SECTION 4
Dispositions relatives à la création d'un
délit en cas de récidive de dépassement de la vitesse
maximale autorisée,
égal ou supérieur à 50
km/h
Article 5
Création d'un délit en cas de
récidive de dépassement
de la vitesse maximale
autorisée, égal ou supérieur à 50 km/h
L'article 5 du projet de loi tend à insérer
un article L.4-1 au code de la route. Le texte proposé pour cet
article L.4-1 punit de six mois d'emprisonnement et de
50.000 francs d'amende tout conducteur dépassant la vitesse
maximale autorisée de 50 km/h ou plus, alors qu'il a
été condamné définitivement pour les mêmes
faits dans l'année précédant cette infraction.
L'infraction elle-même constituerait une contravention de la
cinquième classe, passible d'une amende de 10.000 F. Cette disposition a
fait l'objet d'un décret (n° 98-214) publié au
Journal officiel du 26 mars 1998.
Actuellement, les excès de vitesse constituent des contraventions de la
quatrième classe et sont sanctionnés à ce titre d'une
peine d'amende pouvant aller jusqu'à 5.000 F (articles R232 et R232-1 du
code de la route). Cette peine s'applique uniformément, quelle que soit
la gravité de l'excès de vitesse. Aucune disposition
particulière n'est prévue en ce qui concerne la récidive.
Le code pénal ne contient aucune disposition punissant de manière
particulière la récidive des contraventions des quatre
premières classes.
En 1994, le Gouvernement a présenté un projet de loi tendant
à créer un délit puni d'une amende de 15.000 F en cas de
dépassement de la vitesse maximale autorisée supérieur
à 50 km/h. Ce projet a suscité un vif débat à
l'Assemblée nationale, dont les membres ont notamment fait observer que
la peine d'amende la plus faible prévue en cas de délit par le
nouveau code pénal était de 25.000 F et que le projet de loi
créerait une dérogation peu opportune à ce principe. En
séance publique, l'Assemblée a finalement décidé de
punir d'une amende de 7.500 F le dépassement de la vitesse maximale
autorisée de plus de 50 km/h. Ce projet de loi n'a jamais
été inscrit à l'ordre du jour du Sénat.
Le projet de loi soumis aujourd'hui au Sénat tend à ne
créer un délit puni de six mois d'emprisonnement et de 50.000
francs d'amende qu'en cas de
récidive
dans le délai
d'un an
de l'infraction de dépassement de la vitesse maximale
autorisée de plus de 50 km/h. Le texte proposé appelle plusieurs
réflexions.
· En premier lieu, il convient de s'interroger sur l'opportunité
de la création de ce nouveau délit. Les excès de vitesse
sont actuellement punis de l'amende prévue pour les contraventions de la
quatrième classe (5.000 francs au maximum) et d'un retrait de points du
permis de conduire (un point pour un dépassement de la vitesse maximale
inférieur à 20 km/h, deux points pour un dépassement
compris entre 20 et 30 km/h, 3 points pour un dépassement compris entre
30 et 40 km/h, quatre points pour un dépassement de plus de
40 km/h). Ce dispositif spécifique n'exclut cependant pas la
poursuite d'un automobiliste ayant commis un excès de vitesse sur le
fondement de la mise en danger d'autrui, conformément à l'article
223-1 du code pénal.
L'article 223-1 du code pénal dispose que "
le fait d'exposer
directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures
de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité
permanente par la violation manifestement délibérée d'une
obligation particulière de sécurité ou de prudence
imposée par la loi ou le règlement est puni d'un an
d'emprisonnement et de 100.000 F d'amende ".
Les travaux préparatoires du nouveau code pénal montrent que le
législateur, en instituant ce nouveau délit, avait en particulier
à l'esprit le domaine de la sécurité routière. Dans
ces conditions, on pourrait considérer que le dispositif actuel est
suffisant pour réprimer les grands excès de vitesse.
Toutefois, dans certaines affaires intervenues ces dernières
années, le juge a estimé que la mise en danger d'autrui
n'était pas constituée, de sorte que des automobilistes auteurs
de très grands excès de vitesse se sont vus condamnés
à de simples peines d'amende. Le projet de loi tend à combler
cette carence en prévoyant que le grand excès de vitesse
constitue en tant que tel un délit, dès lors qu'il est commis
moins d'un an après une condamnation définitive pour la
même infraction.
· On peut, en second lieu se demander s'il ne serait pas opportun de
prévoir une gradation des sanctions prévues, dans la mesure
où le dépassement de la vitesse maximale autorisée de plus
de 50 km/h peut avoir des conséquences plus graves dans une
agglomération que sur autoroute.
Toutefois, la mise en place de seuils différents pour la constitution du
délit, en fonction du lieu où l'infraction est commise, rendrait
cette mesure peu lisible, alors même que la réglementation en
matière de circulation routière est déjà d'une
grande complexité. Il paraît préférable de conserver
la référence à un seuil unique de 50 km/h de
dépassement de la vitesse autorisée pour la constitution du
délit.
En troisième lieu, il convient de souligner que les cas dans lesquels
une contravention se transforme en délit en cas de récidive sont
fort rares, même s'il est possible d'en trouver quelques exemples, l'un
d'entre eux figurant dans le code de la route. L'article L. 12 de ce code
prévoit ainsi que toute personne qui, en récidive, aura conduit
un véhicule sans être titulaire du permis de conduire
correspondant à la catégorie du véhicule concernée
sera punie d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 30.000 F.
L'infraction elle-même est punie, en vertu de l'article R. 241-2 du code
de la route, de l'amende prévue pour les contraventions de la
cinquième classe.
De même, l'article L.65 du code des débits de boissons punit
de six mois d'emprisonnement et de 25.000 F d'amende la personne
trouvée en état d'ivresse manifeste dans un lieu public dans les
douze mois suivant une deuxième condamnation pour contravention
d'ivresse.
· Enfin, certaines difficultés se présenteront
vraisemblablement dans la mise en oeuvre de cette disposition, qui devront
faire l'objet d'un examen attentif. En particulier, la première
condamnation pour grand excès de vitesse risque de n'être inscrite
au casier judiciaire, compte tenu des procédures applicables, que
plusieurs mois après qu'elle sera devenue définitive. Dans ces
conditions, il sera parfois difficile de déterminer si le délit
de récidive est constitué. Des mesures administratives devront
probablement être prises afin d'éviter que cette disposition ne
reste lettre morte.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 5
sans modification.
Article 6
Extension de la liste des infractions
donnant lieu
à réduction du nombre de points affecté au
permis de conduire
L'article 6 tend à modifier l'article L.11-1
du code de la route qui énumère les infractions donnant lieu
à réduction du nombre de points affecté au permis de
conduire.
L'article L.11-1 serait modifié afin d'inclure parmi les
infractions donnant lieu à réduction de la moitié du
nombre de points affecté au permis de conduire le délit de
récidive de dépassement de la vitesse maximale autorisée,
égal ou supérieur à 50 km/h, que tend à
créer l'article 5 du projet de loi.
Votre commission vous soumet un
amendement
tendant à corriger une
erreur de décompte des alinéas et vous propose d'adopter
l'article 6
ainsi modifié.