EXAMEN DES ARTICLES
TITRE
IER
RENFORCER LE PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE PRÉVENTION DE
LA PERTE D'AUTONOMIE
ET LUTTER CONTRE L'ISOLEMENT SOCIAL
Article
1er
Création d'une conférence nationale de l'autonomie
Cet article propose la création d'une conférence nationale de l'autonomie chargée d'assurer le pilotage national de la politique de prévention de la perte d'autonomie. Elle prévoit également l'intégration, au sein de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, d'un centre national de ressources probantes.
La commission a réécrit cet article afin de supprimer la conférence nationale de l'autonomie et de recentrer les missions du centre national de ressources probantes.
I - Le dispositif proposé
A. Le pilotage national de la politique de prévention de la perte d'autonomie
1. Le rôle de la CNSA
a) Les missions de la CNSA
La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), établissement public national à caractère administratif, a été instituée par la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie5(*). Avec la création de la branche autonomie de la sécurité sociale, elle est devenue la caisse centrale chargée de gérer cette cinquième branche6(*).
L'article L. 223-5 du code de la sécurité sociale dispose que la CNSA a notamment pour rôle de « contribuer, en assurant une répartition équitable sur le territoire national, au financement et au pilotage d'une politique de prévention de la perte d'autonomie et de lutte contre l'isolement ».
Les missions de la CNSA7(*)
La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie gère la branche autonomie de la sécurité sociale et, à cet effet, a pour rôle :
- de veiller à l'équilibre financier de cette branche ;
- de piloter et d'assurer l'animation et la coordination, dans le champ des politiques de soutien à l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, des acteurs participant à leur mise en oeuvre en vue de garantir l'équité, notamment territoriale, la qualité et l'efficience de l'accompagnement des personnes concernées ;
- de contribuer, en assurant une répartition équitable sur le territoire national, au financement et au pilotage d'une politique de prévention de la perte d'autonomie et de lutte contre l'isolement, des établissements et services sociaux et médico-sociaux, des prestations individuelles d'aide à l'autonomie et des dispositifs mis en place aux niveaux national ou local en faveur de l'autonomie et des proches aidants et de contribuer au financement de l'investissement dans le champ du soutien à l'autonomie ;
- de contribuer à l'information des personnes âgées, des personnes handicapées et de leurs proches aidants, notamment en créant des services numériques et en favorisant la mise en place de guichets uniques au niveau départemental permettant de faciliter leurs démarches administratives et le suivi personnalisé de leurs parcours ;
- de contribuer à la recherche et à l'innovation dans le champ du soutien à l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées ;
- de contribuer à la réflexion prospective sur les politiques de l'autonomie, leurs possibles adaptations territoriales et de proposer toute mesure visant à améliorer la couverture du risque, en prenant notamment en considération les inégalités liées au sexe afin d'élaborer des mesures correctives ;
- de contribuer à l'attractivité des métiers participant à l'accompagnement et au soutien à l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, notamment au travers de ses actions en faveur de la formation et de la professionnalisation des professionnels.
b) Le conseil de la CNSA
La CNSA est dotée d'un Conseil qui a la particularité d'être plus large que les conseils d'administration des autres caisses de sécurité sociale et de constituer une forme de « parlement de l'autonomie ». Il est en effet composé :
- de représentants des associations oeuvrant au niveau national en faveur des personnes handicapées et des personnes âgées ;
- de représentants des conseils départementaux ;
- de représentants des organisations syndicales et des organisations professionnelles d'employeurs représentatives ;
- de représentants de l'État ;
- d'un député et d'un sénateur ;
- de représentants des régimes de base d'assurance maladie et d'assurance vieillesse ;
- de personnalités et de représentants d'institutions choisis à raison de leur qualification dans les domaines de compétence de la CNSA8(*).
Ce Conseil détermine, par ses délibérations, les orientations de la convention d'objectifs et de gestion (COG) de la branche autonomie, les objectifs à poursuivre, notamment dans le cadre des conventions avec les départements, pour garantir l'égalité des pratiques d'évaluation individuelle des besoins et améliorer la qualité des services rendus aux personnes handicapées et aux personnes âgées dépendantes, les principes selon lesquels doit être réparti l'objectif de dépenses pour le financement des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS) ainsi que les orientations des rapports de la CNSA avec les autres institutions et organismes, nationaux ou étrangers, qui oeuvrent dans son champ de compétence.
2. La coordination des conférences des financeurs
La loi « ASV » du 28 décembre 20159(*) a mis en place, dans chaque département, une conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie10(*).
Afin de coordonner au plan national l'action de ces instances, un comité de pilotage (Copil) a été mis en place en associant notamment la CNSA, la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav), les caisses d'assurance retraite et de santé au travail (Carsat) et des représentants des départements.
Lors de son audition devant la commission des affaires sociales, la directrice de la CNSA, Virginie Magnant, a indiqué que « cette instance, technique, a simplement vocation à coordonner le soutien apporté aux acteurs territoriaux des conférences des financeurs. Elle a notamment contribué à doter ces conférences de méthodes leur permettant de définir des programmes concertés de prévention de la perte d'autonomie, ainsi que d'outils d'évaluation. Toutefois, sa composition l'empêche de jouer le rôle d'une véritable instance de pilotage de la politique de prévention de la perte d'autonomie. »11(*)
3. La préfiguration d'un centre national de ressources et de preuves
La CNSA s'est vue confier, dans le cadre de sa COG 2022-2026, la responsabilité de préfigurer et mettre en place un « centre de ressources et de preuves dédié à la prévention de la perte d'autonomie » tel que prévu par la stratégie nationale « Vieillir en bonne santé 2020-2022 ».
Inspiré du modèle britannique des « What Work Centres », ce centre vise à étayer l'action publique en mobilisant et en rendant accessibles des conclusions tirées de la recherche, ou « données probantes »12(*). Son champ d'intervention prioritaire concerne les actions collectives de prévention financées dans le cadre des conférences des financeurs13(*).
Comme l'a indiqué la CNSA lors de son audition devant la commission, la mission de préfiguration de ce centre a été installée à la fin de l'année 2022, puis il a constitué sa gouvernance, commencé à recruter et noué des partenariats avec les gérontopôles dans le courant de l'année 202314(*).
En 2022, le budget dédié à cette structure s'élevait à 3,8 millions d'euros15(*).
Les « What Works Centres »16(*)
Au Royaume-Uni, les What Works Centres sont des structures dédiées au recueil et au transfert de la connaissance - notamment des évaluations d'impact de pratiques de terrain - dans différents champs de l'action publique.
Ces centres ont eu pour modèle le National Institute for Health and Clinical Excellence (NICE), fondé en 1999. Grâce à ses méthodes rigoureuses et à son influence sur les pratiques médicales, le NICE est devenu un pionnier de la politique de santé fondée sur la preuve.
À partir de 2011, six nouveaux centres inspirés de ce modèle ont été créés dans divers domaines :
- l'éducation des enfants défavorisés (Education Endowment Foundation) ;
- la prévention précoce (Early Intervention Foundation) ;
- le développement économique local (What Works Centre for local economic growth) ;
- la prévention de la criminalité (What Works Centre for crime reduction) ;
- la promotion du bien-être (What Works Centre for Wellbeing) ;
- l'amélioration de la qualité de vie des personnes vieillissantes (Centre for Ageing Better).
Deux centres visent aussi la territorialisation de cette approche, au niveau de deux des nations du Royaume-Uni : l'Écosse (What Works Scotland) et le Pays de Galles (Public Policy Institute for Wales).
B. La proposition de formaliser une coordination nationale
1. La création de la conférence nationale de l'autonomie
Le 1° de l'article 1er tend à créer, dans un nouvel article L. 233-1 A du code de l'action sociale et des familles, une conférence nationale de l'autonomie chargée d'assurer le pilotage national de la politique de prévention de la perte d'autonomie.
Cette instance serait chargée de définir, dans le cadre d'un plan pluriannuel, les axes prioritaires pour l'élaboration des programmes coordonnés de financement des conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie17(*).
La composition de la conférence nationale de l'autonomie serait fixée par décret.
2. La création d'un centre national de preuves
La conférence s'appuierait sur un centre national de preuves de prévention de la perte d'autonomie et de ressources gérontologiques. Il s'agit de pérenniser le centre qui fait l'objet d'une mission de préfiguration par la CNSA (cf. supra).
Piloté par la CNSA, celui-ci évaluerait et labelliserait les équipements et aides techniques individuelles favorisant le soutien à domicile ou la prévention de la perte d'autonomie en établissement.
3. L'ajustement des dispositions relatives aux conférences des financeurs
Le a du 3° vise à articuler l'action des conférences des financeurs avec le rôle de la conférence nationale de l'autonomie en précisant que les programmes coordonnés de financements sont définis dans le respect des axes prioritaires du plan pluriannuel établi par la conférence nationale de l'autonomie.
Le b du 3° rattache l'axe d'amélioration de l'accès aux équipements et aides techniques individuelles des programmes coordonnées de financement à l'action du centre national de preuves en matière d'évaluation et de labellisation de ces matériels.
En outre, il tend à compléter cet axe en mentionnant la mise en place de plateformes de location parmi les dispositifs pouvant être financés.
Le c du 3° vise à mettre à jour une référence aux services autonomie à domicile.
Enfin, le 2° opère une coordination au sein du code de l'action sociale et des familles en créant une section consacrée à la conférence des financeurs comprenant les articles L. 233-1 à L. 233-6.
II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
A. Les modifications adoptées en commission
À l'Assemblée nationale, la commission des affaires sociales a adopté deux amendements de Cyrille Isaac-Sibille (Démocrates) tendant à :
- confier au ministre chargé de la politique de prévention de la perte d'autonomie la présidence de la conférence nationale de l'autonomie ;
- renommer le centre national de preuves de prévention de la perte d'autonomie et de ressources gérontologiques en « centre national de ressources probantes ».
À l'initiative de François Gernigon (Horizons), la commission a précisé que la conférence nationale de l'autonomie assure également le suivi et l'évaluation de la mise en oeuvre du plan pluriannuel dans les conférences des financeurs.
Par ailleurs, elle a adopté quatre amendements identiques de Yannick Neuder (Les Républicains), Laurent Panifous (LIOT), Sébastien Peytavie (Écologiste) et d'Anne Bergantz (Démocrates) afin d'ajouter un nouvel axe aux programmes coordonnés de financement des conférences des financeurs relatif au développement d'actions de lutte contre l'isolement des personnes âgées (d du 3°).
Enfin, la commission a adopté deux amendements rédactionnels de la rapporteure Laurence Cristol et de Cyrille Isaac-Sibille.
B. Les modifications adoptées en séance publique
1. L'ajout de précisions concernant les missions et le fonctionnement de la conférence nationale de l'autonomie et du centre de ressources probantes
En séance publique, les députés ont adopté un amendement de Cyrille Isaac-Sibille tendant à préciser les missions de la conférence nationale de l'autonomie et celles du centre de ressources probantes.
La conférence nationale serait ainsi chargée :
- de fixer les priorités de la politique de prévention et d'accompagnement de la perte d'autonomie et les indicateurs permettant de l'évaluer ;
- de coordonner les acteurs impliqués dans la politique de prévention et d'accompagnement de la perte d'autonomie ainsi que les stratégies de communication des politiques publiques en faveur de l'autonomie et contre l'âgisme.
Il est précisé que la conférence nationale s'appuierait notamment sur la CNSA pour la déclinaison de cette politique.
Quant au centre de ressources probantes, il serait également chargé :
- de capitaliser et de diffuser les actions de prévention de la perte d'autonomie ;
- d'élaborer des référentiels d'actions et de bonnes pratiques.
L'Assemblée nationale a également adopté un amendement de Paul Christophe (Horizons) afin de confier à la conférence nationale de l'autonomie une mission de sensibilisation à la « prévention primaire pour le bien-vieillir ».
À l'initiative de Jérôme Guedj (Socialistes), elle a précisé que la conférence nationale se réunirait au moins une fois par an.
2. Des modifications concernant les conférences des financeurs
Deux amendements identiques de Thibaut Bazin (Les Républicains) et de Martine Étienne (La France insoumise) ont supprimé la référence, ajoutée en commission, à la mise en place de plateformes de location parmi les dispositifs pouvant être financés par les conférences des financeurs au titre de l'amélioration de l'accès aux équipements et aides techniques individuelles.
L'Assemblée nationale a également adopté un amendement de Stéphanie Rist (Renaissance) précisant que les programmes coordonnés de financement des conférences des financeurs doivent être définis en lien avec le gérontopôle compétent18(*) (aa du 3°).
L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.
III - La position de la commission : recentrer l'article sur la création du centre national de ressources probantes
De manière symptomatique de l'improvisation dans laquelle cette proposition de loi a été rédigée, cet article est pour une large part incompatible avec les dispositions d'autres articles du texte, notamment l'article 1er bis A19(*).
Si la politique de l'autonomie souffre d'un défaut de coordination au niveau territorial, force est de constater que la mise en place d'une conférence nationale de l'autonomie, bien qu'elle fasse l'objet de l'article 1er de la proposition de loi, n'a pas été mentionnée au cours des auditions menées par les rapporteurs comme un apport significatif du texte. Cette instance pourrait au contraire complexifier inutilement le paysage.
En revanche, la création d'un centre national de ressources probantes au sein de la CNSA présente l'intérêt de promouvoir une culture de l'expérimentation sociale et de l'évaluation d'impact. Toutefois, lors de son audition par la commission des affaires sociales, Virginie Magnant, directrice de la CNSA, a émis des réserves sur la mission de labellisation des aides techniques prévue par le texte, considérant que cette mission représenterait une charge importante, nécessitant une trentaine d'ETP supplémentaires pour le centre, et invoquant un manque de légitimité de la caisse sur ce sujet20(*).
À l'initiative des rapporteurs, la commission a donc adopté un amendement COM-142 supprimant la conférence nationale de l'autonomie ainsi que les dispositions de l'article 1er relatives aux conférences des financeurs.
En conséquence, l'amendement rapatrie au sein du code de la sécurité sociale, avec les dispositions relatives à la CNSA, la création en son sein du centre national de ressources probantes. Il supprime enfin la mission de labellisation des aides techniques de ce centre.
La commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article
1er bis A
Création du service public départemental
de l'autonomie
Cet article, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, vise à créer dans chaque département un service public départemental de l'autonomie (SPDA) chargé de coordonner les services et les aides au bénéfice des personnes âgées et des personnes handicapées et d'assurer la continuité des parcours.
La commission a modifié cet article afin, notamment, de préciser les objectifs et les missions du SPDA et de prévoir la possibilité d'un pilotage à l'échelle infra-départementale.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale : une refonte de la gouvernance et de l'organisation territoriale des politiques d'autonomie
A. La coordination encore inaboutie des politiques de l'autonomie
1. La mise en place de dispositifs de coordination
a) Les conférences des financeurs
Les conférences départementales des financeurs ont été créés par la loi « ASV » du 28 décembre 201521(*).
Dans chaque département, la conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées établit un diagnostic des besoins des personnes âgées de 60 ans et plus résidant sur le territoire, recense les initiatives locales et définit un programme coordonné de financement des actions individuelles et collectives de prévention. Les financements alloués interviennent en complément des prestations légales ou réglementaires. Le diagnostic est établi à partir des besoins recensés, notamment, par le schéma relatif aux personnes en perte d'autonomie et par le projet régional de santé22(*).
