EXAMEN DES ARTICLES
CHAPITRE IER
Favoriser le dialogue territorial et renforcer la
gouvernance décentralisée
Article 1er
Allonger les délais laissés aux
collectivités pour intégrer
dans leurs documents de
planification et leurs documents d'urbanisme
les objectifs de
réduction de l'artificialisation des sols
et accélérer
les procédures d'évolution des SRADDET
Cet article décale d'un an l'entrée en vigueur des différents documents régionaux de planification modifiés pour y inclure les objectifs et trajectoires de réduction de l'artificialisation prévus par la loi Climat-résilience.
En parallèle, afin d'accélérer les délais de modification des schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), il autorise la tenue simultanée de la consultation du public et des personnes publiques associées et réduit le délai d'approbation de ce dernier par le préfet de trois à un mois.
La commission a adopté trois amendements du rapporteur visant respectivement à rétablir le délai minimal de deux mois applicable à la mise à disposition du public du projet de modification du SRADDET, à permettre la consultation simultanée des personnes publiques associées et du public lors de la modification des schémas de cohérence territoriale (SCoT) et plans locaux d'urbanisme communaux ou intercommunaux (PLUi), et à permettre la saisine de la commission départementale de conciliation par les autorités compétentes pour l'élaboration des documents d'urbanisme, en cas de difficulté sur les évolutions des documents d'urbanisme concernant l'artificialisation des sols.
Elle a adopté deux amendements identiques permettant d'appliquer la procédure dérogatoire de modification du SRADDET aux autres objectifs et stratégies devant être intégrées simultanément au SRADDET.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - des délais contraints d'intégration dans les documents régionaux de planification et les documents d'urbanisme des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols
A. La loi Climat-résilience a introduit des délais contraints d'intégration dans les documents régionaux de planification et les documents d'urbanisme des objectifs de réduction de l'artificialisation tout en accélérant les procédures d'évolution de ces documents
1) La loi Climat-résilience a introduit un calendrier serré de modification des documents régionaux de planification et des documents d'urbanisme pour intégrer les objectifs de réduction de l'artificialisation
La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi Climat-résilience, a introduit un double objectif national visant à la réduction de l'artificialisation des sols, à savoir la réduction de moitié de la consommation d'espace sur la période 2021-2031 , par rapport la décennie précédente, et l' atteinte du « zéro artificialisation nette » à l'horizon 2050 .
Afin d'engager rapidement la décrue de l'artificialisation nécessaire à l'atteinte de cet objectif, l'article 194 de cette même loi a rendu obligatoire l'intégration, dans un délai déterminé, d'un objectif et d'une trajectoire de réduction de l'artificialisation des sols, dans les documents de planification régionaux (schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), schémas d'aménagement régionaux (SAR) pour les départements et régions d'outre-mer, plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC) et schéma directeur de la région Île-de-France (SDRIF)) ainsi que dans les schémas de cohérence territoriale (SCoT), plans locaux d'urbanisme (PLU) - ou plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUi) - et cartes communales .
La modification des documents régionaux de planification devait être engagée dans un délai maximum d'un an après promulgation de la loi Climat-résilience (intervenue en août 2021), pour une entrée en vigueur des documents ainsi modifiés au plus tard deux ans après l'entrée en vigueur de cette même loi , soit août 2023.
L'entrée en vigueur des SCoT modifiés devait quant à elle intervenir cinq ans maximum à compter de cette entrée en vigueur (soit août 2026) et celle des PLU(i) et cartes communales dans un délai de six ans (soit août 2027) . En effet, compte tenu de la hiérarchie des normes entre les documents d'urbanisme locaux et les documents régionaux de planification, la modification de ces derniers, l'évolution des documents régionaux de planification entraînera dans la majorité des cas une évolution « en cascade » des documents d'urbanisme locaux.
Aucun délai n'était en revanche prescrit pour l'engagement de la modification des SCoT, PLU(i) et cartes communales , l'intégration des nouvelles dispositions des documents régionaux de planification modifiés concernant les objectifs et trajectoires de réduction de l'artificialisation devant intervenir lors de leur plus prochaine révision ou modification à compter de l'adoption des documents régionaux de planification modifiés ou, pour les PLU(i) et cartes communales entrant dans le champ d'un SCoT, au moment de leur plus prochaine révision après modification de ce dernier.
2) Les délais de modification prévus par la loi Climat-résilience ont déjà été partiellement étendus par la loi « 3DS »
Prenant acte des difficultés rencontrées par les régions pour mettre à jour leurs documents de planification dans les délais impartis, la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite loi « 3DS » a repoussé 1 ( * ) le délai d'entrée en vigueur des documents régionaux de planification modifiés de deux ans à trente mois ( soit février 2024) , sans modifier parallèlement les délais d'entrée en vigueur des SCoT, PLU(i) et cartes communales qui devront être modifiés en conséquence.
3) La loi Climat-résilience a accéléré les procédures de modification des documents régionaux de planification et des documents d'urbanisme
L'article 194 de la loi Climat-résilience (premier alinéa du 1° du IV) a prévu la possibilité d' engager la modification du SRADDET selon la procédure simplifiée définie au I de l'article L. 4251-9 du code général des collectivités territoriales. Si cette procédure ne modifie pas les conditions et délais de consultation des personnes publiques associées (PPA) 2 ( * ) qui prévalent dans les procédures normales de révision du SRADDET (établies par délibération du conseil régional, pour ce qui le concerne), elle permet en revanche, au lieu de la procédure d'enquête publique habituelle, la mise à disposition du public du projet de modification et des avis des PPA uniquement par voie électronique, pour une durée de deux mois .
Le même article 194 de la loi Climat-résilience (3 e alinéa du 5° du IV) a également prévu l'utilisation des procédures de modification simplifiée prévues respectivement aux articles L. 143-37 à 143-39 et L. 153-45 à L. 153-48 du code de l'urbanisme pour l'actualisation des SCoT et des PLU(i) 3 ( * ) . Ces procédures permettent de réduire les délais de modification de ces différents documents d'urbanisme, en prévoyant d'une part, au lieu de la procédure d'enquête publique qui prévaut pour les modifications de droit commun, la mise à disposition du public, pour une durée d'un mois, du projet de modification ainsi que des avis des personnes publiques associées (art. L. 143-38 et L. 153-47 du code de l'urbanisme), d'autre part, que ces documents deviennent exécutoires dès publication et transmission à l'autorité administrative compétente de l'État (art. L. 153-48 et L. 143-39 et du code de l'urbanisme).
B. Les procédures prévues par la loi allongent les délais d'adoption et modification des documents régionaux de planification
1) Le SRADDET doit faire l'objet d'une approbation par le représentant de l'État dans un délai de trois mois
Aux termes de l'article L. 4251-7 du code général des collectivités territoriales, le SRADDET, après adoption par délibération du conseil régional, doit être approuvé par arrêté du préfet de région dans un délai de trois mois à compter de sa transmission par le conseil régional (art. R. 4251-16 du code général des collectivités territoriales). Le préfet s'assure notamment du respect formel de la procédure d'adoption du document, notamment la consultation des personnes et organismes prévus par la loi, ainsi que de sa conformité aux lois et règlements en vigueur.
2) La consultation de personnes et organismes es qualité , puis la consultation du public, allongent les délais de modification des SRADDET
Aux termes du I de l'article L. 4251-9 du code général des collectivités territoriales, la procédure de modification simplifiée du SRADDET, dont l'utilisation est prévue par l'article 194 de la loi Climat-résilience pour y intégrer les objectifs et trajectoires de réduction d'artificialisation des sols prévus dans la même loi, prévoit successivement la consultation des personnes publiques associées (PPA), dans un délai maximum de trois mois 4 ( * ) , puis la mise à disposition du public du projet de modification et des avis des PPA uniquement par voie électronique, pour une durée de deux mois . Ces délais, qui courent à partir de l'arrêt du projet par le conseil régional, s'ajoutent à ceux inhérents à la phase de concertation préalable à toute évolution du SRADDET.
II. Le dispositif envisagé - Une extension d'un an des délais d'entrée en vigueur des documents régionaux de planification et des documents locaux d'urbanisme et une accélération de la procédure de modification des SRADDET
A. Un report d'un an des délais de modification des documents régionaux de planification et des documents locaux d'urbanisme
L'article 1 er de la proposition de loi repousse de douze mois la date limite d'entrée en vigueur des SRADDET, des SAR, du PADDUC et du SDRIF modifiés en vue d'intégrer des objectifs et trajectoires en matière de lutte contre l'artificialisation des sols . Cette date limite serait donc fixée à février 2025, au lieu de février 2024 actuellement 5 ( * ) .
Compte tenu des délais de modification en « cascade » des SCoT, PLU(i) et cartes communales, l'article 1 er décale également d'un an l'entrée en vigueur de ces différents documents modifiés pour intégrer les modifications en matière de lutte contre l'artificialisation des sols intégrés dans les documents régionaux de planification. Ainsi, l'entrée en vigueur des SCoT modifiés devrait intervenir au plus tard en août 2027 au lieu de 2026 6 ( * ) , et celle des PLUi ou cartes communales en août 2028 au lieu de 2027 7 ( * ) .
DATES LIMITES D'ENTRÉE EN VIGUEUR DES DOCUMENTS
RÉGIONAUX DE PLANIFICATION
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Document |
Loi Climat-résilience |
Loi « 3DS » |
Présente proposition de loi |
SRADDET |
Août 2023 |
Février 2024 |
Février 2025 |
SAR |
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PADDUC |
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SDRIF |
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ScoT |
Août 2026 |
Août 2027 |
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PLU(i) |
Août 2027 |
Août 2028 |
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Carte communale |
B. Une accélération de la procédure de modification des SRADDET
En vue d'accélérer la procédure de modification des SRADDET, le II de l'article 1 er de la proposition de loi réduit de trois mois 8 ( * ) à un mois le délai laissé au préfet pour approuver le SRADDET , lorsque l'évolution du SRADDET vise à y intégrer des objectifs et trajectoires de réduction de l'artificialisation des sols, en application des dispositions de la loi Climat-résilience.
En outre, l'article 1 er autorise, dans le même cas, la tenue simultanée de la consultation des PPA requises pour la modification des SRADDET - et la consultation du public par voie électronique. Ainsi, le délai de remise des avis des personnes publiques associées ne serait plus un préalable à la mise à disposition du projet de modification au public, ce qui permettrait de raccourcir le délai global de consultation.
III. La position de la commission - Reporter les échéances de modification des documents régionaux de planification d'aménagement et des documents d'urbanisme pour assurer une mise en oeuvre robuste des trajectoires de lutte contre l'artificialisation
A. Un nécessaire report d'échéances de modification incompatibles avec les procédures prévues par la loi
1) Les incertitudes juridiques persistantes, depuis la promulgation de la loi Climat-résilience, ont contraint les collectivités à différer la modification de leurs documents d'aménagement et d'urbanisme
Malgré une première extension, via la loi « 3DS » 9 ( * ) , du délai d'intégration des objectifs et trajectoires prévus par la loi Climat-résilience en matière de lutte contre l'artificialisation des sols dans les documents régionaux de planification et dans les documents d'urbanisme, tant les régions que les collectivités locales ont alerté sur la difficulté de tenir le double délai prévu par la loi Climat-résilience . Pour respecter le délai d'entrée en vigueur des documents régionaux de planification modifiés en février 2024, les régions devraient en effet adopter d'ici seulement quelques semaines leurs SRADDET modifiés .
Or l'évolution des documents régionaux de planification a été retardée par la publication tardive de certains décrets d'application indispensables à la préparation de ces documents (décrets relatifs à la nomenclature des sols et aux modalités de territorialisation des objectifs « ZAN » 10 ( * ) , avril 2022 ; décret sur les mesures de compensation écologique et de renaturation décomptables du « ZAN » 11 ( * ) , décembre 2022). D'autres éléments indispensables au bon calibrage de l'évolution de ces documents n'ont toujours pas été fixés, comme la maille d'observation de l'artificialisation 12 ( * ) .
Aujourd'hui encore, les régions sont contraintes d'élaborer leurs documents de planification non seulement dans l'urgence, mais aussi dans une forte incertitude juridique , puisque les deux décrets d'avril 2022 font l'objet d'un recours 13 ( * ) . Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, Christophe Béchu, a en outre annoncé à plusieurs reprises - y compris devant le Sénat - une réécriture de ces décrets, réécriture qui cependant, d'après les informations recueillies par le rapporteur, n'est pas encore été engagée, hormis pour le décret sur la nomenclature.
Cette situation ouvre la possibilité que les documents régionaux de planification qui seraient adoptés dans les délais actuellement prévus par la loi doivent à nouveau être modifiés rapidement , et ce alors même que certains d'entre eux ont été adoptés très récemment, comme le SRADDET de la région Occitanie, approuvé en septembre 2022, ou celui de la région Pays de la Loire, approuvé en février 2022 14 ( * ) . Cela n'est souhaitable ni du point de vue de la lisibilité de l'action des régions, ni du point de vue des coûts.
Le rapporteur approuve donc l'extension d'un an du délai laissé aux régions pour élaborer leurs documents de planification , et souligne que la bonne tenue de ces délais dépendra, en tout état de cause, de la diligence du Gouvernement à élaborer, en concertation avec les parties prenantes les décrets d'application nécessaires, dans des délais raisonnables.
Par cohérence, et afin de ne pas comprimer exagérément le délai laissé aux autorités organisatrices des SCoT et aux maires et présidents d'intercommunalité pour modifier leurs documents d'urbanisme, il est indispensable de reporter d'un an leur date limite de modification , qui n'avait pas été modifiée par la loi « 3DS »
2) Les collectivités locales sont déjà entrées dans une dynamique de réduction de l'artificialisation
Le principal argument contre le report de l'entrée en vigueur des documents modifiés est la crainte que ce report obère la capacité des collectivités à « tenir » le double délai introduit par la loi Climat-résilience, en matière de lutte contre l'artificialisation des sols .
En particulier, les modalités d'atteinte de l'objectif intermédiaire d'une réduction de moitié du rythme de consommation d'espace d'ici 2031 deviennent plus complexes à mesure que cette échéance se rapproche.
Cependant, comme le rapporteur du présent texte l'avait déjà noté dans son rapport sur la loi Climat-résilience 15 ( * ) les objectifs de sobriété foncière et de réduction de l'artificialisation des sols ont été intégrés dans les documents régionaux de planification et les documents d'urbanisme dès avant l'adoption de la loi Climat-résilience .
Comme l'a indiqué au rapporteur l'association Régions de France, « les régions ont pris leurs responsabilités en matière de sobriété foncière ». Les SRADDET intègrent depuis plusieurs années, des objectifs - y compris chiffrés pour certains - de gestion économe de l'espace 16 ( * ) .
