III. DES DIFFICULTÉS D'APPLICATION À ANTICIPER, UNE EFFECTIVITÉ À ASSURER
A. LE RESPECT DU DROIT EUROPÉEN NÉCESSITE UNE ATTENTION SPÉCIFIQUE
Au fil de ses décisions, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a développé une interprétation extensive des droits accordés aux travailleurs issus de pays tiers, qui résident légalement dans un État membre, par la directive européenne 2011/98 du 13 décembre 2011 dite « permis unique ». Durant les auditions conduites par la rapporteure, les services du ministère de l'Intérieur ont souligné le risque de non-respect de cette directive, et l'importance de notification le cas échéant. En effet, cette directive impose une égalité de traitement, au regard de la sécurité sociale, entre les nationaux et étrangers titulaires d'un titre de séjour relevant de son champ.
Afin de limiter le risque de non-conformité à la directive, la commission a adopté, à l'initiative de la rapporteure, un amendement ayant pour objet de substituer à l'exception « d'affiliation à la sécurité sociale au titre d'une activité professionnelle » celle d'être « titulaire d'un titre ou document autorisant à travailler ».
B. UNE APPLICATION SUSCEPTIBLE D'ÊTRE CONTRARIÉE PAR LES CLAUSES D'ÉGALITÉ DE TRAITEMENT CONTENUES DANS CERTAINS TRAITÉS ET CONVENTIONS INTERNATIONALES
La France a ratifié différents instruments de droit international qui impliquent des clauses d'égalité de traitement entre les ressortissants nationaux et ceux des pays-tiers partie au traité en matière de protection sociale. Du fait de la supériorité du droit international sur la loi, ces traités et conventions bilatérales ou multipartites sont de nature à faire écran aux dispositions contenue dans la proposition de loi, et empêcherait de facto son application pour les ressortissants concernés.
Il s'agit notamment des accords européens d'association, notamment signés entre l'Union européenne et l'Algérie, le Maroc, la Tunisie, le Liban, l'Égypte, la Jordanie, Israël et la Turquie, de la convention n° 118 sur l'égalité de traitement de sécurité sociale de l'Organisation internationale du travail (OIT) qui concerne plusieurs pays d'Afrique sub-saharienne et d'Amérique du Sud et de 67 accords ou conventions bilatérales avec des États tiers qui peuvent impliquer une clause de réciprocité sur certaines prestations sociales.
Cependant, la rapporteure appelle à ne pas tirer de conclusions hâtives de ce point. D'abord parce que les conventions en question peuvent être dénoncées, ou amendées sur certains points. Et qu'à défaut, ces conventions assurent en retour qu'un ressortissant français habitant dans le pays partie au traité bénéficie d'un traitement non discriminatoire avec les ressortissants nationaux.