C. EXAMEN THÉMATIQUE DES CRÉDITS SPÉCIFIQUES VILLE
Les crédits spécifiques Ville peuvent être regroupés sous trois grands thèmes.
1. Animation de la politique de la ville
a) Les crédits de la délégation interministérielle à la ville
Créée par décret du 28 octobre 1988,
la
délégation interministérielle à la ville (DIV) est
une structure administrative légère dotée de
85 fonctionnaires
mis à disposition par différents
ministères. Sa mission est à la fois de coordonner les
interventions, d'animer les équipes, d'évaluer les
opérations, et de préparer les travaux des instances de
décision (Conseil national des villes ; Comités
interministériels des villes).
Inscrits au chapitre 37-60 article 10, ses
crédits de
fonctionnement
proprement dits passent en 1999
de 13 à
près de 20 millions de francs, en hausse de 54 %.
Votre rapporteur s'interroge sur le bien fondé de cette forte
progression des crédits de la DIV. Il est vrai que la DIV devrait se
voir confier de nouvelles responsabilités, encore un peu vagues, et que
le Conseil national des villes a été renouvelé en juillet
1998 dans sa composition "
pour devenir l'outil d'un débat politique
ouvert, critique et prospectif
."
Votre rapporteur ne dispose malheureusement pas d'indications plus
précises : ainsi, aucune précision chiffrée ne lui a
été fournie sur l'évolution des effectifs dont on lui a
simplement indiqué qu'ils seraient "
réajustés en
fonction des nouvelles missions attribuées à la DIV et de
l'organisation qui en résultera
".
Le budget de communication
de la DIV (chapitre 37-30,
article 50) passe de 3,4 à 5 millions de francs, en
hausse
de 47 %
, pour permettre le lancement d'une nouvelle lettre de la DIV,
et l'organisation de colloques sur les thèmes généraux de
"l'école et la ville", ou "la prévention de la
délinquance".
Enfin, les dotations consacrées aux
études et à
l'assistance technique
, inscrits au titre V, chapitre 57-71, passent
de
4 à 16 millions de francs en crédits de paiement
,
et de 2 à 18 millions de francs en autorisations de programme,
progression qui paraît bien forte même au regard des exigences de
la préparation de la nouvelle génération des contrats de
ville.
Dans l'ensemble, les
dotations affectées à la
Délégation interministérielle à la ville font plus
que doubler
, et cette forte progression contraste avec l'effort de rigueur
entrepris en 1998 et qui s'était traduit par une diminution de 20 %
des crédits qui lui étaient affectés. Ces brusques
à coups dans la gestion de la DIV d'une année sur l'autre ne
traduisent-ils pas d'ailleurs une certaine hésitation du gouvernement
quant au rôle qu'il envisage de lui attribuer ?
Fonctionnement |
LFI 1997 |
LFI 1998 |
PLF 1999 |
de la DIV |
AP ou DO |
AP ou DO |
AP ou DO |
Chapitre 37-60 art. 10 |
13,00 |
13,00 |
19,87 |
34-60 art. 10 |
4,00 |
- |
- |
37-60 art. 50 |
- |
3,40 |
5,00 |
37-60 art. 20 |
2,00 |
- |
- |
57-71 art. 10 |
4,17 |
2,00 |
18,00 |
TOTAL |
23,17 |
18,40 |
42,87 |
b) Les dépenses déconcentrées d'animation
Les
dépenses déconcentrées d'animation, inscrites au chapitre
37-82 article 20, sont
multipliées par trois et demi
, et
s'établissent à 14 millions de francs.
Au cours de son audition, la nouvelle déléguée
interministérielle à la ville, Mme Claude Brévan, a
précisé à votre rapporteur que ces crédits sont
destinés à la formation des acteurs de la politique de la ville,
de façon à leur permettre d'avoir une vision d'ensemble de leur
façon de travailler.
c) Le partenariat national
Les
crédits consacrés aux initiatives locales dans le cadre du
partenariat national (chapitre 46-60 article 30), restent stables, à
8,3 millions de francs, dans le projet de loi de finances pour 1999. Ces
crédits servent à passer avec les grandes structures associatives
des conventions de partenariat permettant de les faire participer à la
réalisation des objectifs de la politique de la ville.