De même, en 2021, plus de la moitié des SCoT se fixaient déjà un objectif de réduction de la consommation d'espace supérieur à 50 % d'ici 2040, et près d'un quart un objectif de réduction supérieur à 50 % d'ici 2030 17 ( * ) . Selon les données de l'Observatoire de l'artificialisation, la consommation annuelle moyenne d'espace par les 35 000 communes françaises a diminué d'un quart entre la période 2010-2015 et la période 2016-2021 , en baisse quasi constante.
Ainsi, la crainte que le report de l'entrée en vigueur des documents modifiés obère significativement l'atteinte des objectifs est à relativiser , dans la mesure où ces derniers y sont déjà partiellement inscrits et où la tendance observée est déjà à la baisse.
En outre, le rapporteur a entendu les craintes, exprimées par les collectivités, d'une « ruée sur le foncier », avant l'entrée en vigueur des documents d'urbanisme modifiés. L'article 12 de la proposition de loi vise à remédier à ces difficultés.
B. Accélérer les procédures de consultation, tout en tenant compte des impératifs d'acceptabilité sociale pour la mise en oeuvre des objectifs du « ZAN »
1) Étendre les dérogations procédurales de modification des SRADDET aux autres modifications qui interviendraient simultanément, tout en préservant le délai minimum de consultation du public
Le rapporteur approuve le principe d'une procédure dérogatoire visant à accélérer les évolutions des SRADDET , afin de permettre aux régions de tenir les délais très courts auxquelles elles sont soumises.
La réduction du délai de trois mois laissé au représentant de l'État pour approuver le SRADDET est d'autant plus justifiée que ce dernier est obligatoirement associé en amont à l'élaboration du projet de SRADDET (art. L. 4251-5 du code général des collectivités territoriales), dont il a donc préalablement connaissance.
Si le rapporteur approuve la possibilité, ouverte par la proposition de loi, d'une consultation simultanée des PPA et du public, il a souhaité rétablir le délai minimal de deux mois de consultation du public , « écrasé » par la rédaction actuelle de l'article. Alors que la loi Climat-résilience a déjà prévu des modalités de modification simplifiée du SRADDET ( cf. supra ), ce délai minimal est en effet essentiel pour assurer l'appropriation par les populations des enjeux de lutte contre l'artificialisation au niveau local, et en assurer une plus large acceptabilité. La commission spéciale a adopté un amendement COM-59 en ce sens.
La commission a également adopté deux amendements identiques COM-18 et COM-58 pour permettre aux régions d'utiliser la procédure dérogatoire de modification des SRADDET prévue par la proposition de loi pour les autres modifications des SRADDET prévues par les lois Climat-résilience et « 3DS » (notamment sur les volets énergies renouvelables, logistique, déchets et infrastructures aéroportuaires) qui interviendraient simultanément, afin d'assurer l'effectivité de cette procédure dérogatoire.
2) Étendre la consultation simultanée des PPA et du public aux collectivités locales
Afin de répondre aux inquiétudes exprimées par les élus locaux quant aux délais de modification des SCoT et PLU(i), la commission spéciale a adopté un amendement COM-60 modifiant les articles L. 143-38 et L. 153-47 du code de l'urbanisme, pour permettre la tenue simultanée des consultations du public et des PPA, sur le modèle de la dérogation prévue pour l'évolution des SRADDET . La durée de consultation du public n'a pas été modifiée.
Enfin, afin de sécuriser et apaiser le processus de modification des documents d'urbanisme en vue d'y intégrer le « ZAN », la commission spéciale a adopté un amendement COM-61 du rapporteur ouvrant aux autorités compétentes pour l'élaboration des documents d'urbanismes, en cas de difficulté, la possibilité de saisir la commission départementale de conciliation en matière d'urbanisme .
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 2
Rapport de prise en compte entre les règles du
SRADDET concernant la lutte contre l'artificialisation des sols
et les
documents d'urbanisme locaux et justification
des choix retenus en
matière de territorialisation régionale
Cet article précise explicitement que les dispositions relatives à la lutte contre l'artificialisation contenues dans les SRADDET et les SAR s'appliquent aux documents d'urbanisme dans un rapport de prise en compte et non de compatibilité. Il impose aux régions la justification de la manière dont il a été tenu compte des propositions faites par les « conférences des SCoT » en matière de territorialisation des objectifs de réduction d'artificialisation des sols.
La commission adopté un unique amendement de coordination juridique.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - Le décret du 29 avril 2022 a de facto rendu prescriptives les règles du SRADDET en matière de réduction de l'artificialisation des sols
A. Les communes et leurs groupements sont seules compétents en matière d'urbanisme, mais les documents d'urbanisme sont soumis à la hiérarchie des normes
La loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État a conféré aux communes et à leurs groupements la responsabilité d'établir les documents de planification d'urbanisme.
Le plan local d'urbanisme (PLU), mais aussi le schéma de cohérence territoriale (SCoT) , introduits par la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (loi « SRU »), sont soumis à la hiérarchie des normes, et doivent ainsi respecter les dispositions du règlement national d'urbanisme (RNU), de lois générales d'aménagement du territoire, telles que la loi Littoral ou la loi Montagne, ainsi que les dispositions contenues dans les documents régionaux de planification, la région étant pour sa part compétente en matière d'aménagement du territoire.
Dans les régions couvertes par un SRADDET , ce dernier s'applique aux SCoT, dans un rapport de compatibilité pour les règles générales, contenus dans le « fascicule » et de prise en compte pour les objectifs généraux, contenus dans le « rapport d'objectifs » (c'est la normativité « adaptée » du SRADDET) (2° de l'art. 131-1 et 1° de l'art. L. 131-2 du code de l'urbanisme). À défaut de SCoT, les mêmes rapports de compatibilité ou de prise en compte s'appliquent directement aux PLU(i), cartes communales ou documents en tenant lieu (art. L. 4251-3 du code général des collectivités territoriales).
Dans les régions non couvertes par un SRADDET mais par un SAR, le SDRIF et le PADDUC, l'ensemble des dispositions de ces documents s'imposent aux SCoT dans un rapport de compatibilité , comme en disposent respectivement les 4°, 3° et 5° de l'article L. 131-1 du code de l'urbanisme.
RAPPORT DE COMPATIBILITÉ OU DE PRISE EN COMPTE ENTRE LES
DOCUMENTS RÉGIONAUX D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET LES SCOT,
PLU(I) ET CARTES COMMUNALES,
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SCoT |
SRADDET : - rapport de compatibilité pour les règles du fascicule ;
- rapport de prise en compte
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• Art. L. 131-1 et 131-2
• Art. L. 4251-3 du code général des collectivités territoriales |
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SAR |
rapport de compatibilité |
• Art. L. 131-1 du code
• Art. L. 4433-9 du code général des collectivités territoriales |
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SDRIF |
• Art. L. 131-1 du code
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PADDUC |
• Art. L. 131-1 du code
• III de l'art. L. 4424-9
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PLU / PLUi
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• Si existence d'un SCoT : compatibilité |
• Art. L. 131-4 du code
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• Si pas de SCoT : |
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- dans les régions couvertes
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• Art. L. 131-6 du code
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- dans les régions couvertes par un SAR : rapport de compatibilité |
• Art. L. 131-6 du code
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- en Île-de-France : rapport de compatibilité |
• Art. L. 131-6 du code
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||
- en Corse : rapport de compatibilité |
• Art. L. 131-6 du code
• III de l'art. L. 4424-9
|
B. Le décret du 29 avril 2022 a réintroduit la prescriptivité des trajectoires de réduction de l'artificialisation contenues dans les SRADDET, rejetée par le Sénat lors de l'examen du projet de loi Climat-résilience
1) À l'initiative du Sénat, la loi Climat-résilience a conservé le caractère optionnel de l'inscription dans les règles du fascicule du SRADDET des trajectoires de réduction de l'artificialisation
Dès avant l'adoption de la loi Climat-résilience, et depuis leur création en 2015 18 ( * ) , les SRADDET devaient déjà comporter des objectifs de moyen et long termes en matière de gestion économe de l'espace (dans le rapport d'objectif) . Les régions pouvaient également décider, de manière optionnelle, d'introduire des règles générales concernant ce volet dans le fascicule . Ces règles, qui pouvaient éventuellement être différenciées dans les différentes parties du territoire régional, s'imposaient alors dans un rapport de compatibilité aux documents infrarégionaux.
Outre l'intégration obligatoire d'objectifs et de trajectoires de réduction du rythme d'artificialisation au sein des SRADDET et autres documents régionaux de planification, le projet de loi Climat-résilience, dans sa version initiale, prévoyait que l'ensemble des dispositions du SRADDET en matière de lutte contre l'artificialisation des sols s'appliquent aux SCoT, PLU(i) et cartes communales dans un rapport de compatibilité , en imposant la fixation dans le fascicule des règles générales du SRADDET « une trajectoire permettant d'aboutir à l'absence de toute artificialisation nette des sols ainsi que, par tranches de dix années, un objectif de réduction du rythme de l'artificialisation ». Lors de l'examen du texte, le Sénat , considérant qu'il n'appartenait pas aux régions de fixer des objectifs et trajectoires prescriptifs, en matière d'urbanisme, aux communes et à leurs groupements 19 ( * ) a supprimé, ce caractère prescriptif du SRADDET en matière de réduction de l'artificialisation des sols et de territorialisation de cette dernière .
Le texte final de la loi Climat-résilience , dans sa rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire, reprenait la version adoptée par le Sénat . L'article 194 de la loi a ainsi complété le deuxième alinéa de l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, qui liste les domaines dans lesquels le SRADDET doit fixer des objectifs généraux, pour préciser qu'« [e]n matière de lutte contre l'artificialisation des sols, les objectifs fixés sont traduits par une trajectoire permettant d'aboutir à l'absence de toute artificialisation nette des sols ainsi que, par tranches de dix années, par un objectif de réduction du rythme de l'artificialisation. Cet objectif est décliné entre les différentes parties du territoire régional. »
2) En prévoyant l'insertion obligatoire, dans le fascicule du SRADDET, de règles territorialisées en matière de lutte contre l'artificialisation des sols, le décret d'avril 2022 a réintroduit la prescriptivité des trajectoires de réduction de l'artificialisation contenues dans les SRADDET
Le décret du 29 avril 2022 20 ( * ) , qui n'était pas explicitement prévu par la loi Climat-résilience , a considérablement renforcé la portée des documents régionaux de planification.
Ses articles 4 et 5, qui modifient l'article R. 4251-8 du code général des collectivités territoriales et y insèrent un nouvel article R. 4251-8 mettent en effet au rang des règles obligatoirement contenues dans le fascicule du SRADDET les « règles territorialisées permettant d'assurer la déclinaison des objectifs entre les différentes parties du territoire régional identifiées par la région », avec notamment, pour chacune d'elle, « une cible d'artificialisation nette des sols au moins par tranche de dix années » .
Ainsi, l'ensemble des dispositions du SRADDET en matière de réduction de l'artificialisation, y compris sa déclinaison territoriale , s'appliquera , aux termes du décret, dans un rapport de compatibilité avec les SCoT, ou subsidiairement, PLU(i), cartes communales ou autres documents en faisant office.
Ce décret fait actuellement l' objet d'un recours devant le Conseil d'État , de la part de l'Association des maires et de France et des présidents d'intercommunalité (AMF), dont l'issue de ce recours ne devrait être connue qu'au printemps 2023.
C. Le Sénat a inscrit dans la loi Climat-résilience la compétence des « conférences des SCoT » pour faire des propositions de territorialisation des trajectoires de réduction de l'artificialisation
Lors de l'examen à l'Assemblée nationale de la loi Climat-résilience, les députés avaient souhaité également confier aux SRADDET le soin de répartir les efforts des collectivités de leur ressort en matière de réduction de l'artificialisation, dans le cadre d'une territorialisation dont les modalités concrètes devaient être précisées par un décret en Conseil d'État. Le Sénat a au contraire souhaité renvoyer la territorialisation des objectifs de réduction de l'artificialisation aux SCoT , estimant que les collectivités locales étaient les mieux placées pour ce faire.
Ainsi, le V de l'article 194 de la loi Climat-résilience , tel qu'issu de la commission mixte paritaire, instituait des « conférences des SCoT » (V), composées de l'ensemble des acteurs concourant à l'élaboration des SCoT situés dans le périmètre régional concerné (à savoir, selon les cas, les EPCI, les syndicats mixtes, pôles métropolitains ou pôles d'équilibre territorial et rural ou les syndicats mixtes) 21 ( * ) , auxquels s'ajoutent deux représentants des EPCI et communes compétents en matière de documents d'urbanismes non couverts par des SCoT , désignés respectivement par les présidents d'Intercommunalités de France (AdCF) et de l'Association des maires de France (AMF).
La loi Climat-résilience invitait ces « conférences des SCoT » à transmettre aux différentes autorités régionales compétentes pour l'élaboration des documents régionaux de planification, dans un délai initial de huit mois après la promulgation de la loi, des propositions relatives à l'établissement des objectifs révision en matière de réduction de l'artificialisation nette - délai porté à quatorze mois par la loi « 3DS », étant entendu qu'un projet de SRADDET modifié ou révisé pour intégrer les objectifs de réduction d'artificialisation des sols ne pouvait être arrêté avant la transmission de ces propositions. La loi Climat-résilience prévoit également que les « conférences des SCoT » réalisent, au plus tard trois ans après leur dernière réunion (soit octobre 2025), un bilan de la mise en oeuvre de leurs propositions en matière de territorialisation.
Des « conférences des SCoT ont été instituées dans chacune des onze régions couvertes par un SRADDET , à partir de février 2022 22 ( * ) , et ont transmis des propositions à l'issue de leurs travaux, en octobre 2022 .
II. Le dispositif envisagé - Le retour au rapport de prise en compte par les documents locaux d'urbanisme des dispositions des documents régionaux de planification
A. Le retour au rapport de prise en compte par les documents locaux d'urbanisme des dispositions du SRADDET ou du SAR relatives à la lutte contre l'artificialisation
L'article 2 de la proposition de loi introduit dans les dispositions en miroir du code de l'urbanisme et du code général des collectivités territoriales concernant la hiérarchie des normes applicable dans les rapports entre les SCoT, PLU(i) et cartes communales et les différents documents régionaux de planification, une mention explicite selon laquelle les règles relatives aux objectifs et trajectoires de réduction de l'artificialisation des sols figurant dans les SRADDET et les SAR s'appliquent aux SCoT - et, en l'absence de SCoT, aux PLU(i) ou cartes communales ou documents en faisant office - dans un rapport de prise en compte, et non de compatibilité . Pour ce faire, il insère cette mention aux 2° et 4° de l'article L. 131-1 du code de l'urbanisme, qui concernent respectivement les règles de compatibilité des SCoT aux SRADDET et aux SAR.
