CONCLUSION
Notre Haute assemblée ne peut a priori que témoigner une grande sympathie à l'endroit de la proposition de loi émanant de l'Assemblée nationale et dont l'objectif, qu'il soit réel ou affiché, est bien de desserrer la contrainte financière des collectivités locales afin de favoriser l'activité des petites et moyennes entreprises.
Toutefois, dans les conditions actuelles de rémunération de l'épargne administrée, et sauf à prévoir une remontée des taux d'intérêt à court terme, votre commission des finances estime de son devoir d'émettre les plus expresses réserves sur l'efficacité du dispositif proposé qui risque fort d'être assez limitée et de conduire à un certain transfert du fardeau de la dette des PME aux collectivités locales.
Par ailleurs, votre commission des finances considère que le dispositif voté par l'Assemblée nationale comporte certaines imprécisions qui devront être impérativement levées, pour assurer à l'expérience toutes ses chances de succès.
Enfin, certains dangers potentiels doivent être pris en considération dont les plus importants sont une éviction relative des PME de l'accès aux financements Codevi et l'introduction de distorsions de concurrence sur le marché du financement aux collectivités locales.
Compte tenu de ces risques, votre commission des finances avait explicitement rejeté une proposition similaire lors de l'examen du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier d'août 1994 ( ( * )1) et l'avait à nouveau implicitement écartée dans le cadre des travaux de sa mission d'information.
En conclusion de ces derniers, votre commission avait cru devoir mettre en garde le Gouvernement de l'époque contre une utilisation détournée de l'instrument affirmant notamment que : " Le Codevi ne doit pas être utilisé comme le moyen d'apaiser les souffrances des banques devant ce qu'elles estiment être la rivalité injuste du Livret A ".
Il ne faudrait pas, aujourd'hui, que l'extension de son champ d'utilisation soit interprétée comme une tentative d'apaisement au mécontentement des collectivités locales devant ce qu'elles estiment être une remise en cause du pacte de stabilité censé régir leurs relations financières avec l'État.
Néanmoins, compte tenu du caractère préoccupant de la situation économique et de la nécessité de tout tenter pour rétablir la confiance, l'activité et l'emploi, votre commission des finances, écartant conformément aux souhaits du rapporteur de la proposition de loi à l'Assemblée nationale, toute approche dogmatique sur la question, émet un avis de principe positif sur la proposition de loi soumise à votre examen.
Confiante dans l'action du Gouvernement qui saura rétablir une hiérarchie des taux de nature à rendre l'instrument efficace et prendre les mesures d'ordre réglementaire permettant d'en éviter les effets pervers, votre commission vous recommande d'adopter cette proposition, sous réserve toutefois de l'adoption des amendements qu'elle vous propose.
* (1) Lors de l'examen de ce projet de loi, un amendement avait été déposé par les sénateurs Emmanuel Hamel et Jacques Oudin, M. Jean Arthuis, alors rapporteur général du Sénat, avait émis, au nom de la Commission des finances, un avis défavorable sur cet amendement, estimant que "Les fonds collectés par les Codevi ne sont pas destinés aux collectivités territoriales. Ils visent à venir en aideaux PME, à créer des emplois. Jusqu'à preuve du contraire ce sont les entreprises qui créent des emplois. De toute évidence, il est nécessaire de concentrer sur les entreprises créatrices d'emplois le produit de ces placements". Journal Officiel du 29 juin 1994
p. 3242 et 3243.