A cet égard, il est bien difficile de savoir dans quelle proportion ces
crédits abondent simplement les moyens généraux de
fonctionnement de ces associations.
2. Actions de la politique de la ville
a) Le Fonds Interministériel d'Intervention pour la Ville (FIV)
Le fonds
interministériel d'intervention pour la politique de la ville a
été mis en place en 1995 pour donner plus de souplesse à
la gestion des instruments contractuels de la politique de la ville en
améliorant la fongibilité des crédits
déconcentrés.
Il a pour fonction de mettre à la disposition des préfets une
enveloppe fongible, selon un calendrier et une circulaire d'utilisation
uniques, sans autre spécialisation que celle de financer l'ensemble des
actions du développement social urbain.
Les instruments traditionnels de la politique contractuelle que permet de
financer le FIV sont à présent familiers. Il s'agit :
-
des contrats de ville
, qui sont le principal instrument de la
politique de la ville. Très brièvement, un contrat de ville est
un programme élaboré conjointement par une ou plusieurs
collectivités locales et l'Etat. Il a pour objet la lutte contre les
processus d'exclusion, et la réinsertion dans la ville des quartiers en
voie de marginalisation. 214 contrats de ville sont actuellement en
vigueur et concernent 767 communes ;
-
des Programmes d'Aménagement Concerté du Territoire
(PACT) urbain.
Ce sont des conventions élaborées pour une
période de 5 ans qui visent à accompagner le processus de
conversion d'activité par des actions de restructuration urbaine. Ils
s'appliquent à des bassins d'emploi gravement marqués par des
activités industrielles en déclin, et de lourds handicaps
sociaux. Ils sont placés sous l'autorité conjointe de la DIV et
de la DATAR. On en compte aujourd'hui 26 ;
- des "
conventions de sortie"
d'une durée limitée
à deux ou trois ans, destinées à ne pas priver brutalement
d'aide les sites qui ont relevé de la géographie prioritaire du
Xe plan, mais n'ont pu être éligibles ni aux contrats de ville ni
aux PACT-urbains du XIe plan ;
- des
Contrats d'Action pour la Prévention
(CAPS)
au
nombre
de 312, spécialisés dans la prévention de la
délinquance.
Le FIV est alimenté :
- par
deux lignes budgétaires
inscrites au
bleu
"Ville",
et intitulées "Contrats de ville, PACT urbains et autres
actions déconcentrées", qui regroupent deux types de financement
de nature différente : des crédits d'intervention (chapitre 46-60
article 10) et des subventions d'investissement (chapitre 67-10 ligne 20).
- par des
transferts en gestion d'autres ministères
.
(en millions de francs)
Ressources |
1998 |
1999 |
1 - Transferts en gestion |
|
|
Ministère de la Culture |
60,00 |
60,00 |
Ministère de l'Environnement |
2,00 |
2,00 |
Ministère de la Jeunesse et des Sports |
33,00 |
33,00 |
Ministère de l'Aménagement du territoire et de l'environnement (DATAR) |
14,00 |
14,00 |
Ministère de la Justice |
2,00 |
2,00 |
Ministère de l'Emploi et de la Solidarité |
115,00 |
115,00 |
Sous-total transferts en gestion |
226,00 |
226,00 |
2 - Budget Ville |
|
|
Chapitre 46-60.10 |
373,52 |
530,00 |
Chapitre 67-10.20 |
63,00 |
63,30 |
Sous-total budget ville |
436,52 |
539,30 |
TOTAL |
662,52 |
819,3 |
Très clairement, la progression des ressources du FIV en 1999 (+ 23,6 %) s'explique exclusivement par l'accroissement des crédits d'intervention du chapitre 46-60, les transferts provenant des autres ministères restant stables en ce domaine comme dans d'autres.
b) Le Fonds Social Urbain (FSU)
Le Fonds
Social Urbain a été créé en 1984 afin de permettre
à l'Etat, après la décentralisation, de conserver les
moyens d'intervenir de façon sélective lorsque sa
responsabilité est engagée en matière de
développement social des villes et plus particulièrement des
banlieues.
