DEUXIÈME PARTIE
LE DÉTAIL DES CRÉDITS PAR PROGRAMME

I. LE PROGRAMME 165 « CONSEIL D'ÉTAT ET AUTRES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES » : UNE HAUSSE DU BUDGET DES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES, QUI MASQUE UNE STABILISATION DES EFFECTIFS DANS UN CONTEXTE DE PRESSION CONTENTIEUSE CROISSANTE

Les crédits demandés pour les juridictions administratives en 2025 s'élèvent à 516,2 millions d'euros en AE et à 604 millions d'euros en CP, soit une baisse des AE de 0,6 % et une hausse des CP de 3,5 % par rapport à 2024. Cette augmentation est tirée par la progression des dépenses de personnel (+ 21,6 millions d'euros) et, dans une moindre mesure, par la hausse des crédits d'investissement (+ 5 millions d'euros).

L'enjeu majeur de ce programme consiste en la mise en adéquation des crédits demandés avec la pression continue que connaissent les juridictions administratives compte tenu de la croissance du contentieux administratif et la volonté de rendre des décisions juridictionnelles dans des délais satisfaisants pour les justiciables, sans jamais nuire à la qualité des décisions rendues.

Le programme 165 concentre 67 % des crédits de la mission et est donc le plus important en volume.

Évolution des crédits par action du programme 165

(en millions d'euros et en %)

   

LFI 2024

PLF 2025

Évolution PLF 2025 / LFI 2024 (volume)

Évolution PLF 2025 / LFI 2024 (%)

FDC et ADP attendus en 2025

01 - Fonction juridictionnelle : Conseil d'État

AE

33,9

36

+ 2,1

+ 6,1 %

0,02

CP

33,9

36

+ 2,1

+ 6,1 %

0,02

02 - Fonction juridictionnelle : Cours administratives d'appel

AE

62,8

66,8

+ 4

+ 6,4 %

0,0

CP

62,8

66,8

+ 4

+ 6,4 %

0,0

03 - Fonction juridictionnelle : Tribunaux administratifs

AE

202,2

215,3

+ 13,1

+ 65, %

0,0

CP

202,2

215,3

+ 13,1

+ 6,5 %

0,0

04 - Fonction consultative

AE

17,5

18,1

+ 0,6

+ 3,1%

0,0

CP

17,5

18,1

+ 0,6

+ 3,1%

0,0

05 - Fonction études, expertise et services rendus aux administrations de l'État et des collectivités

AE

20,1

9,1

+ 11

- 54,8 %

0,0

CP

20,1

9,1

+ 11

- 58,2 %

0,0

06 - Soutien

AE

132,9

109,6

- 23,3

- 17,5 %

0,18

CP

197,2

197,3

+ 0,1

+ 0,1 %

0,18

07 - Cour nationale du droit d'asile

AE

49,6

52,1

+ 2,5

+ 5 %

0,0

CP

49,6

52,1

+ 2,5

+ 5 %

0,0

08 - Commission du contentieux du stationnement payant1(*)

AE

/

9,3

/

/

0,0

CP

/

9,3

/

/

0,0

Total programme 165

AE

519,1

516,2

- 2,9

- 0,6 %

0,2

CP

583,4

604

+ 20,6

+3,5 %

0,2

Dont hors CAS Pensions

 

470

483,3

+ 13,3

+ 2,9 %

 

FDC et ADP : fonds de concours et attributions de produits.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

A. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS LIÉE À LA RÉFORME INDEMNITAIRE DES MAGISTRATS ADMINISTRATIFS, AINSI QU'À LA POURSUITE DE PLUSIEURS PROJETS IMMOBILIERS MAJEURS

Les crédits de paiement demandés pour 2025 sont en hausse de 3,5 millions d'euros par rapport à 2023.

1. La dynamique de revalorisation indemnitaire des magistrats administratifs engagée depuis 2023 se poursuit, dans une logique d'alignement de leur rémunération avec le corps des administrateurs de l'État

Les dépenses de personnel pèsent fortement dans les crédits du programme 165, à l'instar de tous les autres programmes de la mission « Conseil et contrôle de l'État ». La hausse de ces dépenses est constante sur les dernières années.

Dans le projet de loi de finances pour l'année 2025, les crédits demandés pour les dépenses de personnel s'élèvent à 458,3 millions d'euros dont 120,3 millions d'euros au titre du compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions ». Ces dépenses de titre 2 représentent 75,9 % des crédits du programme et sont en augmentation de 4,9 % par rapport à 2024, malgré un schéma d'emploi neutre.

Ventilation par titre des crédits de paiement

(en millions d'euros)

 

LFI 2023

LFI 2024

PLF 2025

Hors titre 2

118,3

146,7

145,7

Dont dépenses de fonctionnement

81,9

86,3

80,25

Dont dépenses d'investissement

36,4

60,4

65,4

Titre 2 

406,7

436,7

458,3

Total

525

583,4

604

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

La revalorisation de la rémunération des magistrats administratifs constitue le principal facteur d'accroissement des dépenses de titre 2 sur les derniers exercices. Comme tous les fonctionnaires, les membres titulaires des juridictions administratives ont bénéficié de la revalorisation de 1,5 % du point d'indice de la fonction publique au 1er juillet 2023, pour un montant 1,64 million d'euros en année pleine.

