EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
Introduction de définitions et de prescriptions
générales concernant la rénovation
énergétique et les travaux prioritaires adaptés au
bâti ancien
Cet article vise à introduire au sein du code de la construction et de l'habitation plusieurs définitions et prescriptions générales concernant la rénovation énergétique des bâtiments anciens. Notamment, il vise à favoriser le recours aux matériaux biosourcés ou géosourcés, à mieux prendre en compte le confort thermique dans les travaux de rénovation énergétique et à prioriser les travaux les plus adaptés au bâti ancien.
La rapporteure a proposé un amendement COM-7 de réécriture de l'article, déposé à l'identique par l'auteur de la proposition de loi, visant à :
- préserver l'introduction d'une définition du bâtiment ancien dans la loi sans pour autant mentionner une liste restrictive de matériaux ;
- conserver la prise en compte du confort intérieur d'hiver et d'été dans le cadre de la rénovation énergétique performante ;
- éviter le remplacement systématique des menuiseries extérieures des bâtis anciens afin de permettre l'étude de solutions alternatives respectueuses du patrimoine.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - Les spécificités constructives du bâti ancien sont insuffisamment prises en compte dans la rénovation énergétique
A. Bien qu'hétérogène, le bâti ancien se caractérise par des spécificités constructives qui rendent certains travaux de rénovation énergétiques inadaptés
1. Le bâti ancien inclut des bâtiments aux matériaux de construction et aux niveaux de protections divers
a) L'approche historique : une définition particulièrement large
Au titre de la règlementation thermique des bâtiments existants, le « bâti ancien » est considéré comme englobant tous les bâtiments construits avant 1948.
Si la première règlementation thermique française a été mise en place en 1974, après le premier choc pétrolier, les bâtiments construits avant 1974 présentent tout de même une grande variabilité dans leurs performances thermiques. Pour cette raison, la date de 1948, qui correspond aux grandes lois de reconstruction d'après la seconde guerre mondiale, est fréquemment retenue.
Du fait de cette définition large, le bâti ancien représente plus d'un tiers du parc français de logements en surface dont 44 % des maisons individuelles et 35 % des logements collectifs1(*). Cela représenterait plus de 10 millions de logements et plus d'une résidence sur cinq dans l'Hexagone2(*).
Néanmoins, aucune définition du bâti ancien n'existe au sein du code de la construction et de l'habitation.
b) L'approche par les matériaux
Une étude du Cerema de 20163(*) retient un marqueur temporel similaire tout en introduisant des considérations liées aux matériaux utilisés : la fin de la seconde guerre mondiale marque le début de l'industrialisation et de la systématisation des procédés de construction, avec de nouveaux matériaux qui apparaissent, comme le béton et l'acier ainsi que de nouvelles techniques telles que les systèmes-poteaux-poutres. Cette étude définit plus précisément le bâti ancien comme « les bâtiments construits avant 1948 et basés sur un mode constructif traditionnel ».
La même étude précise que les matériaux de construction des bâtiments anciens sont divers - brique, tuffeau, pisé, pierre calcaire, granite, pan de bois-torchis, terre crue. Les matériaux utilisés sont en outre le reflet de spécificités locales : le schiste et le granit sont par exemple davantage utilisés en zone de montagne et en Bretagne tandis que le pan de bois est plébiscité en Normandie, le torchis dans le Val-de-Loire ou en Picardie. La composition physicochimique des matériaux constructifs varie en fonction des régions : un torchis normand n'est par exemple pas identique à un torchis alsacien.
Les auditions de la rapporteure, notamment celle des architectes des bâtiments de France, ont permis de mettre en évidence que près de 90 % des bâtiments anciens ont été construits avec des matériaux biosourcés et géosourcés issus de filières courtes et mis en oeuvre sans utilisation d'énergie fossile.
La seule définition actuelle existe au niveau règlementaire concernant les matériaux biosourcés, définis par l'arrêté du 2 juillet 20244(*) relatif label « bâtiment biosourcé » comme un produit de construction comprenant une quantité de matière partiellement ou totalement issue de la biomasse végétale ou animale utilisée comme matière première dans ces produits. Il n'existe pas de définition règlementaire des matériaux géosourcés.
c) Des bâtiments à l'intérêt patrimonial, architectural, culturel ou touristique variable
Une part importante des bâtiments anciens fait l'objet d'une protection au titre du code du patrimoine.
Les sites patrimoniaux remarquables (SPR) ou situés en abord des monuments historiques peuvent concerner jusqu'à un tiers des résidences principales, soit 11,6 millions de logements5(*), ce qui représenterait jusqu'à 44 % des logements du parc locatif privé. Or une grande partie du parc localisé en périmètre de protection patrimoniale est ancien, voire très ancien : la part des logements construits avant 1949 y est de 45 % (26 % avant 1900), voire de 55 % dans les SPR (35 % avant 1900) alors qu'elle n'est que de 25 % hors périmètre.
Néanmoins, cela ne signifie pas que 44 % des logements sont éligibles aux exemptions de travaux de rénovation énergétique performante : les dérogations ne s'appliquent qu'à partir du moment où les travaux nécessaires entreraient en conflit avec les règles de conservation.
Tous les bâtiments anciens ne font néanmoins pas l'objet d'une protection au titre du code du patrimoine malgré leur intérêt patrimonial, architectural, culturel ou touristique.
Comme le soulignait le rapport d'information sénatorial de Mme Sabine Drexler sur le patrimoine et la transition écologique de juin 20236(*), « ce bâti n'en revêt pas moins un intérêt en conférant à nos paysages leur cohérence architecturale, leur identité et leur typicité et en étant le reflet d'époques et de styles variés ». À titre d'exemple, ni les maisons alsaciennes ni les immeubles haussmanniens ne sont protégés en tant que tels.
2. Le bâti ancien présente de multiples intérêts thermiques et climatiques du fait des matériaux de construction utilisés
Le bâti ancien présente des spécificités qui ont des conséquences en matière énergétiques, notamment du fait de leurs matériaux de construction.
Les auditions de la rapporteure ont mis en évidence que les bâtiments anciens ont le plus souvent été construits via des matériaux et des techniques traditionnelles : les minéraux avec la chaux ou la pierre (calcaire, granit, schiste) offrent ainsi une forte inertie thermique qui limite les variations de température et fonctionnent sur un principe de perspiration permettant d'évacuer l'humidité vers l'extérieur ; la brique pleine possède quant à elle des capacités hygroscopiques favorisant la régulation de l'humidité ; le bois (colombage, charpentes) est un bon isolant naturel qui facilite la ventilation des parois tandis qu'enfin, le torchis et le pisé assurent une régulation hygrométrique naturelle, prévenant les pathologies du bâti.
Ces caractéristiques améliorent le confort d'été et évitent la condensation. À l'inverse, les maçonneries d'après-guerre en béton ou en parpaing, prévues pour être étanches, avec une inertie faible, permettant un chauffage mais également un refroidissements rapides.
Enfin, ces matériaux de construction du bâti ancien présentent un impact environnemental faible et une empreinte carbone déjà amortie : il s'agit en effet de bâtis construits il y a plus de 80 ans à partir de matériaux aux cycles de vie très long, allant jusqu'à plusieurs siècles (murs de pierre, charpente, menuiserie ancienne...). Ces matériaux présentent donc un intérêt en termes de sobriété de consommation de matériaux. Leur utilisation et leur entretien permet également de maintenir des filières artisanales non délocalisables et parfois sources d'innovation (béton décarboné, béton de chanvre, etc.).
B. Malgré l'existence de dérogations, la règlementation relative aux travaux de rénovation énergétique ne distingue pas spécifiquement le bâti ancien
1. Des objectifs génériques
L'article 158 de la loi dite climat et résilience du 22 août 20217(*) a rendu obligatoire la réalisation d'un audit énergétique lors de la mise en vente de logements classés « passoires énergétiques ».
Cet audit formule notamment des propositions de travaux8(*) afin d'atteindre une rénovation énergétique performante - dont la définition a été introduite par l'article 155 de la même loi.
La rénovation énergétique d'un bâtiment à usage d'habitation est dite performante9(*) lorsque les travaux, qui veillent à assurer des conditions satisfaisantes de renouvellement de l'air, respectent deux conditions :
- ils permettent d'atteindre un classement du bâtiment au titre du diagnostic de performance énergétique (DPE) en classe « A » ou « B » ;
- ils étudient les six postes de travaux de rénovation énergétique suivants : l'isolation des murs, l'isolation des planchers bas, l'isolation de la toiture, le remplacement des menuiseries extérieures, la ventilation, la production de chauffage et d'eau chaude sanitaire ainsi que les interfaces associées.
