EXAMEN DES ARTICLES
Article premier
(art. 435-1 à 435-4 nouveaux du
code pénal)
Incrimination de la corruption d'agents publics
étrangers,
de fonctionnaires communautaires ou appartenant
aux
autres Etats membres de l'Union européenne
Le
livre IV du code pénal est consacré aux "
crimes et
délits contre la Nation, l'Etat et la paix publique
". Le
titre III de ce livre IV concerne les "
Atteintes à
l'autorité de l'Etat
" et comporte actuellement quatre
chapitres respectivement relatifs aux atteintes à la paix publique, aux
atteintes à l'administration publique commises par des personnes
exerçant une fonction publique, aux atteintes à l'administration
publique commises par des particuliers, enfin aux atteintes à l'action
de justice.
L'article premier du projet de loi a pour objet d'insérer dans le
titre III du livre IV du code pénal un chapitre V
consacré aux "
Atteintes à l'administration publique des
Communautés européennes, des Etats membres de l'Union
européenne, des autres Etats étrangers et des organisations
internationales publiques
".
Ce chapitre comporterait trois sections respectivement relatives à la
corruption passive
, à la
corruption active
, enfin aux
peines complémentaires et à la responsabilité des
personnes morales
. Cet article premier du projet de loi doit permettre la
transposition en droit français de la Convention signée dans le
cadre de l'O.C.D.E relative à la corruption d'agents publics
étrangers dans les transactions commerciales internationales, ainsi que
des conventions signées dans le cadre de l'Union européenne
relatives à la protection des intérêts financiers des
Communautés européennes (Convention du 26 juillet 1995)
et à la lutte contre la corruption (Convention du 26 mai 1997).
L'une des questions qui se posent est celle de savoir si le code pénal,
dans sa rédaction actuelle, ne punit pas d'ores et déjà la
corruption d'agent public étranger ou d'agent public appartenant
à une organisation internationale. L'exposé des motifs du projet
de loi donne clairement une réponse négative à cette
question. Actuellement, la corruption active ou passive figure parmi les
infractions mentionnées dans le livre du code pénal
consacré aux "
crimes et délits contre la Nation, l'Etat
et la paix publique
", ce qui semble exclure les atteintes à
des administrations étrangères ou internationales. Les rares
décisions jurisprudentielles intervenues sous l'empire de l'ancien code
pénal semblent confirmer que le délit de corruption active ou
passive, tel qu'il figure dans le code pénal ne concerne pas les agents
étrangers.
La circulaire du 14 mai 1993 commentant les dispositions de la partie
législative du nouveau code pénal précise que l'expression
"
personne dépositaire de l'autorité publique
"
employée dans les articles du code relatifs à la corruption
"
paraît pouvoir s'appliquer aux fonctionnaires internationaux,
dès lors qu'il leur est reconnu, en application de conventions
internationales des pouvoirs d'autorité ou une mission de service public
sur le territoire français
". Les agents publics d'Etats
étrangers ne sont donc en tout état de cause pas concernés.
Le Gouvernement a choisi de présenter les dispositions
nécessaires pour la transposition dans l'Union européenne et de
la convention de l'O.C.D.E dans une section spécifique. Il aurait
été envisageable de compléter les dispositions existantes
du code pénal sur la corruption active et la corruption passive. Le
Gouvernement a écarté ce choix, d'une part à cause de la
diversité du champ d'application des diverses conventions en
présence, d'autre part pour tenir compte de la spécificité
de certaines notions propres à chacun des traités.
Il convient enfin de signaler que chacune des nouvelles incriminations
renvoie explicitement à la convention à laquelle elle se
rapporte, ce qui constitue une novation dans notre droit pénal
destinée à délimiter de manière précise le
champ de l'infraction.
SECTION 1
De la corruption passive
Le texte proposé pour le chapitre V du titre III du livre IV du code pénal comporterait une section I consacrée à la corruption passive et composée d'un unique article.
Article
435-1 du code pénal
Corruption passive de fonctionnaire
communautaire
ou de fonctionnaire d'un autre Etat membre de l'Union
européenne
Le texte
proposé pour l'article 435-1 nouveau du code pénal tend
à punir de dix ans d'emprisonnement et de 1.000.000 F d'amende
"
le fait par un fonctionnaire communautaire ou un fonctionnaire
national d'un autre Etat membre de l'Union européenne ou par un membre
de la Commission des Communautés européennes, du Parlement
européen, de la Cour de justice et de la Cour des comptes des
Communautés européennes de solliciter ou d'agréer, sans
droit, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des
présents ou des avantages quelconques pour accomplir ou s'abstenir
d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou
facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat
. "
Plusieurs remarques peuvent être formulées sur la
définition de cette nouvelle infraction.
Le texte proposé fait explicitement référence à la
convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des
fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires
des Etats membres de l'Union européenne faite à Bruxelles le
26 mai 1997. Un souci de "
dissiper toute confusion
" a
guidé ce choix du Gouvernement.
L'expression "
fonctionnaire communautaire
" doit être
entendue dans un sens très large. En effet, le rapport explicatif
concernant la convention du 26 mai 1997
8(
*
)
précise que cette expression
vise "
non seulement les fonctionnaires titulaires des
Communautés européennes stricto sensu, auxquels s'applique le
statut des fonctionnaires des Communautés européennes, mais aussi
les différentes catégories d'agents engagés par contrat au
sens du régime applicable aux autres agents des Communautés
européennes. Ce concept englobe les experts nationaux mis à la
disposition des Communautés européennes pour y exercer des
fonctions équivalentes à celles qu'exercent les fonctionnaires et
autres agents des Communautés européennes
".