Parallèlement, il complète l'article L. 131-2 du code de l'urbanisme afin de préciser que ces mêmes objectifs et trajectoires déterminés dans les documents régionaux de planification s'appliquent au SCoT dans un rapport de prise en compte .
L'article modifie également, en miroir, les articles pertinents du code général des collectivités territoriales (respectivement articles L. 4251-3 et L. 4433-9), afin de préciser que les dispositions des SRADDET et des SAR en matière d'objectifs et trajectoires d'artificialisation s'appliquent dans un rapport de prise en compte aux SCoT ainsi que, en l'absence de SCoT, aux PLU(i) et cartes communales ou documents en tenant lieu.
En ce qui concerne l'outre-mer, alors que l'ensemble des dispositions des SAR s'appliquent habituellement dans un rapport de compatibilité aux documents infrarégionaux, la proposition de loi crée ainsi une exception pour les dispositions des SAR concernant les objectifs et trajectoires de réduction de l'artificialisation des sols, qui ne s'appliqueront plus que dans un rapport de prise en compte .
B. Une obligation pour les régions de justifier les suites données aux propositions de territorialisation faites par les « conférences des SCoT »
L'article prévoit aussi que lors du processus d'évolution des SRADDET 23 ( * ) , les régions soient tenues de justifier par écrit les suites données aux propositions concernant l'objectif régional de réduction de l'artificialisation des sols et de territorialisation de cet objectif faites par les « conférences des SCoT » prévues au V de l'article 194 de la loi Climat-résilience ( cf. supra ), conformément à ce même article.
Il modifie à cette fin l'alinéa de l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, qui liste les objectifs obligatoirement contenus dans le SRADDET.
III. La position de la commission - Améliorer le dialogue entre les régions et les collectivités locales et faire confiance à ces dernières pour opérer la territorialisation des objectifs du « ZAN »
A. Revenir à l'esprit de la loi Climat-résilience en réaffirmant le caractère non prescriptif du SRADDET en matière de réduction de l'artificialisation
Le décret du 29 avril 2022 est allé à l'encontre de l'esprit de la loi Climat-résilience, telle que votée par le Parlement à l'initiative du Sénat en vue de garantir le respect des compétences du bloc communal en matière d'urbanisme, tout en reconnaissant à la région un rôle d'orientation.
Attentive au suivi de l'application de loi, la commission des affaires économiques, attentive au suivi de l'application de la loi, avait, dès avant la publication du décret, dénoncé un « passage en force » de la part du Gouvernement 24 ( * ) . Publié sans étude d'impact, ce dernier avait par ailleurs reçu un avis défavorable au Conseil national d'évaluation des normes.
Plus fondamentalement, ainsi que le relève l'AMF dans son recours devant le Conseil d'État, le renforcement du caractère prescriptif du SRADDET entraîne un risque d'atteinte au principe constitutionnel d'absence de tutelle d'une collectivité sur une autre , à mesure que les dispositions des documents régionaux de planification deviennent plus contraignantes pour les collectivités locales.
Le présent article revient à l'esprit de la loi Climat-résilience telle que votée par le Parlement . Il va même au-delà, puisqu'avant la publication du décret, les régions étaient libres d'intégrer ou non des règles en matière de lutte contre l'artificialisation dans le fascicule. La même dérogation est étendue aux SAR, dont l'ensemble des dispositions s'appliquent actuellement dans un rapport de compatibilité aux documents infrarégionaux.
Le rapporteur estime que seul un rapport de prise en compte permet de donner aux collectivités la latitude nécessaire pour pouvoir adapter finement aux territoires les objectifs de réduction de l'artificialisation . Pour rappel, le rapport de prise en compte, pour induire un niveau d'opposabilité moins contraignant, n'en impose pas moins de ne pas s'écarter des orientations fondamentales du document de rang supérieur, sauf exception dûment motivée, et le cas échéant sous le contrôle approfondi du juge. Ainsi réintroduire un rapport de prise en compte plutôt que de compatibilité vise simplement à garantir les conditions de mise en oeuvre d'une véritable territorialisation des objectifs et trajectoires du « ZAN » , sans remettre ces derniers en cause.
Il apparaît d'autant plus indispensable de conserver cette marge de manoeuvre aux élus locaux, et notamment aux maires et présidents d'EPCI ruraux que plusieurs interlocuteurs du rapporteur ont souligné l'inégale qualité des concertations menées en amont de l'évolution des documents régionaux de planification, confirmant par là la crainte qu'exprimait le rapporteur lors de l'examen de la loi Climat-résilience 25 ( * ) .
Malgré les réels efforts observés de la part des régions (travail partenarial avec les conférences régionales des SCoT, création de commissions de concertation ad hoc sur la territorialisation de la réduction de l'artificialisation, évocation du sujet dans le cadre de la conférence territoriale de l'action publique (CTAP)), force est de constater que les instances de concertation qui existent au niveau régional en vue de l'évolution des SRADDET ne constituent pas des enceintes adéquates pour garantir la bonne prise en compte de l'ensemble des demandes des élus locaux, concernant les problématiques de réduction de l'artificialisation . Or la réussite des politiques de sobriété foncière nécessitera une forte adhésion des populations et des collectivités locales, à l'opposé de la territorialisation descendante organisée par le décret du 29 avril .
Le rapporteur note d'ailleurs que l'association Régions de France, entendue par le rapporteur, a précisé que si la moitié des régions couvertes par des SRADDET ont, à ce jour, introduit des règles concernant la lutte contre l'artificialisation des sols dans le fascicule, elles ne sont pas, dans leur ensemble, demandeuses d'une inscription obligatoire de ces règles dans le fascicule .
Enfin, alors que le Gouvernement estime la prescriptivité nécessaire pour garantir la tenue des objectifs fixés par la loi Climat-résilience, le rapporteur souligne que les collectivités territoriales ont déjà engagé depuis plusieurs années la décrue de l'artificialisation de manière significative 26 ( * ) , même en l'absence de règles prescriptives au niveau régional : selon les données de l'Observatoire de l'artificialisation, deux tiers des communes ont réduit leur consommation annuelle moyenne d'espace entre la période 2010-2015 et la période 2016-2021 (40 % d'entre elles l'ont réduit de plus de moitié, plus d'un quart l'ont plus que divisé par trois et plus de 20 % par quatre).
En conséquence, le rapporteur réitère son appel à faire confiance aux collectivités territoriales pour s'emparer et mettre en oeuvre , à leur niveau, des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols, dans un esprit de responsabilité .
En conséquence, le rapporteur soutient l'adoption sans modification de l'article 2.
B. Soutenir la décentralisation de la gouvernance du « ZAN » pour mieux répartir les compétences entre les différents niveaux de collectivités
Les « conférences des SCoT », créées et défendues par le Sénat pour assurer une territorialisation du « ZAN » au plus près des territoires, se sont réunies dans toutes les régions couvertes par un SRADDET. Grâce à une forte mobilisation des parties prenantes, et malgré un contexte de forte insécurité juridique, elles ont présenté en octobre 2022 d' intéressantes propositions tant sur la méthodologie de la territorialisation que sur les modalités de catégorisation des espaces 27 ( * ) . Elles ont également permis une acculturation rapide des élus locaux aux problématiques de lutte contre l'artificialisation .
Le dialogue ainsi engagé entre les régions et les niveaux infrarégionaux doit désormais être approfondi et pouvoir se déployer sur le temps long , dans le respect des compétences respectives des régions, communes et intercommunalités. En attendant la mise en place des « conférences régionales du ZAN » prévues à l'article 3 de la proposition de loi, il demeure souhaitable que les régions puissent justifier de la bonne prise en compte, dans l'élaboration des SRADDET, des recommandations des « conférences des SCoT ».
La commission a adopté un amendement de coordination juridique COM-62 .
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 3
Conférences régionales de gouvernance
de
la politique de réduction de l'artificialisation des sols
Cet article vise à élargir la composition de la conférence des schémas de cohérence territoriale (SCoT), instaurée par la loi Climat-résilience, afin de la transformer en conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l'artificialisation des sols, réunissant l'ensemble des acteurs locaux, selon une représentation équilibrée des territoires.
Cette conférence régionale a une compétente générale d'avis sur les sujets liés à la mise en oeuvre des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols. Elle est notamment consultée pour la qualification des projets d'ampleur nationale ou européenne et d'intérêt général majeur ainsi que des projets d'envergure régionale. Elle peut élaborer une proposition relative à la fixation et à la territorialisation des objectifs régionaux en matière de réduction de l'artificialisation des sols, dans le cadre de l'inscription de ces objectifs par la région dans le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET). Elle établit enfin un bilan annuel de la mise en oeuvre de ces objectifs.
Outre trois amendements rédactionnels, la commission a adopté un amendement prévoyant que la conférence régionale de gouvernance est présidée par le président de l'exécutif régional.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - Les territoires infrarégionaux sont associés de manière limitée à la mise en oeuvre de la politique de réduction de l'artificialisation des sols
A. La loi Climat-résilience a donné aux conférences des SCoT un droit de proposition sur la fixation des objectifs de réduction de l'artificialisation et leur territorialisation
Dans son V, l'article 194 de la loi Climat-résilience 28 ( * ) instaure une conférence des schémas de cohérence territoriale (SCoT). Cette disposition a été introduite par la commission mixte paritaire lors des débats législatifs.
La conférence des SCoT réunit, dans chaque région, l'ensemble des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et autres structures qui élaborent des SCoT. Les EPCI et communes non couverts par des SCoT y sont également représentés.
La conférence des SCoT peut, dans un délai de quatorze mois à compter de la promulgation de la loi Climat-résilience 29 ( * ) , transmettre à la région, en charge du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), une proposition relative à l'établissement des objectifs régionaux en matière de réduction de l'artificialisation nette et notamment à leur déclinaison en objectifs infrarégionaux.
Le SRADDET ne peut pas être modifié pour intégrer les objectifs de réduction de l'artificialisation avant la transmission de cette proposition ou, en l'absence de transmission, avant l'expiration d'un délai de huit mois à compter de la promulgation de la loi Climat-résilience.
La direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) a indiqué, lors de son audition par le rapporteur, que les conférences des SCoT ont effectivement transmis leurs propositions dans le délai prévu.
Selon les indications de la Fédération nationale des SCoT, toutes les conférences des SCoT ont en effet été réunies entre 6 et 8 fois par espace régional. Suscitant une forte mobilisation locale, elles ont contribué à diffuser auprès des élus et des acteurs locaux les enjeux de sobriété foncière et à leur faire mieux appréhender l'impact des objectifs de la loi Climat-résilience, contribuant à combler le manque d'information que le rapporteur a constatée de nombreuses fois au cours de ses déplacements sur le terrain depuis la promulgation de la loi Climat-résilience.
Toutefois, les propositions faites par les conférences des SCoT vont rarement jusqu'à un chiffrage précis en hectares, en raison notamment d'un désaccord sur le chiffrage de l'artificialisation entre les relevés de l'Observatoire de l'artificialisation et les élus locaux, mais aussi par la volonté de mettre l'accent sur une approche qualitative pour la territorialisation de l'objectif, en fonction des spécificités locales 30 ( * ) .
Au plus tard trois ans après sa première réunion, la conférence des SCoT se réunit à nouveau afin d'établir un bilan de l'intégration et de la mise en oeuvre des objectifs de réduction de l'artificialisation nette fixés en application de l'article 194 de la loi Climat-résilience. Ce bilan comprend :
- des données relatives aux objectifs fixés par les SCoT ;
- des données relatives à l'artificialisation constatée sur les périmètres des SCoT et sur le périmètre régional au cours des trois années précédentes ;
- une analyse de la contribution de cette dynamique d'évolution de l'artificialisation à l'atteinte des objectifs fixés par le SRADDET ;
- des propositions d'évolution des objectifs régionaux et infrarégionaux en vue de la prochaine tranche décennale.
B. Le droit existant prévoit d'autres instances locales de concertation entre collectivités locales, notamment au sujet de l'élaboration des documents d'urbanisme
Le droit de l'urbanisme prévoit des procédures particulières d'association des autorités locales à l'élaboration des documents d'urbanisme concernant leurs territoires. Ces procédures et les structures dans lesquelles elles sont mises en oeuvre ont été parfois évoquées au cours des débats de la commission spéciale.
En application de l'article L. 132-14 du code de l'urbanisme, une commission de conciliation est chargée, dans chaque département, de rechercher un accord entre les différentes autorités responsables de l'élaboration des documents d'urbanisme (schémas de cohérence territoriale (SCoT), plans locaux d'urbanisme (PLU), cartes communales). Cette commission peut formuler en tant que de besoin des propositions alternatives.
Cette commission comprend six élus communaux, choisis par leurs pairs, et six personnes qualifiées en matière d'aménagement, d'urbanisme, d'architecture ou d'environnement, nommées par le préfet 31 ( * ) . Elle peut être saisie du projet de document d'urbanisme arrêté ou du document d'urbanisme approuvé par les personnes publiques associées à leur élaboration, par les associations locales d'usagers ou par les associations de protection de l'environnement. Elle peut formuler des propositions dans un délai de deux mois à compter de sa saisine.
La commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF), prévue par l'article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime, est un autre espace de conciliation regroupant dans chaque département des représentants de l'État, des collectivités territoriales et de leurs groupements ainsi que des professionnels et organismes concernés par les enjeux de la ruralité. La CDPENAF est consultée sur toute question relative à la réduction des surfaces naturelles, forestières et à vocation ou usage agricole. Elle émet notamment un avis sur l'opportunité, au regard de l'objectif de préservation des terres naturelles, agricoles ou forestières, de certaines procédures ou autorisations d'urbanisme.
S'agissant des procédures d'élaboration et de modification des documents d'urbanisme, elle peut donner un avis sur un projet de SCoT (articles L. 132-12 et L. 143-20 du code de l'urbanisme), sur l'ouverture à l'urbanisation dans les communes non couvertes par un SCoT (article L. 142-5 du même code), sur un projet de PLU (articles L. 151-11 à 151-16) et sur un projet de carte communale (article L. 163-4). Son avis est obligatoire lorsqu'un projet de SCoT ou de PLU a pour conséquence une réduction des espaces agricoles, naturels ou forestiers ; dans les autres cas, elle peut être consultée à sa demande.
Ces deux instances ont un domaine d'action limité au périmètre départemental. Contrairement à la conférence des SCoT instituée par la loi Climat-résilience, elles ne formulent pas d'avis sur les SRADDET.