Il permet aujourd'hui d'engager des opérations d'investissement en
complément de celles inscrites au titre des procédures
contractuelles.
Les crédits du FSU inscrits au chapitre 67-10 article 10 sont
entièrement déconcentrés, et représentent
près de 90 % de l'ensemble des crédits du FSU. Toutefois,
pour répondre aux spécificités du financement de l'appel
à projets de transports (qui croise des crédits FSU et des
crédits provenant de la Direction des Transports Terrestres), un nouveau
chapitre 67-10 article 40 a été créé.
L'évolution des crédits du FSU est la suivante :
(en millions de francs)
|
1998 |
1999 |
||
|
CP |
AP |
CP |
AP |
- FSU opérations déconcentrées art. 67-10.10 |
110 |
170 |
97 |
150 |
- FSU : opérations non déconcentrées art. 67-10.40 |
10 |
30 |
12,93 |
30 |
Total |
120 |
200 |
109,93 |
180 |
Elle traduit une baisse globale de 8,4 % des moyens du FSU en crédits de paiements, et de 10 % en autorisations de programme.
c) Le fonds d'aménagement de la région Ile-de-France
Les
transferts en cours d'année en provenance du Fonds d'Aménagement
de la Région Ile-de-France, le FARIF, évalués pour 1999
à 215 millions de francs, sont en revanche
en hausse de
12 %.
Ce compte spécial, alimenté par le produit de la taxe sur les
bureaux, contribue, à côté de ses interventions en faveur
du logement social ou des transports, aux opérations de
développement social urbain.
Le projet de loi de finances pour 1999 prévoit, dans son
article 26, un
réajustement du dispositif du FARIF que le
Sénat, suivant sa commission des finances, a rejeté en
première lecture.
L'objectif de l'article 26 est d'accroître les recettes du FARIF en
élargissant l'assiette de la taxe qui l'alimente, de façon
à compenser la perte de ressources pour l'Etat des transferts croissants
du FARIF au profit de la région Ile-de-France.
Ces transferts du FARIF ont été institués par la loi
d'orientation de 1995. Ils doivent compenser à due concurrence la
suppression progressive de la dotation globale de fonctionnement de la
région Ile-de-France.
Ils représentent une
part croissante des crédits du
FARIF
: de 8,2 % en 1995, ils sont passés à
29,2 % en 1998, et cette progression devrait se poursuivre à
l'avenir. En outre, à partir de 1999, la région recouvrera une
entière liberté dans l'utilisation de ces crédits.
Pour
tenter de préserver les ressources que l'Etat tire du FARIF
et utilise au financement de ses projets d'infrastructures en Ile-de-France, le
gouvernement envisage, dans le projet de loi de finances, d'accroître les
recettes du FARIF en
élargissant l'assiette de la taxe qui
l'alimente
: naguère assise sur les "bureaux", elle serait
étendue aux
locaux commerciaux et aux locaux de stockage.
La commission des finances du Sénat a refusé
l'élargissement de l'assiette de la taxe, qui constituerait une
erreur économique
, et serait en
contradiction avec les
objectifs de la politique de la ville
, qui ne doit pas chercher à
décourager l'implantation des commerces en Ile-de-France par
l'imposition de charges nouvelles. En outre, au vu des estimations pourtant
optimistes du gouvernement, cette révision ne suffirait pas à
compenser intégralement les pertes de recettes de l'Etat. Aussi, la
commission préconise-t-elle plutôt de rechercher une solution dans
un rééquilibrage entre l'Etat et la région du financement
des infrastructures de transport
1(
*
)
.
d) Les grands projets urbains
Les
grands projets urbains (GPU) constituent une démarche et un programme
spécifiques au sein de la politique de la ville, et
bénéficient d'un niveau important de subventions de l'Etat.