Toutes les personnes travaillant dans des organisations de droit communautaire
sont considérées comme des fonctionnaires communautaires au sens
de la Convention. Il en va ainsi du personnel de la Banque européenne
d'investissement, de l'Agence européenne pour l'environnement, de la
Banque centrale européenne...
En ce qui concerne la notion de "
fonctionnaire national d'un autre
Etat membre
", le rapport explicatif concernant la convention du
26 mai 1997 indique que l'acception du droit pénal du pays
d'origine du fonctionnaire national est privilégiée.
Les éléments constitutifs de l'infraction ont été
calqués sur les éléments d'ores et déjà
prévus par l'article 432-11 du code pénal relatif à
la corruption passive. Ces éléments prennent pleinement en
considération l'ensemble des exigences posées par la convention
du 26 mai 1997, laquelle définit la corruption passive comme
"
le fait intentionnel, pour un fonctionnaire, directement ou par
interposition de tiers, de solliciter ou de recevoir des avantages de quelque
nature que ce soit, pour lui même ou pour un tiers, ou d'en accepter la
promesse, pour accomplir ou ne pas accomplir, de façon certaine à
ses devoirs officiels, un acte de sa fonction ou un acte dans l'exercice de sa
fonction
".
Seul l'élément intentionnel n'est pas repris dans la
définition proposée par le projet de loi, mais il résulte
de l'article 121-3 du code pénal qu'il n'est pas de délit
sans intention de le commettre.
Les pénalités sont les mêmes que celles prévues par
l'article 432-11 du code pénal relatif à la corruption
passive et au trafic d'influence commis par des personnes dépositaires
de l'autorité publique ou exerçant une mission de service public.
Rappelons à cet égard que, dans un arrêt de 1989
9(
*
)
, la Cour de justice des
Communautés européennes à considéré que les
Etats membres "
doivent notamment veiller à ce que les
violations du droit communautaire soient sanctionnées dans des
conditions, de fond et de procédure, qui soient analogues à
celles applicables aux violations du droit national d'une nature et d'une
importance similaires et qui, en tout état de cause, confèrent
à la sanction un caractère effectif, proportionné et
dissuasif
".
Le rapport explicatif de la convention précise que les Etats membres
disposent d'une certaine marge d'appréciation, mais le Gouvernement a
choisi de prévoir des peines rigoureusement identiques pour la
corruption d'agents nationaux et la corruption des fonctionnaires
communautaires ou de fonctionnaires d'autres Etats membres de l'Union
européenne.
Le second alinéa du texte proposé pour l'article 435-1 du
code pénal prévoit que les dispositions de cet article entreront
en vigueur le jour de l'entrée en vigueur de la convention du
26 mai 1997 sur la corruption signée dans le cadre de l'Union
européenne. Le Parlement a autorisé la ratification de cette
convention au printemps 1999, mais le Gouvernement n'a pas
déposé les instruments de ratification de la Convention dans
l'attente de l'adoption du présent projet de loi.
Ce choix paraît judicieux, dans la mesure où il est
préférable que la convention et la loi de transposition n'entrent
pas en vigueur de manière décalée dans le temps. Votre
commission estime cependant qu'il est inutile de prévoir au sein du code
pénal lui-même une disposition transitoire telle que celle qui est
proposée. Votre commission vous soumet donc un
amendement
de
suppression du second alinéa du texte proposé pour
l'article 435-1 du code pénal et proposer le rétablissement
de cette disposition transitoire à l'article 2 du projet de loi,
lequel n'a pas vocation à être codifié.
SECTION 2
De la corruption active
Le texte proposé pour le chapitre V nouveau du titre III du livre IV du code pénal comporte une section 2 relative à la corruption active et composée de trois articles numérotés 435-2 à 435-4.
Article
435-2 du code pénal
Corruption active de fonctionnaire
communautaire
ou de fonctionnaire d'un autre Etat membre de l'Union
européenne
Le texte
proposé pour cet article est le pendant du texte proposé pour
l'article 435-1, puisqu'il tend à punir la corruption active de
fonctionnaire communautaire ou de fonctionnaire d'un Etat membre de l'Union
européenne autre que la France.
Le nouvel article 435-2 vise le corrupteur alors que le texte proposé
pour l'article 435-1 visait la personne corrompue.
Serait puni de dix ans d'emprisonnement et de 1.000.000 F d'amende
"
le fait de proposer sans droit, directement ou indirectement, des
offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages
quelconques pour obtenir d'un fonctionnaire communautaire ou d'un fonctionnaire
national d'un autre Etat membre de l'Union européenne ou d'un membre de
la Commission des Communautés européennes, du Parlement
européen, de la Cour de justice et de la Cour des comptes des
Communautés européennes qu'il accomplisse ou s'abstienne
d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat ou
facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat
".
Le deuxième alinéa du texte proposé pour
l'article 435-2 du code pénal tend à punir des mêmes
peines "
le fait de céder à une des personnes
précédemment mentionnées qui sollicite des promesses,
dons, présents ou avantages pour accomplir ou ne pas accomplir un acte
de sa fonction
".
Ainsi, comme pour la corruption passive, la définition de la corruption
active de fonctionnaire communautaire ou de fonctionnaire d'un autre Etat
membre de l'Union européenne que la France est exactement la même
que la définition de la corruption active d'une personne
dépositaire de l'autorité publique (article 433-1 du code
pénal).