Le programme coordonné de financement défini par la conférence doit répondre à cinq objectifs :
- l'amélioration de l'accès aux équipements et aux aides techniques individuelles favorisant le soutien à domicile, notamment par la promotion de modes innovants d'achat et de mise à disposition ;
- l'attribution du « forfait autonomie » aux résidences autonomie23(*) ;
- la coordination et l'appui des actions de prévention mises en oeuvre par les services autonomie à domicile intervenant auprès des personnes âgées ;
- le soutien aux actions d'accompagnement des proches aidants des personnes âgées en perte d'autonomie ;
- le développement d'autres actions collectives de prévention.
La conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie
Source : Commission des affaires sociales du Sénat
La conférence des financeurs est présidée par le président du conseil départemental, et le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) ou son représentant en assure la vice-présidence. En cas de partage égal des voix, le président a voix prépondérante.
Réunissant les personnes physiques ou morales qui contribuent au financement d'actions entrant dans son champ de compétence, la conférence des financeurs comporte des représentants24(*) :
- du département et, sur décision de leur assemblée délibérante, d'autres collectivités territoriales et d'établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ;
- de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) dans le département et de l'agence régionale de santé (ARS) ;
- des régimes de base d'assurance vieillesse et d'assurance maladie et des fédérations d'institutions de retraite complémentaire ;
- des organismes régis par le code de la mutualité.
Toute autre personne physique ou morale concernée par les politiques de prévention de la perte d'autonomie peut y participer, sous réserve de l'accord de la majorité des membres de droit.
La conférence départementale des financeurs est compétente sur le territoire de la métropole créée sur le ressort départemental lorsque celle-ci exerce les compétences relatives aux personnes âgées. Elle est alors dénommée « conférence départementale-métropolitaine de la prévention de la perte d'autonomie », comporte des représentants de la métropole et est présidée par le président du conseil de la métropole25(*).
Le périmètre d'intervention de la conférence des financeurs a été élargi par la loi « ELAN » du 23 novembre 2018 au financement de l'habitat inclusif26(*). Lorsqu'elle intervient dans ce domaine, elle est alors dénommée « conférence des financeurs de l'habitat inclusif pour les personnes handicapées et les personnes âgées »27(*).
Lorsqu'elle se réunit dans cette formation, la composition de la conférence des financeurs est complétée par des représentants des services départementaux de l'État compétents en matière d'habitat et de cohésion sociale28(*).
Elle recense les initiatives locales et définit un programme coordonné de financement de l'habitat inclusif, dont le financement par le forfait habitat inclusif29(*), en s'appuyant sur les diagnostics territoriaux existants et partagés entre les acteurs concernés.
Les concours de la CNSA aux départements contribuent au financement des dépenses de la conférence des financeurs30(*).
Les dépenses relatives à l'amélioration de l'accès aux équipements et aux aides techniques individuelles ainsi que celles relatives au développement d'autres actions collectives de prévention bénéficient, pour au moins 40 % de leur montant, à des personnes ne remplissant pas les conditions de perte d'autonomie mentionnées à l'article L. 232-2 du code de l'action sociale et des familles. Elles sont gérées par le département, qui peut déléguer cette gestion par convention à l'un des membres de la conférence des financeurs suivant des modalités fixées par décret.
Les aides individuelles accordées dans le cadre des actions visant à favoriser le soutien à domicile et financées par le département par le concours correspondant aux autres actions de prévention doivent bénéficier aux personnes remplissant des conditions de ressources variables selon la zone géographique de résidence et définies par décret. Cette règle s'applique également aux financements complémentaires alloués par d'autres membres de la conférence des financeurs.
Le président du conseil départemental transmet à la CNSA et aux commissions de coordination des politiques publiques de santé, au plus tard le 30 juin de chaque année, un rapport d'activité et les données nécessaires au suivi de l'activité de la conférence des financeurs, qui comportent des indicateurs présentés par sexe31(*).
En 2022, d'après la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), les membres des conférences des financeurs ont financé plus 415 000 aides et actions de prévention pour un montant de plus de 108 millions d'euros (contre 95 millions en 2021 et 81 millions en 2020). Les concours versés par la CNSA, qui s'ajoutent à ces montants, ont été mobilisés à hauteur de 152 millions d'euros en 2022 (après 147,4 millions d'euros en 2021 et 144,8 millions d'euros en 2020) pour financer près de 198 000 aides et actions. Les concours de la CNSA ont ainsi représenté 58,3 % des financements en 2022 alors que cette part était de 64 % en 2019, ce qui montre leur effet incitatif sur les dépenses des autres financeurs.
Selon la DGCS, les inégalités territoriales restent toutefois importantes : l'effort de prévention total par habitant de 60 ans et plus s'échelonnait entre les départements de 2,3 euros à 15,2 euros en 2021.
b) Les dispositifs d'appui à la coordination des parcours de santé complexes
La loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé32(*) a créé un dispositif d'appui à la coordination (DAC) pour les professionnels de santé, sociaux et médico-sociaux en vue de la coordination des parcours de santé qu'ils estiment complexes, quels que soient l'âge, l'autonomie, ou la pathologie de la personne, afin d'améliorer le service rendu à la population et de concourir à la structuration des parcours de santé. Ils ont vocation à intégrer l'ensemble des dispositifs de coordination existants :
- les réseaux de santé ;
- les « MAIA » (méthode d'action pour l'intégration des services d'aide et de soins dans le champ de l'autonomie) ;
- les plateformes territoriales d'appui (PTA) ;
- les coordinations territoriales d'appui (CTA) de l'expérimentation du parcours de santé des personnes âgées en risque de perte d'autonomie (PAERPA).
Les centres locaux d'information et de coordination (Clic) peuvent également rejoindre ce dispositif sur décision du conseil départemental.
Les DAC ont trois missions principales :
- en lien avec le médecin traitant, assurer la réponse globale aux demandes d'appui des professionnels ;
- contribuer, avec d'autres acteurs et de façon coordonnée, à la réponse aux besoins des personnes et de leurs aidants en matière d'accueil, de repérage des situations à risque, d'information, de conseils, d'orientation, de mise en relation et d'accompagnement ;
- participer à la coordination territoriale qui concourt à la structuration des parcours de santé33(*).
La direction générale de l'offre de soins (DGOS) recensait 132 DAC en novembre 2022, représentant 4 414 équivalents temps plein (ETP). 55 % étaient des dispositifs départementaux et 38 % des dispositifs infra-départementaux34(*).
Les MAIA
La méthode d'action pour l'intégration des services d'aide et de soins dans le champ de l'autonomie (MAIA) est une méthode qui associe tous les acteurs engagés dans l'accompagnement des personnes âgées de 60 ans et plus en perte d'autonomie et de leurs aidants dans une démarche d'intégration des services d'aide et de soins.
Elle vise à apporter une réponse décloisonnée, harmonisée, complète et adaptée aux besoins de la personne âgée (accueil, information, orientation et mise en place de soins, d'aides ou de prestations), quelle que soit la structure à laquelle elle s'adresse.
Elle repose sur la concertation entre les acteurs, un guichet intégré et un suivi intensif au long cours des situations par un gestionnaire de cas.
A l'issue de son déploiement sur le territoire, entre 2011 et 2016, la MAIA comptait, au 1er janvier 2017, 352 dispositifs couvrant 98 % du territoire français, financés à hauteur de 98,6 millions d'euros par la CNSA35(*).
2. Les appels à la création d'un service public territorial de l'autonomie
a) La mission Libault
En décembre 2020, le Gouvernement a confié à Dominique Libault, qui avait piloté la concertation « Grand âge et autonomie » en 2019, une mission à visée opérationnelle centrée sur trois priorités :
- proposer une méthode de généralisation d'un point d'entrée clairement identifié pour les personnes en perte d'autonomie ;
- formaliser la bonne articulation entre les dispositifs de coordination et les dispositifs d'accompagnement de la personne âgée ;
- créer et animer un comité « autonomie et parcours de soins ».
Selon le rapport remis par Dominique Libault en mars 2022, intitulé « Vers un service public territorial de l'autonomie », une partie des difficultés mises en avant par les usagers tient au cloisonnement historique entre d'une part, les politiques d'accompagnement social et médico-social des personnes âgées et en situation de handicap et, d'autre part, les politiques de prise en charge des soins.
Le rapport plaide pour la mise en place, dans tous les départements, d'un véritable service public territorial de l'autonomie (SPTA) ayant pour objectif de « créer les conditions d'un rassemblement des acteurs de l'autonomie, institutionnels et professionnels des structures sanitaire, sociale et médico-sociale existantes, dans un ensemble cohérent, articulé et interdépendant, pour aboutir à une meilleure qualité d'accompagnement de la personne âgée et en situation de handicap ainsi que de ses aidants, que celle obtenue par les acteurs de manière individuelle et/ou sectorielle ».
Ce SPTA s'appuierait sur un guichet unique pouvant disposer de plusieurs points de proximité sur le territoire.
Il assurerait un socle minimum de quatre types d'actions articulées entre elles :
- l'accueil, l'information, l'orientation et la mise en relation des personnes âgées en perte d'autonomie, des personnes en situation de handicap et de leurs aidants ;
- l'instruction, la délivrance et la réévaluation des aides et des prestations ;
- l'appui aux solutions concrètes, comprenant aussi bien les aides et appuis, au profit des professionnels des secteurs social, médico-social, sanitaire ou autres, à la gestion concrète, au suivi et à l'accompagnement dans la durée de l'ensemble des personnes, que la mobilisation de l'ensemble des acteurs institutionnels et associatifs de droit commun pour proposer une réponse concrète globale et inclusive ;
- les actions de prévention, de repérage et d'« aller-vers ».
Le rapport recommande la mise en place d'une gouvernance décloisonnée et simplifiée autour d'une conférence territoriale de l'autonomie. Dans ce cadre, la gouvernance du SPTA serait exercée conjointement par le conseil départemental et l'ARS.
b) Le CNR « bien vieillir »
Le volet « bien vieillir » du Conseil national de la refondation (CNR), lancé le 11 octobre 2022, s'est terminé par un séminaire national de restitution le 4 avril 2023.
Parmi les mesures proposées, et retenues par le ministre des solidarités, figure la création d'un service public territorial de l'autonomie « ayant pour objet d'apporter une réponse globale et inclusive en mobilisant les acteurs des politiques publiques de droit commun dans une logique de garantie de citoyenneté »36(*).
B. La mise en place d'une coordination unifiée
Cet article a été inséré en séance publique à l'Assemblée nationale par un amendement du Gouvernement, modifié par un sous-amendement de Thibaut Bazin (Les Républicains), deux sous-amendements de Cyrille Isaac-Sibille (Démocrates), un sous-amendement de Jérôme Guedj (Socialistes et apparentés - NUPES) et quatre sous-amendements de la rapporteure Laurence Cristol.
1. La création d'un service public départemental de l'autonomie37(*)
Le 1° du I tend à compléter le chapitre IX du titre IV du livre Ier du code de l'action sociale et des familles d'une section 3 intitulée : « Service public départemental de l'autonomie ».
Il prévoit, dans un nouvel article L. 149-5, la mise en place, dans chaque département ou chaque collectivité exerçant les compétences des départements, d'un service public départemental de l'autonomie (SPDA). Celui-ci aurait pour objectif de faciliter les démarches des personnes âgées, des personnes handicapées et des proches aidants en garantissant que les services et les aides dont ils bénéficient soient coordonnés et que la continuité de leur parcours soit assurée, dans le respect de leur volonté. À cet effet, ses membres coordonneraient leurs actions respectives et transmettraient les informations nécessaires aux demandes des personnes, quel que soit le service qu'elles sollicitent en première intention.
a) Les missions du service public départemental de l'autonomie
Ce SPDA exercerait les quatre missions suivantes, dans le respect des compétences respectives de ses membres :
- réaliser l'accueil, l'information, l'orientation des personnes âgées, des personnes handicapées et des proches aidants, et apporter à leurs demandes, ainsi qu'à celles des professionnels concernés, une réponse complète et coordonnée afin de favoriser un égal accès au service et une coordination dans l'accompagnement et les actions entreprises ;
- s'assurer de la réalisation de l'instruction, de l'attribution et de la révision des droits des personnes âgées et handicapées par les services qui en ont la charge dans le respect des délais légaux ;
- assister les professionnels des secteurs social, médico-social et sanitaire intervenant auprès des bénéficiaires du SPDA dans l'élaboration de réponses globales et adaptées aux besoins de chaque personne ;
- diffuser, planifier et réaliser des actions d'information et de sensibilisation aux démarches de prévention individuelle, des offres de prévention collective ainsi que des actions de repérage et d'une démarche volontaire pour aller vers les personnes en situation de handicap fragiles et les personnes vulnérables âgées. Ces actions et ces offres seraient évaluées et fournies par le centre national de ressources probantes créé par l'article 1er de la présente proposition de loi38(*).
Pour l'exercice de ces missions, le SPDA devrait respecter un cahier des charges national, fixé par arrêté des ministres chargés de la santé, des personnes âgées et des personnes handicapées, qui préciserait notamment les modalités de la participation de ses membres. Ce cahier des charges préciserait également le socle commun des missions assumées par le SPDA et définirait un référentiel de qualité de service. Il pourrait faire l'objet d'adaptations dans les départements et collectivités d'outre-mer.
b) La composition du service public départemental de l'autonomie
Dans un nouvel article L. 149-6, seraient mentionnées les personnes assurant conjointement le SPDA :
- les départements, qui en assureraient le pilotage, les communes et leurs groupements ainsi que leurs établissements publics ;
- les agences régionales de santé (ARS) ;
- les rectorats d'académie ;
- les services de l'État chargés de l'emploi et de l'égalité professionnelle, l'opérateur France Travail (ex-Pôle emploi), l'Afpa et l'Unédic ;
- certains établissements et services sociaux et médico-sociaux : établissements et services d'accompagnement par le travail (Ésat) ; établissements de réadaptation et de préorientation professionnelle (ESRP et ESPO) ; établissements et services qui accueillent ou aident à domicile des personnes âgées ; établissements et services qui accueillent ou aident à domicile des personnes handicapées ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, ou bien qui leur assurent un accompagnement médico-social en milieu ouvert ; centres de ressources, centres d'information et de coordination ou centres prestataires de services de proximité ; services mettant en oeuvre les mesures de protection des majeurs ; services mettant en oeuvre les mesures judiciaires d'aide à la gestion du budget familial ;
- les établissements publics de santé ;
- les dispositifs d'appui à la coordination des parcours de santé complexes (DAC) ;
- les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ;
- les organismes locaux et régionaux de sécurité sociale ;
- les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et maisons départementales de l'autonomie (MDA) ;
- les maisons France services.