L'auditeur réalise au moins deux propositions de travaux, présentant les coûts associés :
- un parcours en une seule étape, constituant une rénovation énergétique performante, permettant d'atteindre la classe « B » ;
- un parcours en plusieurs étapes pour constituer une rénovation énergétique performante, dont la première permet de réaliser un gain d'au moins une classe et d'atteindre au minimum la classe « E » et dont l'étape finale permet d'atteindre au moins la classe « B ».
Ces travaux « permett[ent] un traitement satisfaisant des interfaces et interactions, notamment les ponts thermiques et l'étanchéité à l'air. Les solutions techniques définies dans les propositions de travaux doivent être compatibles avec l'état du bâti existant, notamment en ce qui concerne les matériaux constitutifs des parois opaques. »10(*)
Les six postes de travaux énergétiques ne sont pas nécessairement recommandés par l'audit mais sont considérés comme traités « dès lors que l'auditeur atteste qu'ils ont été portés à un haut niveau de performance en faisant appel aux meilleures techniques possibles et compatibles avec les caractéristiques du bâtiment proposé »11(*).
2. Des dérogations sont prévues mais sans cibler directement le bâtiment ancien
Des dérogations ont été prévues par la loi dite climat et résilience afin de tenir compte de la situation des « passoires énergétiques » mais aussi d'enjeux patrimoniaux, architecturaux, techniques et économiques.
Néanmoins, ces dérogations concernent l'ambition de la rénovation énergétique et non ses modalités : les postes de travaux étudiés restent les mêmes.
a) Les dérogations applicables aux passoires énergétiques
Pour les logements dont le DPE est classé « F » ou « G », qualifiés de « passoires énergétiques », une rénovation énergétique est dite performante dès lors que la classe « C » est atteinte. Les six postes de rénovation mentionnés ci-dessus doivent également être étudiés dans le cadre des travaux12(*).
Pour ces bâtiments classés « passoires énergétiques » avant travaux, la proposition de travaux de l'auditeur inclut une étape intermédiaire permettant d'atteindre au moins la classe « C », au lieu de la classe « B »13(*).
b) Les dérogations liées à des motifs patrimoniaux, architecturaux, techniques ou économiques
L'article L. 126-28-1 du code de la construction et de l'habitation, qui prescrit l'audit énergétique en cas de vente d'un logement classé « passoire énergétique », prévoit ainsi que le parcours de travaux proposé doit être compatible avec les servitudes prévues par le code du patrimoine et présenter un coût qui n'est pas disproportionné par rapport à la valeur du bien. Il indique également que l'atteinte de la classe « B » ne s'applique pas lorsque des contraintes techniques, architecturales, patrimoniales ou liées au coût des travaux y font obstacle.
L'article L. 111-1 du même code prévoit quant à lui que pour les logements qui ne peuvent faire l'objet de travaux permettant d'atteindre la classe « B » en raison de contraintes techniques, architecturales ou patrimoniales ou de coûts manifestement disproportionnés à la valeur du bien, la rénovation est dite performante dès lors que les travaux permettent un gain d'au moins deux classes au titre du DPE et que les six postes de travaux précités ont été traités. Les conditions dans lesquelles ces contraintes sont réunies sont prévues par décret en Conseil d'État, pris le 8 avril 202214(*) et codifié à l'article R. 112-18 du même code.
Ainsi, au titre des contraintes techniques, il est précisé que l'exception s'applique si les travaux font courir un risque de pathologie du bâti, affectant notamment les structures ou le clos ouvert du bâtiment. Le risque doit être justifié par une note argumentée rédigée par un homme de l'art, sous sa responsabilité.
Au titre des contraintes architecturales et patrimoniales, l'exception s'applique si les travaux risquent d'entraîner des modifications des parties extérieures ou des éléments d'architecture et de décoration de la construction, en contradiction avec les règles et prescriptions prévues pour les bâtiments suivants :
- les monuments historiques classés ou inscrits, les sites patrimoniaux remarquables ou les abords des monuments historiques ;
- les immeubles ou les ensembles architecturaux de moins de 100 ans ayant reçu le label « Architecture contemporaine remarquable »15(*) ;
- les monuments naturels et les sites dont la conservation ou la préservation présente, au point de vue artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, un intérêt général16(*) ;
- le cas échéant, les constructions visées par le plan local d'urbanisme conformément aux articles L. 151-18 et L. 151-19 du code de l'urbanisme.
Au titre des contraintes liées à des « coûts manifestement disproportionnés à la valeur du bien », le décret prévoit que les travaux entrent dans le champ de l'exception dès lors qu'ils excèdent 50 % de la valeur vénale du bien, évaluée par un professionnel dans le domaine de l'immobilier.
Enfin, les travaux nécessaires à une rénovation énergétique performante qui ne seraient pas conformes aux obligations relatives, notamment, au droit des sols, au droit de propriété, à la sécurité des biens et des personnes ou à l'aspect des façades et à leur implantation, justifient également l'application de la dérogation.
Dès lors, pour tous les bâtiments entrant dans le champ de ces exceptions, le parcours de travaux proposés par l'audit énergétique ne prévoit pas nécessairement d'atteindre la classe « B »17(*) :
- pour les bâtiments classés « E » avant travaux, il doit permettre d'atteindre la classe « C » ;
- pour les bâtiments « F » avant travaux, la classe « D » ;
- pour les bâtiments « G » avant travaux, la classe « E ».
C. L'insuffisante prise en compte des spécificités du bâti ancien a justifié plusieurs réformes, dont certains sont encore en cours
1. Le risque de travaux de rénovation énergétique inadaptés au bâti ancien
L'obligation actuelle d'étudier les six postes de travaux peut aller à l'encontre de la préservation du bâti ancien.
D'après les architectes auditionnés par la rapporteure, l'isolation systématique des murs se justifierait parfois davantage par la recherche d'une meilleure classe énergétique que par la recherche d'un meilleur confort, notamment d'été, tout en allant à l'encontre de la sobriété environnementale.
S'ils recherchent l'étanchéité et le renouvellement de l'air sans prendre en compte la perspiration spécifique au bâti ancien, les travaux d'isolation peuvent en outre être sources de pathologies importantes du bâti. Parmi les pathologies les plus fréquentes, figure notamment le risque de dégradation des structures traditionnelles par le pourrissement des pierres tendres en raison du blocage des transferts hygrométriques traditionnels. En outre, les signes avant-coureurs de dégradation d'un bâtiment ancien (fissurations, casses de certaines pierres) peuvent être masqués par les isolations thermiques extérieures, augmentant ainsi le risque d'effondrement soudain.
Le risque est également patrimonial : même sur un bâtiment non protégé au titre du code du patrimoine, le changement des menuiseries des fenêtres en bois pour des fenêtres en PVC contribue à l'uniformisation des paysages et à l'effacement d'un patrimoine historique et culturel inhérent aux territoires. Dès lors, comme le souligne le rapport sénatorial précité, les rénovations inadaptées entraînent un risque de banalisation des caractéristiques architecturales propres à chaque région, avec des conséquences néfastes en termes culturel et touristique mais aussi économique, en raison de la disparition de savoir-faire traditionnels.
2. Ces spécificités ont justifié de récents travaux, qui restent insuffisants
a) Des travaux visant à renforcer la connaissance du bâti ancien par les diagnostiqueurs et les auditeurs
Les ministères chargés du logement et de la culture mènent depuis plusieurs mois des travaux visant à renforcer la diffusion de connaissance sur les spécificités du bâti ancien, de manière à améliorer la prise en compte de leurs spécificités dans le cadre des travaux de rénovation énergétique.
Ainsi :
- fin 2023, l'Agence nationale de l'habitat (Anah) a diffusé un guide à destination des espaces conseils France Rénov' afin de conseiller les ménages sur la réhabilitation du bâti ancien ;
- à partir du premier semestre 2024, des questions spécifiques au bâti ancien ou d'intérêt patrimonial ont été incluses aux banques de questions pour les examens des diagnostiqueurs et des auditeurs énergétiques ;
- le centre de ressources et d'évaluation sur le bâti ancien (CREBA), missionné par le ministère chargé du logement, mène d'importants travaux d'animation et d'expertise sur la réhabilitation du bâti ancien ;
- enfin, un guide destiné à orienter les diagnostiqueurs et les auditeurs dans la formalisation de leurs recommandations de travaux, notamment sur le bâti ancien, devrait être publié d'ici la fin du trimestre.