Cette définition paraît respecter pleinement celle de la
convention du 26 mai 1997, au sens de laquelle la corruption active
est "
le fait intentionnel, pour quiconque, de promettre ou de donner,
directement ou par interposition de tiers, un avantage de quelque nature que ce
soit, à un fonctionnaire, pour lui-même ou pour un tiers, pour
qu'il accomplisse ou s'abstienne d'accomplir, de façon certaine à
ses devoirs officiels, un acte de sa fonction ou un acte dans l'exercice de sa
fonction
".
Le troisième alinéa du texte proposé pour
l'article 435-2 prévoit que ses dispositions entreront en vigueur
le jour de l'entrée en vigueur de la convention du 26 mai 1998
relative à la corruption. Conformément à la
décision prise à propos de l'article 435-1, votre commission
vous soumet un
amendement
de suppression de cet alinéa pour le
transférer dans l'article 2.
Article 435-3
Corruption active d'agents
publics
étrangers
ou appartenant à des organisations internationales
autres que les Communautés européennes
Le texte
proposé pour l'article 435-3 du code pénal tend à
transposer la convention sur la lutte contre la corruption d'agents publics
étrangers dans les transactions commerciales internationales
signée dans le cadre de l'O.C.D.E le 17 décembre 1997.
Comme pour la convention signée dans le cadre de l'Union
européenne, le texte proposé fait directement
référence à la convention qu'il tend à transposer.
Le texte proposé tend à punir de dix ans d'emprisonnement et de
1.000.000 F d'amende le fait de proposer sans droit, directement ou
indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des
avantages quelconques pour obtenir "
d'une personne dépositaire
de l'autorité publique, chargée d'une mission de service public,
ou investie d'un mandat électif public dans un Etat étranger ou
au sein d'une organisation internationale publique, qu'elle accomplisse ou
s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat
ou facilité par sa fonction, sa mission ou son mandat, en vue d'obtenir
ou de conserver un marché ou un autre avantage inclus dans le commerce
international
".
A nouveau, l'incrimination proposée est très proche de celle
d'ores et déjà prévue pour la corruption de fonctionnaires
nationaux. Ainsi, la référence aux personnes dépositaires
de l'autorité publique, chargées d'une mission de service public
ou investies d'un mandat électif public est directement reprise de
l'article 433-1 du code pénal, qui incrimine la corruption active.
La convention de l'O.C.D.E fait pour sa part référence à
la notion d'"
agent public étranger
"
qui
désigne "
toute personne qui détient un mandat
législatif, administratif ou judiciaire dans un pays étranger,
qu'elle ait été nommée ou élue, toute personne
exerçant une fonction publique pour un pays étranger, y compris
pour une entreprise ou un organisme public, et tout fonctionnaire ou agent
d'une organisation internationale publique "
.
Le texte proposé pour l'article 435-3 tend à transposer de
manière complète le texte de la convention. Ainsi, la notion de
personne dépositaire de l'autorité publique désigne
"
les personnes qui exercent une fonction d'autorité, que cette
autorité soit de nature administrative, juridictionnelle ou
militaire
" (circulaire du 14 mai 1993 commentant la partie
législative du nouveau code pénal).
Le droit français comportant une infraction spécifique de
corruption de magistrat, de juré et d'autres personnes ayant une
fonction judiciaire, le Gouvernement a cependant choisi de faire un sort
particulier à cette catégorie d'agents publics étrangers
qui font l'objet du texte proposé pour l'article 435-4 du code
pénal.
En ce qui concerne les éléments constitutifs de l'infraction, le
texte proposé est identique à l'article 433-1 du code
pénal. Le texte proposé incrimine en effet "
le fait de
proposer sans droit, directement ou indirectement, des offres, des promesses,
des dons ou des avantages quelconques
". Cette expression paraît
réaliser une transposition très complète de la convention
du 17 décembre 1997 qui invite chaque Etat partie à
punir "
le fait intentionnel, pour toute personne, d'offrir, de
promettre ou d'octroyer un avantage indu pécuniaire ou autre,
directement ou par des intermédiaires
".
Le but de l'infraction est défini de manière presque identique
dans le texte proposé pour l'article 435-3 du code pénal et
dans le texte de la convention. Le texte proposé précise que la
proposition est faite à la personne concernée pour obtenir
"
qu'elle accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa
fonction, de sa mission ou de son mandat ou facilité par sa fonction, sa
mission ou son mandat "
. La convention évoque le fait que
l'agent étranger "
agisse ou s'abstienne d'agir dans
l'exécution de fonctions officielles
".
Enfin, il convient de noter que la nouvelle infraction comporte un
élément spécifique par rapport à la
définition actuelle de la corruption active dans le code pénal.
Le texte proposé ne concerne en effet que la corruption d'un agent
public étranger "
en vue d'obtenir ou de conserver un
marché ou un autre avantage indu dans le commerce
international "
. Cette expression est directement reprise de
l'article premier de la convention du 17 décembre 1997.
Les commentaires de la Convention apportent des éclairages
intéressants et importants sur ce dernier élément
constitutif de l'infraction.
Ainsi, par
" autre avantage indu
", il faut entendre
"
un avantage qu'une entreprise n'aurait clairement pas dû
recevoir, par exemple l'autorisation d'exercer une activité pour une
usine ne remplissant pas les conditions réglementaires
".
Les commentaires de la convention précisent en outre qu'il y a
infraction indépendamment "
de la valeur de l'avantage ou de son
résultat, de l'idée qu'on peut se faire des usages locaux, de la
tolérance de ces paiements par les autorités
légales "
.
En revanche, l'infraction n'est pas constituée "
lorsque
l'avantage est permis ou requis par la loi ou la réglementation
écrites du pays de l'agent public étranger, y compris la
jurisprudence
".
