II. LE CINQUIÈME RÉSEAU

S'agissant du rapprochement entre la SEPT - ARTE et La Cinquième, votre rapporteur s'est prononcé, dès décembre 1995, en faveur d'une « structure commune ». Dès l'origine, il a préconisé la création d'une holding créée avec des apports à 50/50 et non la fusion d'une chaîne avec l'autre, v oire l'absorption de l'une par l'autre .

Plus fondamentalement, il importe d'aligner la politique de diffusion de la SEPT sur ARTE-Deutschland et de mettre fin à l'isolement actuel de la chaîne vis-à-vis du secteur public.

En tout état de cause, votre rapporteur a toujours souligné que ce rapprochement était subordonné à la concertation avec notre partenaire allemand, en prenant exemple sur les méthodes germaniques : la SudWestFunk et la Süddeutsche Rundfunk n'ont-elles pas décidé de démarrer un processus de fusion qui durera... deux ans ?

Pour la SEPT - ARTE, c'est le GEIE qui a compétence pour la conception générale et la définition de la grille alimentée sur la base du principe de parité entre les deux pôles d'édition ; c'est lui qui en fin de compte choisit le programme mis à l'antenne.

Pour La Cinquième, la production est intégralement sous-traitée. Depuis début novembre 1996, un audit est conduit sur les quatre sociétés de production qui réalisent plus de 8 millions de chiffre d'affaires avec la chaîne.

Pour votre rapporteur, le rapprochement entre les deux chaînes passe par l'alignement de la politique de programmation de la SEPT sur celle de La Cinquième : la SEPT devrait donc sous-traiter sa production aux autres chaînes publiques françaises, comme ARTE - Deutschland le fait en Allemagne .

A. ARTE

ARTE poursuit heureusement son développement européen avec des accords conclus avec de nouveaux partenaires, comme les télévisions publiques suédoise, polonaise ou hongroise. La chaîne négocierait la reprise de sa diffusion sur un bouquet satellite que la chaîne suédoise SVT est en train de constituer avec des chaînes du secteur public scandinave et sur un autre bouquet satellite italien. Son audience demeure toutefois réduite.

Afin de tenter de réduire le coût de la SEPT-ARTE, le Gouvernement propose, dans le présent projet de loi de finances, des économies importantes qui imposent financièrement le rapprochement avec La Cinquième et anticipent, par là même, le projet de loi de réforme de la loi du 30 septembre 1986 .

La SEPT-ARTE réintégrera ainsi l'orbite du secteur public dont elle a toujours eu tendance à s'éloigner, invoquant le traité franco-allemand de 1992. Sans méconnaître ses spécificités institutionnelles, on peut s'interroger sur les raisons qui la conduisent à faire constamment « bande à part », comme en témoigne le refus récent d'adopter la signalétique sur les émissions de violence ou la politique autonome qu'elle mène en matière de diffusion par satellite .

Il est vrai que, selon un document de la chaîne ( ( * )43) , il existe une « conférence des programmes franco-allemande-belge-suisse-espagnole, souveraine à Strasbourg pour la diffusion sur ARTE » .

Le législateur de 1992 avait-il eu conscience de créer une chaîne « souveraine » ?

1. L'isolement de la chaîne

Les modes français et allemand d'alimentation de la grille sont très différents. ARTE Deutschland est essentiellement une structure administrative, par laquelle transitent avec ARTE les moyens en production mis en oeuvre par les grands réseaux publics allemands. Le coût est le plus souvent celui d'une diffusion sur ARTE, qui ne reflète pas, tant s'en faut, le coût total de production ou d'achat du programme. Le dispositif français, en revanche, assigne à la SEPT un rôle moteur dans l'alimentation de la grille d'ARTE et lui fait subir alors frontalement l'ensemble des coûts liés à cette alimentation d'ARTE .

Cette structure tend à isoler la SEPT dans le système audiovisuel français, à limiter ses échanges avec les autres diffuseurs, même si le nombre de coproductions augmente de façon incontestable, et à accroître le risque financier qui pèse sur elle .

Une diminution régulière du budget de production et d'achats de programmes. Le budget de production et d'achats de programmes de la SEPT ne cesse de diminuer ces dernières années.

(En millions de francs)

1993

1994

1995

1996

487

451

418

409

Cette diminution de 16% sur la période 1993/96 s'inscrit dans un contexte d'augmentation générale des coûts unitaires des achats et des coproductions.

La réduction régulière des crédits alloués au plan de production et d'achats de programmes se traduit par une situation inédite : le budget d'achats et de production disponible pour la SEPT (409 millions de francs en 1996) est devenu inférieur au coût prévisionnel de la contribution à la grille d'ARTE qu'elle a communiqué au pôle allemand (420 millions de francs).

Une insuffisance de stocks

Cette évolution est préoccupante dans la mesure où elle se traduit par une diminution sensible des stocks de programmes inédits. La valeur du stock de programmes à l'actif du bilan s'établit à 378 millions de francs fin 1995, contre 471 millions de francs fin 1992.

Cette diminution du budget de programmes a conduit la SEPT à rechercher les moyens de réduire le coût global de sa contribution à la grille d'ARTE.

La SEPT n'a qu'assez peu infléchi sa politique d'alimentation en programmes. Considérant qu'elle a pour mission de stimuler la création française et européenne, elle maintient une part élevée de productions comparée aux achats (plus des 3/4 du budget d'achats et de production de programmes ; environ 60 % du volume d'heures de programmes).

Par conséquent, le volume de programmes rediffusés a progressé de façon significative (50 heures supplémentaires prévues dans la grille de 1996), le niveau moyen de rediffusion, toutes cases confondues, étant porté à 20 %.

Puisque la SEPT doit approvisionner, selon un principe de parité - aménagé selon les genres d'émission - la grille d'ARTE et puisqu'elle ne peut proposer un nombre excessif de rediffusions alors que son budget de programmes régresse, elle doit redéployer son budget au profit des dépenses de programme ou renforcer la synergie avec les autres diffuseurs publics .

Le redéploiement de son budget, au détriment des frais de diffusion et en faveur du budget de programmes, est, en effet, peu réaliste.

Ce rapprochement avec les autres diffuseurs du secteur public, réclamé par votre rapporteur depuis plusieurs années, s'effectue progressivement. En 1995, la moitié des fictions ont été des coproductions avec France 2 ou France 3, et 30 % des documentaires ont été coproduits (dont 19 heures sur un total de 81 heures avec La Cinquième).

* (40) Calcul reposant sur le budget fonctionnel joint aux projets de loi de finances.

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