Enfin, par-delà l'exercice des compétences d'urbanisme, la conférence territoriale de l'action publique (CTAP), institué dans chaque région par l'article L. 1111-9-1 du code général des collectivités territoriales, constitue un espace plus général où les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent débattre et rendre des avis sur tous les sujets relevant de l'exercice des compétences des collectivités territoriales, de leurs groupements et de leurs établissements publics.
La CTAP comprend des représentants de la région, des conseils départementaux, des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et des communes, avec une représentation spécifique des communes de petite taille et, le cas échéant, des territoires de montagne.
II. Le dispositif envisagé - Élargir la composition et les missions de la conférence des SCoT afin de les transformer en conférences de gouvernance du « ZAN »
Le présent article propose une nouvelle rédaction complète du V de l'article 194 de la loi Climat-résilience.
Il remplace la conférence des SCoT par une conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l'artificialisation des sols, ou « conférence de gouvernance du "ZAN" », par le double moyen d'un élargissement de sa composition et d'une extension de ses compétences.
A. La composition de la conférence de gouvernance du « ZAN »
La conférence de gouvernance du « ZAN », tout en assurant une représentation équilibrée des territoires urbains, ruraux et le cas échéant de montagne et du littoral, réunirait les membres suivants :
- quinze représentants de la région ;
- cinq représentants des établissements publics en charge de l'élaboration des SCoT ;
- dix représentants des EPCI compétents en matière de document d'urbanisme, dont cinq au moins représenteraient les EPCI non couverts par un SCoT ;
- dix représentants des communes compétentes en matière de document d'urbanisme ;
- cinq représentants des communes couvertes par un document d'urbanisme mais non compétentes en matière de document d'urbanisme ;
- cinq représentants des communes non couvertes par un document d'urbanisme ;
- cinq représentants de l'État.
La conférence comprendrait également un représentant de chaque département, à titre consultatif.
La conférence comprendrait donc cinquante-cinq membres, hors membres consultatifs, dont 15 de niveau régional, 15 de niveau intercommunal, 20 de niveau communal et 5 représentant l'État.
Composition de la conférence régionale de gouvernance
(en nombre de membres)
Source : commission spéciale. Hors
représentants des départements
participant aux travaux de la
conférence à titre consultatif.
B. Les modalités de saisine de la conférence de gouvernance
En application du B du V de l'article 194 de la loi Climat-résilience, dans la rédaction résultant du présent article, la conférence de gouvernance du « ZAN » peut se réunir à l'initiative de la région ou d'un établissement public chargé de l'élaboration d'un SCoT, sur tout sujet lié à la mise en oeuvre des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols .
Elle peut également transmettre à l'État des analyses et des propositions portant sur cette mise en oeuvre.
En outre, elle est consultée dans le cadre de la qualification , d'une part, des projets d'envergure nationale ou européenne et d'intérêt général majeur prévus par l'article 4 de la présente proposition de loi et, d'autre part, des projets d'envergure régionale prévus par l'article 5. Dans ce dernier cas, les représentants de l'État ne siègent pas au sein de la conférence.
C. L'élaboration d'une proposition d'objectif
La conférence de gouvernance du « ZAN » est également chargée de transmettre à la région une proposition relative à l'établissement des objectifs régionaux en matière de réduction de l'artificialisation des sols , dans un délai de trois mois à compter du lancement de la révision du SRADDET ou des autres documents de niveau régional ayant pour conséquence de modifier les objectifs chiffrés ou les trajectoires de réduction de l'artificialisation.
La conférence peut formuler des propositions relatives à la fixation d'un objectif régional et, le cas échéant, à sa déclinaison en objectifs infrarégionaux . Lors des délibérations relatives à ces propositions, les représentants de la région mentionnés au I du présent article siègent à titre consultatif. Le projet de ne peut être arrêté avant transmission de ce document à la région ou, à défaut de transmission, avant l'expiration d'un délai de six mois.
D. Le bilan de mise en oeuvre des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols
Enfin, la conférence de gouvernance du « ZAN » est chargée d'établir, au plus tard un an après sa dernière réunion, un bilan de la mise en oeuvre des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols. Ce bilan comprend :
- des éléments permettant d'apprécier les modalités et les critères de territorialisation des objectifs de réduction de l'artificialisation retenus au niveau régional, ainsi que la pertinence de cette territorialisation au regard des trajectoires et des besoins territoriaux constatés ;
- des éléments relatifs aux objectifs de réduction de l'artificialisation des sols fixés par les SCoT, par les plans locaux d'urbanisme (PLU) et par les cartes communales du périmètre régional, permettant d'apprécier la cohérence globale de ces objectifs au regard des objectifs retenus au niveau régional ;
- des éléments relatifs à l'artificialisation des sols constatée depuis le début de la période décennale en cours, permettant d'apprécier la trajectoire nécessaire pour atteindre les objectifs de réduction de l'artificialisation fixés par le document régional et par les SCoT du périmètre régional. En particulier, ces éléments doivent permettre d'apprécier l'artificialisation des sols constatée depuis le début de la même période décennale sur le périmètre des communes non couvertes par un PLU ou une carte communale et leur contribution à l'atteinte des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols fixés par le document régional et par les schémas de cohérence territoriale ;
- des propositions d'évolution des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols fixés par la loi et par les documents de planification en vue de la prochaine période décennale.
III. La position de la commission - Un dispositif permettant de garantir la participation de tous les niveaux de collectivités
Le travail mené par les conférences des SCoT est positif : il a permis de diffuser auprès des élus locaux une « culture du "ZAN" » en leur permettant de mieux appréhender la complexité de l'exercice, mais aussi sa diversité : l'enjeu diffère selon la dynamique passée de l'artificialisation qui impacte les enveloppes disponibles pour la période 2021-2022, selon les dynamiques démographiques et économiques locales qui déterminent les besoins à venir, mais aussi selon la qualité des données disponibles.
Il est toutefois apparu que les élus locaux, autres que ceux ayant établi les SCoT, se sentaient parfois insuffisamment écoutés , alors même qu'ils sont concernés par la mise en oeuvre de la territorialisation des objectifs de réduction de l'artificialisation inscrits dans les schémas régionaux. Or le rôle central que jouent les objectifs de réduction de l'artificialisation dans de nombreuses politiques locales rend nécessaire une meilleure représentation de l'ensemble des territoires concernés.
Le présent article propose d'assurer cette représentation en étendant la composition des actuelles conférences des SCoT à l'ensemble des autorités concernées par cette territorialisation.
Si certains organismes auditionnés ont souhaité étendre la composition de cette conférence à d'autres catégories d'acteurs, le rapporteur souligne qu'il est préférable de la limiter aux autorités compétentes en urbanisme, car il s'agit d'un espace de concertation pour la mise en oeuvre des objectifs de réduction de l'artificialisation, et non d'un espace général de discussion.
Outre trois amendements rédactionnels COM-64 , COM-65 et COM-66 , la commission a adopté un amendement COM-63 présenté par le rapporteur, qui précise que la conférence régionale de gouvernance est présidée par le président de l'organe exécutif de la région, afin de faciliter la mise en place et le fonctionnement de cette instance.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
CHAPITRE
II
Accompagner les projets structurants de demain
Article 4
Projets d'ampleur nationale ou européenne et
d'intérêt général majeur
Cet article prévoit que la consommation des sols résultant des projets d'ampleur nationale ou européenne et d'intérêt général majeur n'est pas prise en compte pour la mesure de l'atteinte des objectifs intégrés dans les documents d'urbanisme, mais qu'elle fait l'objet d'une comptabilisation séparée.
Il s'agit soit de projets à maîtrise d'ouvrage directe ou déléguée de l'État, soit de projets d'implantations d'unités industrielles valorisant l'utilisation d'une ressource naturelle renouvelable, concourant à la transition énergétique ou relevant de l'indépendance nationale, soit de projets d'agrandissement ou de création d'infrastructures ou d'équipements interrégionaux, nationaux ou européens. Ces projets font l'objet d'une inscription au schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET).
Outre un amendement de coordination juridique, la commission a adopté 5 amendements tendant à :
- clarifier la nécessité pour un projet de remplir une condition d'intérêt général majeur en plus de l'appartenance à l'une des trois catégories indiquées ;
- inclure dans la liste des projets d'ampleur nationale ou européenne et d'intérêt général majeur des projets relevant d'une concession de service public de l'État ;
- prévoir un délai limite de deux mois pour que la conférence de gouvernance régionale et les parties prenantes locales rendent leurs avis relatifs à la qualification par la région des projets d'ampleur nationale ou européenne et d'intérêt général majeur ;
- demander une information sur l'artificialisation résultant des projets d'ampleur nationale ou européenne et d'intérêt général majeur réalisés non seulement au cours de la décennie 2021-2031, mais aussi au cours de la décennie passée 2011-2021 ;
- prévoir la définition, par l'État, d'une trajectoire spécifique pour les projets d'ampleur nationale ou européenne et d'intérêt général majeur, permettant d'atteindre l'objectif national de réduction de l'artificialisation.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - Les « grands projets » sont pris en compte uniquement par mutualisation au niveau régional
A. Les modalités de mise en oeuvre des objectifs de réduction de l'artificialisation au niveau régional
Le III de l'article 194 de la loi Climat-résilience définit les conditions de mise en oeuvre des objectifs décennaux de réduction de l'artificialisation dans les schémas régionaux et les documents d'urbanisme mentionnés aux I et II du même article. Les schémas régionaux concernés sont le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), le plan d'aménagement et de développement durable de Corse (PADDUC), le schéma d`aménagement régional (SAR) pour les régions d'outre-mer et le schéma directeur de la région d'Île-de-France (SDRIF).
Il indique dans son 1° que la première tranche de dix années débute à la date de promulgation de la loi , c'est-à-dire le 22 août 2021. Pour cette première tranche décennale :
- d'une part, le rythme d'artificialisation est traduit par un objectif de réduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF) par rapport à la consommation réelle de ces espaces observée au cours des dix années précédentes (2°), réduction qui doit d'être au moins 50 % pendant la première tranche décennale pour les régions élaborant un SRADDET (3°) ;
- d'autre part, afin de tenir compte des périmètres des schémas de cohérence territoriale (SCoT) existant sur leur territoire et de la réduction du rythme d'artificialisation des sols déjà réalisée, la région associe les établissements publics chargés de l'élaboration de ces SCoT à la fixation et à la déclinaison des objectifs de réduction de l'artificialisation (4°).
Le 5° précise que la consommation d'ENAF au sens de l'article 194 de la loi Climat-résilience est entendue comme la création ou l'extension effective d'espaces urbanisés sur le territoire concerné .
Enfin, dans le cadre de la première tranche décennale, un espace naturel ou agricole occupé par une installation de production d'énergie photovoltaïque n'est pas comptabilisé dans la consommation d'ENAF dès lors que les modalités de cette installation permettent qu'elle n'affecte pas durablement les fonctions écologiques du sol , en particulier ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques ainsi que son potentiel agronomique et, le cas échéant, que l'installation n'est pas incompatible avec l'exercice d'une activité agricole ou pastorale sur le terrain sur lequel elle est implantée.
Cette dernière disposition doit toutefois être précisée par un décret en Conseil d'État qui n'a pas encore été pris. Or, comme le souligne la Fédération nationale des agences d'urbanisme 32 ( * ) , les espaces photovoltaïques peuvent être d'importants gisements fonciers.
B. La prise en compte des projets d'intérêt général majeur et d'envergure nationale ou régionale
En application de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction résultant de la loi Climat-résilience, le document d'orientation et d'objectifs (DOO) du schéma de cohérence territoriale (SCoT) peut décliner les objectifs de réduction de l'artificialisation des sols par secteur géographique .
L'un des éléments à prendre en compte pour cette déclinaison géographique est la présence de projets d'envergure nationale ou régionale . Cette disposition a été introduite par la commission des affaires économiques du Sénat lors de l'examen de la loi Climat-résilience 33 ( * ) , le choix étant fait de prendre le SCoT comme niveau de mise en oeuvre de la territorialisation des objectifs régionaux.
L'impact de ces projets en matière d'artificialisation peut ne pas être pris en compte pour l'évaluation de l'atteinte de l'objectif décennal de réduction du rythme de l'artificialisation fixé au niveau local par le projet d'aménagement stratégique (PAS) du SCoT. En revanche, l'artificialisation représentée par ces projets demeure prise en compte pour l'atteinte des objectifs fixés au niveau régional par le SRADDET.
Cette disposition est précisée à l'article R. 4251-8-1 du code général des collectivités territoriales, créé par un décret du 29 avril 2022 34 ( * ) , afin notamment d'expliciter la manière dont l'artificialisation emportée par ces « grands projets » est mutualisée au niveau régional. Cet article précise que les projets concernés sont des projets d'aménagements 35 ( * ) , d'infrastructures et d'équipements publics ou d'activités économiques qui sont d'intérêt général majeur et d'envergure nationale ou régionale. Ils sont définis par la région dans le fascicule du SRADDET.
Selon les réponses apportées par l'administration au rapporteur, la notion d'intérêt général majeur vise en particulier des projets avec des effets significatifs et qui plus globalement peuvent être qualifiés en tant que tels au vu de leurs caractéristiques, mais également en raison de ce qu'ils impliquent territorialement, des enjeux qui y sont attachés et surtout des objectifs auxquels ils permettent de répondre.
Cette notion est également utilisée en droit de l'environnement pour justifier certaines dérogations aux objectifs de qualité et de quantité des eaux que fixent les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) 36 ( * ) . Elle est distincte de celle de raison impérative d'intérêt public majeur, qui peut justifier une dérogation en matière de dérogation aux règles de protection des espèces protégées 37 ( * ) .
L'artificialisation induite par ces projets n'est pas décomptée directement du territoire dans lequel ils se trouvent, mais elle demeure décomptée au niveau régional. L'« enveloppe d'artificialisation » répartie entre les territoires infrarégionaux est donc diminuée de la superficie occupée par ces projets.
Les travaux de mise en oeuvre de la loi Climat-résilience étant en cours, la liste de ces projets n'est pas disponible à l'heure actuelle. Selon une enquête menée par l'administration auprès des préfets, la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers induite par certaines catégories de projets 38 ( * ) pour la décennie 2021-2031 pourrait représenter de l'ordre de 19 000 hectares, soit de l'ordre de 16 % de l'enveloppe nationale, majoritairement pour les infrastructures de transports.