Ces organismes et services partageraient les informations strictement nécessaires à l'accomplissement des missions du SPDA dans les conditions fixées par un décret pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) (nouvel article L. 149-9).
c) La gouvernance du service public départemental de l'autonomie
La conférence territoriale de l'autonomie
De nouveaux articles L. 149-7, L. 149-8, L. 149-10 et L. 149-11 du code de l'action sociale et des familles institueraient dans chaque département une conférence territoriale de l'autonomie. Celle-ci serait chargée :
- de coordonner l'action des membres du SPDA. À cette fin, elle élaborerait un programme d'actions annuel déclinant, en fonction des besoins du territoire, les objectifs à atteindre fixés par la conférence nationale de l'autonomie ainsi que les moyens et contributions respectifs des membres. Elle veillerait au respect du cahier des charges du SPDA ;
- d'allouer des financements pour prévenir la perte d'autonomie et pour soutenir le développement de l'habitat inclusif.
La conférence territoriale de l'autonomie n'aurait pas la personnalité morale. Elle serait présidée par le président du conseil départemental et la vice-présidence en serait assurée par le directeur général de l'ARS. Elle serait composée d'une partie des membres du SPDA : départements et bloc communal, ARS, rectorats et service public de l'emploi. Toute autre personne physique ou morale concernée pourrait y participer sous réserve de l'accord de la majorité des membres de droit de la conférence.
Elle serait réunie au moins une fois par an, notamment pour consulter ses membres sur le programme d'actions annuel.
Le président de la conférence territoriale de l'autonomie présenterait chaque année, avant le 1er avril, le bilan du programme d'actions de l'année précédente et le programme d'actions pour l'année courante au conseil départemental de la citoyenneté et de l'autonomie (CDCA).
La commission des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie
Une formation spécifique de la conférence territoriale de l'autonomie, dénommée « commission des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie », reprendrait pour l'essentiel les attributions et le circuit financier de l'actuelle conférence des financeurs.
Elle réunirait de droit les départements, le bloc communal, les ARS et le service public de l'emploi, ainsi que des représentants :
- de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) dans le département ;
- des mutuelles ;
- des fédérations d'institutions de retraite complémentaire ;
- des organismes locaux et régionaux de sécurité sociale.
Toute autre personne concernée par les politiques de prévention de la perte d'autonomie pourrait y participer sous réserve de l'accord de la majorité des membres de droit.
Le président du conseil départemental en assurerait la présidence et aurait voix prépondérante en cas de partage égal des voix.
La commission des financeurs serait chargée d'établir un diagnostic des besoins des personnes âgées de soixante ans et plus résidant sur le territoire départemental, de recenser les initiatives locales et de définir un programme coordonné de financement des actions individuelles et collectives de prévention, dans le respect des axes prioritaires définis dans le plan pluriannuel établi par la conférence nationale de l'autonomie. Les financements alloués interviendraient en complément des prestations légales ou réglementaires. Le diagnostic serait établi à partir des besoins recensés, notamment, par le schéma relatif aux personnes en perte d'autonomie et par le projet régional de santé.
Le programme coordonné de financement défini par la commission des financeurs porterait sur les axes retracés dans le tableau ci-après.
Comparaison du contenu des programmes
coordonnés de financement
dans le cadre des actuelles
conférences des financeurs et des commissions des financeurs des
services publics départementaux de l'autonomie
Conférence des financeurs (droit existant) |
Commission des financeurs du SPDA (droit proposé) |
Amélioration de l'accès aux équipements et aux aides techniques individuelles favorisant le soutien à domicile, notamment par la promotion de modes innovants d'achat et de mise à disposition |
Amélioration de l'accès aux équipements et aux aides techniques individuelles favorisant le soutien à domicile, notamment ceux évalués et labellisés ou recensés par le centre de ressources probantes39(*), par la mise en place de plateformes de location et par la promotion de modes innovants d'achat et de mise à disposition |
Attribution du « forfait autonomie » |
Attribution du « forfait autonomie » |
Coordination et appui des actions de prévention mises en oeuvre par les services autonomie à domicile (SAD) intervenant auprès des personnes âgées |
Coordination et soutien des actions de prévention mises en oeuvre par les services autonomie à domicile (SAD) intervenant auprès des personnes âgées |
Coordination et soutien des actions de prévention mises en oeuvre par les services polyvalents d'aide et de soins à domicile (Spasad) intervenant auprès des personnes âgées40(*) |
|
Soutien aux actions d'accompagnement des proches aidants des personnes âgées en perte d'autonomie |
Soutien aux actions d'accompagnement des proches aidants des personnes âgées en perte d'autonomie |
Développement d'autres actions collectives de prévention |
Développement d'autres actions collectives de prévention |
Développement d'actions de lutte contre l'isolement des personnes âgées |
Il est précisé que les concours de la CNSA aux départements contribueraient au financement des dépenses liées à la coordination du SPDA et au fonctionnement de la commission des financeurs.
Les dépenses relatives à l'amélioration de l'accès aux équipements et aux aides techniques individuelles ainsi que celles relatives au développement d'autres actions collectives de prévention bénéficieraient, pour au moins 40 % de leur montant, à des personnes ne remplissant pas les conditions de perte d'autonomie mentionnées à l'article L. 232-2 du code de l'action sociale et des familles. Elles seraient gérées par le département, qui pourrait déléguer cette gestion par convention à l'un des membres de la commission des financeurs suivant des modalités fixées par décret.
Les aides individuelles accordées dans le cadre des actions visant à favoriser le maintien à domicile et financées par le département par le concours correspondant aux autres actions de prévention bénéficieraient à des personnes remplissant des conditions de ressources variables selon la zone géographique de résidence et définies par décret. Cette règle s'appliquerait également aux financements complémentaires alloués par d'autres membres de la commission des financeurs.
Le président du conseil départemental transmettrait chaque année à la CNSA, au plus tard le 30 juin, un rapport d'activité et les données nécessaires au suivi de la commission, comportant des indicateurs par sexe. Le défaut de transmission de ces informations après mise en demeure par la CNSA ferait obstacle à tout nouveau versement au département à ce titre.
La commission des financeurs de l'habitat inclusif
Comme l'actuelle conférence des financeurs, la commission des financeurs serait également compétente en matière d'habitat inclusif pour les personnes handicapées et les personnes âgées. Pour l'exercice de cette compétence, elle serait dénommée « commission des financeurs de l'habitat inclusif pour les personnes handicapées et les personnes âgées ».
Cette formation serait chargée de recenser les initiatives locales et de définir un programme coordonné de financement de l'habitat inclusif, dont le financement serait assuré par le forfait habitat inclusif41(*), en s'appuyant sur les diagnostics territoriaux existants et partagés entre les acteurs concernés.
La composition de cette commission serait complétée par des représentants des services départementaux de l'État compétents en matière d'habitat et de cohésion sociale.
Source : Commission des affaires sociales du Sénat
d) Les dispositions d'application
Les modalités d'application de cette nouvelle section sont renvoyées à un décret en Conseil d'État (nouvel article L. 149-12).
2. Le rôle de coordination de la CNSA
Le II complète la définition du rôle de la CNSA à l'article L. 223-5 du code de la sécurité sociale afin de mentionner le SPDA, dont elle assurerait l'animation et la coordination.
3. L'abrogation de dispositions existantes
En conséquence de l'introduction de ces dispositions, le 2° du I tend à abroger les dispositions du code de l'action sociale et des familles relatives à l'actuelle conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées (chapitre III du titre III du livre II).
4. L'entrée en vigueur du dispositif
Cet article entrerait en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2025 (III).
II - La position de la commission : affirmer la logique de parcours, territorialiser le pilotage du SPDA
Sans attendre l'adoption de la proposition de loi, le ministère chargé des solidarités a adressé aux départements un appel à manifestation d'intérêt afin de préfigurer le SPDA. À l'issue de l'examen des candidatures, 18 départements42(*) ont été retenus pour expérimenter le dispositif en 202443(*).
Les rapporteurs observent que le dispositif proposé ne supprime rien mais ajoute une couche de coordination supplémentaire avec le SPDA et la conférence territoriale de l'autonomie. En outre, on ne retrouve pas dans le texte la notion de point d'entrée unique pour les usagers qui sous-tend le rapport de Dominique Libault sur le SPTA.
La commission des financeurs du SPDA resterait spécialisée, comme l'actuelle conférence des financeurs, dans la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées, et ne serait pas compétente en matière de soutien de l'autonomie des personnes en situation de handicap (sauf, comme aujourd'hui, en matière d'habitat inclusif).
Les rapporteurs considèrent que la logique de parcours doit être un pilier du SPDA et doit s'inscrire dans la perspective du virage domiciliaire de nos politiques de soutien à l'autonomie. À leur initiative, la commission a adopté un amendement COM-145 afin d'ajouter, parmi les objectifs du SPDA, le soutien du maintien à domicile des personnes accompagnées. De plus, cet amendement tend à préciser que la mission d'accueil, d'information et d'orientation du SPDA s'accompagne du suivi dans la durée des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.
La commission a également adopté deux amendements de Guylène Pantel précisant que le SPDA apporte une réponse adaptée aux besoins des personnes (COM-122) et individualisée (COM-123). Un autre amendement de Mme Pantel, adopté par la commission, prévoit que le cahier des charges du SPDA sera arrêté après consultation des associations représentatives des usagers (COM-126).
La commission a prévu, à l'initiative des rapporteurs, que les Cap emploi seraient membres du SPDA au même titre que l'opérateur France Travail (ex-Pôle emploi) (COM-148).
Considérant que les politiques territoriales de soutien à l'autonomie devaient pouvoir être menées au plus près du terrain, au niveau des bassins de vie, la commission a adopté l'amendement COM-150 des rapporteurs afin de permettre au département et à l'ARS de définir conjointement, à l'échelle infra-départementale, des « territoires de l'autonomie » et d'installer à ce niveau la conférence territoriale de l'autonomie.
Par cohérence avec la suppression, à l'article 1er, de la conférence nationale de l'autonomie, elle a prévu que la commission des financeurs du SPDA établirait elle-même un plan trisannuel définissant des axes prioritaires de financement (amendement COM-151 des rapporteurs).
Par ailleurs, la commission a adopté un amendement COM-143 des rapporteurs afin de mettre en cohérence les compétences du département en matière de politique sociale et médico-sociale en faveur des personnes âgées avec la création du SPDA.
Elle a supprimé, dans la liste des thèmes du programme coordonné de financement de la commission des financeurs, une référence obsolète aux Spasad (amendement COM-153 des rapporteurs) et remplacé une référence au forfait habitat inclusif par une référence à l'aide à la vie partagée qui l'a remplacé (amendement COM-155)44(*).
Elle a enfin adopté six amendements de coordination (COM-144, COM-146, COM-149, COM-152, COM-156, COM-157) et deux amendements rédactionnels (COM-147, COM-154) des rapporteurs.
La commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article 1er bis
B
Association du gérontopôle à la conférence des
financeurs
Cet article, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, vise à intégrer les gérontopôles au sein des conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie.
La commission a supprimé cet article.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale
A. Les gérontopôles, des structures d'initiative locale en quête de reconnaissance nationale
1. Des structures visant à rapprocher les acteurs de la recherche, du soin et de l'économie autour du vieillissement
a) Des structures récemment implantées dans la plupart des régions
Les gérontopôles se sont progressivement implantés sur le territoire à partir de 2007. Leur création a toujours été le fruit d'une démarche engagée par un ou plusieurs acteurs de terrain.
Le premier d'entre eux a été créé à Toulouse sous la responsabilité du Pr Bruno Vellas, coordinateur du pôle gériatrie du centre hospitalier universitaire (CHU) de Toulouse. Sa mission initiale était de développer la recherche clinique sur la maladie d'Alzheimer pendant une période expérimentale de deux ans, domaine dans lequel il a acquis un rayonnement international.
Constitué en 2007, le gérontopôle de Dijon s'est associé en 2010 au pôle de gérontologie et d'innovation (PGI) Bourgogne-Franche-Comté. En 2010 a également été créé à Nantes le gérontopôle des Pays de la Loire par la chambre de commerce et d'industrie (CCI) régionale, le CHU de Nantes et le CHU d'Angers.
Puis ont été créés :
- en 2015, le gérontopôle Auvergne-Rhône-Alpes (AURA) à Saint-Étienne et le gérontopôle « Kozh ensemble » de Bretagne à Rennes ;
- en 2016, le gérontopôle d'Île-de-France (« Gérond'if ») à Paris ;
- en 2017, le gérontopôle de Normandie au Havre ;
- en 2018, le gérontopôle Sud à Marseille ;
- en 2021, le gérontopôle de Nouvelle-Aquitaine, issu de l'« Autonom'lab » de Limoges créé en 200945(*).
Carte des gérontopôles au 1er janvier 2022
Source : G. Berrut, S. Podevyn-Menant, Cahier des charges des gérontopôles, février 2022
Un dixième gérontopôle a été constitué à Amiens, dans les Hauts-de-France, en juillet 2023 par la Carsat Hauts-de-France, le CHU d'Amiens-Picardie, le CHU de Lille, la région Hauts-de-France et l'agence régionale de santé (ARS) des Hauts-de-France. D'autres sont en cours de constitution en Corse et en région Centre-Val de Loire46(*).
b) Des modèles divers
Généralement constitués sous la forme d'associations « loi de 1901 », les gérontopôles gèrent en même temps des activités prolongeant l'action publique et des prestations à caractère commercial.
Le rapport remis en février 2022 à la ministre Brigitte Bourguignon par le Pr Gilles Berrut, président du Gérontopôle Autonomie des Pays de la Loire, et Sébastien Podevyn-Menant, directeur général de France Silver Economie, observe que les gérontopôles, qui ont été développés sur la base d'initiatives locales d'envergures diverses, répondent à des modèles d'organisation et de fonctionnement très hétérogènes47(*). Au modèle « hospitalo-centré » du gérontopôle de Toulouse ont notamment succédé des modèles « holistes » qui « articulent leur action autour de quatre champs d'action (recherche, innovation, territoire et formation) afin d'envisager les enjeux du vieillissement dans une dynamique régionale ».
Selon ces auteurs, les gérontopôles ont néanmoins en commun le projet de « répondre aux enjeux de la transition démographique dans toute son amplitude avec transversalité et en étant des lieux de collaborations, de rencontres et de ressources de compétences dans le domaine du vieillissement ».
2. Une reconnaissance progressive
a) Une mention législative en 2015
La loi « ASV » du 28 décembre 2015 a constitué une première forme de reconnaissance, sans caractère normatif, en mentionnant les gérontopôles dans son annexe48(*). Celle-ci, définissant l'objectif de « rapprocher les acteurs du monde de la recherche, du monde social et du monde économique autour du ”bien-être” des personnes âgées », stipule que « la mission des gérontopôles est de rapprocher et de dynamiser autour du vieillissement les acteurs de la recherche, du soin (à l'hôpital, en ville, en établissement médico-social), de la formation et de l'entreprise ». Elle précise que les gérontopôles « faciliteront le transfert de la recherche, du développement technologique (“silver économie”) vers le soin, le médico-social et les services apportés aux âgés ».
b) L'élaboration d'un cahier des charges national
En janvier 2022, la ministre déléguée chargée de l'autonomie, Brigitte Bourguignon, a confié au Pr Berrut et à M. Podevyn-Menant la mission de définir le cahier des charges des gérontopôles, précisant leurs objectifs communs en matière de gouvernance, de recherche, de formation, de lien avec la « silver économie » et de communication.
Leur rapport précité de février 2022 répond à cette commande après avoir dressé un état des lieux des gérontopôles existants. Le cahier des charges proposé n'a pas de valeur juridique mais les gérontopôles veillent à s'y conformer.