Néanmoins, les auditions menées par la rapporteure ont mis en évidence une préoccupation persistante des acteurs pour le niveau de connaissances des diagnostiqueurs concernant les spécificités du bâti ancien.
b) Des travaux visant à mieux prendre en compte le confort thermique dans le cadre de la rénovation énergétique
À l'heure actuelle, la caractérisation du confort d'été par le diagnostic de performance énergétique (DPE) provient du caractère traversant ou non du logement, l'isolation de la toiture ou de la couverture, l'inertie du logement, la présence de brasseurs d'air fixes et la présence de protections solaires extérieures.
Une révision de cet indicateur de confort d'été pourrait avoir lieu dans le cadre du plan national d'adaptation au changement climatique 3 (PNACC 3) qui a été à la consultation publique fin 2024. D'après le ministère chargé du logement, ces travaux sont en cours en lien avec le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) pour définir un indicateur plus précis de prise en compte du confort d'été.
II. Le dispositif envisagé - La définition du bâti ancien, assortie de prescriptions générales concernant sa rénovation énergétique
A. L'introduction de définitions du bâtiment ancien et des matériaux biosourcés ou géosourcés
L'article 1er de la proposition de loi introduit à l'article L. 111-1 du code de la construction et de l'habitation une définition spécifique du bâtiment « ancien », en sus de la définition du « bâtiment »18(*) qui est un bien immeuble ouvert et destiné à accueillir une occupation, une activité ou tout autre usage humain.
Cette définition du bâtiment ancien introduirait deux critères :
- un critère lié aux techniques et aux matériaux de construction utilisés. Le bâtiment ancien serait défini de la manière suivante : « un bâtiment construit selon des techniques et avec des matériaux traditionnels tels que la pierre, la terre crue, la brique de pays, du bois, conférant aux parois extérieures une bonne perméance à la vapeur d'eau. » ;
- un critère lié à la date de construction du bâtiment : il serait précisé qu' « au sens de la règlementation thermique, il s'agit de l'ensemble des bâtiments construits avant 1948 ».
Cet article introduit également, au même article du même code, des définitions des « matériaux biosourcés ou géosourcés », qui seraient des « matériaux de construction issus, pour les matériaux biosourcés, de la biomasse d'origine animale ou végétale et pour les matériaux géosourcés, de ressources d'origine minérale. »
Il serait précisé que ces matériaux favorisent la perméance à la vapeur d'eau.
B. La modification de la définition de la rénovation énergétique performante
La définition de la rénovation énergétique performante serait modifiée pour préciser que les travaux prennent en compte non seulement des conditions satisfaisantes de renouvellement de l'air mais aussi le confort intérieur d'été et d'hiver.
Il serait également précisé que les travaux de rénovation s'inscrivent en cohérence avec les objectifs fixés par la stratégie nationale bas-carbone, en encourageant le recours à des matériaux biosourcés, bas-carbone ou à impact environnemental faible, à la végétalisation et à d'autres dispositifs de rafraîchissement naturel qui assurent le confort d'été et qui limitent le recours à des équipements consommateurs en énergie.
C. L'introduction de règles spécifiques à la rénovation énergétique des bâtiments anciens
Enfin, il serait précisé qu'un décret en Conseil d'État fixe des règles spécifiques à la rénovation énergétique des bâtiments anciens en établissant des postes de travaux énergétiques prioritaires adaptés aux modes constructifs anciens.
III. La position de la commission - la nécessaire prise en compte des spécificités du bâti ancien ne doit pas être source de complexification excessive
A. La nécessité de ne pas alourdir la règlementation
La rapporteure adopte une attitude prudente à l'égard de l'inscription au sein de la loi de définitions pouvant avoir des conséquences importantes pour les acteurs économiques.
Au-delà de la borne chronologique de 1948 qui paraît pertinente, les acteurs du bâtiment ont notamment alerté la rapporteure sur la liste limitative de matériaux associés à la définition des bâtiments associés alors même que ces derniers ont été construits selon des modes constructifs extrêmement divers. Il semble plus opportun à la rapporteure de s'adosser à une définition plus souple, pouvant éventuellement faire l'objet de précision par voie règlementaire. Elle s'est notamment référée à la définition du bâtiment ancien fixée par le Cerema, qui a par ailleurs développé un centre de ressources spécifiquement dédié à la réhabilitation du bâtiment ancien.
En accord avec l'auteur de la proposition de loi, la rapporteure a donc proposé la définition suivante du bâtiment ancien : « un bâtiment construit avant 1948 et basé sur un mode constructif traditionnel ».
Par conséquent, elle a également proposé, en phase avec l'auteur de la proposition de loi, de ne pas non plus inscrire au niveau législatif les définitions des matériaux biosourcés et géosourcés, qui trouvent davantage leur place au niveau règlementaire, d'autant plus que la définition proposée des matériaux géosourcés inclurait dans cette catégorie des matériaux comme le béton.
B. Un équilibre entre prise en compte du bâti ancien et refus d'un système à deux vitesses
La rapporteure est favorable à la prise en compte des spécificités du bâti ancien dans les travaux de rénovation énergétique afin de prévenir la réalisation de travaux inadaptés.
En particulier, elle estime bienvenue la prise en compte explicite du confort intérieur d'été et d'hiver dans le cadre de la rénovation énergétique performante. De même, la mention, parmi les six postes de travaux à étudier, du « traitement » des menuiseries extérieures et non de leur remplacement, lui semble de nature à encourager l'étude de travaux respectueux du bâti ancien et à éviter le remplacement systématique de menuiseries anciennes par du double vitrage hermétique qui supprime toute ventilation naturelle et entraîne des problèmes de condensation et de moisissures.
Néanmoins, elle estime qu'il n'est pas souhaitable d'imposer une priorisation des travaux qui serait spécifique au bâti ancien. Non seulement elle serait sans doute source de complexité normative, mais de nombreux professionnels ont souligné l'importance d'adopter une approche globale permettant de valoriser, par exemple, l'isolation de la toiture lorsque celle des murs n'est pas possible.
La rapporteure a donc proposé à la commission un amendement COM-7, déposé à l'identique par l'auteur de la proposition de loi, qui vise à :
- préserver l'introduction d'une définition du bâtiment ancien dans la loi, sans pour autant mentionner une liste restrictive de matériaux ;
- prévoir la prise en compte du confort intérieur d'hiver et d'été dans le cadre de la définition de la rénovation énergétique performante ;
- éviter le remplacement systématique des menuiseries extérieures des bâtis anciens, afin de permettre l'étude de solutions alternatives respectueuses du bâti ancien.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 2
Création de règles
de performance énergétique et de diagnostic de performance
énergétique (DPE) spécifiques au bâti ancien
Cet article vise à soumettre les bâtiments anciens à des modes spécifiques de calcul et d'évaluation de la performance énergétique, en dérogeant aux règles fixant les classes du diagnostic de performance énergétique (DPE) et aux objectifs de performance énergétique des logements issus de la loi climat et résilience du 22 août 2021.
Afin de prendre en compte les spécificités du bâti ancien sans pour autant créer un second DPE qui lui serait applicable, la rapporteure a proposé un amendement COM-8 de réécriture de l'article, déposé à l'identique par l'auteur de la proposition de loi afin de prévoir que les spécificités, notamment thermiques sont prises en compte par le DPE et que les recommandations de travaux qu'il formule sont adaptées aux contraintes techniques, architecturales et patrimoniales pesant sur le bâtiment, notamment aux caractéristiques hygrothermiques des matériaux le composant.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - Pensé pour la bâti moderne, le DPE pourrait davantage prendre en compte les spécificités du bâti ancien
A. Opposable à tous les bâtiments, le mode de calcul DPE ne reflète pas totalement les spécificités du bâti ancien
1. Outil générique utilisé à des fins de classifications, le DPE des logements est opposable depuis 2021
Créé en 2006, le diagnostic de performance énergétique (DPE) est un document permettant de classer les bâtiments selon leur performance énergétique. La loi dite « Grenelle II » de 2010 rend obligatoire sa communication à l'acquéreur en cas de vente immobilière ainsi que l'affichage de la classe de performance énergétique au titre du DPE sur les annonces immobilières, tout en précisant que le locataire ne peut se prévaloir à l'encontre du bailleur des informations contenues dans ce DPE19(*).
Alors qu'il était délivré à titre informatif, la loi dite « Elan » l'a rendu opposable à compter du 1er juillet 2021, lui conférant la même portée juridique que les autres diagnostics immobiliers, à l'exception des recommandations de travaux qui conservent alors une valeur informative.