Selon les travaux menés dans les conférences des SCoT, les projets d'envergure nationale et régionale pourraient représenter de l'ordre de 10 à 35 % de l'enveloppe foncière restante selon les régions, ce qui obligerait le bloc local à réduire sa consommation de foncier de l'ordre de 60 à 80 % par rapport à la dernière décennie 39 ( * ) .
C. La déclaration de projet est une procédure permettant de faciliter la mise en compatibilité des documents d'urbanisme
Par ailleurs, le droit existant prévoit, à l'article L. 300-6 du code de l'urbanisme, une procédure de déclaration de projet pour faciliter la mise en compatibilité des documents d'urbanisme , lorsqu'elle est rendue nécessaire par la réalisation d'un projet d'aménagement d'intérêt général. Cette procédure est distincte de celle de déclaration de projet prévue par le code de l'urbanisme 40 ( * ) .
La déclaration de projet du code de l'urbanisme permet à l'État et à ses établissements publics, aux collectivités territoriales et à leurs groupements, après enquête publique, de prononcer l'intérêt général d'une action ou opération d'aménagement ou de la réalisation d'un programme de construction. Les projets peuvent être publics ou privés 41 ( * ) .
Les adaptations concernent en premier lieu les documents d'urbanisme : schéma de cohérence territoriale (SCoT), plan local d'urbanisme (PLU), plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi).
Lorsque la déclaration de projet est adoptée par l'État, elle peut également procéder à des adaptations dans les schémas régionaux 42 ( * ) et dans divers autres documents 43 ( * ) . Une évaluation environnementale est nécessaire lorsque le projet est susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement.
L'application de cette procédure a été encadrée par la jurisprudence , dans la mesure où elle permet d'alléger les contraintes procédurales s'imposant à la modification des documents d'urbanisme. Le Conseil d'État a ainsi précisé qu'il revient au juge du fond d'exercer un contrôle entier sur l'intérêt général s'attachant à la réalisation d'un projet faisant l'objet d'une telle déclaration, au regard notamment des objectifs économiques, sociaux et urbanistiques poursuivis par la collectivité publique intéressée 44 ( * ) .
II. Le dispositif envisagé - Sortir les « grands projets » des enveloppes d'artificialisation régionale
Le présent article complète le III précité de l'article 194 de la loi Climat-résilience en précisant les modalités de prise en compte des projets d'intérêt de construction, d'aménagement, d'infrastructures ou d'équipements d'ampleur nationale ou européenne et qui présentent un intérêt général majeur.
L'artificialisation ou la consommation d'espaces naturels, agricoles ou forestiers (ENAF) résultant de ces projets ne serait pas prise en compte dans les objectifs assignés à chaque région et, par conséquent, aux périmètres infrarégionaux.
Trois catégories de projets d'ampleur nationale ou européenne sont distinguées :
- des projets à maîtrise d'ouvrage directe ou déléguée de l'État ;
- des projets tendant à l'implantation d'unités industrielles valorisant l'utilisation d'une ressource naturelle renouvelable, concourant à la transition énergétique ou relevant de l'indépendance nationale ;
- des projets tendant à l'agrandissement ou à la création d'infrastructures ou d'équipements interrégionaux, nationaux ou européens.
Ces projets devraient être inscrits au SRADDET , après avis de la conférence des SCoT transformée en conférence de gouvernance du « ZAN » par l'article 4 de la présente proposition de loi, ainsi que des collectivités territoriales et groupements de collectivités territoriales concernés par ces projets. La procédure de déclaration de projet , prévue par l'article L. 300-6 du code de l'urbanisme, peut être utilisée afin de faciliter la modification des documents d'urbanisme que rend nécessaire cette inscription.
Enfin, l'artificialisation des sols résultant de ces projets ferait l'objet d'une comptabilisation séparée par une autorité de l'État désignée par décret. Le Gouvernement devrait remettre au Parlement, au moins tous les trois ans, un rapport relatif à l'artificialisation résultant de ces mêmes projets, qui présente les chiffres de l'artificialisation constatée ainsi que projetée et qui formule des propositions de réduction du rythme de cette artificialisation.
III. La position de la commission - Approuver la définition des « grands projets » et leur sortie des enveloppes régionales, tout en prévoyant leur suivi et la définition d'une trajectoire de réduction de l'artificialisation qu'ils induisent
Selon des travaux menés dans les conférences des SCoT, les projets d'envergure nationale et régionale , tels que définis dans le droit existant, pourraient représenter de l'ordre de 10 à 35 % de l'enveloppe foncière restante selon les régions. Ce qui obligerait le bloc local à réduire sa consommation de foncier de l'ordre de 60 à 80 % par rapport à la dernière décennie. Dans la région des Hauts-de-France, par exemple, la présence d'un petit nombre de grands projets (canal Seine-Nord, port de Dunkerque, parkings du Brexit) représenteraient à eux seuls 35 % de l'enveloppe régionale. L'impact serait également considérable dans les régions du sud de la France avec le port de Marseille, le projet de réacteur thermonucléaire expérimental ITER ou les lignes à grande vitesse du Sud-Ouest.
Les trois catégories de projets prévus par le présent article se rapprochent de celles prévues dans le droit existant , tel que précisé par le décret du 29 avril 2022. Ce décret ouvre en effet la qualification de projet d'ampleur nationale ou régionale à des projets d'aménagements, d'infrastructures et d'équipements publics, mais aussi à des projets d'activités économiques, sous réserve qu'ils soient d'intérêt général majeur et d'envergure nationale ou régionale 45 ( * ) .
L'inclusion de projets d'activités économiques a fait l'objet de débats. Or il est essentiel de concilier la mise en oeuvre des objectifs de réduction de l'artificialisation avec le développement des territoires , à l'heure où la transition énergétique elle-même entraîne une mutation du tissu industriel qui rend nécessaire la création ou l'extension de sites.
De même, l'accent mis sur la souveraineté industrielle, notamment à la suite de la crise du Covid, favorise les projets de relocalisation, soutenus notamment par le plan de relance et le plan France 2030 46 ( * ) .
La qualification d'« intérêt général majeur », pour sa part, est déjà prévue au niveau réglementaire dans la qualification des projets d'envergure nationale et régionale prévue par l'article R. 4251-8-1 précité du code général des collectivités territoriales, comme indiqué supra. Dans le cadre de l'article R. 4251-8-1, selon les explications apportées par l'administration centrale, cette notion permet de retenir des projets qui, au vu de leurs caractéristiques mais surtout en raison des effets qu'ils emportent et de ce qu'ils impliquent territorialement, des enjeux qui y sont attachés et des objectifs auxquels ils permettent de répondre, sont nécessairement d'intérêt général mais plus précisément de nature à présenter un intérêt général pouvant être qualifié de majeur. Cet intérêt doit être manifestement significatif au niveau national ou régional.
La notion d'ampleur nationale ou européenne n'est pas précisément définie par le présent article. Elle pourrait correspondre à la nature ou au type de projet, à ses dimensions et à son ampleur territoriale, ainsi qu'à son origine et au niveau de reconnaissance et de portage.
Le Gouvernement a proposé une solution alternative, qui consisterait à « mutualiser » entre l'ensemble des régions l'artificialisation induite par les « grands projets ». Cette solution est apparue peu juste, et difficilement supportable par les régions dépourvues de grands projets, puisqu'elles verraient leurs possibilités de développement réduites en raison d'opérations menées dans d'autres régions et dont elles n'auraient pas bénéficié.
Au total, la commission spéciale a soutenu dans l'ensemble le mécanisme proposé par la proposition de loi, en lui proposant plusieurs adaptations.
En premier lieu, la commission a souligné la nécessité de ne pas exonérer les « grands projets », et notamment l'État qui les conduit, de toute responsabilité vis-à-vis de l'artificialisation qu'ils induisent. Elle a adopté :
- d'une part, un amendement COM-69 du rapporteur, qui prévoit une information sur l'artificialisation résultant des projets d'ampleur nationale ou européenne et d'intérêt général majeur. Il manque en effet un suivi de ces projets, souvent réalisés par ou à l'impulsion de l'État. L'amendement prévoit donc l'inscription au SRADDET des grands projets réalisés entre 2011 et 2021, et pas seulement entre 2021 et 2031, ce qui permettra de constater s'ils participent à l'effort de réduction de l'artificialisation, au même titre que les projets de moindre ampleur qui relèvent des enveloppes d'artificialisation des régions ;
- d'autre part, un amendement COM-12 de M. Christian Redon-Sarrazy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, tendant à la définition d'une trajectoire spécifique à ces grands projets favorisant l'atteinte des objectifs de réduction de l'artificialisation, présentant notamment les actions de réduction du rythme de l'artificialisation que l'État met en oeuvre.
En outre, afin d'éviter tout délai ou blocage dans la procédure de modification des SRADDET, la commission a adopté un amendement COM-68 , présenté par le rapporteur, prévoyant un délai limite de deux mois pour que la conférence de gouvernance régionale et les parties prenantes locales rendent leurs avis sur la qualification des « grands projets ».
Par ailleurs, la commission a adopté un amendement COM-67 du rapporteur, afin de clarifier la nécessité pour un projet de remplir une condition d'intérêt général majeur en plus de l'appartenance à l'une des trois catégories indiquées. La condition d'intérêt général majeur est déjà nécessaire en application de l'alinéa premier et n'a donc pas à être répétée sur l'alinéa 5 et les alinéas suivants, qui précisent donc les autres conditions.
La commission a également adopté un amendement COM-28 de Mme Frédérique Espagnac, qui inclut dans la liste des projets d'ampleur nationale ou européenne et d'intérêt général majeur des projets relevant d'une concession de service public de l'État.
La commission a enfin adopté un amendement COM-70 de coordination juridique présenté par le rapporteur.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 5
Projets d'ampleur régionale et projets
d'intérêt intercommunal
Cet article précise les modalités de désignation des projets d'ampleur régionale, dont l'artificialisation serait imputée sur l'enveloppe d'artificialisation de la région et non sur celle de leur territoire d'implantation.
Il prévoit également que la fixation des objectifs de réduction de l'artificialisation à l'échelle d'une intercommunalité doit prendre en compte les projets d'intérêt intercommunal portés par les communes membres.
Outre quatre amendements rédactionnels, la commission a adopté deux amendements tendant à :
- prévoir que les projets d'ampleur régionale sont comptabilisés de manière séparée ;
- instaurer un délai limite de deux mois pour que la conférence de gouvernance régionale et les parties prenantes locales rendent leurs avis relatifs à la qualification des projets d'ampleur régionale susceptibles de faire l'objet d'une « mutualisation » régionale.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - La loi Climat-résilience a prévu la prise en compte, dans la fixation des objectifs de réduction de l'artificialisation, des projets d'envergure régionale et des projets d'intérêt communal ou intercommunal
L'article 194 de la loi Climat-résilience définit les conditions de mise en oeuvre des objectifs décennaux de réduction de l'artificialisation dans les schémas régionaux, incluant notamment la modification des documents d'urbanisme.
Lors des débats ayant conduit à l'adoption de cette loi, le texte a été enrichi, sur proposition de la commission des affaires économiques du Sénat 47 ( * ) , par la prise en compte des projets d'envergure nationale ou régionale d'une part, d'intérêt communal ou intercommunal d'autre part.
A. Les modalités générales de mise en oeuvre de l'objectif de réduction de l'artificialisation
Les principaux éléments relatifs à l'articulation des documents d'urbanisme, pour ce qui concerne la définition et la mise en oeuvre des objectifs de réduction de la consommation d'espaces, et au calendrier de leur modification résultant de la loi Climat-résilience ont été présentés supra 48 ( * ) .
En particulier, le III de l'article 194 de cette loi précise les modalités relatives à la première période décennale , qui a commencé à la date de promulgation de la loi, soit le 22 août 2021.
La prise en compte de ces objectifs est prévue :
- pour les schémas de cohérence territoriale (SCoT), dans l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme, en application duquel le document d'orientation et d'objectifs (DOO) peut décliner ces objectifs par secteur géographique ;
- pour les plans locaux d'urbanisme (PLU), dans l'article L. 151-5 du même code, dont le quatrième alinéa prévoit que le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain pour la réalisation des objectifs de réduction d'artificialisation des sols fixés au niveau du SCoT ou, à défaut, au niveau régional.
La composition du SCoT et du PLU
En application de l'ordonnance de modernisation des schémas de cohérence territoriale 49 ( * ) , ce document comprend depuis avril 2021 :
- le projet d'aménagement stratégique (PAS) 50 ( * ) , qui définit les objectifs de développement et d'aménagement du territoire à un horizon de vingt ans sur la base d'une synthèse du diagnostic territorial et des enjeux qui s'en dégagent ;
- le document d'orientation et d'objectifs (DOO) 51 ( * ) , qui détermine les conditions d'application du PAS en définissant les orientations générales d'organisation de l'espace, de coordination des politiques publiques et de valorisation des territoires. Il aborde principalement trois thèmes : activités économiques, artisanales, commerciales, agricoles et forestières ; logement et habitat, implantation des équipements et services structurants, mobilités ; transitions écologique et énergétique et prévention des risques ;
- des annexes .
Le plan local d'urbanisme comprend pour sa part :
- un rapport de présentation , qui explique les choix retenus à partir d'un diagnostic territorial ;
- un projet d'aménagement et de développement durables (PADD) 52 ( * ) qui définit les orientations générales ;
- des orientations d'aménagement et de programmation (OAP) prévoient des dispositions propres à certains quartiers ou secteurs ;
- un règlement fixant les règles générales et les servitudes d'utilisation du sol permettant d'atteindre les objectifs ;
- des annexes .
Source : commission spéciale
B. La mutualisation, au niveau régional, des projets d'envergure nationale ou régionale
Dans sa rédaction résultant de la loi Climat-résilience, le 6° de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme indique que le document d'orientation et d'objectifs du SCoT tient compte des projets d'envergure nationale ou régionale lorsqu'il décline par secteur géographique les objectifs de réduction de l'artificialisation.
L'impact de ces projets en matière d'artificialisation peut ne pas être pris en compte pour l'évaluation de l'atteinte des objectifs fixés au niveau du SCoT en application du second alinéa de l'article L. 141-3 du même code, tout en restant pris en compte pour l'évaluation de l'atteinte des objectifs fixés au niveau régional dans le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET).
Pour mémoire, la notion d' intérêt régional est utilisée, dans le code général des collectivités territoriales, pour préciser la nature et l'étendue des compétences de la région 53 ( * ) .
Comme indiqué supra 54 ( * ) , la notion de projets d'intérêt national ou régional a été précisée par un décret du 29 avril 2022 55 ( * ) . L'article R. 4251-8-1 du code général des collectivités territoriales précise ainsi que les projets concernés sont définis par la région dans le fascicule du SRADDET. Il s'agit de projets d'aménagements, d'infrastructures et d'équipements publics ou d'activités économiques qui sont d'intérêt général majeur et d'envergure nationale ou régionale.