Surtout, les commentaires de la convention précisent que "
les
petits paiements dits de " facilitation " ne constituent pas des
paiements " en vue d'obtenir ou de conserver un marché ou un autre
avantage indu (...) et, en conséquence, ils ne constituent pas une
infraction (...)
". Il est possible de se demander si cette
dernière précision ne devrait pas être explicitement
inscrite dans l'article du code pénal créant l'infraction de
corruption d'agent public étranger. On peut toutefois estimer que les
magistrats appelés à appliquer la nouvelle infraction seront
nécessairement conduits à se reporter à la convention,
à laquelle le texte proposé pour l'article 435-3 du code
pénal fait explicitement référence.
Votre commission estime cependant souhaitable que des orientations
générales de politique pénale du garde des Sceaux
rappellent que ces paiements "
de facilitation
" sont exclus
du champ d'application de la nouvelle incrimination.
En ce qui concerne les peines prévues, votre commission vous soumet un
amendement
les réduisant à cinq ans d'emprisonnement et
à 1.000.000 F d'amende. La convention de l'O.C.D.E prévoit
certes que l'éventail des sanctions applicables à la corruption
d'agent public étranger doit être comparable aux sanctions
applicables à la corruption d'agents nationaux, mais elle a
également pour objectif d'assurer l'équivalence fonctionnelle
entre les mesures prises par les Etats parties. Or, d'après les
informations recueillies par votre rapporteur, les peines prévues par
les pays ayant déjà transposé la convention ne
dépassent pas cinq ans d'emprisonnement.
Il serait donc paradoxal que
la France et elle seule punisse la corruption d'agent public étranger de
peines deux fois supérieur à celles prévues par ses
partenaires.
Le deuxième alinéa du texte proposé pour
l'article 435-3 tend à punir des mêmes peines le fait de
céder à l'une des personnes précédemment
énumérées qui sollicite des offres, promesses, dons,
présents ou avantages pour accomplir ou s'abstenir d'accomplir un acte
de sa fonction ou un acte facilité par sa fonction.
Le troisième alinéa prévoit que les dispositions de
l'article 435-3 entreront en vigueur le jour de l'entrée en vigueur
de la convention du 17 décembre 1997. Conformément aux
décisions prises à propos des article 435-1 et 435-2, votre
commission vous soumet un
amendement
de suppression de cette disposition
qu'elle vous propose de faire figurer à l'article 2.
Enfin, le dernier alinéa du texte proposé prévoit que la
poursuite des délits visés dans l'article ne peut être
exercée qu'à la requête du ministère public.
Ainsi, le projet de loi tend à exclure la constitution de partie civile
en matière de corruption d'agent public étranger. Il convient de
rappeler qu'en tout état de cause, l'article 113-8 du code
pénal prévoit que la poursuite des délits commis par un
Français hors du territoire de la République ne peut être
exercée qu'à la requête du ministère public.
Par ailleurs, l'exposé des motifs du projet de loi précise que
"
lorsqu'une partie au moins de ces faits a eu lieu sur le territoire
national, la mise en mouvement de l'action publique par une entreprise
concurrente, par exemple, n'aurait, en tout état de cause, pas
été possible. En effet, comme l'indique l'intitulé du
chapitre V, l'incrimination a pour but de protéger les atteintes
portées à l'administration publique d'Etats étrangers ou
d'organisations internationales publiques. La commission de l'infraction ne
cause donc directement aucun préjudice personnel à une entreprise
concurrente
".
Le Gouvernement propose donc d'inscrire dans la loi le principe selon lequel la
poursuite est réservée au ministère public dans un souci
de sécurité juridique.
L'insertion de cette disposition dans le projet de loi mérite
d'être approuvée. Même en l'absence de condamnation, une
plainte avec constitution de partie civile déposée par un
concurrent évincé d'un marché peut être
profondément déstabilisante pour une entreprise et l'on ne peut
exclure a priori que certaines de ces plaintes ne soient jugées
recevables en l'absence d'une disposition explicite.
Il paraît au demeurant justifié de réserver au
ministère public le monopole de l'engagement des poursuites. Rappelons
que peu de pays connaissent le système de la constitution de partie
civile tel qu'il existe en France.
Il convient toutefois de noter que cette disposition n'est prévue que
pour les infractions destinées à permettre l'application de la
convention du 17 octobre 1997 signée dans le cadre de
l'O.C.D.E et non pour les infractions destinées à permettre
l'application des conventions signées dans le cadre de l'Union
européenne. Une telle différence peut toutefois être
justifiée par le fait que les conventions signées dans le cadre
de l'Union européenne prévoient un principe
d' "
assimilation
" entre le traitement
réservé aux nationaux et celui réservé aux
fonctionnaires de la Communauté.
Article
435-4 du code pénal
Corruption de magistrat dans un Etat
étranger
ou une organisation internationale publique
La
convention du 17 décembre 1997 sur la lutte contre la
corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales
internationales invite notamment les Etats à punir la corruption de
personnes détenant un mandat judiciaire. Or, cette notion ne
paraît pas couverte par le texte proposé pour
l'article 435-3, qui fait référence, conformément aux
dispositions sur la corruption déjà inscrites à
l'article 433-1 du code pénal aux personnes dépositaires de
l'autorité publique, chargées d'une mission de service public ou
titulaires d'un mandat électif public.
En effet, l'article 434-9 du code pénal incrimine
spécifiquement la corruption, au niveau interne, de magistrats ou
d'autres personnes exerçant une fonction judiciaire.
