pour cette raison, votre commission vous proposera de
conférer une
existence législative au Conseil national de la recherche
archéologique
(CNRA)
et aux commissions interrégionales de
la recherche archéologique
(CIRA), tout en élargissant leur
composition actuelle à des représentants des collectivités
territoriales. Il apparaît nécessaire de renforcer
l'autorité de ces organismes consultatifs, et en particulier des CIRA,
qui, depuis leur création par décret en 1994, jouent un
rôle très actif auprès des services régionaux dans
la définition des prescriptions archéologiques et le
contrôle des opérations de terrain.
• Votre rapporteur soulignera cependant que
les conditions dans
lesquelles l'Etat pourra s'acquitter de ses obligations dépend pour une
large part des crédits budgétaires qui seront à l'avenir
consacrés à l'archéologie
. La crise actuelle de
l'archéologie est largement imputable, on l'a vu, à
l'incapacité de l'Etat à se doter des moyens correspondants
à ses missions. A cet égard, la mention de la carte
archéologique dans la loi, qui constitue pourtant un
élément essentiel pour mieux appréhender le " risque
archéologique " risque de rester de l'ordre du voeu pieux si
l'effort de recrutement nécessaire pour renforcer les services
régionaux d'archéologie n'est pas consenti.