L'artificialisation induite par les projets d'envergure régionale, comme celle induite par les projets d'envergure nationale, n'est pas décomptée directement du territoire dans lequel ils se trouvent, mais elle demeure décomptée au niveau régional.
Les travaux de mise en oeuvre de la loi Climat-résilience étant en cours, l'administration n'est pas en mesure, à l'heure actuelle, de donner une liste des projets d'envergure régionale, pas plus que celle des projets d'envergure nationale.
Selon les travaux menés dans les conférences des SCoT, les projets d'envergure nationale et régionale pourraient représenter de l'ordre de 10 % à 35 % de l'enveloppe foncière restante selon les Régions.
C. La prise en compte des projets d'intérêt communal ou intercommunal
Le même article L. 141-8 du code de l'urbanisme prévoit, dans son 7°, que le document d'orientation et d'objectifs du SCoT tient compte , lors de la déclinaison par secteur géographique des objectifs de réduction de l'artificialisation, des projets d'intérêt communal ou intercommunal .
Les notions d'intérêt communal et d'intérêt intercommunal ou communautaire sont prévues par le code général des collectivités territoriales. Elles permettent par exemple de délimiter l'étendue des compétences des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) par rapport à celles des communes membres 56 ( * ) .
II. Le dispositif envisagé - Préciser les modalités de mutualisation et de prise en compte des projets d'ampleur régionale d'une part, des projets d'intérêt communal et intercommunal d'autre part
A. La mutualisation des projets d'ampleur régionale
Dans son I , le présent article complète le III précité de l'article 194 de la loi Climat-résilience par un paragraphe relatif à la mutualisation des projets d'ampleur régionale .
Il permet aux schémas de cohérence territoriale (SCoT), dans leur projet d'aménagement stratégique (PAS), de ne pas prendre en compte, pour l'évaluation des objectifs décennaux, de l'artificialisation des sols ou la consommation d'espaces naturels, agricoles ou forestiers (ENAF) résultant de projets d'ampleur régionale .
Les projets d'ampleur régionale sont définis comme des projets de construction, d'aménagement, d'infrastructures ou d'équipements qui respectent deux conditions.
D'une part, ils font l'objet d'une inscription au schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), ce qui limite l'application de cette disposition aux régions soumises à l'obligation d'élaborer ce document, comme c'est le cas dans le droit existant au 6° précité de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme 57 ( * ) . Au préalable, la conférence des SCoT, remplacée par une conférence de gouvernance du « ZAN » par l'article 3 de la présente proposition de loi, se prononce sur la qualification de ces projets, ainsi que les collectivités territoriales et les groupements de collectivités territoriales sur le territoire desquels ces projets sont implantés.
La procédure de déclaration de projet , prévue par l'article L. 300-6 du code de l'urbanisme, peut être utilisée afin de faciliter la modification des documents d'urbanisme que rend nécessaire cette inscription 58 ( * ) .
En second lieu, l'artificialisation des sols résultant de ces projets demeure prise en compte pour l'évaluation de l'atteinte des objectifs régionaux .
Par ailleurs, les projets d'ampleur régionale peuvent être proposés par les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents en matière de documents d'urbanisme, ainsi que par les départements.
B. Les modalités de prise en compte des projets d'ampleur intercommunale
Le II du présent article complète le quatrième alinéa de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme, relatif à la fixation, par le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) du plan local d'urbanisme (PLU), d'objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain. Il est précisé que, pour la fixation de ces objectifs, un EPCI chargé de l'élaboration d'un PLU tient compte de l'existence de projets d'envergure intercommunale sis sur le territoire des communes membres, lesquels sont identifiés au sein du projet d'aménagement et de développement durables (PADD).
III. La position de la commission - Des précisions bienvenues sur la mutualisation des projets d'ampleur régionale et la prise en compte des projets d'intérêt intercommunal
La commission a approuvé dans l'ensemble les précisions apportées par l'article sur les conditions de mutualisation des projets d'ampleur régionale et sur la prise en compte des projets d'intérêt intercommunal.
Elle a adopté l'amendement COM-13 de M. Christian Redon-Sarrazy et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, qui prévoit que les projets d'ampleur régionale sont comptabilisés de manière séparée : les projets n'étant pas suivis dans le cadre des enveloppes des SCoT ou des communes, il est nécessaire qu'ils soient suivis au niveau de la région. L'artificialisation résultant de ces projets demeure cependant prise en compte dans les objectifs assignés à chaque région.
Elle a également adopté les amendements rédactionnels COM-71 , COM-73 , COM-74 et COM-75 présentés par le rapporteur, ainsi que son amendement COM-72 qui instaure un délai limite de deux mois pour que la conférence de gouvernance régionale et les parties prenantes locales rendent leurs avis relatifs à la qualification des projets d'ampleur régionale susceptibles de faire l'objet d'une « mutualisation » régionale.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
CHAPITRE III
Mieux
prendre en compte les spécificités des territoires
Article 6
Renforcement de la prise en compte
des efforts
passés de sobriété foncière
Cet article vise à mieux prendre en compte les spécificités des territoires en alignant les critères de territorialisation dont doivent tenir compte les SRADDET dans la déclinaison des objectifs de lutte contre l'artificialisation sur ceux définis pour les SCoT à l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme. Il permet de mieux tenir compte des efforts passés de réduction de consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers avant 2031, ainsi que des efforts de réduction de l'artificialisation à compter de 2031.
La commission a adopté un amendement du rapporteur qui supprime l'alignement des critères de territorialisation dont doivent tenir compte les SRADDET sur ceux applicables aux SCoT, mais renforce la prise en compte des efforts passés, afin de la rendre totale, avant et après 2031, et identique entre SRADDET et SCoT.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - Une prise en compte des besoins des territoires et des efforts passés de réduction de l'artificialisation différenciée entre les différents documents de planification et d'urbanisme
A. La bonne déclinaison des objectifs de réduction de l'artificialisation nécessite la prise en compte des enjeux et besoins auxquels font face les territoires
La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le changement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite « Climat-résilience ») a introduit un objectif national visant à réduire le rythme d'artificialisation.
Cet objectif est décomposé en deux périodes :
- sur la période 2021-2031, un objectif de réduction de moitié de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers constatée entre 2011 et 2021.
- à compter de 2031 et à horizon 2050, un objectif d'absence d'artificialisation nette où toute action d'artificialisation devra être compensée par une opération de renaturation.
La loi Climat-résilience prévoit une intégration de ces objectifs dans les documents de planification et d'urbanisme selon une méthode « en cascade » et un calendrier précisément fixé.
Afin de prévenir une application uniforme de l'objectif de réduction de l'artificialisation de - 50 % pour la période 2021-2031 qui négligerait de prendre en compte la diversité et les spécificités des territoires, un dispositif de territorialisation a été intégré lors de la navette parlementaire, à l'échelon du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) et du schéma de cohérence territoriale (SCoT).
Ainsi, le I, 1° de l'article 194 de la loi Climat-résilience précise que cet objectif de réduction de l'artificialisation inscrit au SRADDET « est décliné entre les différentes parties du territoire régional ». Cette déclinaison territoriale a ensuite été précisée par voie réglementaire dans le décret n° 2022-762 du 29 avril 2022 relatif aux objectifs et aux règles générales en matière de gestion économe de l'espace et de lutte contre l'artificialisation des sols du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires. L'article 3 du décret modifie ainsi l'article R. 4251-3 du code de l'urbanisme en intégrant quatre critères de territorialisation.
LES CRITÈRES DE TERRITORIALISATION AU NIVEAU DES SRADDET
(Article R. 4251-3 du code général des collectivités territoriales)
Les objectifs en matière de gestion économe de l'espace et de lutte contre l'artificialisation des sols sont définis et sont territorialement déclinés en considérant :
1° Les enjeux de préservation, de valorisation, de remise en bon état et de restauration des espaces naturels, agricoles et forestiers ainsi que des continuités écologiques ;
2° Le potentiel foncier mobilisable dans les espaces déjà artificialisés, en particulier par l'optimisation de la densité, le renouvellement urbain et la réhabilitation des friches ;
3° L'équilibre du territoire, en tenant compte des pôles urbains, du maillage des infrastructures et des enjeux de désenclavement rural ;
4° Les dynamiques démographiques et économiques prévisibles au vu notamment des données disponibles et des besoins identifiés sur les territoires.
Ce même article 194 de la loi Climat-résilience modifie l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme en y inscrivant une liste de sept critères dont doivent tenir compte les schémas de cohérence territoriale dans la déclinaison des objectifs de réduction de l'artificialisation. Ces critères, introduits en première lecture par le Sénat permettent de garantir la prise en compte des enjeux auxquels font face les collectivités territoriales lors de la phase de dialogue de territorialisation au niveau des SCoT.
LES CRITÈRES DE TERRITORIALISATION AU NIVEAU DES SCOT
(Article L. 141-8 du code de l'urbanisme)
Pour la réalisation des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols mentionnés à l'article L. 141-3, le document d'orientation et d'objectifs peut décliner ces objectifs par secteur géographique , en tenant compte :
1° Des besoins en matière de logement et des obligations de production de logement social résultant de la législation applicable, en lien avec la dynamique démographique du territoire ;
2° Des besoins en matière d'implantation d'activité économique et de mutation et redynamisation des bassins d'emploi ;
3° Du potentiel foncier mobilisable dans les espaces déjà urbanisés et à urbaniser et de l'impact des législations relatives à la protection du littoral, de la montagne et des espaces naturels sur la disponibilité du foncier ;
4° De la diversité des territoires urbains et ruraux , des stratégies et des besoins liées au développement rural ainsi qu'à la revitalisation des zones rurales et des communes rurales caractérisées comme peu denses ou très peu denses au sens des données statistiques de densité établies par l'Institut national de la statistique et des études économiques ;
5° Des efforts de réduction de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers déjà réalisés par les collectivités compétentes en matière d'urbanisme au cours des vingt dernières années et traduits au sein de leurs documents d'urbanisme ;
6° Des projets d'envergure nationale ou régionale dont l'impact en matière d'artificialisation peut ne pas être pris en compte pour l'évaluation de l'atteinte des objectifs mentionnés au second alinéa du même article L. 141-3, mais est pris en compte pour l'évaluation de l'atteinte des objectifs mentionnés au deuxième alinéa de l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales ;
7° Des projets d'intérêt communal ou intercommunal .
B. La prise en compte des efforts passés n'est pas assurée de la même manière pour les SRADDET et les SCoT
Afin de ne pas pénaliser les collectivités territoriales ayant déjà fait preuve de sobriété foncière, des dispositions de prise en compte des efforts passés de lutte contre l'artificialisation ont été introduites pendant la navette parlementaire.
Le 5° de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme mentionne que les SCoT doivent tenir compte des efforts de réduction de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers réalisés au cours des vingt dernières années par les collectivités territoriales et inscrits dans leurs documents d'urbanisme. Ainsi, pour déterminer la trajectoire de réduction de la consommation de ces espaces pour la décennie 2021-2031, les documents d'orientation et d'objectifs des SCoT devront prendre en compte les efforts de sobriété foncière réalisés entre 2001 et 2021 par les collectivités territoriales. Cependant, les efforts de réduction de l'artificialisation entrepris par les communes et EPCI à partir de 2031 ne sont pas inscrits parmi les critères de territorialisation des objectifs : une commune particulièrement vertueuse, qui aurait par exemple dépassé son objectif de réduction de l'artificialisation pendant la période 2031-2041 ne verrait pas, en théorie, prendre en compte ses efforts dans la déclinaison future de l'objectif.
Il n'existe pas de dispositif similaire parmi les critères de territorialisation inscrits à l'article R. 4251-3 relatif à la déclinaison des objectifs de lutte contre l'artificialisation par les SRADDET. Le décret n° 2022-762 du 29 avril 2022 relatif aux objectifs et aux règles générales en matière de gestion économe de l'espace et de lutte contre l'artificialisation des sols du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires qui définit ces critères indique néanmoins dans sa notice que le SRADDET prévoit « de fixer les modalités de la déclinaison infrarégionale des objectifs, prenant en compte les efforts de réduction du rythme d'artificialisation des sols déjà réalisés au niveau infrarégional » . Par ailleurs, l'article 194, III, 4° de la loi Climat-résilience indique que l'autorité compétente - le SRADDET le cas échéant - associe les établissements publics élaborant les SCoT à la fixation et à la déclinaison des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols « afin de tenir compte des périmètres des schémas de cohérence territoriale existant sur leur territoire et de la réduction du rythme d'artificialisation des sols déjà réalisée ». Les SRADDET doivent donc prendre en compte les efforts de réduction de l'artificialisation effectués par les SCoT lors de la déclinaison des objectifs de zéro artificialisation nette. Cependant, à l'inverse du dispositif en vigueur pour les SCoT, les efforts de réduction de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers entrepris pendant la période 2001-2021 ne sont pas explicitement pris en compte dans la déclinaison territoriale des objectifs de lutte contre l'artificialisation. Cependant, la notion de « réduction du rythme de l'artificialisation des sols déjà réalisée » peut être entendue au sens large et concerner l'ensemble des mesures de sobriété foncières prises par les collectivités territoriales, avant et après 2031.
Les efforts passés ne sont donc pas pris en compte sur les mêmes périodes ni dans les mêmes termes lors de la déclinaison des objectifs de lutte contre l'artificialisation inscrits dans les SRADDET et les SCoT.
II. Le dispositif envisagé - Un alignement des critères de territorialisation des SRADDET et des SCoT et une meilleure prise en compte des efforts passés de réduction de l'artificialisation
A. L'alignement des critères de territorialisation des SRADDET sur ceux des SCoT rend le dispositif de territorialisation plus lisible...
L'article 6 de la proposition de loi propose d'aligner les critères de territorialisation des SRADDET sur six des sept critères définis pour les SCoT en complétant l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territorial. Ainsi, les SRADDET devront effectuer la déclinaison des objectifs de réduction de l'artificialisation en tenant compte des mêmes critères que les SCoT, à l'exception du dernier critère (au 7° de l'article L. 141-8) relatif à la prise en compte des projets d'intérêt intercommunaux, non pertinent pour un document de planification régional. Le renvoi, inscrit au deuxième alinéa de l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, aux 1° à 6° de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme permet de centraliser les critères de territorialisation applicables aux SCoT et aux SRADDET et ainsi d'en améliorer la lisibilité.