Le texte proposé pour l'article 435-4 du code pénal a donc
pour objet d'incriminer la corruption active de personnes détenant un
mandat judiciaire au sens de la convention. Le Gouvernement a choisi de
reprendre les éléments constitutifs de l'infraction de corruption
active de magistrat prévue à l'article 434-9 du code
pénal. Les personnes visées seraient donc "
un magistrat,
un juré ou toute autre personne siégeant dans une formation
juridictionnelle, un arbitre ou un expert nommé soit par une
juridiction, soit par les parties, ou une personne chargée par
l'autorité judiciaire d'une mission de conciliation ou de
médiation
".
Comme pour les infractions précédentes, serait puni le fait de
proposer des offres, promesses ou dons afin d'obtenir d'une des personnes
énumérées qu'elle accomplisse ou s'abstienne d'accomplir
un acte de sa fonction, mais aussi le fait de céder aux sollicitations
d'une de ces personnes.
Comme pour la corruption de personne dépositaire de l'autorité
publique prévue dans le texte proposé pour l'article 435-3,
le but de l'infraction serait "
d'obtenir ou conserver un marché
ou un autre avantage indu dans le commerce international
", expression
directement reprise de la convention signée dans le cadre de l'O.C.D.E.
Votre commission, par coordination avec les décisions prises aux
articles précédents vous propose, par un
amendement
, de
ramener les peines prévues à cinq ans d'emprisonnement et
à 1.000.000 F d'amende et de remanier la rédaction de cet
article, afin qu'il soit en harmonie avec celle proposée pour les
articles 435-2 et 435-3 nouveaux du code pénal.
Le deuxième alinéa du texte proposé pour
l'article 435-4 du code pénal prévoit que l'incrimination
prévue par cet article entrera en vigueur le jour de l'entrée en
vigueur de la convention à laquelle il fait référence. Par
coordination avec les décisions prises à propos des articles
précédents, votre commission vous propose de supprimer cet
alinéa qui sera repris à l'article 2.
Enfin, le dernier alinéa du texte proposé prévoit que la
poursuite des délits visés dans l'article ne peut être
exercée qu'à la requête du ministère public. Pour
les raisons exposées à propos du texte proposé pour
l'article 435-3 du code pénal, cette disposition mérite
d'être approuvée.
SECTION 3
Peines complémentaires et
responsabilité des personnes morales
Article 435-5 du code pénal
Peines complémentaires
encourues par les personnes physiques
Le texte
proposé pour l'article 435-5 énumère les peines
complémentaires encourues par les personnes coupables d'une des
infractions que tendent à créer les articles 435-1 à
435-4 nouveaux du code pénal.
Les peines prévues sont les suivantes :
- l'interdiction des droits civiques, civils et de famille ;
- l'interdiction pour une durée de cinq ans ou plus, d'exercer une
fonction publique ou d'exercer une activité professionnelle ou sociale
dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a
été commise ;
- l'affichage ou la diffusion de la décision prononcée ;
- la confiscation de la chose qui a servi ou était destinée
à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit, à
l'exception des objets susceptibles de restitution. Il convient de noter que
la confiscation du produit de l'infraction n'est actuellement pas
prévue pour l'application de l'article 433-1 du code pénal
relatif à la corruption active de fonctionnaire national
. Cependant,
la convention du 17 décembre 1997 signée dans le cadre
de l'O.C.D.E prévoit explicitement dans son article 3 que
"
chaque partie prend les mesures nécessaires pour assurer que
l'instrument et les produits de la corruption d'un agent public étranger
ou des avoirs d'une valeur équivalente à celle de ces produits
puissent faire l'objet d'une saisie et d'une confiscation ou que des sanctions
pécuniaires d'un effet comparable soient prévues
". Le
projet de loi prévoit donc la confiscation de la chose qui a servi
à commettre l'infraction comme peine complémentaire applicable
aux personnes physiques.
Enfin, le texte proposé par l'article 435-5 prévoit que
l'interdiction du territoire français peut être prononcée
dans les conditions prévues par l'article 131-30 du code
pénal, soit à titre définitif, soit pour une durée
de dix ans au plus à l'encontre de tout étranger coupable d'une
des infractions que tend à créer le projet de loi.
Article
435-6 du code pénal
Responsabilité pénale des
personnes morales
L'article 2 de la convention sur la lutte contre la
corruption
d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales
internationales prévoit que "
chaque partie prend les mesures
nécessaires, conformément à ses principes juridiques, pour
établir la responsabilité des personnes morales en cas de
corruption d'un agent public étranger
".
Dans la mesure où la législation française prévoit,
depuis l'entrée en vigueur du nouveau code pénal, la
responsabilité pénale des personnes morales, il est normal que
celle-ci soit prévue pour les nouvelles infractions que tend à
créer le projet de loi.
Le texte proposé pour l'article 435-6 du code pénal comporte
une
liste des peines applicables aux personnes morales exactement identique
à celle qui prévaut en matière de corruption d'un
fonctionnaire national
. Les personnes morales encourraient donc :
- l'amende (le montant maximal possible étant de 5 millions de
francs) ;
- la confiscation de la chose qui a servi ou était destinée
à commettre l'infraction ;
- l'affichage ou la diffusion de la décision prononcée.
Surtout, les personnes morales pourraient se voir infliger, pour une
durée de cinq ans ou plus ;
- l'interdiction d'exercer l'activité professionnelle dans laquelle
ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a
été commise ;
- le placement sous surveillance judiciaire ;
- la fermeture des établissements ou de l'un des
établissements ayant servi à commettre les faits
incriminés ;
- l'exclusion des marchés publics ;
- l'interdiction de faire appel public à l'épargne ;
- l'interdiction d'émettre des chèques.