La loi dite « climat et résilience » du 22 août 202120(*) a quant à elle associé des objectifs de performance énergétique aux bâtiments en fonction des classes du DPE : à compter du 1er janvier 2028, tous les logements devront respecter une performance énergétique comprise entre les classes A et E au sens du DPE21(*). Aux classes du DPE correspondent également des échéances d'interdiction de mise en location des logements, qui s'appliquent à compter du 1er janvier 2023 aux logements classés « G+ », 1er janvier 2025, aux logements classés « G », à compter du 1er janvier 2028, aux logements classés « F » et à compter du 1er janvier 2034, aux logements classés « E ».
Le DPE est établi par un diagnostiqueur présentant des garanties de compétences et d'indépendance22(*), précisées par voie règlementaire23(*). Ces garanties incluent notamment une certification et une assurance professionnelle.
La classification au titre du DPE induit donc des conséquences financières :
- d'une part, l'interdiction de mise en location des passoires énergétiques (logements classés E, F et G) se répercute sur la valeur vénale du bien ;
- d'autre part, le bénéfice de certaines aides financières à la rénovation, notamment de Ma Prime Rénov', est adossé à l'atteinte, par les travaux, d'une certaine classe de rénovation énergétique.
2. La méthode de calcul du DPE, fiabilisée en 2021, inclut désormais quelques critères liés aux spécificités du bâti ancien
La méthode de calcul du DPE a été révisée par trois arrêtés du 31 mars 2021 : alors que le diagnostic était auparavant réalisé en tenant compte des factures de consommations énergétiques, cette réforme a introduit la méthode conventionnelle dite « 3-CL24(*) ». L'objectif du Gouvernement était de fiabiliser le DPE, objet de critiques, par le biais d'un mode de calcul indépendant du comportement des occupants s'appuyant sur une utilisation standardisée du logement pour des conditions climatiques moyennes.
Le DPE se base désormais uniquement sur les caractéristiques physiques du logement, telles que le bâti, l'isolation, les fenêtres et le système de chauffage.
Selon le ministère chargé du logement, cette réforme a permis de mieux prendre en compte les spécificités du bâti ancien :
- pour les bâtiments aux parois anciennes (terre, pierre, brique ancienne, colombage), une modulation a été introduite afin de tenir compte de leur inertie, qui leur permet de stocker la chaleur pendant les journées ensoleillées pour la restituer pendant les nuits froides. Cette approche réduit forfaitairement les besoins de chauffage d'environ 7 % par an ;
- les valeurs de résistance thermique des murs utilisées dans la méthode règlementaire tiennent compte de la composition des murs et de leur épaisseur ;
- le confort d'été est quant à lui traité en prenant en compte de l'isolation des toitures, de la présence de protection solaires, de l'inertie et de l'aspect traversant des logements.
B. Les spécificités du bâti ancien restent insuffisamment prises en compte par le DPE
1. Le bâti ancien est globalement dévalorisé par le calcul du DPE
La part de « passoires énergétiques », c'est-à-dire de logements classés E, F ou G est beaucoup plus importante au sein des constructions anciennes : elle s'élève à deux tiers en ce qui concerne les logements construits avant 1948. À titre de comparaison, plus de deux tiers des logements construits après 2013 sont classés B ou C.
Ceci s'explique notamment par le fait que les premières règlementations thermiques des bâtiments datent de 1974.
Cela s'explique également par la méthode de calcul du DPE : les auditions menées par la rapporteure ont mis en évidence la persistance, soulignée par les travaux du Creba, d'écarts significatifs entre les consommations réelles et celles issues du DPE réalisé à l'aide de la méthode révisée en 2021. Selon des professionnels auditionnés, cet écart serait principalement lié au fait que la méthode se base sur un régime stationnaire, adapté aux bâtiments récents et isolés qui sont peu sensibles aux variations extérieures mais beaucoup moins pertinent pour le bâti ancien compte tenu de son comportement dynamique.
En outre, le DPE ne prendrait pas suffisamment en compte les modes constructifs et l'organisation spatiale (l'existence d'espaces tampons non chauffés par exemple). Il pourrait encore mieux prendre en compte l'inertie thermique des matériaux anciens ainsi que leur perméance à la vapeur d'eau et mieux valoriser le confort d'été et certains systèmes de chauffages alternatifs.
Enfin, l'empreinte carbone du DPE reste liée à celle des consommations d'énergies et ne tient pas compte des matériaux locaux ou biosourcés ainsi que la date de la construction du bâtiment.
2. Des travaux sont en cours afin que le DPE reflète mieux la performance énergétique du bâti ancien
Les ministères chargés de la culture et du logement travaillent actuellement à intégrer des valeurs supplémentaires de résistance thermique de matériaux traditionnels, afin de diversifier la bibliothèque de matériaux de référence utilisée par les diagnostiqueurs et éviter la pénalisation de certains matériaux anciens dans le diagnostic. Un des enjeux reste notamment la mise à disposition d'une liste de valeurs de transmission thermiques par défaut qui serait davantage caractéristique des parois anciennes. L'appropriation par les diagnostiqueurs de cette bibliothèque de matériaux, déjà large, est aussi essentielle pour éviter des erreurs dans la caractérisation des matériaux.
Au total, l'étiquette DPE est donc dépendante non seulement de la méthode utilisée mais surtout des données d'entrées et de la formation des diagnostiqueurs.
Des améliorations concernant ces deux points ont pu être notées récemment, notamment via une réforme de la certification des diagnostiqueurs intervenue en juillet 2024, qui a instauré l'obligation de réaliser une étude de cas sur le bâti ancien et a intégré un minimum 30 % de questions à l'examen d'entrée portant spécifiquement sur le sujet bâti ancien ou traditionnel.
II. Le dispositif envisagé - L'introduction de règles dérogatoires au diagnostic de performance énergétique pour les bâtiments anciens
L'article 2 de la proposition de loi introduit un nouvel article L. 173-3 au code de la construction et de l'habitation, à la suite des articles L. 173-1-1 et L. 173-2 qui fixent respectivement les classes de DPE applicables aux logements et les niveaux de performance énergétique des logements à atteindre à compter du 1er janvier 2028.
Ce nouvel article L. 173-3 exempterait les bâtiments anciens, tels que définis à l'article 1er de la présente proposition de loi, de l'application des règles ci-dessus.
Les bâtiments anciens seraient soumis, par dérogation, à des critères d'évaluation et des modèles de calcul de performance énergétique adaptés, prenant notamment en compte leurs qualités hygrothermiques.
Ces critères et modalités de calcul seraient déterminés par un décret en Conseil d'État.
III. La position de la commission - mieux prendre en compte les spécificités du bâti ancien sans créer un DPE à deux vitesses
A. La stabilité des objectifs et l'unicité du DPE SONt gage de fiabilité et de comparabilité
Compte tenu du volume important de logements anciens, la rapporteure n'est pas favorable à une dérogation totale des bâtiments anciens aux objectifs de performance énergétique issus de la loi climat et résilience du 22 août 2021, ni à leur sortie des classes de performance énergétique calculées par le DPE.
Elle souligne en outre qu'au vu des réformes survenues récemment - en 2021 et en 2024 - la simplification normative ne plaide pas pour un nouveau DPE spécifique au bâti ancien, qui remettrait en outre en cause le rôle comparatif d'un tel diagnostic.
B. Il est néanmoins pertinent de mieux adapter le DPE actuel au bâti ancien
Plutôt que de fragmenter le dispositif en créant un DPE spécifique, la rapporteure est favorable à l'intégration de mesures ou d'indicateurs complémentaires au sein du DPE actuel permettant de mieux tenir compte de l'inertie, de l'hygrométrie des murs ainsi que du confort d'été, comme recommandé dès l'été 2023 par la commission de la culture et la commission d'enquête sénatoriale sur l'efficacité des politiques publiques de rénovation énergétique25(*).
La rapporteure estime qu'il est d'autant plus pertinent d'adapter la méthode actuelle du DPE au bâti ancien, que les travaux préalables à la réforme intervenue en 2021 n'ont pas associé le ministère de la culture.
La rapporteure a donc proposé, par un amendement COM-8 déposé à l'identique par l'auteur de la proposition de loi, que le DPE prenne en compte les spécificités thermiques des bâtiments anciens et que les recommandations de travaux qu'il formule soient adaptées aux contraintes techniques, architecturales et patrimoniales pesant sur le bâtiment, notamment aux caractéristiques hygrothermiques des matériaux le composant.