En matière de recherche
La première mission définie par le cahier des charges est de développer et favoriser une recherche qui réponde aux besoins des personnes âgées et des professionnels. À cette fin, le gérontopôle doit s'appuyer sur « deux structurations obligatoires » : un conseil scientifique et un département de recherche. L'articulation entre ces deux éléments doit être précisée dans un règlement intérieur.
En matière de formation
Le gérontopôle doit proposer des formations à destination des personnes âgées, des aidants, des métiers gérontologiques et des professionnels de manière à oeuvrer concrètement à la montée en compétences et à une meilleure reconnaissance des métiers. Des collaborations doivent être mises en place avec le conseil régional, les différents organismes de formation et les universités.
En matière de « silver économie »
Les gérontopôles doivent participer à l'évaluation des innovations issues du monde de la recherche afin d'en valider l'usage et d'en mesurer l'acceptabilité. Des moyens humains spécifiques doivent être consacrés à cette mission, menée en relation avec les entreprises.
En matière de communication
Les objectifs de la mission de communication du gérontopôle sont décrits dans un plan de communication décliné en trois volets : institutionnel, scientifique et grand public. La communication est orientée préférentiellement vers les acteurs de la région mais peut être nationale ou internationale et associer les partenaires et le réseau des gérontopôles.
B. La proposition d'intégrer le gérontopôle au sein de la conférence des financeurs
L'article 1er bis B a été introduit en séance publique à l'Assemblée nationale par l'adoption d'un amendement de Stéphanie Rist et plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance.
Il tend à ajouter à la liste des membres de la conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie, fixée à l'article L. 233-3 du code de l'action sociale et des familles, des représentants du gérontopôle « compétent dans le département ».
II - La position de la commission : un dispositif incohérent
Ici encore, les rapporteurs constatent avec surprise que le dispositif proposé est incompatible avec des modifications proposées par ailleurs49(*). En effet, l'article 1er bis A propose de supprimer les conférences des financeurs pour les refondre dans le service public départemental de l'autonomie50(*). De plus, cet article fait référence à un article L. 233-7 du code de l'action sociale et des familles qui n'existe ni dans le droit existant, ni dans le droit proposé.
Sur le fond, cet article introduirait dans la loi des acteurs qui n'ont actuellement pas de définition en droit positif. Il suggère la présence d'un ressort géographique des gérontopôles qui n'a pas davantage d'existence juridique. En tout état de cause, il serait inapplicable dans les départements situés dans une région qui n'est dotée d'aucun gérontopôle. Enfin, la nature de centres ressources des gérontopôles pourrait poser question au sein d'une instance qui associe les personnes physiques ou morales contribuant au financement d'actions de prévention de la perte d'autonomie.
Tout en reconnaissant l'intérêt des actions menées par ces structures pour relever les défis les liés à la transition démographique, la commission a donc adopté l'amendement COM-158 de suppression des rapporteurs, considérant que ce dispositif devait être entièrement retravaillé.
La commission a supprimé cet article.
Article
1er bis C
Transmission de données relatives au financement
de projets pérennes
Cet article, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, prévoit la transmission par le président du conseil départemental à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie de données relatives au nombre de projets pérennes financés par la conférence des financeurs.
La commission a supprimé cet article.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale
A. L'obligation de transmission de données sur l'activité de la conférence des financeurs par le département
L'article L. 233-4 du code de l'action sociale et des familles dispose que le président du conseil départemental doit transmettre à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), ainsi qu'aux commissions de coordination des politiques publiques de santé constituées auprès de l'agence régionale de santé (ARS), au plus tard le 30 juin de chaque année, un rapport d'activité et les données nécessaires au suivi de l'activité de la conférence des financeurs51(*). Ces données, qui comportent des indicateurs présentés par sexe, sont relatives :
- au nombre et au type de demandes ;
- au nombre et au type d'actions financées par les membres de la conférence des financeurs, ainsi qu'à la répartition des dépenses par type d'actions ;
- au nombre et aux caractéristiques des bénéficiaires des actions.
Le défaut de transmission de ces informations après mise en demeure de la CNSA fait obstacle à tout nouveau versement de la caisse au département à ce titre.
B. L'ajout de données concernant les financements de projets pérennes
L'article 1er bis C a été introduit en séance publique à l'Assemblée nationale par l'adoption, contre l'avis du Gouvernement, d'un amendement de Stéphanie Rist (Renaissance).
Il tend à ajouter à la liste des données devant être transmises par le département le nombre de financements de projets pérennes par la conférence des financeurs.
II - La position de la commission : un dispositif inopérant
Les rapporteurs constatent là encore que le dispositif proposé est incompatible avec des modifications proposées par ailleurs52(*). Il est rappelé que l'article 1er bis A propose de supprimer les conférences des financeurs pour les refondre dans le service public départemental de l'autonomie53(*).
Sur le fond, l'ajout proposé est contradictoire avec le mode de fonctionnement des conférences des financeurs, qui ne peuvent pas attribuer de financements pérennes. En effet, la doctrine d'emploi des crédits des concours de la CNSA est d'utiliser ces crédits comme levier d'innovation par effet d'amorçage, et non de financer des projets de manière pérenne.
Du reste, la transmission annuelle de données concernant le nombre et le type d'actions financées permet le cas échéant de retracer la continuité du financement de ces actions ou, au contraire, de mettre en évidence le caractère ponctuel des financements octroyés.
La commission a donc adopté l'amendement COM-159 de suppression des rapporteurs.
La commission a supprimé cet article.
Article
1er bis D
Généralisation des équipes locales
sur les aides techniques
Cet article, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, tend à généraliser l'expérimentation des équipes locales d'accompagnement sur les aides techniques (EqLAAT).
La commission a modifié cet article afin de garantir le caractère pluridisciplinaire des équipes locales.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale
A. Un dispositif expérimenté depuis 2021
1. Les aides techniques et leur prise en charge
Les aides techniques désignent les matériels spécialement conçus ou directement disponibles sur le marché permettant aux personnes en situation de handicap et aux personnes âgées de réaliser des activités avec plus d'autonomie, de sécurité ou une meilleure performance. Elles peuvent aussi être un outil pour les proches aidants et les professionnels en contribuant à la qualité des soins ou de l'aide apportée et à la prévention des troubles musculo-squelettiques (TMS) liés à ces actes.
Les aides techniques figurant dans la liste des produits et prestations remboursables (LPPR) sont remboursées par l'assurance maladie sur prescription. En outre, la prestation de compensation du handicap (PCH), pour les personnes handicapées, et l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), pour les personnes âgées de 60 ans et plus, peuvent contribuer à financer les charges liées à ces aides techniques. Par ailleurs, l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) permet de compenser le coût des aides techniques liées à la situation de handicap d'un enfant.
Enfin, l'amélioration de l'accès aux équipements et aux aides techniques individuelles favorisant le soutien à domicile, notamment par la promotion de modes innovants d'achat et de mise à disposition, sont un axe d'intervention des conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées54(*).
2. L'expérimentation d'équipes locales d'accompagnement
La nécessité de renforcer l'accompagnement des personnes en situation de handicap et des personnes âgées en matière d'aides techniques en France a été mise en évidence par un rapport remis au Gouvernement en 2020 par Philippe Denormandie et Cécile Chevalier55(*). Les lacunes actuelles de l'accompagnement expliquent l'inadaptation et la sous-utilisation fréquentes des aides techniques.
La proposition 8 du rapport Denormandie-Chevalier invite ainsi à « renforcer l'offre d'évaluation des besoins et d'accompagnement au choix et à l'usage des aides techniques pour les personnes par des équipes dédiées dans chaque département, intervenant sur la base d'un cahier des charges national, et financées par des crédits pérennes de la sécurité sociale ».
Afin de traduire cette proposition, l'expérimentation des équipes locales d'accompagnement sur les aides techniques (EqLAAT) a été lancée en février 2021, dans le cadre prévu par l'article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale (dit « article 51 »), pour une durée initialement fixée à deux ans56(*).
Cette expérimentation, mise en oeuvre par la CNSA, vise à faire émerger des équipes de professionnels, indépendantes de toute activité commerciale relative aux aides techniques, afin d'offrir aux personnes handicapées et aux personnes âgées un accompagnement de proximité dans le choix d'aides techniques et leur prise en main, notamment par des temps sur les lieux de vie des personnes. À cette fin, les porteurs de projet retenus ont mis en place des équipes comprenant au minium des ergothérapeutes et des travailleurs sociaux. L'expérimentation est financée par des forfaits d'accompagnement.
Un nouveau cahier des charges a été arrêté en septembre 2021, à nouveau pour une durée de deux ans, donnant le coup d'envoi effectif de l'expérimentation, que 24 équipes locales ont été autorisées à mener dans douze régions métropolitaines et deux collectivités d'outre-mer57(*). Ce cahier des charges a été modifié par un arrêté du 22 juillet 202258(*). Enfin, un arrêté du 4 août 2023 a prolongé de 7 mois la durée de l'expérimentation59(*).
Au 31 août 2023, selon les informations fournies par la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), l'expérimentation concerne 7 768 personnes accompagnées. Elle a fait l'objet d'un rapport intermédiaire confirmant que le dispositif répond à un réel besoin.
B. La proposition de généraliser le dispositif
L'article 1er bis D a été inséré en séance publique à l'Assemblée nationale par un amendement de François Gernigon et de plusieurs de ses collègues du groupe Horizons.
Il a pour objet de généraliser et de pérenniser les équipes locales d'accompagnement sur les aides techniques.
Il complète à cette fin le titre VIII du livre II du code de l'action sociale et des familles, relatif à l'habitat inclusif pour les personnes handicapées et les personnes âgées, en l'intitulant : « Dispositions communes aux personnes handicapées et aux personnes âgées » (1° du I).
Le 2° du I tend à ajouter dans ce titre VIII un nouveau chapitre II relatif à la compensation technique, comprenant un nouvel article L. 282-1.
Celui-ci prévoit que des équipes locales sur les aides techniques seront mises en oeuvre dans chaque département. Elles auraient pour mission :
- d'accompagner individuellement les personnes âgées et les personnes handicapées dans l'évaluation de leurs besoins, le choix et la prise en main des aides techniques et dans la définition des aménagements de logement correspondant à leurs besoins ;
- de soutenir des actions de sensibilisation, l'information et la formation des personnes handicapées, des personnes âgées, des proches aidants et des professionnels sur les aides techniques.
Comme dans le cadre de l'expérimentation des EqLAAT, ces équipes seraient indépendantes de toute activité commerciale relative aux aides techniques ou à l'adaptation du logement.
Un décret fixerait le cahier des charges national que devront respecter ces équipes ainsi que leurs modalités d'organisation, leur composition et leurs ressources.
Le II fixe au 1er janvier 2025 l'entrée en vigueur du dispositif. D'après la DGCS, entre avril 2024 (date de fin de l'expérimentation) et janvier 2025, une période transitoire serait mise en place dans le cadre de l'« article 51 » afin d'assurer une transition sans rupture vers la généralisation.
II - La position de la commission : une généralisation bienvenue
La généralisation à tous les départements des équipes locales d'accompagnement sur les aides techniques, dont l'expérimentation est concluante, apparaît pertinente.
À l'initiative des rapporteurs, la commission a précisé que ces équipes locales devraient être pluridisciplinaires (amendement COM-161).
Elle a par ailleurs adopté un amendement rédactionnel (COM-160) des rapporteurs.
La commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article
1er bis E
Alignement de la temporalité des schémas
régionaux de santé et des schémas d'organisation
sociale et médico-sociale
Cet article, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, propose que le schéma régional de santé et les schémas d'organisation sociale et médico-sociale soient établis selon le même calendrier.
La commission a supprimé cet article.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale
Cet article a été inséré en séance publique à l'Assemblée nationale par l'adoption, contre l'avis du Gouvernement, de cinq amendements identiques déposés respectivement par Laurent Panifous (LIOT), Thibaut Bazin (Les Républicains), Emmanuelle Ménard (non inscrite), Caroline Colombier (Rassemblement national) et Sébastien Peytavie (Écologiste).
Il propose que soient élaborés selon la même temporalité deux types de schémas qui doivent actuellement être établis en cohérence les uns avec les autres et pour la même durée de cinq ans :
- le schéma régional de santé prévu à l'article L. 1434-2 du code de la santé publique : celui-ci est établi dans le cadre du projet régional de santé (PRS) arrêté par le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) ;
- les schémas d'organisation sociale et médico-sociale prévus à l'article L. 312-4 du code de l'action sociale et des familles : ceux-ci sont établis, selon les cas, au niveau national par les ministres chargés des personnes âgées et des personnes handicapées, au niveau régional par le préfet de région ou au niveau départemental par le président du conseil départemental60(*).
II - La position de la commission : une rigidification excessive
Les rapporteurs partagent les réserves émises lors de l'examen de ces amendements en séance publique à l'Assemblée nationale par l'ancien ministre des solidarités Jean-Christophe Combe : aligner les calendriers de ces deux types de schémas conduirait les départements d'une même région à s'aligner sur le calendrier d'élaboration du schéma régional de santé (SRS). Cette mesure serait donc source de complexité et de rigidité pour les départements.
Dans la mesure où ces différents schémas doivent déjà être établis en cohérence les uns avec les autres, cette complexification n'apparaît pas nécessaire compte tenu du caractère peu opérationnel des SRS.
La commission a donc adopté l'amendement COM-162 de suppression des rapporteurs.
La commission a supprimé cet article.
Article
1er bis FA (nouveau)
Adaptation à Saint-Martin de la
composition du conseil départemental de la citoyenneté et de
l'autonomie et du statut de la maison départementale des personnes
handicapées
Cet article additionnel, inséré par la commission, propose d'adapter la composition du conseil départemental de la citoyenneté et de l'autonomie dans la collectivité de Saint-Martin. Par ailleurs, il vise à reconnaître en tant que maison départementale des personnes handicapées le service compétent de la collectivité.
A. Les spécificités de la situation à Saint-Martin
1. La composition du conseil départemental de la citoyenneté et de l'autonomie n'est pas adaptée à la collectivité
Le conseil départemental de la citoyenneté et de l'autonomie (CDCA), prévu à l'article L. 149-1 du code de l'action sociale et des familles, a pour objet d'assurer la participation des personnes âgées et des personnes handicapées à l'élaboration et à la mise en oeuvre des politiques de l'autonomie dans le département.
Sa composition, fixée à l'article L. 149-2 du même code, intègre un grand nombre de parties prenantes de ces politiques.
La composition du conseil
départemental
de la citoyenneté et de l'autonomie
Le CDCA, présidé par le président du conseil départemental, rassemble des représentants :
1° des personnes âgées, des personnes retraitées issues notamment des organisations syndicales représentatives, des personnes handicapées, de leurs familles et de leurs proches aidants ;
2° du département ;
3° d'autres collectivités territoriales et d'établissements publics de coopération intercommunale ;
4° de l'agence régionale de santé (ARS) ;
5° des services départementaux de l'État ;
6° de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) dans le département ;
7° du recteur d'académie ;
8° de la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (Dreets) ;
9° des régimes de base d'assurance vieillesse et d'assurance maladie ;
10° des fédérations des institutions de retraite complémentaire ;
11° des organismes régis par le code de la mutualité ;
12° des autorités organisatrices de transports ;
13° des bailleurs sociaux ;
14° des architectes urbanistes ;
15° des organisations syndicales représentatives des employeurs et des salariés des établissements et services sociaux et médico-sociaux ;
16° des intervenants bénévoles qui contribuent au maintien du lien social des personnes âgées et des personnes handicapées.