L'énumération de ces dernières peines suscite quelques
interrogations. Il est possible de se demander si elles ne sont pas
disproportionnées par rapport à l'infraction commise et si elles
ne poseraient pas certaines difficultés juridiques. Des tribunaux
français pourraient-ils imposer la fermeture d'établissements
situés hors du territoire de la République ?
Par ailleurs, il est indispensable de rappeler que certains pays signataires de
la convention de l'O.C.D.E ne connaissent pas la responsabilité
pénale des personnes morales. A cet égard, la convention
prévoit que si dans le système juridique d'une partie, la
responsabilité pénale n'est pas applicable aux personnes morales,
cette Partie fait en sorte que les personnes morales soient passibles de
sanctions non pénales efficaces, proportionnées et dissuasives.
La convention a notamment pour objet d' "
assurer
l'équivalence entre les mesures que doivent prendre les
parties
". Afin de préserver cette équivalence
nécessaire, votre commission vous soumet un
amendement
tendant
à limiter les peines encourues par les personnes morales à
l'amende, la confiscation, l'affichage de la décision et au placement
sous surveillance judiciaire.
Votre commission vous propose d'adopter l'article premier
ainsi
modifié
.
Article 2
Non-rétroactivité de
la
loi pénale plus sévère
L'article 2 du projet de loi prévoit que les quatre
infractions nouvelles que tend à créer le projet de loi
ne
s'appliquent pas aux faits commis à l'occasion des contrats
signés antérieurement à l'entrée en vigueur de la
convention visée par ces articles.
Cet article a donc pour objet de permettre l'application aux nouvelles
infractions du principe de non rétroactivité de la loi
pénale plus sévère. Rappelons que l'article 8 de la
déclaration des droits de l'homme et du citoyen prévoit que
"
nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et
promulguée antérieurement au délit
".
De même, l'article 7§1 de la convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme dispose que "
nul ne peut être
condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a
été commise, ne constituait pas une infraction d'après le
droit national ou international. De même, il n'est infligé aucune
peine plus forte que celle qui était applicable au moment où
l'infraction a été commise
".
Le principe de non rétroactivité de la loi pénale plus
sévère est de valeur constitutionnelle, comme l'a affirmé
à plusieurs reprises le Conseil constitutionnel. Ainsi, dans sa
décision du 3 septembre 1986, il a censuré par une
réserve d'interprétation, certaines des dispositions de la loi du
9 septembre 1986 relative à la lutte contre la
criminalité, afin que la période de sûreté de trente
ans créée par cette loi ne puisse être appliquée
à des infractions commises avant son entrée en vigueur.
Il est possible de se demander si l'article 2 du projet de loi est
indispensable, dans la mesure où l'article 112-1 du code
pénal prévoit déjà de manière
générale que
" sont seuls punissables les faits
constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont
été commis. Peuvent seules être prononcées les
peines légalement applicables à la même date
".
Toutefois, il convient de noter que, naturellement, pour savoir si une
infraction tombe sous le corps de la nouvelle loi plus sévère, il
est nécessaire de déterminer le moment de sa réalisation.
Or, si cette détermination est aisée dans le cas d'infractions
"
instantanées "
, elle est beaucoup plus difficile pour
les infractions dont la réalisation s'étend sur une certaine
durée.
Dans ce cas, il convient de savoir si tout acte constitutif de l'infraction
commis après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi suffit
à écarter le principe de non rétroactivité de la
loi pénale plus sévère.
Dans le cas des contrats passés dans le cadre du commerce international,
certaines commissions peuvent être versées longtemps après
la signature du contrat tout en n'étant que la conséquence de
celui-ci. Il est donc justifié de prévoir que les nouvelles
incriminations ne s'appliquent pas aux actes accomplis pour l'exécution
de contrats signés antérieurement à l'entrée en
vigueur des conventions. Il résulterait de l'absence d'une telle clause
dans le projet de loi une grande insécurité juridique pour les
entreprises ayant souscrit des contrats avant l'entrée en vigueur des
nouvelles dispositions pénales.
Dans un souci de clarté, votre commission vous soumet un
amendement
tendant à préciser que la date d'entrée
en vigueur des conventions évoquée dans cet article est celle de
l'entrée en vigueur sur le territoire de la République. En effet,
la convention du 17 décembre 1997 signée dans le cadre
de l'O.C.D.E est entrée en vigueur pour un certain nombre de pays
l'ayant ratifiée le 15 février dernier. Il convient
donc d'éviter toute ambiguïté entre la date de
l'entrée en vigueur et celle de l'entrée en vigueur sur le
territoire de la République, qui ne pourra intervenir que lorsque la
France aura déposé ses instruments de ratification.
Par ailleurs, votre commission vous soumet un
amendement
complétant cet article pour prévoir que les nouvelles
incriminations ainsi que l'article du code de procédure pénale
établissent la compétence des juridictions françaises
entreront en vigueur le jour de l'entrée en vigueur des conventions
auxquelles ils font référence. Le projet de loi prévoit en
effet d'insérer une clause de ce type dans chacun des nouveaux articles
du code pénal et du code de procédure pénale. Votre
commission considère qu'il n'est pas de bonne technique
législative de codifier des dispositions par nature transitoires qu'elle
vous a proposé en conséquence de supprimer à l'article
premier et qu'elle vous propose de rétablir au présent article.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 2
ainsi
modifié
.
