INTRODUCTION
Pour sa
première présentation des crédits de la communication
audiovisuelle, votre rapporteur a tenu à rester dans la ligne
tracée par son prédécesseur, M. Jean Cluzel, en
s'efforçant d'offrir un panorama aussi vaste et complet que possible, de
l'activité des organismes qui constituent le secteur public audiovisuel.
Sur le fond, votre rapporteur arrive vers cet audiovisuel compliqué avec
une idée simple. La révolution résultant de
l'arrivée des technologies numériques nous oblige à
considérer que le paysage audiovisuel est désormais sans
frontière, et que les opérateurs sont dans une situation de
concurrence généralisée, toujours plus vive.
Sa conviction profonde est que l'audiovisuel est désormais un
marché hyper-concurrentiel sur lequel le consommateur choisit avec sa
télécommande, sans se soucier du statut de l'opérateur
dont il regarde les programmes.
Le secteur public est donc en compétition avec le secteur privé,
même s'il bénéficie - mais pour combien de temps encore -
de ressources publiques abondantes.
A cet égard, il n'est pas possible de traiter du secteur public de
l'audiovisuel, de la santé financière et du dynamisme des
sociétés qui le composent sans considérer qu'il
s'insère dans un espace structuré par les initiatives du secteur
privé.
La France connaît aujourd'hui une véritable explosion de la
télévision numérique : Canal Satellite affiche maintenant
près d'un million d'abonnés, tandis que TPS en revendique plus de
500.000. De surcroît, les frontières réglementaires sont
entrain de tomber comme une espèce de mur de Berlin, condamné par
l'histoire. Ne voit-on pas RTL 9, cette chaîne désormais
contrôlée par le groupe français AB Productions, faire
reconnaître par le Conseil supérieur de l'audiovisuel, sa
nationalité luxembourgeoise et, par là même, s'affranchir
des contraintes réglementaires multiples pesant sur les chaînes
françaises.
Des alliances se nouent et se dénouent. Des conflits se font jour, des
groupes, enfin, se constituent, associant des sociétés
opérant sur les marchés connexes de l'industrie et de la
communication.
Votre rapporteur est conscient de l'importance des enjeux de cette guerre de
mouvement à laquelle on assiste dans le domaine audiovisuel, et pour ce
premier rapport, il a souhaité prendre un peu de recul avant de
présenter, comme le faisait son prédécesseur, une sorte
d'état des lieux des groupes de communication audiovisuels
6(
*
)
.
La démarche qu'il a entreprise dans le présent rapport en
complément des observations qu'il a présentées et fait
adopter par la commission des finances, consiste à procéder en
trois étapes décrivant :
• l'état des ressources du secteur audiovisuel public car
l'argent est le nerf de la communication audiovisuelle ;
• la situation des organismes composant le secteur audiovisuel public en
s'efforçant, pour chacun des organismes considérés,
d'insister sur les problèmes d'exécution de leur budget ;
• les problèmes liés au renforcement de notre
présence audiovisuelle extérieure en en soulignant l'enjeu
culturel et linguistique.
Il n'est pas possible de faire abstraction dans cette présentation de la
situation d'attente créée par la perspective de la discussion
prochaine du projet de loi sur la communication audiovisuelle
déposé par le gouvernement sur le Bureau de l'Assemblée
nationale.
Dans la perspective ainsi créée, le budget que votre rapporteur
s'est efforcé d'analyser apparaît comme un
budget paradoxal
à plus d'un titre
:
•
Premier paradoxe
, c'est au moment où le Gouvernement
affiche sa volonté de diminuer les
recettes publicitaires des
chaînes
, que celles-ci
marquent spontanément un certain
fléchissement
, qui fait contraste avec la vitalité de celles
de ses concurrents privés et notamment de TF1. Cette chaîne
annonce pour 4,2 milliards de francs de chiffres publicitaires pour les six
premiers mois de l'année, soit autant que France 2 et France 3
réunis sur l'ensemble de l'année ;
•
Deuxième paradoxe
, c'est au moment où le
Gouvernement annonce qu'il entend diminuer de façon volontariste les
recettes de publicité de France2 et France 3 et de compenser ce manque
à gagner par des crédits publics, que
les crédits
budgétaires affectés à l'audiovisuel publics atteignent
leur plus bas niveau historique
.
•
Troisième paradoxe
, c'est un Gouvernement enclin
à stigmatiser les positions dominantes des grands groupes sur
l'audiovisuel, qui veut mettre en place un système aboutissant, par un
effet d'aubaine
, à renforcer les bénéfices desdits
groupes.
Enfin, et il s'agit également d'un paradoxe, c'est au moment où
l'on s'apprête à restreindre la place de la publicité sur
les écrans de télévision, que de nombreuses personnes
redécouvrent les
vertus de la publicité
.
La publicité fait désormais partie du paysage audiovisuel
.
La conviction de votre rapporteur est que les chaînes qui en sont
dépourvues affichent de façon emblématique une
différence qui, à la limite, les font passer pour
élitistes sinon "ringardes", auprès d'une grande partie de la
population et en particulier des jeunes.