III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES LOIS
Votre
commission des Lois constate, en premier lieu, que la deuxième lecture
du projet de loi par l'Assemblée nationale a permis, outre l'adoption
par celle-ci de certains articles dans la rédaction du Sénat, un
rapprochement des points de vue des deux assemblées sur un certain
nombre d'autres dispositions pour lesquelles les divergences sont d'ordre
purement formel ou rédactionnel.
Il paraît ainsi possible que le Sénat adopte sans modification les
articles premier
(compétences des agents de police municipale),
12
(compétences judiciaires des agents de police municipale)
et
14
(procédure de relevé d'identité par les
agents de police municipale).
De même, votre commission des Lois vous propose d'adopter dans la
rédaction de l'Assemblée nationale
l'
article 5 ter
qui précise les compétences des
personnels de la ville de Paris, l'
article
10
qui soumet au
droit commun les départements d'Alsace-Moselle et l'
article
14 bis
qui habilite les agents de l'exploitant d'un service de
transports publics de voyageurs à procéder, sous certaines
conditions, à des relevés d'identité.
Votre commission vous propose également d'accepter le principe de
" l'identification commune "
des équipements et tenues
énoncé à
l'article 8
,
tout en
souhaitant revenir à un décret en Conseil d'Etat pour la
détermination de leurs caractéristiques.
En revanche, les rédactions adoptées par l'Assemblée
nationale pour plusieurs dispositions du projet de loi ne paraissent pas de
nature à promouvoir
l'efficacité des services de police
dans le cadre d'un
partenariat équilibré
et
respectueux de la
libre administration des collectivités
locales
.
S'il faut se féliciter que l'Assemblée nationale ait reconnu
qu'un
dispositif conventionnel
était mieux adapté pour
assurer la coordination des services qu'un règlement, force est de
constater qu'elle a retenu une solution hybride et peu satisfaisante en
permettant au représentant de l'Etat, en cas de désaccord,
d'édicter seul un
règlement de coordination
. Cette formule
apparaît quelque peu vexatoire à l'égard des maires qui
engageront la discussion de la convention " sous la menace " d'un
règlement édicté par le seul préfet. Cet
épée de Damoclès est, en outre, inutile puisque l'absence
de convention a des effets directs sur les missions des polices municipales et
que la recherche d'un accord prévaudra nécessairement. C'est
pourquoi votre commission des Lois vous propose de supprimer cette
faculté reconnue au représentant de l'Etat
(
article 2
).
De même, le rétablissement par l'Assemblée nationale du
double
agrément
par le procureur de la République et par
le représentant de l'Etat n'apparaît pas satisfaisant. Il revient,
en effet, à modifier une procédure instituée en 1982 en
compensation de la suppression de la tutelle du préfet.
L'agrément par le représentant de l'Etat n'apporterait, en outre,
rien de plus pour garantir l'honorabilité des agents
(
article 6
).
En ce qui concerne
l'armement
, si les rédactions retenues par les
deux assemblées apparaissent désormais moins
éloignées, votre commission des Lois vous proposera
néanmoins de rétablir la rédaction adoptée par le
Sénat en première lecture qui, de manière pragmatique,
permet l'armement des policiers municipaux selon la nature des missions qui
leur sont confiées ou les circonstances. Elle tient, en outre, à
souligner de nouveau que la classification des armes devrait être
révisée par la voie réglementaire (
article 7
).
Votre commission des Lois vous suggère, par ailleurs, de rétablir
la faculté pour la commission consultative des polices municipales de
demander la vérification d'un service de police municipale. En outre, il
paraît logique que le maire -intéressé au premier chef par
cette vérification- soit directement destinataire des conclusions de
celle-ci (
article 4
). La composition de cette commission
consultative devrait assurer la représentation effective des agents de
police municipale (
article 3
).
Si la promotion d'une police municipale de qualité justifie le
développement de la formation des agents, le financement de celle-ci
doit logiquement être assuré par les communes concernées.