Article 3
(article 689-8 nouveau du code de
procédure pénale)
Compétence universelle des
juridictions françaises
L'article 113-2 du code pénal prévoit que
"
la loi pénale française est applicable à toutes
les infractions commises sur le territoire de la République "
.
En principe, les infractions commises hors du territoire de la
République échappent aux juridictions françaises.
Toutefois, l'article 113-6 du code pénal prévoit que la loi
française est applicable pour les crimes et les délits commis
à l'étranger par un Français. En ce qui concerne les
délits, la loi pénale française ne s'applique que
"
si les faits sont punis par la législation du pays où
ils ont été commis
". Par ailleurs, selon
l'article 113-7 du code pénal "
la loi pénale
française est applicable à tout crime, ainsi qu'à tout
délit puni d'emprisonnement, commis par un Français ou par un
étranger hors du territoire de la République lorsque la victime
est de nationalité française au moment de
l'infraction
".
En outre, certaines infractions portant atteinte à des
intérêts supérieurs sont également soumises à
la loi pénale française, même lorsqu'elles sont commises
à l'étranger (article 113-10 du code pénal).
Enfin, dans certains cas, les juridictions françaises
bénéficient d'une compétence universelle par l'effet de
conventions internationales. Le système de la compétence
universelle "
donne vocation à juger une infraction aux tribunaux de
l'Etat sur le territoire duquel le délinquant a été
arrêté ou se trouve même passagèrement, quel que soit
le lieu de commission de l'infraction et quelles que soient les
nationalités de l'auteur et de la victime "
10(
*
)
. Les articles 689-2 à
689-7 du code de procédure pénale prévoient
déjà des cas de compétence universelle des juridictions
françaises, par exemple pour l'application de la convention contre la
torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
L'article 3 du projet de loi tend à introduire un nouveau cas de
compétence universelle pour l'application du protocole du
27 septembre 1996 à la convention relative à la
protection des intérêts financiers des Communautés et de la
convention du 26 mai 1997 relative à la lutte contre la
corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés
européennes ou des fonctionnaires des Etats membres de l'Union
européenne.
Ces deux engagements internationaux imposent aux Etats parties
d'établir leur compétence dans certains cas où
l'application des principes généraux du droit pénal
français ne permet pas d'être sûr de la compétence
des juridictions françaises
.
Ainsi, l'article 6 du protocole du 27 septembre 1996 et
l'article 7 de la convention du 26 mai 1997 imposent aux Etats
d'établir leur compétence dans les cas où :
- l'auteur de l'infraction est un de leurs ressortissants ou un de leurs
fonctionnaires ;
- l'infraction est commise à l'encontre d'un de leurs
ressortissants, fonctionnaire européen ou national, ou membre d'une
institution ou organisation communautaire ;
- l'auteur de l'infraction est un fonctionnaire communautaire au service
d'une institution des Communautés européennes ou d'un organisme
créé conformément aux traités instituant les
Communautés européennes et ayant son siège dans l'Etat
membre concerné.
Pour permettre l'application de ces stipulations, l'article 3 du projet de
loi tend à insérer un article 689-8 dans le code de
procédure pénale afin de prévoir la compétence des
juridictions françaises à l'égard de :
- tout fonctionnaire communautaire au service d'une institution des
Communautés européennes ou d'un organisme créé
conformément aux traités instituant les Communautés
européennes et
ayant son siège en France
, coupable du
nouveau délit de corruption passive (article 435-1 du code
pénal) ou d'une infraction portant atteinte aux intérêts
financiers des Communautés européennes. L'hypothèse ici
visée selon l'exposé des motifs du projet de loi est celle d'une
infraction commise hors du territoire de l'Union par un fonctionnaire
européen ou ressortissant d'un Etat membre
;
- tout Français ou toute personne appartenant à la fonction
publique française coupable d'un des nouveaux délits de
corruption passive (article 435-1 du code pénal) ou active
(article 435-2 du code pénal) ou d'une infraction portant atteinte
aux intérêts financiers des Communautés
européennes ;
- enfin, toute personne coupable du nouveau délit de corruption
active (article 435-2 du code pénal) ou d'une infraction portant
atteinte aux intérêts financiers des Communautés
européennes lorsque ces infractions sont commises à l'encontre
d'un ressortissant français.
Cet article permet donc d'établir la compétence des juridictions
françaises en dehors de toute condition de réciprocité et
ne concernera donc que des
infractions commises entièrement hors du
territoire de l'Union
européenne
. En effet, le protocole et
la convention visés dans le texte proposé pour
l'article 689-8 du code de procédure pénale n'entreront en
vigueur que lorsque tous les Etats membres les auront ratifiés, de sorte
qu'à l'intérieur de l'Union, la condition de
réciprocité sera toujours satisfaite.
Conformément aux décisions prises à l'article premier
et à l'article 2, votre commission vous soumet un
amendement
supprimant le dernier alinéa de cet article qui tend à
prévoir son entrée en vigueur le jour de l'entrée en
vigueur des conventions auxquelles il fait référence.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 3
ainsi
modifié.
Article additionnel après
l'article 3
Compétence du procureur et des juridictions
de Paris
pour la corruption active d'agents publics étrangers
La
corruption dans le commerce international est souvent extrêmement
difficile à déceler, compte tenu des mécanismes de plus en
plus complexes qui sont utilisés. La création dans notre code
pénal d'une incrimination de ces comportements ne pourra être
réellement efficace que si des magistrats très
spécialisés en matière financière sont
chargés de ces dossiers.