C. La formation des diagnostiqueurs doit être améliorée pour limiter les erreurs de données
Réitérant les constats et les recommandations formulés dès l'été 2023 par Mme Drexler et repris par la commission d'enquête sénatoriale sur l'efficacité des politiques publiques de rénovation énergétique, la rapporteure déplore l'insuffisante formation des professionnels et notamment des diagnostiqueurs aux enjeux de la rénovation du bâti ancien.
Notamment, de nombreuses erreurs sont recensées en raison d'une connaissance lacunaire des matériaux et techniques traditionnels employés dans le bâti ancien : elles pourraient être évitées par une saisie plus fidèle des matériaux caractérisant l'enveloppe du bâti plutôt qu'une référence erronée aux données fixées par défaut.
Elle appelle donc le Gouvernement à tenir compte de ces éléments lors de la prise des mesures règlementaires précisant les modalités d'adaptation du mode de calcul et des critères du DPE aux spécificités du bâti ancien.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 3
Instauration d'un audit
énergétique et patrimonial et prise en compte des
spécificités du bâti ancien dans les objectifs de
performance énergétique et environnementale des
bâtiments
Cet article vise à :
- transformer l'audit énergétique réglementaire actuel en un audit énergétique et patrimonial réalisé par un bureau d'étude agréé ou par un architecte ;
- prendre en compte les matériaux biosourcés ou géosourcés pour l'atteinte de résultats minimaux de performance énergétique ou environnementale lors de la construction et la rénovation de bâtiments ;
- préciser que les travaux d'isolation thermique des bâtiments anciens sont adaptés aux spécificités du bâti ancien ;
- préciser que les objectifs de réduction des consommations d'énergie finale applicables aux bâtiments peuvent être modulées en fonction de contraintes relatives aux bâtiments anciens.
Afin de prendre en compte des exigences supplémentaires de respect des spécificités du bâti ancien lors de l'audit énergétique sans pour autant imposer des contraintes normatives et financières excessives aux propriétaires de ces biens, qui représentent un tiers du parc de logements, la rapporteure a proposé un amendement COM-9 de réécriture de l'article, déposé à l'identique par l'auteur, qui vise à :
- exiger des compétences supplémentaires spécifiques au bâti ancien, qui seront obligatoires pour réaliser l'audit énergétique règlementaire du bâti ancien présentant un intérêt patrimonial à partir du 1er janvier 2027 ;
- préciser que les propositions de travaux formulées par l'audit sont adaptées aux contraintes techniques, architecturales et patrimoniales pesant sur le bâtiment, notamment aux caractéristiques hygrothermiques des matériaux le composant, et garantissent une rénovation respectueuse du bâti ancien ;
- dans un souci de cohérence globale de la proposition de loi, tournée vers la rénovation énergétique des logements, éviter de modifier des dispositions applicables à tous les bâtiments, y compris neufs, qui sont concernés par d'autres règlementations thermiques et énergétiques.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - description brève
A. La réalisation d'un audit énergétique est obligatoire lors de la vente de certains logements
Lors de la vente d'une maison individuelle ou d'un logement non soumis au statut de la copropriété, la réalisation d'un audit énergétique est progressivement obligatoire26(*) :
- depuis le 1er avril 2023 pour les logements classés « F » ou « G » - cette date, initialement prévue au 1er janvier 2022, ayant été décalée à deux reprises27(*) ;
- depuis le 1er janvier 2025 pour les logements classés « E » ;
- à compter du 1er janvier 2034 pour les logements classés « D ».
Cet audit inclut des éléments portant sur l'estimation de la performance énergétique du logement et formule des propositions de travaux. Ces propositions présentent un parcours de travaux cohérent par étapes pour atteindre une rénovation énergétique performante dont la première permet au moins d'atteindre la classe E.
Lorsque cela est possible, ce parcours permet d'atteindre la classe B. Des dérogations sont néanmoins possibles si les caractéristiques techniques, architecturales, patrimoniales ou le coût des travaux ne permettent pas d'atteindre la rénovation performante, conformément au 17 bis de l'article L. 111-1 du code de la construction et de l'habitation.
À l'instar des DPE, les audits énergétiques sont transmis à l'Ademe28(*).
Cet audit est réalisé par un professionnel répondant à des conditions de qualification prévues par décret29(*). Il peut s'agir :
- d'un architecte ou d'une société ayant réalisé une formation dédiée ;
- d'un auditeur titulaire d'un signe de qualité (en l'occurrence, les bureaux d'études qualifiés « Audit énergétique Bâtiments tertiaires et collectifs » ou « Maison individuelle » selon les cas) ;
- d'un diagnostiqueur certifié pour l'audit énergétique30(*). Les diagnostiqueurs font donc l'objet d'une certification spécifique « Audit énergétique », distincte de celle du DPE.
En pratique, le recours à des bureaux d'études ou architectes reste minoritaire : 15,4 % des audits collectés sur la base de données de l'Ademe ont été réalisés par des bureaux d'études et environ 1 % par des architectes. Les ventes nécessitent des délais courts de réalisation des audits, plus favorables aux diagnostiqueurs.
Si cet audit énergétique règlementaire ne prend pas explicitement en compte les spécificités du bâti ancien, il est précisé que les recommandations de travaux qu'il formule doivent être compatibles avec les servitudes prévues par le code du patrimoine et présenter un coût qui n'est pas disproportionné par rapport à la valeur du bien. Cette analyse suppose donc une étude minimale des spécificités constructives et patrimoniales du bâtiment.
Outre cet audit règlementaire, une méthodologie d'audit énergétique et patrimonial est définie par une norme volontaire. Depuis juin 2017, la norme NF 16 883 fournit des lignes directrices pour l'évaluation de la performance énergétique des bâtiments présentant une valeur historique, architecturale ou culturelle. Néanmoins, l'audit énergétique et patrimonial défini par cette norme européenne cible davantage des bâtiments tertiaires que des bâtiments à usage d'habitation. En outre, les coûts et la complexité de cet audit, qui nécessitent une approche pluridisciplinaire approfondie, limitent son déploiement dans le secteur résidentiel.
B. La rénovation des bâtiments s'inscrit dans le cadre d'objectifs nationaux de politique énergétique
L'article L. 171-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit que la construction et la rénovation de bâtiments, quel que soit leur usage, contribuent à atteindre les objectifs de la politique nationale énergétique. Fixés à l'article L. 100-4 du code de l'énergie, ces objectifs incluent la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 % entre 1990 et 2030 ou encore la réduction de la consommation énergétique finale de 50 % en 2050 par rapport à 2012.
Ce même article prévoit notamment que la rénovation des bâtiments limite les consommations d'énergie et de ressources des bâtiments ainsi que leur impact sur le changement climatique.
Un décret en Conseil d'État fixe les résultats minimaux :
- de performance énergétique des bâtiments, évaluée en tenant compte du recours aux énergies renouvelables ;
- de limitation de l'impact du bâti sur le changement climatique en prenant en compte le stockage du carbone de l'atmosphère durant la vie du bâtiment ;
- de performance environnementale, évaluée au regard des émissions de gaz à effet de serre, de la consommation d'eau et de la production de déchets liées à la construction, à l'entretien, la rénovation et la démolition du bâtiment ainsi qu'au recours à des matériaux issus de ressources renouvelables et de l'incorporation des matériaux issus du recyclage.
Bien que les matériaux biosourcés ou géosourcés, représentatifs des matériaux traditionnels utilisés pour les bâtiments anciens ne soient pas mentionnés explicitement, la mention des objectifs ci-dessus conduit à la valoriser en pratique. D'abord, les matériaux biosourcés et géosourcés ont une empreinte environnementale relativement faible, en particulier lorsqu'ils sont locaux et peu transformés. Ensuite, les matériaux issus de ressources renouvelables, pris en compte dans les objectifs de performance environnementale fixés pour la construction et la rénovation de bâtiments, incluent les matériaux biosourcés et géosourcés.
C. Les bâtiments existants sont également soumis à des obligations de travaux d'isolation thermique
L'article L. 173-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit que lors de travaux importants de ravalement ou de réfection de toiture sur des bâtiments existants, quel que soit leur usage, des travaux d'isolation thermique sont réalisés. Des dérogations sont prévues dans le cas où cette isolation n'est pas réalisable techniquement ou juridiquement ou qu'il existe une disproportion manifeste entre ses avantages et ses inconvénients de nature économique, technique ou architecturale.
En pratique, la disproportion en matière architecturale est évaluée en fonction de l'impact visuel et structurel des travaux sur le bâti, notamment pour les bâtiments classés ou protégés.