L'évolution tendancielle des dépenses de personnel s'explique également par des mesures catégorielles, et notamment les revalorisations indemnitaire et indiciaire des magistrats administratifs rendues nécessaires par la réforme de l'encadrement supérieur de l'État. D'après les informations communiquées au rapporteur spécial par le Conseil d'État, une enveloppe de 8,8 millions est prévue en 2025 pour compléter ce mouvement de revalorisation et résorber en partie l'écart de rémunération entre les magistrats administratifs et les administrateurs de l'État. Cette mesure apparait justifiée pour préserver l'attractivité des juridictions administratives.

Un mouvement de revalorisation indemnitaire et indiciaire des magistrats
des juridictions administratives engagé dès 2022

L'arrêté du 22 avril 2022 a procédé à une revalorisation du traitement indemnitaire des magistrats administratifs, auparavant fixé par l'arrêté du 29 décembre 2009, avec une entrée en vigueur rétroactive au 1er janvier 2022. Près de 8,3 millions d'euros2(*) ont ainsi été ouverts en AE et en CP dans la loi n° 2022-1157 de finances rectificative pour 2022 du 16 août 2022 pour financer cette mesure.

Une refonte de la grille indiciaire est ensuite intervenue en 2023 avec le décret n° 2023-486 du 21 juin 2023 modifiant le statut des magistrats administratifs et le décret n° 2023-488 du même jour fixant le nouvel échelonnement indiciaire des trois grades de ce corps à compter du 1er juillet 2023.

En 2023, le coût sur six mois était estimé à 1,2 million d'euros et devrait ainsi s'élever à 2,4 millions d'euros en 2024 en année pleine. S'agissant des membres du Conseil d'État, leur revalorisation représente, en année pleine pour 2024, 0,63 million d'euros au titre de la revalorisation indiciaire et 0,42 million d'euros au titre de la revalorisation indemnitaire.

Le PLF pour 2025 prévoit une dotation de près de 8,8 millions d'euros au titre de la réforme indemnitaire des magistrats administratifs.

Source : commission des finances

2. Une baisse des dépenses hors titre 2, alors que l'année 2025 sera marquée par la poursuite de travaux immobiliers d'ampleur et d'investissements informatiques conséquents

Les crédits demandés pour couvrir les dépenses hors titre 2 s'élèvent à 145,7 millions d'euros en CP et 58 millions en AE, soit une baisse de 0,7 % des CP et une baisse de 29,6 % des AE.

L'action 06 Soutien comprend des dépenses de personnel du programme non affectées à d'autres actions et les dépenses de fonctionnement et d'investissement de l'ensemble du programme 165. Ainsi, tous les crédits de titre 3 et de titre 5 sont concentrés sur l'action 06.

a) Une hausse des dépenses d'investissement qui s'explique par la poursuite de plusieurs projets immobiliers majeurs en 2025

Les dépenses de titre 5 augmentent de 5 millions d'euros en CP par rapport à 2024, pour s'établir à 65,4 millions d'euros. Ces dépenses visent principalement à financer des travaux immobiliers liés aux opérations de relogement et des dépenses d'investissement informatique. À titre d'exemple, l'année 2025 sera marquée par le décaissement de 38,7 millions d'euros en CP pour le projet de relogement de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) et du tribunal administratif de Montreuil engagé en 2018.

La baisse des AE, de l'ordre de 58 %, résulte principalement de la budgétisation sur les exercices précédents des AE dédiées aux renouvellements de baux (immeuble Richelieu des services du Conseil d'État, immeuble Arborial et de la CNDA, tribunal administratif de Toulouse), de la revalorisation des opérations de relogement de la CNDA, des tribunaux administratifs de Montreuil et de Guyane, et des renouvellements des marchés d'énergie et fluide pour la juridiction administrative. L'engagement de ces dépenses sur l'exercice 2023 a fait mécaniquement baisser les prévisions d'AE en 2024, puis en 2025.

b) La baisse des crédits de titre 3 traduit les efforts menés par les juridictions administratives pour maîtriser leurs dépenses de fonctionnement

Les dépenses de fonctionnement sont en baisse de près de 7 % en 2025. Les juridictions administratives ont en effet engagé depuis plusieurs années une démarche de maîtrise de leurs dépenses de fonctionnement grâce à la renégociation de certains baux, la professionnalisation de l'achat public et la dématérialisation des procédures avec la mise en oeuvre de Télérecours.

En effet, la généralisation des téléprocédures a permis de réaliser des économies substantielles en matière de frais d'affranchissement. Ces économies sont apparues progressivement, tout au long du déploiement de l'application Télérecours depuis 2014, pour atteindre 5,3 millions d'euros en 2023.

Évolution des économies générées grâce aux téléprocédures
de 2018 à 2023

(en millions d'euros)

Année

2018

2019

2020

2021

2022

2023

Économies générées

3,90

4,6

3,86

5,04

5,02

5,28

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

En 2023, 203 766 requêtes ont été enregistrées via cette application devant les tribunaux administratifs, soit 78,8 % des entrées, ainsi que 29 519 requêtes devant les cours administratives d'appel, soit 92,7 % des entrées et 8 601 devant le Conseil d'État, soit 42 % des entrées.


* 1 Ces crédits étaient rattachés à l'action 5 « Fonction études, expertise et services rendus aux administrations de l'État et des collectivités » en LFI 2024.

* 2 Il s'agit du coût de la mesure en année pleine sur l'exercice 2022 et qui concerne 1 270 magistrats.

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