LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION

Dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, le Gouvernement n'a retenu aucun amendement de crédits relatif à la mission « Investir pour la France de 2030 ».

Il a en revanche retenu un amendement portant sur la création d'un article additionnel rattaché à la mission « Investir pour la France de 2030 », l'article 34 bis qui a pour objet de conditionner l'octroi des aides du plan France 2030 au respect par les bénéficiaires de la réglementation en matière de publication par les entreprises d'un bilan carbone.

EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

ARTICLE 54 bis (nouveau)

Conditionnalité de l'octroi des aides du plan France 2030 au respect de la réglementation en matière de publication par les entreprises d'un bilan carbone

Le présent article prévoit de conditionner l'octroi aux entreprises bénéficiaires finales des aides du plan France 2030 à la publication annuelle par ces entreprises d'un bilan de leurs émissions de gaz à effet de serre.

Les rapporteurs spéciaux, qui partagent l'objectif de renforcer l'effectivité de l'obligation de publication d'un bilan carbone pour certaines entreprises qui figure actuellement dans le code de l'environnement, ont proposé deux amendements adoptés par la commission ayant pour objet d'aligner le dispositif de conditionnalité sur le droit actuellement applicable, de manière à augmenter l'effectivité de l'obligation de publication d'un bilan carbone sans alourdir les charges pesant sur les entreprises concernées.

La commission des finances propose d'adopter cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : LES ENTREPRISES DE PLUS DE CINQ CENTS EMPLOYÉS SONT SOUMISES À UNE OBLIGATION DE PUBLICATION D'UN « BILAN CARBONE »

A. LES PERSONNES MORALES DE DROIT PRIVÉ QUI EMPLOIENT PLUS DE CINQ CENTS PERSONNES SONT TENUES DE PUBLIER ET D'ACTUALISER RÉGULIÈREMENT UN BILAN DE LEURS ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE

La loi dite « Grenelle II » du 12 juillet 201054(*) a créé l'obligation, pour certains organismes publics et privés, d'établir un bilan de leurs émissions de gaz à effet de serre (BEGES). Cette obligation est codifiée à l'article L. 229-25 du code de l'environnement, qui précise que ce bilan est assorti d'un plan de transformation pour réduire les émissions de GES et que ce bilan et ce plan sont rendus publics.

En dehors des personnes publiques, qui n'entrent pas dans le champ du présent article, les personnes privées soumises à l'obligation d'établissement d'un bilan carbone sont les personnes morales de droit privé employant plus de 500 personnes. Dans les régions et départements d'outre-mer, le législateur a prévu l'application de cette obligation aux personnes morales de droit privé employant plus 250 personnes.

Les personnes privées soumises à l'obligation d'établissement d'un bilan carbone ont l'obligation de le mettre à jour tous les quatre ans.

Enfin, le législateur a prévu que l'administration inflige une sanction d'un montant maximum de 50 000 euros, porté à 100 000 euros en cas de récidive de manquement à l'établissement du bilan carbone.

B. LA MAJORITÉ DES ENTREPRISES SOUMISES À L'OBLIGATION DE PUBLICATION DE LEUR BILAN CARBONE NE S'Y CONFORMENT PAS

Les travaux d'évaluation du respect de l'obligation de publication d'un bilan carbone par les personnes assujetties témoignent du fait que l'obligation actuellement fixée par la loi a une portée limitée.

Selon l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), qui est secrétaire du pôle de la coordination nationale (PCN) sur les bilans d'émissions de gaz à effet de serre, le taux de conformité à la réglementation était au 31 décembre 202155(*) de 35 %.

Concernant les entreprises, qui font l'objet des prescriptions du présent article, le taux de conformité était estimé à 43 %, c'est-à-dire que seulement 1 336 des 3 106 entreprises soumises à l'obligation de publication d'un bilan carbone respectaient à cette date les prescriptions fixées par l'article L. 229-25 du code de l'environnement.

II. LE DISPOSITIF CONSIDÉRÉ COMME ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION : CONDITIONNER L'OCTROI DES AIDES DU PLAN FRANCE 2030 AU RESPECT DE L'OBLIGATION DE PUBLICATION D'UN BILAN CARBONE

Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, reprend un amendement de la députée Eva Sas (Écologiste). Examiné en séance publique à l'Assemblée nationale le 2 novembre 2023, cet amendement avait reçu un avis défavorable du Gouvernement avant d'être adopté.