II. Le dispositif envisagé - l'Instauration d'un audit énergétique et patrimonial et la valorisation des spécificités du bâti ancien pour l'atteinte d'objectifs de performance énergétique et environnementale des bâtiments
A. La transformation de l'audit énergétique règlementaire en un audit énergétique et patrimonial
Cet article vise à transformer l'audit énergétique règlementaire en un audit énergétique et patrimonial, réalisé, pour les bâtiments anciens, par un bureau d'étude agréé ou par un architecte, contrairement à l'audit énergétique règlementaire actuel qui peut également être réalisé, sous réserve de conditions de compétences, par des diagnostiqueurs certifiés.
L'article précise que les propositions de travaux formulées par l'audit énergétique, pour un bâtiment ancien, seront évaluées au regard des modifications et des incidences que lesdits travaux peuvent engendrer à la fois sur le comportement global du bâtiment et sur la valeur patrimoniale de ses composants afin de garantir une rénovation respectueuse du bâti.
B. La prise en compte des matériaux biosourcés, géosourcés et locaux dans les objectifs de performance énergétique et environnementale de la construction et de la rénovation
Cet article vise également à valoriser les matériaux biosourcés et géosourcés pour l'atteinte des objectifs généraux de performance énergétique, de limitation de l'impact sur le changement climatique et de performance environnementale de la construction et de la rénovation des bâtiments.
Il précise ainsi que le décret en Conseil d'État qui fixe les résultats minimaux à atteindre en matière de limitation de l'impact de la construction et de la rénovation des bâtiments sur le changement climatique prenne en compte le stockage du carbone tout au long du cycle de vie du bâtiment, « notamment grâce à l'utilisation de matériaux biosourcés ou géosourcés ».
De même, en ce qui concerne les résultats minimaux de performance environnementale précisés par ce même décret, il serait précisé que seraient pris en compte non seulement le recours à des matériaux issus de ressources renouvelables et l'incorporation de matériaux issus du recyclage, mais aussi de ressources « naturelles et locales telles que les matériaux biosourcés ou géosourcés. »
C. L'introduction de nouvelles exigences lors des travaux d'isolation des bâtis anciens
L'article 3 de la proposition de loi modifie également les obligations de travaux applicables à tous les bâtiments : l'article 173-1 du code de la construction et de l'habitation serait modifié pour préciser que dans le cas d'un bâtiment ancien, en cas d'importants travaux de ravalement ou de réfection de toiture, les travaux d'isolation thermique requièrent des matériaux et des techniques adaptés, préservant le comportement global du bâtiment, notamment ses qualités hygrothermiques et sa perméance à la vapeur d'eau ainsi que ses composants.
Les nouveaux équipements installés dans les bâtiments anciens devraient également respecter la qualité patrimoniale et les qualités hydrothermiques du bâtiment.
L'article introduit également, à l'article L. 174-1, la possibilité de moduler les objectifs de consommation d'énergie des bâtiments anciens - et pas seulement des logements - en fonction des spécificités introduites par l'article 2 de la présente proposition de loi concernant les critères d'évaluation et les modèles de calculs de performance énergétique adaptés au bâti ancien.
III. La position de la commission - renforcer les exigences à l'égard de l'audit du bâti ancien sans pour autant imposer des contraintes excessives aux propriétaires
A. L'audit énergétique et patrimonial : un dispositif potentiellement coûteux et source de complexité
La rapporteure n'est pas favorable à la transformation de l'audit énergétique règlementaire actuel en un audit énergétique et patrimonial pour tous les logements anciens.
D'abord, pour un motif de simplification normative : cet audit énergétique et patrimonial concernerait potentiellement un tiers du parc de logements, sans pour autant que cela ne soit justifié par des motifs patrimoniaux.
Ensuite, pour un motif financier : elle rappelle que le coût de l'audit énergétique, obligatoire depuis le 1er janvier 2025 pour les logements en monopropriété classés « E » ou moins performants, est bien souvent supporté par un particulier. Le fait d'imposer la réalisation de cet audit par un bureau d'études agréé ou un architecte ne ferait que renchérir son coût, et ce de manière injustifiée si le bâti ne présente pas un intérêt patrimonial ou architectural. En outre, restreindre le champ des professionnels pouvant réaliser cet audit laisse craindre une pénurie d'auditeurs, tant les diagnostiqueurs représentent aujourd'hui la majorité des auditeurs (85 %).
Enfin, l'audit règlementaire implique déjà une analyse des caractéristiques architecturales et patrimoniales du bien audité afin de proposer des scénarii de travaux adaptés.
En revanche, la rapporteure est favorable au renforcement de la formation des professionnels réalisant cet audit lorsqu'ils interviennent sur du bâti ancien.
Plusieurs programmes et certifications accessibles aux architectes, aux bureaux d'études ou autres entreprises valorisent la connaissance du bâti ancien, à l'instar du programme de formation aux économies d'énergies « FEEBAT » ou de la qualification « Audit énergétique » proposée par l'organisme de certification Qualibat.
En ce qui concerne les diagnostiqueurs réalisant l'audit, comme pour la certification DPE, des compétences spécifiques ont été récemment exigées pour renforcer la prise en compte des enjeux du bâti ancien ou patrimonial aux formations et examens. Si la rapporteure partage le souhait de renforcer encore davantage le niveau de connaissances du bâti ancien des diagnostiqueurs, elle n'estime pas pertinent de les exclure totalement de la réalisation de l'audit énergétique.
La rapporteure a donc proposé à la commission le dispositif suivant :
- l'actuel audit énergétique règlementaire serait conservé tel quel, mais seraient exigées des compétences spécifiques au bâti ancien, de la part des auditeurs réalisant l'audit énergétique règlementaire d'un logement ancien présentant un intérêt patrimonial, formulation permettant de retenir davantage de bâtiments que les seuls bâtiments protégés au titre du patrimoine. Le champ des bâtiments concerné serait délimité par décret ;
- afin de laisser un délai suffisant à la profession pour s'organiser et ne pas créer un goulet d'étranglement préjudiciable au respect des obligations d'audit énergétique, elle a proposé que cette obligation de certification spécifique au bâti ancien ne soit applicable qu'à compter du 1er janvier 2027 ;
- il serait précisé que les propositions de travaux formulées par l'audit sont évaluées au regard des modifications et des incidences que lesdits travaux peuvent engendrer à la fois sur le comportement global du bâtiment et sur la valeur patrimoniale de ses composants afin de garantir une rénovation respectueuse du bâti ancien.
B. La prise en compte du bâti ancien dans la rénovation énergétique ne doit pas interférer avec la règlementation environnementale applicable au neuf
La rapporteure relève que les alinéas 8 à 17 du présent article, qui visent à valoriser les produits biosourcés et géosourcés, ne concernent pas seulement les logements mais tous les bâtiments, quel que soit leur usage, et également les bâtiments neufs.
Elle estime qu'à des fins de clarté, il est préférable de centrer la proposition de loi sur ses dispositions visant à adapter la rénovation énergétique des logements aux spécificités du bâti ancien. Il s'agit également d'éviter d'interférer avec d'autres règlementations, notamment celle applicable aux bâtiments neufs (RE 2020) qui inclut déjà la promotion des matériaux bas-carbone. Elle a donc proposé à la commission de supprimer ces dispositions.
Tenant compte de tous ces éléments, la rapporteure a donc proposé à la commission un amendement COM-9 de réécriture de l'article, déposé à l'identique par l'auteur de la proposition de loi.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 4 (supprimé)
Prise en
compte de spécificités des bâtiments anciens
dans le
cadre de leur entretien
Cet article vise à adapter les règles relatives à la qualité sanitaire et à la qualité de l'air intérieur des bâtiments afin de prendre en compte les spécificités du bâtiment ancien.
Considérant que ces dispositions, de nature règlementaire, s'appliqueraient au-delà de la rénovation énergétique des logements, à tous les bâtiments, quel que soit leur usage, la rapporteure a proposé à la commission un amendement COM-10 de suppression, déposé à l'identique par l'auteur de la proposition de loi, afin de centrer cette dernière sur l'adaptation de la rénovation énergétique des logements aux spécificités du bâti ancien.
La commission a supprimé l'article.
I. La situation actuelle - les spécificités hygrométriques du bâti ancien ne sont pas explicitement prises en compte par le droit
Le code de la construction et de l'habitation prévoit que les travaux de rénovation énergétique des logements « veillent à assurer des conditions satisfaisantes de renouvellement de l'air »31(*).
Cependant, en vue de remplir cette exigence, la bonne utilisation des qualités hygrothermiques du bâti ancien est de la responsabilité du professionnel, notamment lors de la formulation des travaux.