Cette composition large n'est pas adaptée à la dimension de la collectivité de Saint-Martin, ce qui empêche la mise en place effective de ce conseil dans l'île.
2. Les missions des maisons départementales des personnes handicapées sont exercées par un service de la collectivité
Les articles L. 146-3 et L. 146-4 du code de l'action sociale et des familles prévoient que, dans chaque département, une maison départementale des personnes handicapées (MDPH) est constituée sous la forme d'un groupement d'intérêt public (GIP) dont le département assure la tutelle administrative et financière.
Un concours de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) contribue au financement des dépenses liées à l'installation et au fonctionnement des MDPH61(*).
À Saint-Martin, alors que l'article L. 581-6 du code de l'action sociale et des familles prévoit l'existence d'une maison territoriale des personnes handicapées (MTPH), il n'a pas été créé de GIP car ce statut a été considéré comme démesuré au regard de la taille du territoire.
C'est un service de la collectivité de Saint-Martin qui assure les missions d'une MTPH. En conséquence, même si les services prévus par la loi sont assurés au bénéfice des personnes en situation de handicap, la collectivité ne peut bénéficier du concours MDPH de la CNSA.
B. Un dispositif déjà adopté dans le PLFSS pour 2024
L'amendement COM-1 d'Annick Petrus reprend un dispositif adopté dans la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2024, ce qui assure sa recevabilité financière. Il avait toutefois été censuré par le Conseil constitutionnel en tant que « cavalier social »62(*).
Il convient également de rappeler qu'un dispositif semblable a été prévu pour Saint-Barthélemy dans la loi « 3DS » du 21 février 202263(*).
Cet amendement propose d'abord d'adapter la composition du conseil territorial de la citoyenneté et de l'autonomie (CTCA) à Saint-Martin. Ce conseil serait présidé par le président du conseil territorial et composé d'un représentant :
- du conseil territorial ;
- de l'ARS ;
- du recteur d'académie ;
- de la caisse générale de sécurité sociale (CGSS) de la Guadeloupe et de Saint-Martin ;
- des intervenants qui contribuent au maintien du lien social des personnes âgées et des personnes handicapées ;
- des bailleurs sociaux ;
- des organisations syndicales représentatives des employeurs et des salariés des établissements et services sociaux et médico-sociaux ;
- des personnes âgées, des personnes retraitées issues notamment des organisations syndicales représentatives, des personnes handicapées, de leurs familles et de leurs proches aidants.
Il est précisé que les modalités de désignation des membres et de fonctionnement du CTCA seront fixées par un arrêté du représentant de l'État à Saint-Martin.
L'amendement vise en outre à reconnaître qu'un service de la collectivité territoriale de Saint-Martin peut, dans le cadre d'une convention passée avec l'État, exercer les missions d'une MDPH.
Il prévoit que ce service puisse organiser des actions de coordination avec les autres dispositifs sanitaires et médico-sociaux concernant les personnes handicapées.
La collectivité territoriale pourrait passer une convention avec les organismes de sécurité sociale ainsi qu'avec d'autres personnes morales, notamment celles représentant les organismes gestionnaires d'établissements ou de services destinés aux personnes handicapées, celles assurant une mission de coordination en leur faveur ou celles participant au fonds départemental de compensation.
L'objectif de cette disposition est de permettre à la collectivité territoriale de bénéficier du concours MDPH de la CNSA.
La commission a adopté cet article additionnel ainsi rédigé.
Article
1er bis F
Groupements territoriaux sociaux et
médico-sociaux
Cet article, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, a pour objet d'imposer aux établissements et services médico-sociaux pour personnes âgées publics autonomes de coopérer dans le cadre d'un groupement territorial.
La commission a modifié cet article afin de prendre en compte, dans le cadre du projet d'accompagnement partagé des groupements, le sujet de l'accompagnement des personnes handicapées vieillissantes.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale
A. Des modalités de regroupement insuffisamment incitatives
1. Les divers outils permettant la coordination entre les établissements et services médico-sociaux
L'article L. 312-7 du code de l'action sociale et des familles prévoit plusieurs modalités afin de favoriser la coordination, la complémentarité et de garantir la continuité des prises en charge et de l'accompagnement entre les établissements et services sociaux ou médico-sociaux (ESMS), les personnes physiques ou morales gestionnaires et les personnes morales ou physiques concourant à la réalisation de leurs missions :
- conclure des conventions entre eux, avec des établissements de santé ou avec des établissements publics locaux d'enseignement (EPLE) et des établissements d'enseignement privés ;
- créer des groupements d'intérêt économique (GIE) et des groupements d'intérêt public (GIP) ;
- créer des groupements de coopération sociale ou médico-sociale ;
- procéder à des regroupements ou à des fusions.
2. Les groupements de coopération sociale ou médico-sociale
a) Un outil offrant une large gamme de possibilités
Les groupements de coopération sociale ou médico-sociale (GCSMS) ont été introduits par la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale64(*).
Il s'agit d'outils de coopération dotés, selon le cas, de la personnalité morale de droit public ou de droit privé et poursuivant un but non lucratif. Ils peuvent être constitués entre professionnels des secteurs sociaux et médico-sociaux et sanitaires, ainsi qu'entre ces professionnels, des ESMS et personnes gestionnaires et des établissements de santé. Peuvent y être associés, par conventions, des professionnels médicaux et paramédicaux du secteur libéral ou du secteur public n'exerçant pas dans les établissements et services des membres adhérents.
Outre les missions dévolues aux GIE et aux GIP, le GCSMS peut :
- permettre les interventions communes des professionnels des secteurs sociaux, médico-sociaux et sanitaires, des professionnels salariés du groupement ainsi que des professionnels associés par convention ;
- être autorisé, à la demande des membres, à exercer directement les missions et prestations des ESMS et à assurer directement, à la demande de l'un ou plusieurs de ses membres, l'exploitation de l'autorisation après accord de l'autorité l'ayant délivrée ;
- être chargé de procéder à des fusions et regroupements ;
- créer des réseaux sociaux ou médico-sociaux et adhérer à ces mêmes réseaux ou aux réseaux et groupements de coopération ou d'intérêt public prévus au code de la santé publique ;
- être chargé, pour le compte de ses membres, des activités de pharmacie à usage interne65(*).
b) Un outil encore peu utilisé et perfectible
Au 31 décembre 2022, selon la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), 22,9 % de l'ensemble des ESMS coopéraient au sein d'une forme de groupement (GIP, GIE, GCSMS, groupement hospitalier de territoire ou groupement de coopération sanitaire). Cette part est plus importante parmi les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) (59,2 %) en raison du rattachement d'une partie d'entre eux à un établissement public hospitalier. Cependant, selon une enquête de l'Agence nationale de la performance sanitaire et médico-sociale (Anap), seuls 11,5 % des Ehpad déclarent faire partie d'un GCSMS.
Globalement, ces outils restent donc peu utilisés. Pourtant, selon l'Anap, ils représentent un levier de performance pour le secteur médico-social dans son ensemble.
En particulier, le parc d'Ehpad publics, qui représente près de 50 % des places en Ehpad et assure un maillage du territoire complémentaire de celui des Ehpad privés, apparaît particulièrement atomisé.
Dans un récent rapport, l'Anap préconisait de simplifier le recours aux GCSMS pour les établissements et de prévoir des mesures incitatives, telles que la valorisation financière du rôle d'administrateur de GCSMS66(*).
B. L'introduction d'une obligation d'appartenir à un groupement pour les établissements publics autonomes
L'article 1er bis F a été inséré en séance publique à l'Assemblée nationale par un amendement de Freddy Sertin et de plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance.
Il a pour objet d'obliger les Ehpad publics autonomes à coopérer dans le cadre d'un groupement territorial.
1. L'obligation d'adhérer à un groupement
Le 1° du I crée une nouvelle section relative aux coopérations au sein du chapitre II du titre Ier du livre III du code de l'action sociale et des familles, dont la sous-section unique est consacrée au groupement territorial social et médico-social.
Aux termes du nouvel article L. 312-7-2 du code de l'action sociale et des familles, les Ehpad, les petites unités de vie, les accueils de jour autonomes et les services à domicile publics autonomes - à l'exception de ceux gérés par un centre communal ou intercommunal d'action sociale (CCAS ou CIAS) - auraient l'obligation d'adhérer :
- soit à un groupement hospitalier de territoire (GHT) ;
- soit à un nouveau type de groupement dénommé « groupement territorial social et médico-social » (GTSMS).
Les groupements hospitaliers de territoire
Les GHT ont été créés par la loi de modernisation de notre système de santé de janvier 201667(*) en lieu et place des communautés hospitalières de territoire, qui étaient fondées sur une démarche de volontariat. En application de l'article L. 6132-1 du code de la santé publique, tout établissement public de santé, sauf dérogation tenant à sa spécificité dans l'offre de soins territoriale, est partie à une convention de GHT.
Le GHT, qui n'est pas doté de la personnalité morale, a pour objet de permettre aux établissements de mettre en oeuvre une stratégie de prise en charge commune et graduée du patient dans le but d'assurer une égalité d'accès à des soins sécurisés et de qualité. Il assure la rationalisation des modes de gestion par une mise en commun de fonctions ou par des transferts d'activités entre établissements. Dans chaque groupement, les établissements parties élaborent un projet médical partagé garantissant une offre de proximité ainsi que l'accès à une offre de référence et de recours.
La loi de 2019 d'organisation et de transformation du système de santé68(*) a institué, dans chaque GHT, une commission médicale de groupement chargée d'élaborer la stratégie médicale du groupement et le projet médical partagé du groupement, de participer à leur mise en oeuvre et de contribuer à l'élaboration de la politique territoriale d'amélioration continue de la qualité, de la sécurité et de la pertinence des soins, ainsi que des conditions d'accueil et de prise en charge des usagers.
Un établissement support, désigné par la convention constitutive, assure pour le compte des établissements parties au groupement69(*) :
- la stratégie, l'optimisation et la gestion commune d'un système d'information hospitalier convergent et interopérable ;
- la gestion d'un département de l'information médicale de territoire ;
- la fonction achats ;
- la coordination des instituts et des écoles de formation paramédicale du groupement et des plans de formation continue et de développement professionnel continu des personnels des établissements parties au groupement ;
- la définition d'orientations stratégiques communes pour la gestion prospective des emplois et des compétences, l'attractivité et le recrutement, la rémunération et le temps de travail des personnels médicaux, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques, dans les limites des compétences des établissements parties à l'égard de ces personnels.
Les Ehpad publics relevant d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (CPOM) mentionné à l'article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles, les accueils de jour autonomes publics et les services à domicile publics gérés par un CCAS ou un CIAS auraient la possibilité d'adhérer à l'un de ces groupements après approbation de leur organisme gestionnaire.
Les établissements publics relevant d'un CPOM, les accueils de jour autonomes publics et les services à domicile publics gérés par un établissement public de santé pourraient adhérer, après approbation de ce dernier, à un GTSMS.
Enfin, les établissements publics autonomes accompagnant ou accueillant des personnes en situation de handicap pourraient adhérer à un GTSMS sous réserve de l'accord du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) compétente.
2. La création de groupements territoriaux sociaux et médico-sociaux
a) La constitution des GTSMS
Le GTSMS serait constitué à l'initiative des établissements et services mentionnés ci-dessus, à « un niveau territorial suffisant, tout en assurant une proximité, pour permettre la mise en oeuvre d'un parcours coordonné des personnes âgées accompagnées ».
Les établissements publics mentionnés ci-dessus pourraient déroger, avec l'accord du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS), à l'obligation d'adhérer à un groupement s'ils étaient issus de la fusion de plusieurs établissements publics ou s'ils présentaient une spécificité dans l'offre départementale d'accompagnement des personnes âgées.
Le directeur général de l'ARS apprécierait la conformité de la convention constitutive du groupement avec le projet régional de santé (PRS).
b) Forme et objet des GTSMS
Le GTSMS prendrait la forme juridique d'un groupement de coopération sociale ou médico-social (GCSMS).
Il aurait pour objet, d'une part, de mettre en oeuvre une stratégie commune d'accompagnement des personnes âgées dans une logique de parcours matérialisée dans le projet d'accompagnement partagé et, d'autre part, de rationaliser les modes de gestion par la mise en commun de fonctions et d'expertises.
Les établissements et services membres d'un GTSMS élaboreraient un projet d'accompagnement partagé garantissant l'accès à une offre d'accompagnement coordonnée et la transformation des modes d'accompagnement au bénéfice des personnes âgées.
Aux termes d'un nouvel article L. 312-7-3 du code de l'action sociale et des familles, chaque GTSMS pour personnes âgées serait partenaire d'un GHT ou d'un établissement de santé. Ce partenariat prendrait la forme d'une convention prévoyant l'articulation entre le projet d'accompagnement partagé du GTSMS et le projet médical du GHT ou de l'établissement de santé.
Il est précisé que tout établissement ou service qui accueille ou aide à domicile des personnes âgées ainsi que tout établissement ou service qui accueille ou aide à domicile des personnes handicapées ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, ou bien qui leur assure un accompagnement médico-social en milieu ouvert, pourrait être partenaire d'un GTSMS dans le cadre d'une convention.
c) Missions des GTSMS
Aux termes d'un nouvel article L. 312-7-4 du code de l'action sociale et des familles, le GTSMS élaborerait une stratégie commune d'accompagnement des personnes accueillies pour assurer la cohérence du parcours des personnes âgées au sein du territoire. Cette stratégie pourrait prévoir la détention ou l'exploitation par le groupement d'autorisations, dans les conditions prévues au b du 3° de l'article L. 312-7 du même code.
Le GTSMS assurerait pour le compte de ses membres au moins une fonction parmi les suivantes :
- la « fonction système d'information », consistant en la convergence des systèmes d'information des membres et la mise en place d'un dossier usager permettant une prise en charge coordonnée ;
- la formation continue des personnels ;
- la démarche qualité et la gestion des risques ;
- la gestion des ressources humaines ;
- la gestion des achats ;
- la gestion budgétaire et financière ;
- les services techniques.
D'autres fonctions, mentionnées dans la convention constitutive, pourraient être confiées au groupement pour le compte de tout ou partie de ses membres. Les membres d'un GTSMS pourraient notamment mutualiser certains marchés et partager des compétences relatives à la passation des marchés publics. Le GTSMS pourrait assurer les missions pouvant être confiées aux GCSMS.
d) Direction des GTSMS
Le GTSMS pour personnes âgées serait dirigé par un directeur d'établissement sanitaire, social ou médico-social nommé par le directeur général de l'ARS, après avis du président du conseil départemental, sur proposition de l'assemblée générale. Ce directeur pourrait diriger un ou plusieurs établissements membres du groupement (nouvel article L. 312-7-5).
Le directeur du GTSMS :
- assurerait le pilotage des fonctions exercées par le groupement pour le compte de ses membres et représenterait le groupement ;
- élaborerait le budget du groupement, qui serait approuvé par l'assemblée générale ;
- serait compétent pour recruter les agents fonctionnaires et contractuels affectés au groupement.