L'ensemble des
13 sites Grands projets urbains
concerne des
territoires plus ou moins vastes comprenant des quartiers à forte
proportion de logements sociaux ou de copropriétés
dégradées.
La détermination des périmètres des GPU a le plus souvent
dépassé les strictes limites des quartiers pour retenir des
entités urbaines, sociales, économiques pertinentes au regard
d'une logique territoriale de développement.
Ces territoires sont inclus dans des contrats de ville, et, dans la plupart
d'entre eux, ont également été instaurées des zones
franches urbaines ou des zones de redynamisation urbaine.
Les subventions consacrées aux GPU figurent, depuis 1997, au chapitre
67-10, article 30.
En 1999, une partie des crédits se trouve répartie sur un
chapitre nouveau du titre IV (le chapitre 46-60, article 70),
doté de 45 millions de francs. L'expérience a en effet
montré que certaines collectivités territoriales
particulièrement démunies éprouvent des difficultés
à faire face aux dépenses de fonctionnement induites par les
nouveaux équipements urbains. La nouvelle ligne de crédits a
précisément pour objet d'aider ces communes à subvenir aux
charges de cette nature.
Votre rapporteur ne conteste pas l'utilité d'une aide ponctuelle de
fonctionnement
aux collectivités qui ont
bénéficié d'un grand projet urbain. Il s'
interroge
toutefois sur l'ampleur de cette aide
(qui représente dans le projet
pour 1999 plus de la moitié des crédits des GPU),
et sur la
durée de cette prise en charge
qui n'a sans doute pas, du moins
peut-on le souhaiter, vocation à une pérennisation.
(En millions de francs)
|
1998 |
1999 |
||
|
DO + CP |
AP |
DO + CP |
AP |
Chapitre 46-60, article 70 |
- |
- |
45 |
- |
Chapitre 67-10, article 30 |
44 |
90 |
40 |
95,230 |
Total DO + CP |
44 |
- |
85 |
- |
e) Les opérations "ville, vie, vacances"
Les
opérations "ville, vie, vacances" ont pour finalité de
prévenir la délinquance et les comportements inciviques pendant
les congés scolaires, et de revitaliser les quartiers en crise. Ce
dispositif couvre aujourd'hui la presque totalité du territoire et a
fait l'objet d'un élargissement à l'ensemble des périodes
de vacances, même s'il continue de privilégier la période
estivale.
Les opérations sont financées à hauteur de
50 millions de francs (en hausse de 11 %) par les crédits
inscrits au bleu "ville", auxquels s'ajoutent des transferts en gestion
provenant des ministères des affaires étrangères, de
l'équipement et du logement, de la culture, de la justice, et de la
coopération, pour un montant de 20,10 millions de francs.
3. Egalité devant le Service public
L'aide
aux services publics de quartier est éclatée depuis
l'année dernière entre deux chapitres :
- le traditionnel chapitre 37-82, article 10 "projets de services
publics de quartier", qui s'établit à 73,5 millions de
francs, en hausse de 15,7 % ;
- un nouveau chapitre, 46-60, article 60 "subventions aux services
publics de quartier", pour un montant de 23,5 millions de francs, en
hausse de 135 %.
Cette scission a été opérée pour remédier
à l'impossibilité de financer, avec des crédits du
titre III, des opérations en faveur de services publics relevant
d'entités autres que l'Etat. La possibilité de recourir
dorénavant aussi à des subventions du titre IV permettra
d'assouplir les interventions financières et d'en faire également
bénéficier d'autres gestionnaires de services publics :
collectivités territoriales ou établissements publics.
La forte progression des crédits d'aide aux services publics inscrits au
titre IV montre
le succès d'une formule qui avait
été recommandée, dès 1995, par la commission des
finances du Sénat
.