Par ailleurs, dans une telle matière, il paraît souhaitable que
l'action publique soit exercée de manière cohérente sur
l'ensemble du territoire. Le projet de loi prévoit certes une
compétence concurrente entre les juridictions territorialement
compétentes et les juridictions spécialisées en
matière économique et financière dans le ressort de chaque
cour d'appel mais cette précaution est apparue insuffisante à
votre commission. En effet, malgré le développement récent
de quelques pôles économiques et financiers, peu de juridictions
paraissent aujourd'hui dotées des moyens nécessaires pour lutter
efficacement contre des infractions financières d'une grande
complexité.
Dans ces conditions, votre commission vous propose, par un article additionnel,
de prévoir une
compétence concurrente de la juridiction
parisienne et de la juridiction territorialement compétente
. Un tel
système, qui existe déjà dans notre procédure
pénale pour la poursuite, l'instruction et le jugement des affaires de
terrorisme, pourrait permettre que les affaires de corruption internationale
soient traitées par la juridiction qui dispose aujourd'hui des moyens
les plus importants pour faire face à ce type d'infractions. En outre,
la cohérence de l'action publique dans une matière très
sensible pourrait être plus sûrement assurée grâce
à cette compétence de la juridiction parisienne.
Naturellement, il sera possible de reconsidérer cette compétence
de la juridiction parisienne si les pôles économiques et
financiers promus par Mme le garde des sceaux se développaient de
manière telle qu'il existe une certitude que, sur tout le territoire de
la République, les infractions souvent complexes de corruption dans les
contrats internationaux soient confiées à des magistrats
disposant d'une formation adéquate.
Il convient enfin de rappeler que d'ores et déjà, pour l'ensemble
des infractions, l'article 693 du code de procédure pénale
prévoit un certain nombre de critères pour la
détermination de la juridiction compétente (le lieu de
résidence du prévenu, le lieu où il est trouvé, le
lieu de résidence de la victime...) et que lorsque ces critères
ne peuvent recevoir application,
la juridiction compétente est celle
de Paris sauf décision contraire de la Cour de cassation.
Article 4
Compétence des tribunaux
correctionnels
en matière économique et financière
L'article 704 du code de procédure pénale
prévoit qu'un certain nombre de délits, en particulier la
corruption et le trafic d'influence, qu'ils soient actifs ou passifs, ainsi que
les délits prévus par la loi de 1966 sur les
sociétés commerciales relèvent de la compétence des
tribunaux correctionnels spécialisés en matière
économique et financière.
La loi n° 94-89 du 1
er
février 1994,
qui a modifié le système antérieur établi par la
loi du 6 août 1975, a prévu, pour toutes les infractions
énumérées à l'article 704 du code de
procédure pénale, une compétence territoriale concurrente
entre la juridiction correctionnelle de droit commun et une juridiction
correctionnelle spécialisée en matière économique
et financière (dont l'existence est prévue par l'article 705
du code de procédure pénale). Ainsi, lorsque la complexité
d'une affaire paraît l'exiger, le procureur territorialement
compétent peut saisir la juridiction spécialisée
plutôt que la juridiction de son ressort.
L'article 4 du projet de loi tend à
inclure parmi les
délits relevant de la compétence des juridictions
correctionnelles spécialisées les nouvelles infractions
prévues par le projet de loi
, en particulier la corruption active
d'agent public étranger.
De fait, les contrats passés dans le cadre du commerce international
peuvent être d'une grande complexité et il paraît
nécessaire que les magistrats appelés à connaître de
plaintes sur ces dossiers aient une maîtrise réelle de ces
questions. Une entreprise peut être gravement déstabilisée
par une procédure lancée contre ses dirigeants et l'intervention
plusieurs années plus tard d'une relaxe ou d'un non-lieu ne peut
réparer les effets d'une mise en examen susceptible de ruiner la
crédibilité de l'entreprise.
La question qui se pose est celle de savoir si la précaution
prévue à cet article est suffisante pour que les affaires de
corruption dans le commerce international soient traitées par des
magistrats au fait de mécanismes financiers très complexes. En ce
qui concerne la corruption active d'agents publics étrangers, votre
commission a préféré prévoir la compétence
de la juridiction parisienne, de manière à faire en sorte que la
cohérence de l'action publique soit préservée et que cette
infraction soit poursuivie et jugée par la juridiction aujourd'hui la
mieux armée en matière économique et financière.
Votre commission vous soumet un
amendement
tendant à exclure du
champ d'application de cet article les articles 435-3 et 435-4 nouveaux du
code pénal, relatifs à la corruption d'agents publics
étrangers, conformément à sa proposition de soumettre ces
infractions à la juridiction parisienne. En revanche, elle accepte
naturellement que les infractions de corruption passive ou active de
fonctionnaire communautaire ou de fonctionnaire d'un Etat membre de l'Union
européenne relèvent de la compétence des juridictions
spécialisées en matière économique et
financière.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 4
ainsi
modifié.
Article 5
Applicabilité en
Nouvelle-Calédonie,
dans les territoires d'outre-mer et à
Mayotte
Cet
article prévoit l'applicabilité de la loi en
Nouvelle-Calédonie, dans les territoires d'outre-mer et dans la
collectivité territoriale de Mayotte. Pour tenir compte du fait que la
Polynésie française ne sera bientôt plus un territoire
d'outre-mer, votre commission vous soumet, comme elle l'a déjà
fait pour plusieurs autres projets de loi, un
amendement
tendant
à remplacer la référence aux territoires d'outre-mer par
une référence à la Polynésie française et
aux îles Wallis-et-Futuna.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 5
ainsi
modifié
.
*
Sous réserve de ces observations et des amendements qu'elle vous soumet, votre commission des Lois vous propose d'adopter le présent projet de loi.