L'indemnité du directeur serait votée par l'assemblée générale du groupement.
e) Dispositions financières
Sous réserve de l'accord du directeur général de l'ARS, les établissements publics membres d'un GTSMS pourraient mettre en commun leurs disponibilités déposées auprès de l'État (nouvel article L. 312-7-6).
Le GTSMS pourrait se constituer des fonds propres et recourir à l'emprunt.
Sous réserve de l'accord du directeur général de l'ARS, il pourrait présenter un plan pluriannuel d'investissement, ainsi que son plan de financement, pour le compte d'un ou plusieurs de ses membres. Ces plans seraient soumis à l'approbation de l'autorité de tarification compétente, qui pourrait déroger au délai de 60 jours prévu à l'article R. 314-20 du code de l'action sociale et des familles si l'instruction de la demande présentait une difficulté particulière.
Le GTSMS pourrait conclure un CPOM unique pour l'ensemble des établissements et services relevant de son périmètre. Ce contrat porterait alors sur les fonctions mutualisées, les axes stratégiques du projet d'accompagnement partagé sur son territoire et les activités gérées par les membres du groupement.
Les modalités d'application de ces dispositions sont renvoyées à un décret en conseil d'État (nouvel article L. 312-7-7).
Par ailleurs, le 2° du I modifie l'article L. 314-7 du code de l'action sociale et des familles relatif aux règles budgétaires et de financement des ESMS.
Le a tend à préciser que, lorsque un établissement ou un service relève de l'état des prévisions de recettes et de dépenses, l'approbation des emprunts dont la durée est supérieure à un an, des programmes d'investissement et de leurs plans de financement s'effectue dans le cadre d'un plan global de financement dont le modèle serait fixé par arrêté ministériel.
Le b soumet à l'accord de l'autorité compétente en matière de tarification les emprunts d'une durée supérieure à un an ainsi que les programmes d'investissement et leurs plans de financement des établissements d'hébergement pour personnes âgées habilités au titre de l'aide sociale.
f) Exécution et contrôle des délibérations des groupements
Le 3° du I étend aux délibérations des GTSMS les dispositions applicables à l'exécution et au contrôle des délibérations des conseils d'administration des établissements publics sociaux et médico-sociaux70(*).
g) Exécution et contrôle des délibérations des groupements
Le 4° du I prévoit qu'un comptable public unique est désigné pour les établissements publics sociaux et médico-sociaux relevant d'un GTSMS.
Les règles applicables aux comptables des établissements publics sociaux et médico-sociaux leur sont applicables.
h) Statut du personnel
Le II modifie l'article L. 5 du code de la fonction publique afin de qualifier de fonctionnaires hospitaliers les personnes qui ont été nommées dans un emploi permanent au sein d'un GTSMS et ont été titularisées dans un grade de la hiérarchie administrative.
3. Entrée en vigueur et dispositions transitoires
Le III prévoit que les dispositions de cet article entreront en vigueur à compter du 1er janvier 2025.
Toutefois, il instaure une période transitoire de trois ans à compter de cette date afin de permettre la mise en place des GTSMS pour personnes âgées sur l'ensemble du territoire métropolitain.
Au terme de la première année, soit le 1er janvier 2026 au plus tard, le directeur général de l'ARS arrêterait, avec les présidents des conseils départementaux de la région, la liste des GTSMS.
Les GCSMS existants pourraient être transformés en GTSMS.
Il est précisé que l'obligation d'adhérer à un groupement prévue au présent article ne s'appliquerait pas dans les territoires et collectivités d'outre-mer.
II - La position de la commission : un outil à utiliser dans une perspective de décloisonnement
Les rapporteurs considèrent que l'évolution proposée, soutenue par les représentants du secteur, est de nature à renforcer la structuration de l'offre médico-sociale.
Selon les informations fournies par la DGCS, environ 300 GTSMS pourraient se mettre en place au cours de la phase de déploiement, ce qui permettrait une résorption significative de la fragmentation du secteur public autonome.
Pour la DGCS, les établissements accueillant des personnes en situation de handicap ne sont pas confrontés à la même atomicité, ce qui justifie que l'obligation d'adhérer à un groupement ne leur soit pas applicable. Lorsqu'ils sont de statut public, ces établissements pourraient cependant adhérer à un GTSMS pour personnes âgées sous réserve de l'accord du directeur général de l'ARS compétente.
Ce nouveau type de groupement pourrait ainsi, dans une perspective de décloisonnement, investir également le champ du handicap. Aussi, la commission a adopté l'amendement COM-163 des rapporteurs supprimant, dans la dénomination du GTSMS, les termes « pour personnes âgées ».
Elle a également souhaité que le projet d'accompagnement partagé du groupement comporte un volet relatif à l'accompagnement des personnes handicapées vieillissantes : un récent rapport de la Cour des comptes a en effet souligné les lacunes de leur prise en charge71(*). Elle a donc adopté l'amendement COM-164 des rapporteurs en ce sens.
La commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article
1er bis G
Mission nationale d'audit et d'évaluation de la
CNSA
Cet article, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, vise à confier à la CNSA une mission d'audit et d'évaluation des acteurs départementaux participant à la mise en oeuvre des politiques de soutien à l'autonomie.
La commission a adopté cet article modifié par un amendement visant à circonscrire le rôle d'évaluation de la CNSA aux maisons départementales des personnes handicapées et aux maisons départementales de l'autonomie.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale
A. Le rôle de coordination, d'accompagnement et d'appui de la CNSA
L'article L. 223-5 du code de la sécurité sociale dispose que la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) a notamment pour rôle de piloter et d'assurer l'animation et la coordination, dans le champ des politiques de soutien à l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, des acteurs participant à leur mise en oeuvre.
Dans ce cadre, elle assure, notamment en vue de garantir la qualité de service et de veiller à l'équité du traitement des demandes de compensation du handicap et d'aide à l'autonomie, un rôle d'accompagnement et d'appui aux maisons départementales de l'autonomie (MDA) et aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) ainsi qu'un rôle d'évaluation de leur contribution à la politique de l'autonomie des personnes handicapées et des personnes âgées.
Les maisons départementales de l'autonomie
La maison départementale de l'autonomie (MDA), prévue par l'article L. 149-4 du code de l'action sociale et des familles, est une organisation mise en place à titre facultatif à l'initiative du président du conseil départemental. Elle vise à réunir les moyens de la MDPH et ceux des services du département en matière d'accueil, d'information, de conseil, d'orientation et le cas échéant d'instruction des demandes, d'évaluation des besoins et d'élaboration des plans d'aide, tant au profit des personnes âgées que des personnes handicapées.
La loi « ASV »72(*) a confié à la CNSA la mission de labelliser les MDA sur saisine des présidents de conseils départementaux. La CNSA délivre le label de MDA quand l'organisation répond aux prescriptions d'un cahier des charges fixé par décret73(*).
Le président du conseil départemental doit transmettre chaque année à la CNSA les données relatives à l'activité et aux moyens de la MDA en vue de son évaluation.
Selon les informations fournies par la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), une seule MDA, celle de la Mayenne, a été labellisée à ce jour. Toutefois, en pratique, nombre de départements ont choisi se rapprocher d'une organisation de type MDA sans demander de labellisation.
B. Une nouvelle mission nationale d'audit et d'évaluation
L'article 1er bis G a été inséré en séance publique à l'Assemblée nationale par un amendement de Freddy Sertin et de plusieurs de ses collègues du groupe Renaissance.
Il a pour objet de confier à la CNSA une mission nationale d'audit et d'évaluation des acteurs participant à la mise en oeuvre des politiques de soutien à l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
À cette fin, le 1°
modifie l'article L. 223-5 du code de la sécurité sociale
afin de prévoir que la CNSA assure,
« au bénéfice des
départements », des MDPH et des MDA, une
mission nationale d'accompagnement, de conseil, d'audit et d'évaluation
en vue de déployer des outils de contrôle interne et de
maîtrise des risques, de garantir la qualité du
service
- notamment celle du service public départemental de
l'autonomie (SPDA) créé par l'article
1er bis A74(*) - et de veiller à l'égalité
de traitement des demandes de droits et de prestations de soutien à
l'autonomie.
Le 2° tend à introduire, dans un nouvel article L. 223-17 du code de la sécurité sociale, l'obligation pour les départements et les MDPH de communiquer à la CNSA tous les documents et les renseignements utiles à la conduite de ses travaux et d'autoriser la tenue de missions sur place. Un décret préciserait les modalités d'application de ces nouvelles obligations.
II - La position de la commission : une nouvelle mission à recentrer
Lors de son audition devant la commission des affaires sociales, Virginie Magnant, directrice de la CNSA, s'est montrée très favorable à la création de cette mission d'audit et d'évaluation de la qualité, qui donnerait à la CNSA la capacité de mieux accompagner l'ensemble des services départementaux chargés de l'autonomie. Elle a considéré que cette disposition ne bouleverserait pas la relation entre la CNSA et les conseils départementaux, la caisse n'ayant pas vocation à exercer une autorité hiérarchique sur leurs services.
Il convient de rappeler que cette mesure avait déjà été inscrite dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 avant d'être censurée en tant que « cavalier social » par le Conseil constitutionnel75(*). Lors de l'examen de ce texte, le Sénat avait, à l'initiative du rapporteur pour la branche autonomie Philippe Mouiller, modifié le dispositif afin de limiter le rôle de la CNSA à l'égard des services départementaux à l'accompagnement et au conseil, et de supprimer l'obligation pour les départements et les MDPH d'autoriser la tenue de mission sur place.
Afin de mettre ces dispositions en conformité avec les principes de la décentralisation, la commission a souhaité limiter le rôle de la CNSA à l'égard des départements à l'accompagnement, au conseil et à l'audit, et réserver le rôle d'évaluation aux MDPH et aux MDA. Elle a donc adopté l'amendement COM-165 des rapporteurs en ce sens.
La commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article
1er bis
Désignation d'un référent
prévention dans les établissements et services sociaux et
médico-sociaux
Cet article, inséré en commission à l'Assemblée nationale, vise à imposer aux responsables d'établissements et services sociaux et médico-sociaux la désignation d'un « référent prévention ».
La commission a supprimé cet article.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale : la désignation obligatoire d'un référent prévention
Cet article a été inséré en commission à l'Assemblée nationale par l'adoption d'un amendement de Cyrille Isaac-Sibille (groupe Démocrate).
Il prévoit, dans un nouvel article L. 312-2 du code de l'action sociale et des familles, que les responsables d'établissements ou services sociaux et médico-sociaux (ESMS) accueillant des personnes âgées ou des personnes handicapées doivent désigner en qualité de « référent prévention » soit un salarié compétent, soit une personne compétente exerçant à titre bénévole pour s'occuper des activités de prévention.
Il est précisé que ce salarié ou cette personne exerçant à titre bénévole devrait bénéficier, dans des conditions déterminées par décret, d'une formation en matière de santé publique.
Les modalités d'application du dispositif seraient déterminées par décret.
II - La position de la commission : un dispositif à la valeur ajoutée douteuse
Il ressort des auditions menées par les rapporteurs que cet article suscite davantage d'interrogations et de réserves qu'il n'apporte de solutions.
Le dispositif interroge d'abord par le caractère très large de la mission qui serait confiée au nouveau référent, faute de précision sur les risques dont il assurerait la prévention.
En outre, la prévention irrigue tous les métiers de l'accompagnement et du soin aux personnes vulnérables et doit en principe être l'affaire de tous les professionnels de l'établissement ou du service. La désignation d'un référent pour s'occuper des activités de prévention porte le risque de diluer cet objectif aux yeux des autres professionnels.
À cet égard, la multiplication des référents ne semble pas probante. Ainsi, la création du référent sport par la loi du 2 mars 202276(*) aurait eu pour effet de détourner les autres professionnels du sujet. De manière générale, il n'est pas attribué de ressources spécifiques aux référents, qui n'ont pas toujours la capacité de dégager du temps pour s'acquitter de cette mission. En l'occurrence, le texte ne prévoit pas d'autre ressource qu'une formation sommaire en matière de santé publique.
Enfin, les rapporteurs soulignent les risques que comporterait la désignation d'un référent bénévole, alors que l'expertise que demande le sujet de la prévention nécessiterait le recours à un professionnel.
À leur initiative, la commission a adopté l'amendement COM-166 de suppression.
La commission a supprimé cet article.
Article
1er ter
Rapport annuel au Parlement sur l'activité de la
conférence nationale de l'autonomie et du centre de ressources
probantes
Cet article, inséré en commission à l'Assemblée nationale, prévoit la remise chaque année au Parlement par le Gouvernement d'un rapport d'évaluation de la conférence nationale de l'autonomie et du centre de ressources probantes.
La commission a supprimé cet article.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale
Cet article résulte de l'adoption en commission à l'Assemblée nationale d'un amendement de Cyrille Isaac-Sibille (groupe Démocrate).
Il dispose que le Gouvernement remet chaque année au Parlement un rapport d'évaluation détaillé de l'activité de la conférence nationale de l'autonomie et du centre national de preuves de prévention de la perte d'autonomie et de ressources gérontologiques créés à l'article 1er de la proposition de loi.
En séance publique, deux amendements identiques d'Emmanuelle Anthoine (Les Républicains) et de la rapporteure Laurence Cristol ont été adoptés afin de faire référence au « centre de ressources probantes », par coordination avec la dénomination retenue à l'article 1er.
II - La position de la commission
Conformément à sa position constante sur les demandes de rapport, la commission a adopté un amendement COM-167 de suppression de l'article.
La commission a supprimé cet article.
Article
2
Utilisation des registres nominatifs pour lutter
contre l'isolement
social des personnes vulnérables
Cet article vise à étendre l'utilisation des registres des personnes vulnérables tenus par les maires afin de lutter contre l'isolement social.
L'Assemblée nationale l'a modifié afin de permettre la transmission des données contenues dans ces registres aux établissements et services sociaux et médico-sociaux. Elle a également prévu la transmission aux maires des données concernant les bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie, de la prestation de compensation du handicap et de prestations d'action sociale de la branche vieillesse.
La commission a adopté cet article modifié par deux amendements visant à préciser les modalités de la transmission et de l'utilisation des données.
I - Le dispositif proposé : utiliser les registres « canicule » afin de lutter contre l'isolement social
A. Les registres « canicule » tenus par les maires : un dispositif constitué sur la base du volontariat et d'accès restreint
En réaction à la canicule de l'été 2003, la loi du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie77(*) a prévu la création de registres municipaux de personnes vulnérables permettant, en cas de canicule, d'appeler les personnes inscrites pour vérifier qu'elles vont bien et, si besoin, leur apporter conseil ou aide. Les données, qui contiennent des éléments relatifs à l'identité, à l'âge et au domicile des personnes âgées ou en situation de handicap, sont recueillies dans ces registres à la demande des personnes concernées, ou à la demande d'un tiers à la condition que la personne concernée ou son représentant légal ne s'y soient pas opposés78(*).
Une enquête publiée par Santé publique France en 2019 montre cependant que nombre de personnes, y compris parmi les plus vulnérables, ne sont pas recensées dans ces registres79(*).