Comme mentionné supra32(*), les matériaux utilisés pour la plupart des bâtiments anciens présentent des capacités hygroscopiques, c'est-à-dire qui tendent à absorber l'humidité de l'air. Associé à leur forte inertie thermique et à leur isolation naturelle, ces matériaux dotent en règle générale le bâti ancien de qualités hygrothermiques - associant température et taux d'humidité - qui sont propices au confort intérieur d'été ou d'hiver. En outre, leur fonctionnement en perspiration, qui permet une migration de la vapeur d'eau par les parois tout en conservant une étanchéité à l'air, les distinguent du bâti moderne en termes de renouvellement d'air et peut être source de pathologies importantes (condensation, moisissures) s'il n'est pas bien intégré lors des travaux.
En pratique, ces spécificités sont prises en compte par les diagnostiqueurs, par les architectes et par les bureaux d'études agréés qui réalisent les DPE ou les audits énergétiques, notamment au sein des recommandations de travaux qu'ils formulent.
Des architectes auditionnés par la rapporteure ont déploré que le plus souvent, les objectifs de la rénovation énergétique soient tournés vers l'étanchéité des parois extérieures et que l'hygrométrie ne soit prise en compte que par la mise en place d'une ventilation mécanique contrôlée (VMC).
II. Le dispositif envisagé - Des précisions relatives à la qualité sanitaire et la qualité de l'air intérieur spécifiques au bâti ancien
L'article 4 de la proposition de loi prévoit de modifier les dispositions du code de la construction et de l'habitation relatives aux objectifs généraux de qualité sanitaire des bâtiments et de qualité d'air intérieur.
En ce qui concerne les objectifs de qualité sanitaire applicables aux bâtiments, il serait précisé qu'une « attention particulière est portée à la gestion de l'hygrométrie des bâtiments anciens faisant l'objet d'une rénovation, afin d'éviter les problèmes d'humidité, de moisissures, de détérioration de la qualité de l'air et des structures engendrés par une rénovation inadaptée ».
En ce qui concerne la qualité de l'air intérieur, il serait précisé que l' « entretien spécifique des bâtiments anciens prend en compte les particularités constructives et le comportement physique de ce type de bâti afin de préserver les qualités d'origine du bâti et de ne pas affecter la santé des personnes. » De même, il serait précisé qu'en cas de travaux de remplacement des menuiseries extérieures d'un bâtiment ancien, ces derniers doivent garantir la « ventilation naturelle mais maîtrisée de l'air nécessaire et indispensable à ce type de bâti ».
III. La position de la commission - des dispositions de nature règlementaires dont la prise en compte doit plutôt être assurée par le biais d'une amélioration de la formation des professionnels
Bien que la rapporteure partage l'objectif de l'auteur de la proposition de loi, elle estime que sur la forme, les dispositions prévues par cet article relèvent essentiellement du domaine règlementaire et que sur le fond, il n'est pas opportun de prévoir des prescriptions générales applicables à tous les bâtiments.
En effet, les règles introduites par le présent article s'appliqueraient à tous les bâtiments, y compris les bâtiments neufs, quel que soit leur usage, au-delà des seuls logements pourtant visés par la présente proposition de loi.
En particulier, l'imposition d'une ventilation naturelle dans le cadre de toute rénovation d'un bâtiment ancien, quel que soit son usage, n'est pas opportune : de bonnes conditions de ventilation peuvent être atteintes via d'autres solutions.
Enfin, la rapporteure considère que les objectifs poursuivis, en particulier ceux de mieux prendre en compte l'hygrométrie des bâtiments anciens et de valoriser les travaux respectueux des menuiseries extérieures anciennes, sont satisfaits par les modifications adoptées par la commission aux articles 1er et 2 de la proposition de loi, qui modifient les définitions de la rénovation énergétique performante et précisent le contenu du DPE.
Elle a donc proposé l'adoption de l'amendement COM-10 de suppression, déposé à l'identique par l'auteur de la proposition de loi, à la commission, qui l'a adopté.
La commission a supprimé l'article.
Article 5
Majoration des aides en cas de
rénovation énergétique respectueuse du bâti ancien
ou impliquant l'acquisition et la pose de matériaux biosourcés et
géosourcés
Cet article vise à majorer le montant de Ma Prime Rénov' et du crédit d'impôt de transition écologique lorsque les dépenses financées concernent respectivement :
- des travaux en faveur d'une rénovation respectueuse d'un bâtiment ancien préconisée par l'audit énergétique et patrimonial instauré par l'article 3 de la présente proposition de loi ;
- l'acquisition et la pose de matériaux de construction biosourcés et géosourcés.
Tirant les conséquences du contexte actuel de tensions budgétaires, la rapporteure a privilégié l'engagement d'une réflexion sur les contours les plus pertinents d'un soutien spécifique à la rénovation énergétique des logements anciens.
Elle a donc proposé à la commission un amendement COM-11 de réécriture de l'article, déposé à l'identique par l'auteur de la proposition de loi, visant à demander au Gouvernement un rapport évaluant la possibilité et l'opportunité d'un tel soutien, en recourant à Ma Prime Rénov' ou aux certificats d'économies d'énergies, voire à un rapprochement entre les deux dispositifs.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - le surcoût éventuel de la rénovation énergétique du bâti ancien n'est pas soutenu spécifiquement par les aides existantes
A. Le surcoût des travaux de rénovation énergétique du bâti ancien n'a pas été évalué
Il existe peu de données concernant le surcoût lié à la rénovation énergétique d'un logement ancien. Néanmoins, peuvent être pris en compte comme des éléments renchérissant le coût des travaux :
- le coût de l'ingénierie, en raison du recours à un architecte, voire un architecte du patrimoine ainsi que de l'intégration de nombreuses thématiques à l'audit énergétique ;
- le manque de filières spécialisées : la faible disponibilité des matériaux biosourcés et des artisans limite le passage à l'échelle et renchérit le coût des travaux ;
- le retard d'entretien de ces bâtiments anciens peut nécessiter des interventions plus profondes que sur le seul aspect énergétique ;
- d'autres éléments liés à l'ancienneté du bâti peuvent générer des délais de réalisation plus longs : dimensions non-standardisées, modalités d'accès aux travaux complexes, découverte de nouveaux éléments en cours de chantiers, réalisation de fenêtres sur mesure, intégration de parois vitrées à des châssis existants...
En ce qui concerne l'Anah, ce surcoût peut approcher par exemple 5 % pour la rénovation énergétique d'une maison individuelle datant de l'après-guerre. En ce qui concerne les copropriétés, les surcoûts sont surtout liés à leur taille, plus réduite pour les bâtiments anciens.
Néanmoins, les surcoûts associés à la rénovation du bâti ancien protégé au titre du code du patrimoine sont de très loin supérieurs.
En outre, ces estimations ne prennent pas en compte les rénovations qui étaient si coûteuses ou complexes qu'elles ont été découragées, ni le coût des travaux complémentaires non éligibles aux aides de l'Anah.
B. Le bâti ancien est soutenu via le « droit commun » des aides et notamment par Ma Prime Rénov', principale aide à la rénovation énergétique
1. Le crédit d'impôt de transition énergétique a été supprimé
Le crédit d'impôt sur le revenu accordé au titre des dépenses d'efficacité énergétique et des investissements dans les énergies renouvelables, dit crédit d'impôt à la transition énergétique (CITE) a permis entre 2014 et 2019 aux ménages propriétaires ou locataires de déduire de leur impôt certaines dépenses liées à des travaux d'amélioration de la performance énergétique de leur résidence principale, si celle-ci est achevée depuis plus de deux ans.
Le Cite a été supprimé au 1er janvier 2021 et remplacé par Ma Prime Rénov'.
2. Ma Prime Rénov' : une tendance à l'harmonisation du parcours
Aucun parcours spécifique n'est prévu au niveau de Ma Prime Rénov' pour financer les travaux de rénovation énergétique du bâti ancien ou pour le financement de travaux entraînant l'usage de matériaux biosourcés ou géosourcés.
Néanmoins, la rénovation énergétique du bâti ancien est soutenue par l'Anah par le biais du « droit commun » des aides versées au titre de Ma Prime Rénov'.
Depuis le 1er janvier 2024, les plafonds des dépenses de travaux et les taux de subventions de Ma Prime Rénov' ont été relevés pour les rénovations d'ampleur de logements gagnant au moins deux classes au titre du DPE. Ces rénovations lourdes, pour lesquelles le reste à charge est de fait réduit, concernent bien souvent des bâtiments anciens ou patrimoniaux.