Cette harmonisation des critères permet de donner une valeur législative identique aux dispositifs de territorialisation des objectifs de lutte contre l'artificialisation appliqués aux SRADDET et aux SCoT. Cet ajustement permet également aux territoires hors-SCoT de bénéficier de la prise en compte de leurs besoins et enjeux de la même manière que les collectivités couvertes par un SCoT.
B. ...et permet une meilleure prise en compte des efforts passés de réduction de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers et des efforts de réduction de l'artificialisation à compter de 2031 dans la déclinaison des objectifs par les SRADDET
Les modifications proposées à l'article 6 de la proposition de loi garantissent une prise en compte extensive des efforts passés lors de la déclinaison des objectifs par les SRADDET, tant de réduction de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers que de réduction de l'artificialisation à compter de 2031. En effet, le critère inscrit au 5° de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme fait mention de la prise en compte « des efforts de réduction de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers déjà réalisés par les collectivités compétentes en matière d'urbanisme au cours des vingt dernières années et traduits au sein de leurs documents d'urbanisme » . Ce critère de prise en compte des efforts effectués pendant la période 2001-2021 sera donc appliqué à la déclinaison des objectifs effectuée par le SRADDET. L'article 6 complète davantage l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales en y inscrivant une prise en compte des efforts de réduction de l'artificialisation effectués lors de la décennie précédente à compter de 2031. Concrètement, cela implique que lors de la déclinaison des objectifs de réduction de l'artificialisation pour 2021-2031, les SRADDET devront donc prendre en compte les efforts de réduction de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers sur la période 2001-2021. Lors de la déclinaison des objectifs à compter de 2031, ils devront prendre en compte les efforts de réduction de l'artificialisation réalisés lors de la décennie précédente.
III. La position de la commission - Un dispositif adapté à tous les échelons territoriaux qui assure une prise en compte effective de tous les efforts passés de lutte contre l'artificialisation
Les consultations d'association d'élus locaux et d'administrations centrales réalisées par la commission spéciale ont apporté des précisions sur les réalités de la déclinaison territoriale des objectifs de zéro artificialisation nette. Les critères précis inscrits à l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme et adaptés à l'échelon infrarégional des SCoT n'apparaissent pas pertinents pour l'échelon régional. En effet, le territoire régional est trop vaste et le nombre de communes concernées trop important pour prendre en compte les critères très détaillés figurant à l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme . En 2021, la moyenne de SCoT par régions (hors Île-de-France, Corse et Outre-mer) s'élève à 43. Sachant que les SCoT ont un périmètre moyen de 65 communes, l'ordre de grandeur du nombre de communes couvertes par un SCoT par région est estimé à 2800. Des critères exigeant une remontée de données et d'indicateurs communaux ou intercommunaux, tels que les obligations de logement social visées au 1° de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme, sont trop précis et constitueraient un trop grand volume de données pour être pris en compte dans la déclinaison des objectifs de lutte contre l'artificialisation par les régions. De l'avis des associations d'élus, la prise en compte de ces critères constituerait une trop grande contrainte pour les SRADDET lors de la déclinaison des objectifs de sobriété foncière . Pour rappel, les critères réglementaires de territorialisation inscrits à l'article R. 4251-3 définissent déjà un cadre pour la déclinaison entre les territoires des objectifs de sobriété foncière par la région.
Si les critères inscrits à l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme sont en majorité trop précis pour être appliqués aux SRADDET, le critère de prise en compte des efforts de réduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers (au 5° de l'article L. 141-8) doit être appliqué à l'échelon régional pour garantir une bonne prise en compte des efforts de sobriété foncière réalisés entre 2001 et 2021 par les collectivités territoriales.
La prise en compte des efforts passés de lutte contre l'artificialisation à compter de 2031 peut également être améliorée afin de garantir un critère identique entre SRADDET et SCoT. Il s'agit de compléter le critère de prise en compte des efforts de réduction de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers inscrit à l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme avec une prise en compte des efforts de réduction de l'artificialisation à compter de 2031 pour les SCoT , dans les mêmes termes que le critère introduit par l'article 6 pour les SRADDET.
Ainsi, les efforts passés de sobriété foncière doivent être totalement pris en compte , à la fois dans la déclinaison de l'objectif de réduction de - 50 % de consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers avant 2031 et dans la déclinaison de l'objectif de zéro artificialisation nette à compter de 2031, et ce tant pour les SRADDET que pour les SCoT .
La commission a adopté un amendement COM-76 du rapporteur afin de prendre en compte de manière identique les efforts passés de sobriété foncière effectués par les collectivités territoriales lors de la déclinaison des objectifs de réduction de l'artificialisation par les SRADDET et les SCoT
Cet amendement complète ainsi le 5° de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme avec un critère de prise en compte des efforts de réduction de l'artificialisation à compter de 2031 qui sera applicable dans la déclinaison des objectifs par les SCoT . Il complète également l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales avec un critère de prise en compte des efforts de réduction de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers effectués durant les vingt années précédant la période 2021-2031 , qui sera applicable dans la déclinaison des objectifs par les SRADDET .
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 7
Prise en
compte des spécificités de la ruralité dans la
territorialisation
des objectifs de réduction de l'artificialisation
des sols
-
Instauration d'une surface minimale de développement
communal
d'au moins un hectare
Cet article vise à apporter plusieurs garde-fous à la territorialisation des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols qui s'opérera par le biais des documents d'urbanisme régionaux et intercommunaux.
Il prévoit tout d'abord que la déclinaison de l'objectif régional d'au moins 50 % de réduction en sous-objectifs régionaux tienne compte des enjeux des territoires ruraux, de même que la fixation d'objectifs intercommunaux de réduction au sein des plans locaux d'urbanisme intercommunaux.
Est également proposée l'instauration d'une « surface minimale de développement communal », c'est-à-dire d'une enveloppe « plancher » d'artificialisation garantie à chaque commune française, d'au moins un hectare. La territorialisation des objectifs de réduction de l'artificialisation qui sera décidée par les SCoT et les SRADDET, ainsi que la fixation d'objectifs au sein des documents locaux, ne pourra contraindre une commune à réduire son artificialisation en deçà de ce plancher. La surface minimale sera fixée par chaque SCoT, ou, à défaut de SCoT, par le SRADDET, mais ne pourra dans aucun cas être inférieure à un hectare.
Sur proposition du rapporteur, la commission a souhaité renforcer encore cette garantie par un amendement de rédaction globale. Il confère au dispositif une plus grande efficacité, en inscrivant directement dans la loi le principe de la surface minimale d'un hectare, sans conserver la possibilité de modulation par le biais du SRADDET ou du SCoT. La rédaction clarifie également que la surface minimale de développement territorial n'emporte aucune dérogation à la comptabilisation de l'artificialisation des sols. Enfin, la commission a adopté le principe d'une réduction progressive du niveau de la surface minimale de période décennale en période décennale, après qu'un bilan en soit tiré, afin de converger vers la « zéro artificialisation nette ».
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - Une prise en compte insuffisante des spécificités de la ruralité dans la déclinaison concrète de la loi « Climat et résilience », qui pourrait aboutir à des situations inéquitables
A. La territorialisation régionale des objectifs de réduction de l'artificialisation est peu encadrée par la loi, et l'on peut craindre que la prise en compte des enjeux de ruralité y soit plus faible
L'article 191 de la loi (dite « Climat et résilience ») a fixé à la France un objectif national de lutte contre l'artificialisation des sols, décomposé en deux périodes :
• d'abord, entre le 22 août 2021 et le 21 août 2031, une réduction de moitié (- 50 %) du rythme de l'artificialisation nouvelle enregistrée entre le 22 août 2011 et le 21 août 2021 ;
• ensuite, en 2050, l'absence de toute artificialisation nette des sols, c'est-à-dire la « zéro artificialisation nette » (ZAN), au titre de laquelle toute artificialisation nouvelle devra être composée par une « désartificialisation » équivalente.
Afin de traduire ces objectifs nationaux au sein des documents de planification et d'urbanisme qui régissent les politiques de l'urbanisme et de l'aménagement, l'article 194 de la loi « Climat et résilience » a prévu une intégration de ces objectifs au sein des documents élaborés par les collectivités territoriales, selon une méthode « en cascade » et un calendrier précis entre 2021 et 2027 .
Les documents de planification de l'échelon régional 59 ( * ) sont d'abord tenus d'être modifiés d'ici le 22 février 2024 , et devront intégrer un objectif de réduction de l'artificialisation au moins égal à 50 % . Par le biais du rapport de compatibilité qui lie ces documents régionaux aux schémas de cohérence territoriale ( SCoT ) portés par l'échelon intercommunal, les SCoT devront à leur tour fixer des objectifs de réduction de l'artificialisation sur leur périmètre cohérents avec les objectifs régionaux. Enfin, de la même manière, les documents communaux et intercommunaux ( plans locaux d'urbanisme et cartes communales ) devront intégrer des objectifs compatibles avec ceux inscrits au SCoT.
Afin d'éviter une application uniforme de l'objectif national de réduction de - 50 % à chaque commune et établissement public de coopération intercommunale (EPCI) de France, au mépris des spécificités des bassins et des territoires (type de terrain, pression démographique, développement économique, crise du logement...) et des trajectoires passées, le Sénat avait introduit lors de la navette parlementaire du projet de loi « Climat et résilience » un dispositif dit de « territorialisation » .
Dans un esprit de différenciation, l'article 194 de la loi « Climat et résilience » (I, 1°, b, traduit à l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales) a ainsi permis aux schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) de décliner leur objectif global de réduction de l'artificialisation entre les différentes parties du territoire régional. La constitution des « grandes Régions » à la suite de la loi dite « NOTRe » a en effet accru la diversité territoriale de chaque périmètre régional, rendant impensable l'application d'une règle unique à l'ensemble du territoire.
Lors de l'examen du texte, le Sénat a également prévu qu'une telle territorialisation puisse aussi s'opérer au niveau de chaque SCoT : il pourra ainsi être prévu, au sein du document, que différentes parties du territoire couvert puissent bénéficier de modulations de l'objectif de réduction de l'artificialisation fixé globalement au niveau du SCoT (II, 3° de l'article 194 précité, traduit à l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme) . À l'initiative du Sénat, des critères de territorialisation ont été introduits, afin d'encadrer l'exercice et de garantir la prise en compte de facteurs de différenciation légitimes (se référer au commentaire de l'article 6) .
Parmi ces critères, le 4° de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme garantit la prise en compte des enjeux de la ruralité , en particulier « la diversité des territoires urbains et ruraux, des stratégies et des besoins liés au développement rural ainsi qu'à la revitalisation des zones rurales et des communes rurales caractérisées comme peu denses ou très peu denses ».
Toutefois, en l'état du droit, ces critères de territorialisation s'appliquent uniquement à la deuxième étape de territorialisation, conduite au sein des SCoT, et non à la territorialisation initiale, compétence de la Région au sein des SRADDET. Le décret du 29 avril 2022 qui a fixé, sans que la loi ne le prévoie, des critères de territorialisation applicables aux SRADDET, a considérablement restreint la prise en compte des enjeux de la ruralité, ne citant plus que le « désenclavement rural » (se référer au commentaire de l'article 6).
B. Près de la moitié des communes françaises, principalement rurales, pourraient être contraintes à atteindre le « ZAN » dès 2031 en l'absence de prise en compte des enjeux de la ruralité
L'enjeu de cette double territorialisation via les SRADDET puis les SCoT est pourtant central . Sans territorialisation pertinente, avec une application uniforme de l'objectif de - 50 % à chaque commune française, près de la moitié d'entre elles disposerait d'enveloppes d'artificialisation presque nulles pour la première période décennale 2021-2031.
Selon les chiffres transmis à la commission spéciale par la DHUP et ceux de l'Observatoire de l'artificialisation, entre 2011-2021 (c'est-à-dire sur la période de référence pour calculer les enveloppes d'artificialisation autorisée entre 2021 et 2031), 9 811 communes françaises ont consommé moins de 1 hectare en dix ans. Ces 9 811 communes, soit 28 % des communes françaises, sont responsables d'environ 5 % de la consommation d'espace enregistrée en France sur la période (11 672 hectares). Cette consommation représente moins d'un millième de la surface de ces communes . Les caractéristiques de ces communes moins consommatrices font ressortir un profil-type de commune peu dense et rurale , ayant artificialisé faiblement en vue d'accueillir une ou deux familles ou de construire un équipement nécessaire.
À titre de comparaison, 2 622 communes françaises ont consommé entre 20 et 100 hectares sur cette même période 2011-2021 : 7 % des communes françaises sont responsables, seules, de près de 40 % de l'artificialisation enregistrée sur le territoire français.
Surtout, 993 communes françaises n'ont pas artificialisé du tout entre 2011 et 2021 , soit parce qu'aucun projet n'a émergé, soit parce qu'elles délivrent moins d'un permis tous les dix ans. Il s'agit souvent de communes fortement contraintes par la topographie ou leurs caractéristiques, par exemple des communes soumises à l'application de la loi Montagne ou de la loi Littoral ou faisant partie de périmètres de protection des zones naturelles qui limitent d'ores et déjà l'artificialisation.
Surface consommée
|
Nombre de communes concernées
|
Surface totale consommée par ces communes (en ha) (% du total) |
% de ces communes non couvertes par un SCoT |
||
0 hectare |
993 |
2,8 % |
0 |
0 % |
29,7 % |
Entre 0 et 0,5 hectare |
4993 |
14,3 % |
1209 |
0,5 % |
24,2 % |
Entre 0,5 et 1 hectare |
3825 |
10,9 % |
2813 |
1,2 % |
19,9 % |
Entre 1 et 2 hectares |
5239 |
15,0 % |
7650 |
3,1 % |
16,4 % |
Entre 2 et 5 hectares |
8226 |
23,6 % |
26 980 |
11,1 % |
14,3 % |
Entre 5 et 10 hectares |
5403 |
15,5 % |
38 198 |
15,7 % |
11,9 % |
Entre 10 et 20 hectares |
3500 |
10,0 % |
48 836 |
20,1 % |
9,9 % |
Entre 20 et 50 hectares |
2126 |
6,1 % |
64 114 |
26,3 % |
8,7 % |
Entre 50 et 100 hectares |
496 |
1,4 % |
33 248 |
13,7 % |
7,9 % |
Entre 100 et 200 hectares |
103 |
0,3 % |
13 596 |
5,6 % |
9,7 % |
Plus de 200 hectares |
24 |
0,1 % |
6492 |
2,7 % |
4,2 % |
Source : Commission spéciale, données DHUP et Observatoire de l'artificialisation
En l'absence de territorialisation réussie, si l'ensemble des communes françaises se voyaient appliquer l'objectif uniforme de réduction de 50 % de l'artificialisation, les communes ayant le moins artificialisé au cours de la dernière décennie se verraient imposer une contrainte plus forte encore. 5 986 communes (17 %) ne pourraient pas artificialiser plus de 2 500m 2 en dix ans - c'est-à-dire le tiers d'un terrain de football. Au total, 15 050 communes (43 %) ne pourraient pas artificialiser plus d'un hectare. Les communes ayant fortement artificialisé sur la période 2011-2021 disposeraient à l'inverse d'une enveloppe plus conséquente pour la période 2021-2031.