En outre, ces données nominatives ne peuvent être consultées que par les agents chargés de la mise en oeuvre de ce recueil et de celle du plan d'alerte et d'urgence canicule départemental.
B. La proposition d'élargir l'utilisation de ces registres nominatifs
L'article 2 de la proposition de loi vise à élargir l'utilisation des registres « canicule » en vue de faciliter le repérage par les services sanitaires et sociaux des personnes âgées ou en situation de handicap qui pourraient être concernées par l'isolement social.
Il prévoit ainsi, dans sa rédaction initiale, que les données du registre soient notamment utilisées par les services sociaux et sanitaires pour proposer aux personnes répertoriées des actions visant à lutter contre l'isolement social.
L'isolement social
L'isolement social est la situation dans laquelle se trouve une personne qui, du fait de relations durablement insuffisantes par leur nombre ou leur qualité, est en situation de souffrance et de danger. Pour le Conseil économique, social et environnemental (CESE), « les relations d'une qualité insuffisante sont celles qui produisent un déni de reconnaissance, un déficit de sécurité et une participation empêchée. Le risque de cette situation tient au fait que l'isolement prive de certaines ressources impératives pour se constituer en tant que personne et accéder aux soins élémentaires et à la vie sociale. » 80(*)
Selon le Baromètre solitude et isolement des Petits Frères des pauvres, 2 millions de personnes âgées de 60 ans et plus étaient, en 2021, isolées des cercles familiaux et amicaux, contre 900 000 en 2017. Parmi elles, 530 000 personnes, vivant dans un isolement extrême et ne rencontrant quasiment jamais ou très rarement d'autres personnes, seraient en situation de « mort sociale »81(*).
II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale
A. Les modifications adoptées en commission
À l'Assemblée nationale, la commission a adopté deux amendements identiques de Josiane Corneloup (Les Républicains) et de Thibault Bazin (Les Républicains) visant à permettre la transmission des données recueillies dans le registre des personnes vulnérables aux établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESMS) prenant en charge des personnes âgées ou en situation de handicap.
La commission a également adopté un amendement de Jérôme Guedj (Socialistes et apparentés) permettant la transmission aux maires des données relatives aux bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), de la prestation de compensation du handicap (PCH) et aux personnes relevant des groupes iso-ressources (GIR) 5 et 6 bénéficiaires de prestations d'action sociale de la Caisse nationale d'assurance vieillesse (Cnav) afin de les inscrire sur le registre des personnes vulnérables. Un sous-amendement de la rapporteure Laurence Cristol est venu préciser que ces données ne pourraient être transmises qu'avec accord du bénéficiaire ou, le cas échéant, de la personne chargée à son égard d'une mesure de protection juridique (d du 1°).
En outre, à l'initiative de François Gernigon (Horizons), la commission a prévu que les services sociaux et sanitaires puissent également utiliser le registre des personnes vulnérables pour informer les personnes âgées et leurs proches des dispositifs d'aide et d'accompagnement existants et de leurs droits.
La commission a enfin adopté trois amendements rédactionnels de la rapporteure.
B. Les modifications adoptées en séance publique
En séance publique, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de Sébastien Peytavie (Écologiste) visant à étendre l'utilisation des données du registre au repérage des situations de perte d'autonomie et à l'information des personnes en perte d'autonomie (et non plus seulement des personnes âgées) sur les dispositifs d'aide et d'accompagnement existants.
En outre, un amendement de Thibaut Bazin (Les Républicains), sous-amendé par la rapporteure, a étendu la transmission de données concernant les bénéficiaires de l'APA, de la PCH et des bénéficiaires de prestations d'action sociale de la branche vieillesse aux présidents d'intercommunalité gérant un centre intercommunal d'action sociale (CIAS).
L'Assemblée nationale a adopté cet article ainsi modifié.
III - La position de la commission : préciser les modalités de transmission et d'utilisation des données
Si la mesure proposée était initialement très modeste, sa réécriture par l'Assemblée nationale peut lui permettre de répondre aux limites actuelles des registres des personnes vulnérables.
Sa rédaction laisse toutefois subsister des ambiguïtés sur l'origine et sur la destination des données.
D'abord, si le texte prévoit la transmission de données relatives aux bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), de la prestation de compensation du handicap (PCH) et aux personnes relevant des GIR 5 et 6, il ne précise pas quelles personnes sont chargées de cette transmission.
Ensuite, il indique que ces données seraient transmises aux présidents d'établissement public de coopération intercommunale gérant un CIAS alors que seuls les maires gèrent le registre des personnes vulnérables.
Sur la proposition des rapporteurs, la commission a donc adopté l'amendement COM-168 visant à :
- préciser que les données concernant les bénéficiaires de l'APA, de la PCH et les GIR 5 et 6 seraient transmises par le président du conseil départemental et les caisses d'assurance retraite et de santé au travail (Carsat) ;
- prévoir que ces données sont transmises aux maires ;
- garantir qu'elles puissent être utilisées par les centres communaux d'action sociale (CCAS) et les CIAS ;
- permettre l'utilisation de ces données pour informer les personnes en situation de handicap, et non seulement les personnes âgées et en perte d'autonomie, des dispositifs d'aide et d'accompagnement existants ainsi que de leurs droits.
Par ailleurs, considérant qu'un régime d'autorisation préalable pourrait compromettre l'efficacité du dispositif, la commission a adopté l'amendement COM-169 des rapporteurs visant à permettre la transmission des données aux maires sans l'accord exprès des bénéficiaires mais en l'absence d'opposition de leur part.
La commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article
2 bis A
Programme de dépistage précoce et de
prévention de la perte d'autonomie
Cet article, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, vise à généraliser un programme de dépistage précoce et de prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées basé sur la démarche « ICOPE ».
La commission a modifié cet article afin de préciser l'articulation de ce programme avec les rendez-vous de prévention et d'encadrer la collecte, la transmission et l'utilisation des données nominatives.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale
A. Le développement d'outils de dépistage de la perte d'autonomie ciblés
1. L'expérimentation du programme ICOPE
La démarche « ICOPE »82(*) se base sur les recommandations de prévention de la perte d'autonomie des seniors publiées par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2019. Ces travaux ont identifié la mobilité, la mémoire, la vue, l'audition, la santé psychique et la nutrition comme les six fonctions essentielles au maintien de l'autonomie.
Le programme ICOPE consiste en une démarche de dépistage multidimensionnel en cinq étapes, ciblé sur les personnes âgées de 60 ans et plus (cf. encadré ci-après). Il permet une prévention de la dépendance selon une approche participative et personnalisée.
Les étapes du programme ICOPE
Étape 1 : le repérage du déclin d'une ou plusieurs fonctions
Ce repérage est basé sur un questionnaire simple, réalisable en une dizaine de minutes et utilisable par tout professionnel formé (même extérieur au monde de la santé) ou en auto-évaluation.
Il est recommandé de réitérer ce test tous les ans.
Étape 2 : l'évaluation approfondie des capacités identifiées comme « altérées »
Cette évaluation, réalisée par un professionnel de santé formé, n'est pas uniquement médicale mais intègre l'environnement, la situation et les habitudes de la personne.
Étape 3 : le plan personnalisé de soins (PPS)
Basé sur l'expertise d'une équipe pluridisciplinaire, sur les résultats de l'étape 2 ainsi que sur les motivations de la personne, ce PPS comprend des interventions à composantes multiples, la prise en charge des pathologies sous-jacentes, l'auto-prise en charge ainsi que des soins socio-médicaux.
Étape 4 : la mise en place du parcours de soins avec un suivi régulier
Cette mise en oeuvre effective peut comprendre la prise en charge par un ou plusieurs professionnels de santé, la participation à des ateliers collectifs ou individuels ou encore un accompagnement social.
Étape 5 (étape transversale) : l'intégration des aidants, de la communauté et des politiques publiques
Cette étape correspond à la mise en place sur le territoire de toutes les ressources nécessaires pour prévenir la dépendance. Elle vise à prendre en compte le proche aidant dans les ressources qu'il peut apporter mais aussi dans la prévention de son épuisement. Elle inclut aussi la communauté de manière à placer le parcours dans une réelle dynamique de gérontologie sociale83(*).
L'ambition du programme ICOPE est donc d'augmenter l'espérance de vie sans incapacité et de diminuer la prévalence de la perte d'autonomie. Le rapport « grand âge et autonomie » de Dominique Libault préconisait ainsi de déployer ce programme et d'en faire « la matrice d'une approche renouvelée et systémique de la prévention de la perte d'autonomie »84(*).
En France, le programme est mis en oeuvre à titre expérimental depuis octobre 2019 dans le cadre des expérimentations en santé prévues par l'article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale (dit « article 51 »). Initialement lancé dans la région Occitanie, au sein du gérontopôle de Toulouse, il est actuellement mis en oeuvre par 13 porteurs dans 9 régions françaises.
Une évaluation de cette expérimentation est en cours et ses résultats restent attendus.
Questionnaire de la première étape du programme ICOPE
Source : Livret de présentation du dispositif « Mon bilan prévention »
2. L'introduction de rendez-vous de prévention à certains âges clés de la vie
La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 202385(*) a prévu que tous les adultes de 18 ans et plus bénéficient de mesures de prévention sanitaire et sociale comportant notamment des rendez-vous de prévention proposés aux assurés à certains âges clés86(*). Ces « rendez-vous » peuvent donner lieu à des consultations de prévention mais aussi à des séances d'information, d'éducation pour la santé, de promotion de la santé et de prévention.
Un de leurs objectifs, fixés par la loi, est la détection des premières fragilités liées à l'âge en vue de prévenir la perte d'autonomie. Il s'agit, concernant les personnes âgées de 60 à 65 ans, de pérenniser et de créer un cadre juridique pour les « rendez-vous de prévention jeunes retraités », priorisant ceux en situation de vulnérabilité et déjà déployés par les caisses d'assurance maladie et retraite afin de prévenir la perte d'autonomie selon une approche globale des grandes capacités fonctionnelles87(*).
L'article L. 1411-7 du code de la santé publique renvoie à un arrêté ministériel la fixation du nombre et la périodicité des rendez-vous de prévention, consultations et séances. Cet arrêté n'a pas encore été publié.
Le dispositif a cependant été ajusté par la LFSS pour 2024 afin, d'une part, d'y intégrer la possibilité de recourir au télésoin et, d'autre part, de prévoir la fixation par arrêté du ministre chargé de la santé de la liste des professionnels habilités à réaliser les rendez-vous de prévention, du montant des tarifs de ces rendez-vous ainsi que des conditions de facturation de ces rendez-vous et des actes ou prestations complémentaires éventuellement réalisés à cette occasion. En outre, elle a ajouté, suivant la recommandation du Haut Conseil de la santé publique (HCSP), un rendez-vous de prévention pour les assurés âgés de 70 à 75 ans88(*).
B. Le dispositif proposé : une généralisation de la démarche ICOPE
Cet article a été inséré en séance publique à l'Assemblée nationale par un amendement de François Gernigon et de plusieurs de ses collègues du groupe Horizons.
Il a pour objet de généraliser le programme ICOPE.
Le I insère à cette fin dans le code de la santé publique un nouvel article L. 1411-6-3 instaurant un programme de dépistage précoce et de prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées d'au moins 60 ans. Ce programme devra respecter un cahier des charges national fixé par voie réglementaire.
Un décret en Conseil d'État devra prévoir les modalités de pilotage du programme ainsi que les conditions dans lesquelles les différents acteurs concourant à sa mise en oeuvre coopèrent et partagent des données.
Le II fixe au 1er janvier 2025 l'entrée en vigueur du dispositif.
II - La position de la commission
A. Articuler les dispositifs de prévention
Le programme ICOPE suscite de légitimes espoirs en matière de prévention de la perte d'autonomie et sa généralisation est bienvenue à condition que des moyens suffisants y soient consacrés.
Toutefois, cet article prévoit la généralisation de ce programme sans aucune indication sur les modalités de sa mise en oeuvre.
Le livret de présentation du dispositif « Mon bilan prévention », publié par l'assurance maladie en décembre 2023, indique cependant que la première étape de la démarche ICOPE serait réalisée à l'occasion des rendez-vous de prévention à 60-65 ans puis à 70-75 ans.
Ce rendez-vous pourrait également être l'occasion de conduire l'évaluation approfondie (étape 2) lorsque des fragilités ont été identifiées avec le test ou l'autotest.
Afin de garantir la bonne articulation de ces dispositifs, la commission a adopté l'amendement COM-170 des rapporteurs précisant que les rendez-vous de prévention proposés à partir de l'âge de 60 ans contribueraient au programme ICOPE.
En outre, les rapporteurs étant convaincus que la grippe est un facteur de perte d'autonomie, cet amendement prévoit également que ces rendez-vous donnent lieu à une information sur les conséquences de la grippe.
B. Encadrer l'usage des données
Le texte issu de l'Assemblée nationale ne prévoit pas quels seront les acteurs chargés de la mise en oeuvre du programme et n'évoquent que les conditions dans lesquelles ceux-ci partageraient des données, en les renvoyant à un décret en Conseil d'État.
Les rapporteurs considèrent qu'en renvoyant au pouvoir réglementaire l'ensemble des modalités du partage de données entre ces acteurs, y compris des informations relatives à la santé des personnes, le législateur court le risque de ne pas épuiser sa compétence et de ne pas apporter de garantie suffisante afin de protéger le droit au respect de la vie privée.
La commission a donc adopté, à l'initiative des rapporteurs, l'amendement COM-171 précisant que le décret prévu à cet article devra définir les acteurs concourant à la mise en oeuvre du programme ICOPE et préciser les conditions dans lesquels ceux-ci coopèrent et collectent, transmettent et utilisent des données nominatives dans des conditions garantissant leur confidentialité.
La commission a adopté cet article ainsi modifié.
Article
2 bis B
Loi de programmation pluriannuelle pour le grand
âge
Cet article, inséré en séance publique à l'Assemblée nationale, prévoit l'adoption, avant le 31 décembre 2024 puis tous les cinq ans, d'une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge.
La commission a adopté cet article sans modification.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale : la promesse d'une loi de programmation quinquennale
Cet article est issu de l'adoption en séance publique de six amendements identiques déposés par Jérôme Guedj (Socialistes et apparentés), Stéphane Viry (Les Républicains), Vincent Descoeur (Les Républicains), Anthony Brosse (Renaissance), Xavier Breton (Les Républicains) et Pierre Dharréville (Gauche démocratique et républicaine).
Dans sa rédaction initiale, il prévoyait l'adoption, avant le 1er septembre 2023 puis tous les cinq ans, d'une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge déterminant la trajectoire des finances publiques en matière d'autonomie des personnes âgées pour une période minimale de cinq ans.
Cette loi de programmation définirait les objectifs de financement public nécessaires pour assurer le bien-vieillir des personnes âgées à domicile et en établissement et le recrutement des professionnels, ainsi que les moyens mis en oeuvre par l'État pour atteindre ces objectifs.
Dans le cadre d'une seconde délibération89(*), un amendement du Gouvernement a décalé au 31 décembre 2024 la date limite d'adoption de la première loi de programmation du genre.
