II. L'OBJECTIF DU PROJET DE LOI DÉPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT: RÉDUIRE DE MOITIÉ EN CINQ ANS LE NOMBRE DE MORTS SUR LA ROUTE
A. UN ÉLÉMENT D'UNE STRATÉGIE GLOBALE
Le projet de loi soumis au Sénat n'est qu'un
élément de la stratégie que souhaite mettre en oeuvre le
Gouvernement, afin de
diviser par deux en cinq ans
le nombre de
personnes tuées sur la route.
Dans l'exposé des motifs du projet de loi, le Gouvernement fait valoir
que
" pour atteindre cet objectif, il a défini une politique
fondée sur trois lignes d'action :
- faire confiance aux jeunes et à leur capacité à
promouvoir de nouveaux comportements ;
- envisager une mobilisation active de tous les partenaires concernés;
- garantir à tous la liberté de circuler dans les meilleures
conditions de sécurité ".
Certaines mesures ont d'ores et déjà été prises
comme l'adoption de la loi sur les conditions d'exercice de la profession de
transporteur routier, qui rend notamment obligatoire une formation pour tous
les conducteurs, salariés et artisans.
Au cours d'une réunion du Comité interministériel de
sécurité routière, le 26 novembre 1997, le
Gouvernement a décidé de proposer sept mesures
législatives qui font l'objet du projet de loi soumis au Sénat et
de mettre en oeuvre dix-huit autres mesures qui méritent d'être
brièvement présentées.
Il s'agit en particulier de renforcer les
activités de formation
.
Le Gouvernement souhaite améliorer la formation des enseignants des
écoles et collèges en matière de sécurité
routière et envisage la mise en place d'un module d'enseignement
à distance comprenant en particulier un site Internet. Il prévoit
en outre de proposer aux jeunes conducteurs un rendez-vous d'évaluation
à la fin de l'année suivant l'obtention du permis de conduire. De
même, un rendez-vous de perfectionnement proposé aux conducteurs
expérimentés sur la base du volontariat, fera l'objet de tests
dans plusieurs départements.
Le Gouvernement souhaite par ailleurs améliorer la
sécurité des cyclomoteurs
. Il envisage de rendre
obligatoire l'immatriculation de ces véhicules, afin de lutter plus
efficacement contre le vol et le " débridage " des
cyclomoteurs.
En ce qui concerne les
infrastructures
, le comité
interministériel a décidé d'engager des actions de
modernisation en prenant en considération trois objectifs : la
promotion de l'usage de la bicyclette et l'amélioration de la
sécurité des cyclistes, l'adaptation des équipements
existants pour une meilleure protection des motocyclistes, enfin l'instauration
d'un audit de sécurité pour tous les projets routiers.
Enfin, le Gouvernement souhaite encourager les
initiatives locales
, en
particulier en améliorant l'association des partenaires concernés
(État, départements, communes, associations, entreprises et
sociétés d'assurances) et en favorisant une meilleure insertion
des actions locales dans la politique nationale.
B. UN PROJET DE LOI COHÉRENT
Le projet de loi présentement soumis à notre
examen est cohérent au regart de son objectif, malgré son
intitulé de projet de loi "
portant diverses mesures relatives
à la sécurité routière "
.
L'essentiel du texte repose sur cinq séries de dispositions.
1. La formation des conducteurs novices auteurs d'une infraction grave
La loi du 10 juillet 1989, relative au permis à points,
a institué un stage de sensibilisation aux causes et conséquences
des accidents de la route.
Le Gouvernement propose, dans l'
article premier
du projet de loi, que ce
stage
soit obligatoire pour tous les titulaires du permis de conduire
depuis
moins de deux ans
, auteurs d'une infraction entraînant le
retrait d'au moins
quatre points
(comme le dépassement du taux
légal d'alcoolémie, le non-respect d'un stop ou d'un feu rouge).
Le Gouvernement justifie cette proposition en indiquant que, statistiquement,
le risque d'être tué sur la route est trois fois plus
élevé pendant les trois premières années qui
suivent l'obtention du permis de conduire.
2. L'enseignement de la conduite et de la sécurité routière
Le Gouvernement souhaite renforcer les garanties
exigées pour l'exercice des professions d'enseignant de la conduite et
d'exploitant des établissements d'enseignement. Le secteur est en effet
caractérisé aujourd'hui par une concurrence très vive, par
la multiplication des créations d'établissements à
l'existence souvent éphémère, voire par des pratiques
répréhensibles en matière de gestion d'entreprise.
Le Gouvernement propose donc
d'inscrire dans la loi
les conditions
nécessaires pour exercer la profession d'enseignant et celle
d'exploitant d'établissements d'enseignement de la conduite et de la
sécurité routière. Ces conditions sont actuellement
fixées par le réglement (articles R.243 et suivants du code
de la route).
Le texte tend par ailleurs à imposer l'existence d'un
contrat
écrit
entre le candidat au permis de conduire et
l'établissement dans lequel il s'inscrit. Cette formalité est
également prévue pour les candidats à l'un des titres et
diplômes exigés pour l'exercice de la profession d'enseignant de
la conduite des véhicules terrestres à moteur et de la
sécurité routière.
Enfin, le texte vise à permettre à l'autorité
administrative de
suspendre
, dans certaines circonstances, pour une
période maximale de six mois, l'autorisation d'enseigner ou
l'agrément permettant d'exploiter un établissement d'enseignement.
Les dispositions proposées dans cet article avaient déjà
donné lieu à un projet de loi déposé à
l'Assemblée nationale le 11 mars 1997 par M. Bernard Pons, alors
ministre des transports.
3. La responsabilité pécuniaire des propriétaires de véhicules
Dans le but de mettre fin à l'impunité dont
jouissent certains conducteurs auteurs d'infractions graves, du fait de
l'impossibilité de les identifier de manière certaine, le projet
de loi tend à rendre pécuniairement responsables les
propriétaires des véhicules pour toutes les infractions à
la réglementation sur le stationnement, sur les vitesses maximales
autorisées et sur les signalisations imposant l'arrêt des
véhicules.
Actuellement, cette responsabilité n'est prévue que pour les
infractions à la réglementation sur le stationnement.
4. La création d'un délit en cas de récidive en moins d'un an de dépassement de la vitesse maximale autorisée, égal ou supérieur à 50 km/h
L'
article 5
du projet de loi tend à punir de six
mois d'emprisonnement et de 50.000 francs d'amende, tout conducteur commettant
un nouveau dépassement de la vitesse maximale autorisée
égal ou supérieur à 50 km/h moins d'un an après
avoir été condamné définitivement pour la
même infraction.
L'
article 6
du projet modifie en outre l'article L.11-1 du code de la
route dans le but de réduire de six points le nombre de points du permis
de conduire pour ce nouveau délit.
5. L'instauration d'un dépistage systématique de l'usage de stupéfiants, pour les conducteurs impliqués dans un accident mortel
L'article 7
du projet de loi tend à imposer aux
officiers ou agents de police judiciaire de faire procéder sur tout
conducteur impliqué dans un accident mortel de la circulation à
des épreuves de dépistage et éventuellement, à des
analyses et examens médicaux, chimiques et biologiques en vue
d'établir s'il conduisait sous l'influence de substances ou plantes
classées comme stupéfiants.
Le refus de se soumettre à ces vérifications serait puni de deux
ans d'emprisonnement et de 30.000 francs d'amende.