En 2024, l'Anah a également lancé une expérimentation sur trois ans visant à mieux soutenir les petites copropriétés anciennes - qui étaient peu nombreuses à être bénéficiaires de Ma Prime Rénov' Copropriétés. En effet, les contraintes techniques et patrimoniales de ces copropriétés, comme la préservation des façades historiques ou les systèmes de chauffage individuel existants, peuvent restreindre les options de travaux.
L'Anah a d'ailleurs indiqué à la rapporteure contribuer, avec les administrations compétentes, l'Ademe ou encore le Centre de ressources pour la réhabilitation du bâti ancien (Creba), à une démarche partenariale visant à prendre en compte les spécificités du bâti ancien, non seulement en renforçant la connaissance des accompagnateurs Rénov' à ces spécificités mais aussi par la démonstration des possibilités de rénovation énergétique du bâti ancien (à l'instar du palmarès Ré-habiter organisé en 2024 avec France villes et l'association nationale des architectes des bâtiments de France) ou encore par la réalisation d'analyses sur le surcoût de la rénovation.
3. Les certificats d'économie d'énergie ne ciblent pas non plus spécifiquement le bâti ancien
Les travaux de rénovation énergétique des logements peuvent également faire l'objet d'une aide financière via le dispositif des certificats d'économie d'énergie (CEE).
Les CEE sont attribués à des obligés, comme les fournisseurs d'énergie, sur lesquels repose une obligation de réalisation d'économies d'énergie selon des objectifs pluriannuels. Ils doivent donc réaliser des actions d'amélioration de la performance énergétique auprès des consommateurs finaux d'énergie, qu'ils soient des particuliers, des collectivités ou des professionnels.
Les travaux éligibles aux CEE, recensés au sein de fiches sectorielles, ne valorisent pas en tant que tels les travaux menés avec des matériaux biosourcés ni les travaux menés sur du bâti ancien.
II. Le dispositif envisagé - une majoration des aides en faveur de la rénovation du bâti ancien et de l'utilisation de matériaux biosourcés et géosourcés
Cet article vise à majorer le montant de Ma Prime Rénov' et du crédit d'impôt de transition écologique lorsque les dépenses financées sont respectivement :
- des travaux en faveur d'une rénovation respectueuse d'un bâtiment ancien préconisée par l'audit énergétique et patrimonial par ailleurs instauré par l'article 3 de la présente proposition de loi ;
- l'acquisition et la pose de matériaux de construction biosourcés et géosourcés.
III. La position de la commission - compte tenu du contexte budgétaire, privilégier une réflexion sur la possibilité et l'opportunité d'un soutien spécifique à la rénovation énergétique du bâti ancien
La rapporteure adopte une attitude prudente à l'égard de l'introduction d'un dispositif coûteux pour les finances publiques en l'absence d'évaluation.
En effet, comme souligné plus haut, le surcoût lié à la rénovation énergétique du bâti ancien n'a pas fait l'objet d'évaluation fiable.
En outre, le contexte budgétaire actuel, particulièrement tendu, l'est d'autant plus concernant Ma Prime Rénov' : ses crédits ont été réduits d'un milliard d'euros en 2025 par rapport à 2024 et ne seront probablement pas suffisants pour l'année 2025 compte tenu de la dynamique actuelle de l'enveloppe.
La rapporteure estime par ailleurs que l'encouragement des particuliers à recourir aux matériaux biosourcés et géosourcés doit plutôt provenir d'un soutien à la structuration de la filière qui permettrait de réduire les coûts d'assurances et de main-d'oeuvre liés à leur emploi.
Les acteurs du bâtiment ont en effet souligné que les assureurs, les bureaux d'études et les architectes ne maîtrisent pas toujours ces matériaux et privilégient d'autres matériaux, mieux connus.
À l'inverse, le soutien dans l'absolu à ces matériaux, qui ne sont pas une solution adaptée à tous les bâtis, n'est pas souhaitable.
La rapporteure a donc proposé à la commission l'adoption d'un amendement COM-11 de réécriture de l'article, déposé à l'identique par l'auteur de la proposition de loi, qui vise à tirer les conséquences du contexte budgétaire et engager une réflexion plus globale sur les modalités les plus pertinentes de soutien à la rénovation énergétique du bâti ancien, en demandant au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport à ce sujet, évaluant notamment les pistes d'évolutions des critères et des caractéristiques de Ma Prime Rénov' et des CEE, éventuellement en vue de leur harmonisation et du couplage des aides.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 6
Gage
Cet article consiste en un « gage » destiné à compenser les éventuelles conséquences financières pour l'État de la proposition de loi.
La commission a adopté l'article sans modification.
I. Le dispositif envisagé - Un gage destiné à compenser les éventuelles conséquences financières de la proposition de loi
L'article 6 consiste en un « gage » destiné à compenser les éventuelles conséquences financières résultant pour l'État de la proposition de loi.
II. La position de la commission - Un gage n'appelant pas d'observation ou de modification
La commission a adopté l'article sans modification.
* 1 Analyse détaillée du parc résidentiel existant. Agence Qualité Construction (AQC) - Programme RAGE - Règles de l'art Grenelle de l'environnement - 2012.
* 2 Capeb selon les données de l'Insee.
* 3 Synthèse bibliographique des études sur la rénovation thermique du bâti ancien à l'aide de matériaux isolants biosourcés, Cerema, direction territoriale Est, octobre 2016.
* 4 Arrêté du 2 juillet 2024 relatif au contenu et aux conditions d'attribution du label prévu à l'article D. 171-6 du code de la construction et de l'habitation.
* 5 Les logements dans les périmètres de protection patrimoniale, Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, février 2024 : 7 % dans un SPR, 3 % dans un périmètre délimité des abords des monuments historiques et 22 % dans les périmètres de 500 mètres autour des monuments historiques.
* 6 Rapport d'information au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication sur le patrimoine et la transition écologique, par Mme Sabine Drexler, Sénateur, déposé le 28 juin 2023.
* 7 Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
* 8 Article L. 126-28-1 du code de la construction et de l'habitation.
* 9 Au sens du 17° bis de l'article L. 111-1 du code de la construction et de l'habitation.
* 10 Article 2 de l'arrêté du 4 mai 2022 définissant pour la France métropolitaine le contenu de l'audit énergétique règlementaire.
* 11 Article 3 de l'arrêté du 4 mai 2022 définissant pour la France métropolitaine le contenu de l'audit énergétique règlementaire.
* 12 Sixième alinéa du 17°bis de l'article L. 111-1 du code de la construction et de l'habitation.
* 13 Article 2 de l'arrêté du 4 mai 2022 définissant pour la France métropolitaine le contenu de l'audit énergétique règlementaire.
* 14 Décret n° 2022-510 du 8 avril 2022 pris pour l'application des articles L. 111-1 et L. 126-32 du code de la construction et de l'habitation.
* 15 Prévu à l'article L. 650-1 du code du patrimoine.
* 16 Sites inscrits et classés mentionnés au chapitre Ier du titre IV du livre III du code de l'environnement.
* 17 Deuxième alinéa de l'article L. 126-28-1 du code de la construction et de l'habitation.
* 18 2° de l'article L. 111-1 du code de la construction et de l'habitation.
* 19 Article 1er de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement.
* 20 Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
* 21 Article L. 173-2 du même code.
* 22 Article L. 271-6 dudit code.
* 23 Arrêté du 20 juillet 2023.
* 24 Calcul de la consommation conventionnelle des logements.
* 25 Rapport d'information de Mme Drexler au nom de la commission de la culture sur le patrimoine et la transition écologique, rendu en juin 2023.
* 26 Article L. 126-28-1 du code de la construction et de l'habitation.
* 27 Communiqué du 17 décembre 2021 du ministère chargé du logement ; décret n° 2022-780 du 4 mai 2022 relatif à l'audit énergétique mentionné à l'article L. 126-28-1 du code de la construction et de l'habitation ; Décret n° 2022-1143 du 9 août 2022 modifiant le décret n° 2022-780 du 4 mai 2022 relatif à l'audit énergétique mentionné à l'article L. 126-28-1 du code de la construction et de l'habitation.
* 28 Article L. 126-32 du code de la construction et de l'habitation.
* 29 Décret n° 2022-780 du 4 mai 2022 relatif à l'audit énergétique.
* 30 Décret n° 2023-1219 du 20 décembre 2023 définissant le référentiel de compétences et les modalités de contrôle de ces compétences pour les diagnostiqueurs immobiliers en vue de la réalisation de l'audit énergétique mentionné à l'article L. 126-28-1 du code de la construction et de l'habitation.
* 31 17 bis de l'article L. 111-1 du code de la construction et de l'habitation.
* 32 Commentaire de l'article 1er de la présentation proposition de loi.