II - La position de la commission : un affichage sans portée normative
Demandée par l'ensemble des groupes de l'Assemblée nationale, la loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge a fait l'objet, depuis le retour à l'ordre du jour de la proposition de loi en novembre 2023, d'engagements clairs de la Première ministre et de la ministre des solidarités et des familles. Un projet de loi de programmation serait ainsi présenté par le Gouvernement avant l'été 2024 puis adopté d'ici la fin de l'année.
Ce projet de loi est très attendu par l'ensemble des acteurs du grand âge et, malgré les limites de l'exercice, les rapporteurs reconnaissent l'intérêt d'une programmation pluriannuelle de la trajectoire des finances publiques en matière d'autonomie. Le président du Conseil de la CNSA, Jean-René Lecerf, a quant à lui considéré, lors de son audition par la commission des affaires sociales, que « ce n'est certes pas la grande loi autonomie dont nous rêvions, notamment parce que ce texte sera contraint par l'aspect financier, mais cela s'en approche »90(*).
Ce texte s'inscrirait dans le cadre de l'article 34 de la Constitution, qui permet à des lois de programmation de déterminer les objectifs de l'action de l'État. En l'espèce, la loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge n'aurait de sens que si elle intégrait également les objectifs et la trajectoire financière d'autres acteurs, notamment la branche autonomie de la sécurité sociale et les départements.
Toutefois, une loi ordinaire ne saurait contraindre le Gouvernement à déposer un projet de loi de programmation, ni le Parlement à l'adopter avant une date déterminée.
En effet, le Conseil constitutionnel a déjà expressément jugé qu'imposer le dépôt d'un projet de loi avant une date donnée est une injonction au Gouvernement contraire à la Constitution91(*).
Il a tout aussi expressément jugé, « considérant que le législateur ne peut lui-même se lier », qu'une injonction du législateur à lui-même est dépourvue de toute normativité92(*) et, depuis 2005, censure les dispositions législatives manifestement dépourvues de portée normative93(*).
Lorsqu'ils ont échappé à la vigilance du Conseil constitutionnel, les précédents tendent à démontrer l'absence de caractère contraignant d'une telle disposition. Ainsi, l'article L. 100-1 A du code de l'énergie, introduit par la loi « Énergie-Climat » du 8 novembre 201994(*), prévoit l'adoption, avant le 1er juillet 2023 puis tous les cinq ans, d'une loi déterminant les objectifs et fixant les priorités d'action de la politique énergétique nationale pour répondre à l'urgence écologique et climatique95(*). Un tel projet de loi n'a toujours pas été déposé à ce jour.
Dès lors, les rapporteurs considèrent que l'article 2 bis B ne relève pas du domaine de la loi. Sa portée est donc uniquement morale et symbolique mais nullement juridique.
Cependant, la commission n'entend pas remettre en cause l'engagement répété du Gouvernement à présenter une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge96(*) et sera attentive à la concrétisation de cette promesse. Elle a souhaité conserver cet article en l'état afin que cet engagement lui soit rappelé.
La commission a adopté cet article sans modification.
Article
2 bis
Rapport au Parlement d'évaluation de l'article 2
Cet article, inséré en commission à l'Assemblée nationale, demande au Gouvernement la remise au Parlement d'un rapport d'évaluation de l'article 2 de la proposition de loi.
La commission a supprimé cet article.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale
Cet article résulte de l'adoption en commission de deux amendements identiques de Yannick Neuder (Les Républicains) et Thibault Bazin (Les Républicains).
Il prévoit la remise par le Gouvernement, dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la loi, d'un rapport au Parlement d'évaluation de l'article 2 de la proposition de loi relatif à l'élargissement de l'utilisation des registres des personnes vulnérables tenus par les maires97(*). Ce rapport devrait préciser les actions de lutte contre l'isolement social menées, leurs résultats et le profil des publics accompagnés.
II - La position de la commission : supprimer cet article
Fidèle à sa position constante concernant les demandes de rapport, la commission a adopté, à l'initiative des rapporteurs, un amendement COM-172 de suppression.
La commission a supprimé cet article.
Article
2 ter
Rapport au Parlement sur la trajectoire financière
de
la branche autonomie jusqu'en 2030
Cet article, inséré en commission à l'Assemblée nationale, demande au Gouvernement la remise d'un rapport sur la trajectoire financière de la branche autonomie de la sécurité sociale jusqu'en 2030.
La commission a supprimé cet article.
I - Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale
Cet article résulte de l'adoption en commission d'un amendement de Yannick Neuder (Les Républicains).
Il dispose que le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, un rapport sur la trajectoire financière de la branche autonomie jusqu'en 2030 au regard des évolutions de la démographie et des besoins. Ce rapport formulerait des propositions pour affecter progressivement de nouvelles ressources au financement de la branche autonomie et pour garantir la pérennité des financements destinés au fonctionnement et à l'investissement de l'ensemble des établissements et des services sociaux et médico-sociaux (ESMS).
En séance publique, cet article a été modifié par deux amendements rédactionnels de la rapporteure Laurence Cristol.
II - La position de la commission : supprimer cet article
Les demandes de rapport ne constituent pas une bonne méthode de législation : dépourvues de caractère normatif, elles restent souvent lettre morte. En outre, le Parlement dispose de pouvoirs de contrôle qui lui permettent de réaliser ses propres rapports d'information.
S'agissant de la demande d'informations formulée par cet article, le rapport de Laurent Vachey de 2020 sur la création de la branche autonomie98(*) avait déjà examiné en détail les différentes pistes pour accroître les ressources de la branche autonomie. Elle devrait également être satisfaite au cours des prochains mois dans le cadre de l'examen du projet de loi de programmation promis par le Gouvernement et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025. La commission a donc adopté un amendement de suppression des rapporteurs (COM-173).
La commission a supprimé cet article.
* 5 Loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.
* 6 Ordonnance n° 2021-1554 du 1er décembre 2021 relative à la mise en oeuvre de la création de la cinquième branche du régime général de la sécurité sociale relative à l'autonomie.
* 7 Article L. 223-5 du code de la sécurité sociale.
* 8 Art. L. 223-7 du code de la sécurité sociale.
* 9 Loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 d'adaptation de la société au vieillissement.
* 10 Pour plus de précisions, le lecteur est invité à se reporter au commentaire de l'article 1er bis A.
* 11 Voir le compte rendu de l'audition du 20 décembre 2023 annexé au présent rapport.
* 12 Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), les données probantes sont des conclusions tirées de recherches et autres connaissances qui peuvent servir de base utile à la prise de décision dans le domaine de la santé publique et des soins de santé.
* 13 Source : CNSA.
* 14 Voir le compte rendu de l'audition du 20 décembre 2023 annexé au présent rapport.
* 15 Source : commission des finances du Conseil de la CNSA du 4 mars 2022.
* 16 Source : Agence nouvelle des solidarités actives, What Works Centres britanniques : quels enseignements pour des politiques fondées sur la preuve en France ?, mars 2017.
* 17 Pour plus de précisions, le lecteur peut se reporter au commentaire de l'article 1er bis A.
* 18 Cf. commentaire de l'article 1er bis B.
* 19 En l'état, cet article ne pourrait prendre effet que jusqu'à la date d'entrée en vigueur du I de l'article 1er bis A, soit au plus tard jusqu'au 1er janvier 2025.
* 20 Voir le compte rendu de l'audition du 20 décembre 2023 annexé au présent rapport.
* 21 Loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 d'adaptation de la société au vieillissement.
* 22 Article L. 233-1 du code de l'action sociale et des familles.
* 23 Article L. 313-12 du code de l'action sociale et des familles.
* 24 Article L. 233-3 du code de l'action sociale et des familles.
* 25 Article L. 233-5 du code de l'action sociale et des familles.
* 26 Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.
* 27 Article L. 233-1-1 du code de l'action sociale et des familles.
* 28 Article L. 233-3-1 du code de l'action sociale et des familles.
* 29 Article L. 281-2 du code de l'action sociale et des familles.
* 30 Article L. 233-2 du code de l'action sociale et des familles.
* 31 Article L. 233-4 du code de l'action sociale et des familles.
* 32 Loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé - Article 23.
* 33 Article L. 6327-2 du code de la santé publique.
* 34 Source : enquête DGOS menée auprès des ARS, novembre 2022.
* 35 Source : CNSA.
* 36 Axe « Promouvoir le lien social et la citoyenneté », mesure n° 23.
* 37 Cette dénomination a été substituée à celle de « service public territorial de l'autonomie » par le sous-amendement de M. Thibaut Bazin.
* 38 Voir le commentaire de l'article 1er.
* 39 Cf. commentaire de l'article 1er.
* 40 Le texte rétablit la référence aux Spasad qui avait été remplacée par la référence aux SAD par l'article 44 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022.
* 41 Article L. 281-2 du code de l'action sociale et des familles.
* 42 Alpes-Maritimes, Aveyron, Corrèze, Finistère, Gironde, Guyane, Hauts-de-Seine, Hérault, Loir-et-Cher, Mayenne, Meurthe-et-Moselle, Nord, Pas-de-Calais, Sarthe, Seine-Maritime, Seine-Saint-Denis, Somme, Yvelines.
* 43 « Aurore Bergé, ministre des Solidarités et des Familles, annonce les 18 départements préfigurateurs du service public départemental de l'autonomie », communiqué de presse du ministère des solidarités et des familles du 22 décembre 2023.
* 44 Cf. commentaire de l'article 13 bis.
* 45 G. Berrut, S. Podevyn-Menant, Cahier des charges des gérontopôles, février 2022.
* 46 « Une union nationale pour les gérontopôles », Ehpadia, 14 juin 2023.
* 47 G. Berrut, S. Podevyn-Menant, Cahier des charges des gérontopôles, février 2022.
* 48 Loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement.
* 49 Plus précisément, il ne pourrait prendre effet que jusqu'à la date d'entrée en vigueur du I de l'article 1er bis A, soit au plus tard jusqu'au 1er janvier 2025.
* 50 Voir le commentaire de l'article 1er bis A pour plus de précisions.
* 51 Pour plus de précisions, le lecteur peut se reporter au commentaire de l'article 1er bis A.
* 52 Plus précisément, il ne pourrait prendre effet que jusqu'à la date d'entrée en vigueur du I de l'article 1er bis A, soit au plus tard jusqu'au 1er janvier 2025.
* 53 Voir le commentaire de l'article 1er bis A.
* 54 Pour plus de précisions, le lecteur peut se reporter au commentaire de l'article 1er bis A.
* 55 Dr Philippe Denormandie et Cécile Chevalier, Des aides techniques pour l'autonomie des personnes en situation de handicap ou âgées : une réforme structurelle indispensable, octobre 2020.
* 56 Arrêté du 18 février 2021 relatif à l'expérimentation nationale d'équipes locales d'accompagnement sur les aides techniques (EqLAAT).
* 57 Arrêté du 30 juillet 2021 abrogeant l'arrêté du 18 février 2021 relatif à l'expérimentation nationale d'équipes locales d'accompagnement sur les aides techniques (EqLAAT).
* 58 Arrêté du 22 juillet 2022 modifiant l'arrêté du 30 juillet 2021 abrogeant l'arrêté du 18 février 2021 relatif à l'expérimentation nationale d'équipes locales d'accompagnement sur les aides techniques (EqLAAT).
* 59 Arrêté du 4 août 2023 modifiant l'arrêté du 30 juillet 2021 relatif à l'expérimentation nationale d'équipes locales d'accompagnement sur les aides techniques (EqLAAT).
* 60 Article L. 312-5 du code de l'action sociale et des familles.
* 61 Article L. 223-8 du code de la sécurité sociale.
* 62 Décision n° 2023-860 DC du 21 décembre 2023.
* 63 Loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale -Article 138.
* 64 Loi n° 2002-02 du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale - Article 21.
* 65 Article L. 312-7 du code de l'action sociale et des familles.
* 66 Renforcer le GCSMS pour accélérer l'évolution de l'offre d'Ehpad publique, rapport Anap, mars 2023.
* 67 Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.
* 68 Loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé.
* 69 Article L. 6132-3 du code de la santé publique.
* 70 Article L. 315-14 du code de l'action sociale et des familles.
* 71 Cour des comptes, L'accompagnement des personnes en situation de handicap vieillissantes, septembre 2023.
* 72 Loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement.
* 73 Décret n° 2016-1873 du 26 décembre 2016 fixant le cahier des charges et la procédure de labellisation des maisons départementales de l'autonomie.
* 74 Pour plus de précisions, voir le commentaire de l'article 1er bis A.
* 75 Décision n° 2021-832 DC du 16 décembre 2021, paragraphes 54 et 63.
* 76 Loi n° 2022-296 du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France - Article 1er.
* 77 Loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées - Article 1er.
* 78 Article L. 121-6-1 du code de l'action sociale et des familles.
* 79 « Canicule et personnes vulnérables : enquête sur les registres municipaux », La Santé en action, n° 448, juin 2019.
* 80 Combattre l'isolement social pour plus de cohésion et de fraternité, Avis du Conseil économique, social et environnemental, juin 2017.
* 81 Baromètre solitude et isolement : Quand on a plus de 60 ans en France en 2021, rapport Petits Frères des pauvres #6, septembre 2021.
* 82 Acronyme anglais de « Integrated Care for Older People » (« Soins intégrés aux personnes âgées »).
* 83 Source : « ICOPE : Un exemple de parcours intégré de prévention pluridisciplinaire pour faire face aux enjeux de la dépendance », Regards 2023/1 (n° 61), juin 2023.
* 84 Concertation grand âge et autonomie, rapport de M. Dominique Libault, mars 2019.
* 85 Loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022 de financement de la sécurité sociale pour 2023 - Article 29.
* 86 Article L. 1411-6-2 du code de la santé publique.
* 87 Cf. rapport de la commission des affaires sociales du Sénat sur le PLFSS pour 2023 (commentaire de l'article 17).
* 88 Loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 - Article 41.
* 89 Celle-ci a eu lieu, à la demande du Gouvernement, sept mois après l'adoption des amendements initiaux, lors de la seconde phase de l'examen du texte en séance publique, le 23 novembre 2023.
* 90 Cf. compte rendu de l'audition du 20 décembre 2023 annexé au présent rapport.
* 91 Décision n° 89-269 DC du 22 janvier 1990.
* 92 Décision n° 82-142 DC du 27 juillet 1982.
* 93 Décision n° 2005-512 DC du 21 avril 2005.
* 94 Loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat.
* 95 Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2019-791 DC du 7 novembre 2019, ne s'était pas prononcé sur l'introduction de cette disposition.
* 96 L'ancienne ministre des solidarités et des familles, Mme Aurore Bergé, a notamment déclaré devant l'Assemblée nationale, le 20 novembre 2023 : « La loi de programmation que vous, parlementaires, avez demandée - je l'avais moi-même demandée lorsque j'étais députée - constitue une fondation essentielle. Au nom du Gouvernement et avec l'appui de la Première ministre, je m'engage à ce qu'une telle loi vous soit présentée. Vous êtes libres de me croire ou non, mais je ne peux pas être plus claire : l'arbitrage a été rendu, l'engagement est pris. J'irais presque jusqu'à le tatouer sur ma peau, s'il fallait cela pour vous convaincre ! ».
* 97 Voir le commentaire de l'article 2 pour plus de précisions.
* 98 La branche autonomie : périmètre, gouvernance et financement, rapport de M. Laurent Vachey, septembre 2020.