Cet article a pour objet de subordonner l'octroi des crédits de la mission « Investir pour la France de 2030 » au fait que les bénéficiaires finaux, lorsqu'ils sont soumis à l'obligation de publication d'une déclaration de performance extra-financière, publient chaque année un bilan carbone.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : LA CONDITIONNALITÉ DES AIDES DU PLAN FRANCE 2030 EST UN LEVIER EFFICACE POUR RENFORCER L'EFFECTIVITÉ DES RÈGLES ACTUELLEMENT APPLICABLES AUX ENTREPRISES EN MATIÈRE DE PUBLICATION D'UN BILAN CARBONE

L'établissement par les entreprises d'un bilan des émissions de gaz à effet de serre, ou bilan carbone, est un instrument éprouvé pour favoriser la mise en oeuvre de la transition écologique, qui est entré en vigueur il y a plus de dix ans.

Les rapporteurs spéciaux ne peuvent que regretter que l'obligation de publication inscrite dans le code de l'environnement ne soit respectée que par une minorité des entreprises concernées, et ce en dépit de l'existence d'une sanction administrative en cas de non-respect de cette obligation, dont les quanta ont été rehaussés récemment par la loi du 23 octobre 202356(*) relative à l'industrie verte.

Par surcroît, les rapporteurs spéciaux relèvent que ce dispositif de conditionnalité est cohérent, d'une part, avec la programmation de 50 % des investissements du plan France 2030 en faveur de projets de décarbonation de l'économie, et, d'autre part, avec le principe d'absence de financement de projet défavorable à l'environnement dans le cadre du plan France 2030. L'Ademe, qui gère les travaux du pôle de coordination nationale sur les bilans d'émission de gaz à effet de serre, est également l'un des quatre opérateurs historiques du programme d'investissements d'avenir (PIA), devenu en 2022 le plan « France 2030 ».

Enfin, les rapporteurs spéciaux relèvent que la grande majorité des bénéficiaires des aides du plan France 2030 ne sont pas des entreprises de plus de 500 salariés et ne seront par conséquent pas affectées par ce mécanisme de conditionnalité.

En effet, d'après les données communiquées aux rapporteurs spéciaux par le Secrétariat général pour l'investissement, les entreprises de plus de 250 salariés ne représentent que 643 des 27 000 bénéficiaires uniques du plan France 2030, soit 2,4 % des organismes soutenus par le plan France 2030.

Par conséquent, les rapporteurs spéciaux soutiennent l'objectif de cet article qui est de conditionner l'octroi des aides versées dans le cadre du plan France 2030 au fait que le bénéficiaire final respecte la réglementation en vigueur en matière d'établissement par les entreprises d'un bilan des émissions de gaz à effet de serre.

La conditionnalité des aides aura pour conséquence de renforcer l'effectivité de la règle existante, sans modifier la charge pesant sur les entreprises pour respecter la réglementation.

La commission a adopté à ce titre plusieurs amendements déposés par les rapporteurs spéciaux ayant pour objet d'assurer la cohérence et l'effectivité du dispositif.

En premier lieu, en ce qui concerne le périmètre des entreprises concernées par le dispositif de conditionnalité, la commission a adopté l'amendement n° II-22 (FINC.1) des rapporteurs spéciaux qui a pour objet de fixer un périmètre d'application du dispositif de conditionnalité qui coïncide avec celui de l'obligation de publication d'un bilan carbone. Cet amendement prévoit également, pour assurer la cohérence du dispositif et sa portée utile, l'application du dispositif de conditionnalité à l'ensemble des aides octroyées aux bénéficiaires finaux à compter du 1er avril 2024.

En second lieu, en ce qui concerne les obligations des entreprises concernées par le dispositif de conditionnalité, la commission a adopté l'amendement n° II-23 (FINC.2) des rapporteurs spéciaux qui a pour objet de garantir que les obligations au respect desquelles l'octroi des aides est conditionné coïncident avec celles fixées actuellement par le code de l'environnement.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article ainsi modifié.


* 54 V. loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement.

* 55 cf. Ademe, septembre 2022, Évaluation 2021 de la règlementation des bilans d'émissions de gaz à effet de serre.

* 56 v. IV de l'art. 29 de la loi. n°2023-973 du 23 octobre 2023

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