Il convient, en conséquence, de rétablir la redevance
versée par ces dernières au Centre national de la fonction
publique territoriale (
article 15
).
Le même objectif conduit votre commission des Lois à vous
suggérer de confirmer le principe d'une bonification d'ancienneté
versée aux agents (
article 16 bis
).
Il convient d'affirmer clairement que pendant la période transitoire
prévue à l'
article 18
la situation actuelle ne sera
pas modifiée concernant tant le travail de nuit que l'armement des
agents.
Il paraît, par ailleurs, raisonnable de prévoir un délai de
dix-huit
mois pour la mise en conformité des
équipements (
article 19
).
Enfin, votre commission des Lois vous propose de rétablir
l'
article 5 bis
relatif aux modalités de suspension et
de révocation des gardes champêtres employés par plusieurs
communes, les motifs ayant fondé sa suppression n'apparaissant pas
convaincants et, à l'
article 10
, de refuser d'abroger
à nouveau les dispositions de l'article L. 412-49-1 du code
des communes autorisant l'agrément temporaire d'agents non armés
dans les communes touristiques.
*
* *
Le
Sénat est, par ailleurs, saisi de la proposition de loi
(n° 131 1998-1999) de notre collègue
Philippe François, relative à l'organisation d'une police
intercommunale.
Reprenant les termes d'une proposition de loi déposée à
l'Assemblée nationale par M. Guy Drut, cette proposition de
loi est fondée sur le constat des limites auxquelles se heurtent les
efforts de certaines communes en matière de sécurité,
lorsqu'elles se trouvent prises dans une vaste agglomération ou lorsque
leur taille ne leur permet pas de consacrer à la sécurité
tous les moyens financiers nécessaires.
Dans de telles circonstances, seul le regroupement des polices municipales de
plusieurs communes voisines permettrait de coordonner les actions, d'affecter
les moyens aux besoins prioritaires et de réaliser une compensation au
bénéfice des communes les moins favorisées.
Or, la création de polices intercommunales se heurte à des
obstacles qui sont clairement identifiables. Le pouvoir de police appartient au
maire seul, qui est officier de police judiciaire. En conséquence, les
agents de police municipale ne peuvent dépendre que du maire et non pas
du président d'un établissement public de coopération
intercommunale.
Afin de lever ces obstacles, la proposition de loi suggère
d'élargir la définition des officiers de police judiciaire qui
résulte du code de procédure pénale. Auraient
désormais la qualité d'officier de police l'adjoint
désigné dans le cadre d'une convention entre communes ou d'un
établissement public de coopération intercommunale, ainsi que le
chef de police municipale nominativement désigné par
arrêté interministériel.
Par cohérence, la proposition de loi prévoit, dans le code
général des collectivités territoriales le rattachement
des agents de police municipale à l'une ou l'autre de ces
autorités.
Votre commission des Lois partage le souci exprimé par l'auteur de la
proposition de loi. Les mêmes motifs l'ont conduit, en première
lecture, à proposer au Sénat d'élargir les
possibilités de mise en commun des moyens de police de plusieurs
communes. Elle souhaite, en conséquence, que la réflexion soit
approfondie pour que puisse être envisagé le développement
de formules intercommunales en matière de police. Force est, en effet,
de constater que les problèmes posés aux maires par les
manquements à l'ordre public dépassent les limites communales.
Tel est notamment le cas dans les transports publics.
Pour autant, l'institution d'une police intercommunale soulève de
réelles difficultés que la proposition de loi ne permet pas de
lever. Le pouvoir de police appartient au seul maire qui l'exerce au nom de la
commune ou au nom de l'Etat. Cette attribution propre au maire ne peut donc
être transférée par une commune à une structure
intercommunale. En outre, le nouveau statut qui serait reconnu au chef de la
police municipale ne serait pas sans poser de problème au regard des
conditions d'exercice des compétences locales.
Il apparaît donc que cette question tout à fait essentielle pour
nos collectivités mériterait un examen complémentaire afin
de dégager des solutions adaptées.