Au vu de cet état des lieux, l'application de la loi « Climat et résilience » pourrait, à défaut de territorialisation pertinente, résulter en des situations inéquitables et très bloquantes au sein des territoires, dès lors que l'on prend en considération que :
• une moindre consommation peut témoigner d'une plus grande sobriété foncière passée . Une application aveugle du - 50 % conduirait à contraindre plus fortement des communes ayant déjà réalisé d'importants efforts, qui devraient désormais atteindre dès 2031 la « quasi zéro artificialisation nette » ;
• les communes n'ayant pas du tout artificialisé au cours de la décennie précédente, même en déprise, peuvent voir de nouveaux besoins émerger au cours de la décennie à venir (nouvel équipement collectif, implantation d'activité dans le cadre de la revitalisation rurale ou de la relocalisation industrielle par exemple). Condamner l'ensemble des communes n'ayant pas artificialisé à ne plus jamais artificialisé apparaît dès lors inéquitable ;
• surtout, les communes rurales et peu denses disposent par nature d'une moins grande surface déjà artificialisée (à l'inverse, les espaces urbains, même peu denses, consomment moins d'espaces naturels, agricoles et forestiers, puisque ces espaces y sont bien plus rares). Le recyclage foncier est donc une option qui ne leur est pas ouverte, et une plus grande partie de la construction y résulte forcément en de l'artificialisation. Dans le même temps, ces espaces ruraux sont aussi soumis à davantage de contraintes urbanistiques en matière de protection des espaces agricoles ou naturels. Les auditions des rapporteurs et celles conduites dans le cadre de la mission conjointe de contrôle sénatoriale font état d'un risque de « muséification » des zones rurales cumulant les contraintes , au profit de la continuation de l'artificialisation en zone périurbaine, fortement consommatrice ;
• la représentation des petites communes rurales au sein de la gouvernance des schémas de cohérence territoriale - et donc de la conférence des SCoT instituée par la loi « Climat et résilience » - et a fortiori de la Région est limitée. Les auditions menées par la commission ont révélé d'importantes inquiétudes des élus locaux de communes rurales quant à leur capacité à se faire entendre dans les discussions de niveau régional et intercommunal. Devant réaliser des arbitrages difficiles en matière de répartition de l'effort, les Régions et les établissements porteurs de SCoT pourraient être tentés de privilégier les projets artificialisants des métropoles et des villes-centres, au détriment de ceux des périphéries , moins bien représentées.
II. Le dispositif envisagé - Mieux encadrer le processus de territorialisation et prévoir des garde-fous pour la ruralité, notamment une surface minimale de développement communale d'un hectare
A. Mieux prendre en compte les enjeux de la ruralité dans le cadre de la territorialisation régionale
L'article 7 du présent texte (I, article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales) précise tout d'abord les critères de territorialisation qui devront être pris en compte à l'échelle régionale, lors de la modification des SRADDET en vue d'y intégrer les objectifs territorialisés de réduction de l'artificialisation des sols.
Il est ainsi explicitement prévu que la territorialisation régionale « tient compte de la diversité des territoires urbains et ruraux, des stratégies et des besoins liés au développement rural ainsi qu'à la revitalisation des zones rurales et des communes rurales caractérisées comme peu denses ou très peu denses au sens des données statistiques de densité établies par l'Institut national de la statistique et des études économiques ». La rédaction reprend en cela point par point les dispositions du 4° de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme, qui impose à la territorialisation opérée au sein des SCoT de prendre en compte les enjeux de la ruralité.
L'article 7 (II, 3°, article L. 151-5 du code de l'urbanisme) prévoit aussi la prise en compte de ces mêmes enjeux de la ruralité au moment de la fixation des objectifs de réduction de l'artificialisation au sein des plans locaux d'urbanisme - notamment intercommunaux.
B. Instaurer une surface minimale de développement communale d'un hectare pour qu'aucune commune ne soit laissée pour compte de la territorialisation
D'autre part, l'article 7 instaure une « surface minimale de développement communal » , enveloppe « plancher » d'artificialisation garantie dans le cadre de la territorialisation, qui s'appliquera à toutes les communes françaises. Le dispositif proposé est le suivant :
• cette surface minimale sera fixée au sein du schéma de cohérence territoriale pour son périmètre, au sein de son document d'orientation et d'objectifs (II, 2° du dispositif, nouvel article L. 141-8-1 du code de l'urbanisme), pour chaque période décennale jusqu'en 2050. Elle s'appliquera à toutes les communes couvertes par le SCoT ;
• pour les communes non couvertes par un SCoT, le SRADDET fixera, à titre subsidiaire, cette surface minimale (I du dispositif, article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales) ;
• dans les deux cas, la surface fixée ne pourra en aucun cas être inférieure à un hectare . Elle pourra en revanche être supérieure à un hectare, si les collectivités compétentes estiment que les circonstances territoriales exigent une répartition plus égalitaire de l'enveloppe d'artificialisation (II, 2° du dispositif, nouvel article L. 141-8-1 du code de l'urbanisme) ;
• la surface minimale agira comme une forme de « garantie » pour les communes au cours du processus de territorialisation et de déclinaison des objectifs de réduction de l'artificialisation : les territorialisations successives ne pourront résulter en ce qu'une commune se voie imposer de réduire son artificialisation au-delà de cet hectare « garanti » (II, 2° du dispositif, nouvel article L. 141-8-1 du code de l'urbanisme) . Ainsi, le SRADDET, le SCoT (II, 1° du dispositif, article L. 141-8 du code de l'urbanisme), les PLU (II, 3° du dispositif, article L. 151-5 du code de l'urbanisme) et les cartes communales (II, 4° du dispositif, article L. 161-3 du code de l'urbanisme) devront s'assurer de fixer des objectifs quantitatifs de réduction compatibles avec la sanctuarisation de ces enveloppes communales minimales ;
• à mi-période, c'est-à-dire au bout de cinq ans, la conférence régionale de gouvernance que l'article 3 du présent texte propose de créer devra tirer un bilan de l'application de cette surface minimale , en vue notamment d'estimer si elle est susceptible d'être réellement consommée par les communes ou si des ajustements pourraient être envisagés (II, 2° du dispositif, nouvel article L. 141-8-1 du code de l'urbanisme).
III. La position de la commission - Un dispositif de justice territoriale, nécessaire à l'acceptabilité du « ZAN » au coeur des zones rurales
La commission a soutenu l'instauration d'une surface minimale de développement communal, telle que la propose l'article 7 de la proposition de loi.
Si la territorialisation est une condition essentielle de la bonne application du « ZAN », en vue de prendre en compte les différentes réalités locales, elle soulève cependant un enjeu fondamental de répartition de l'effort de réduction de l'artificialisation entre les territoires français . L'application mathématique de la règle de « - 50 % » n'est pas souhaitable, mais la territorialisation ne doit pas non plus aboutir à concentrer l'effort sur les communes rurales et les petites communes, au motif qu'elles constitueraient les réservoirs de nature face au développement des métropoles ; ou qu'elles n'auraient pas de besoins fonciers puisqu'en déprise ou ayant peu consommé précédemment.
Il est essentiel à l'acceptabilité du « ZAN » que celui-ci ne soit pas perçu comme une condamnation au sous-développement rural. Cheminer vers le « ZAN » à horizon 2050 n'est pas interdire, pour des milliers de petites communes, toute consommation de foncier dès 2021 .
La surface minimale de un hectare proposée par le texte est donc une mesure de justice territoriale, qui assure qu'il n'y aura pas de laissés pour compte du « ZAN » ni de territoire sacrifiés.
La commission ne partage pas l'analyse trop simpliste du dispositif partagée par le ministre, qu'elle réfute sur plusieurs points :
• La surface minimale n'est ni une incitation à consommer, ni une obligation de consommer une surface d'un hectare. C'est la préservation d'un potentiel , qui assure aux communes que les besoins émergents pourront être réalisés. Il est probable que, dans de nombreux cas, la surface minimale ne soit pas consommée, puisque plus de 10 000 communes environ ont déjà consommé moins d'un hectare au cours de la dernière période décennale ;
• Elle n'est pas non plus une dérogation à la comptabilité du « ZAN » , puisqu'elle sera prélevée et « garantie » sur l'enveloppe attachée au SRADDET ou au SCoT. C'est, dans l'esprit, un mécanisme de péréquation, de solidarité en faveur des territoires moins urbains, ayant été plus sobres par le passé ;
• Surtout, elle n'emportera pas une consommation additionnelle de 35 000 hectares , argument erroné pourtant souvent mis en avant par les détracteurs de la mesure.
En effet, 19 878 communes françaises ont consommé, entre 2011 et 2021, plus de deux hectares d'espaces naturels, forestiers et agricoles, et ne pourraient donc pas consommer plus d'un hectare entre 2021 et 2031 si on leur appliquait un objectif de réduction de l'ordre de 50 %. Ces 19 878 communes bénéficient donc déjà, de facto , d'une surface minimale garantie de un hectare. La surface minimale de développement communal ne représente donc un surcroît d'enveloppe que pour 15 050 communes françaises , qui auraient disposé d'une enveloppe de moins d'un hectare mais verront cette enveloppe augmentée au seuil plancher d'un hectare.
Qui plus est, ces communes auraient elles aussi, avec l'application de la règle de « - 50 % », disposé d'enveloppes, certes faibles. Ce ne sont donc pas 35 000 hectares additionnels, ni 15 050 hectares additionnels, mais bien 9 200 hectares environ, que le texte propose de sanctuariser au profit des communes les plus vulnérables . Comme rappelé plus haut, ces 9 200 hectares seront prélevés sur les enveloppes des régions et des SCoT, et non « sortis du décompte ZAN ».
Ces 9 200 hectares sont à mettre au regard de l'enveloppe globale d'artificialisation dont disposera la France entre 2021 et 2031, d'environ 121 000 hectares. Le « coût » réel de mise en oeuvre de la surface minimale proposée par l'article 8 est donc d'environ 7,6 % de l'enveloppe globale d'artificialisation, au profit de 15 050 communes françaises, soit 43 % des communes françaises : est-ce trop que demander une telle solidarité ?
Ces 7,6 % sont cohérents avec le poids de ces petites communes et communes rurales dans l'artificialisation au cours de la dernière décennie : les 15 050 communes pour qui la garantie de la surface minimale serait particulièrement pertinente ont représenté ensemble moins de 5 % de l'artificialisation constatée sur le territoire français entre 2011 et 2021.
• La proposition formulée par le ministre, qui consisterait à remplacer la garantie de un hectare par une garantie d'un pour cent de la surface déjà urbanisée de la commune n'est pas plus pertinente .
D'abord, un pourcentage de la surface urbanisée existante n'est pas un bon indicateur : il tend à favoriser les communes ayant le plus artificialisé dans le passé, déjà avantagées par la règle de « - 50 % ». Plutôt que de corriger les effets de bord de l'application du « ZAN », elle les renforcera , en favorisant notamment les villes périurbaines. Ce critère ne dit rien, non plus, des besoins et des dynamiques effectives de ces communes.
Ensuite, l'État ne dispose pas de données fiables ou formalisées sur la surface urbanisée de chaque commune française , raison pour laquelle cette donnée n'est pas incluse dans la base de données publique de l'Observatoire de l'artificialisation. Si la Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) a pu fournir au rapporteur de la commission spéciale des données de travail, celles-ci connaissent plusieurs lacunes, de l'admission même de l'administration (caractère déclaratif des données, variabilité de la donnée selon les sources, non-prise en compte du domaine public...). La notion de « surface déjà urbanisée » est-elle aussi très variable, selon que l'on retienne la méthode de la « tâche urbaine » ou d'autres modes de calcul (fichiers fonciers...). La base de calcul même de ce « 1 % » serait donc hautement contestable, à l'inverse du « 1 hectare » qui présente l'avantage de la simplicité et de la lisibilité .
Enfin, la proposition qu'a évoquée le Gouvernement comporte une condition très restrictive, à laquelle le rapporteur ne peut souscrire : celle de conditionner le bénéfice de la surface minimale aux seules communes couvertes par un plan local d'urbanisme intercommunal , ou en passe de l'être. Le rapporteur rappelle que, comme l'a prévu la loi, le transfert à l'intercommunalité de la compétence en matière de document d'urbanisme reste facultatif. Il relève du libre choix de chaque commune de déléguer ou non à l'EPCI cette compétence centrale. Conditionner le bénéfice de la surface minimale aux seules communes ayant transféré leur compétence à l'intercommunalité est un passage en force inacceptable pour le Sénat . On ne peut admettre que les communes ayant conservé leur compétence, dans leur bon droit, ne soient ainsi pénalisées.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission a pleinement soutenu la proposition de surface minimale de développement communal de un hectare portée par l'article 8 de la proposition de loi .
Par une rédaction globale de l'article adoptée dans l'amendement COM-77 du rapporteur, elle a souhaité renforcer encore cette garantie et lui conférer une plus grande efficacité, en inscrivant directement dans la loi le principe de la surface minimale de développement communal .
La possibilité laissée au SRADDET et au SCoT, dans le texte initial, de moduler à la hausse le seuil de la surface minimale selon les circonstances locales, est apparue source de complexité additionnelle dans le processus de territorialisation. La commission a donc supprimé ces échelons intermédiaires pour privilégier une inscription du principe de la surface minimale dans la loi, ce qui permettra qu'elle soit prise en compte et respectée dès l'amorce de l'évolution des documents de planification et d'urbanisme et à toutes ses étapes.
La commission a également clarifié que la surface minimale de développement territorial n'emporte aucune dérogation à la comptabilisation de l'artificialisation des sols : elle sera bien prélevée, selon les cas, sur l'enveloppe régionale, celle du SCoT ou celle du PLU intercommunal, sans y ajouter des droits supplémentaires.
Par ailleurs, la rédaction globale a précisé la disposition prévoyant qu'un bilan de l'application de la surface minimale soit conduit au sein de la conférence régionale de gouvernance. Il permettra notamment d'examiner si les enveloppes minimales d'un hectare ont effectivement été consommées, et de formuler des propositions d'évolution de la surface minimale au cours des périodes décennales suivantes.
En effet, sur proposition du rapporteur, la commission a adopté le principe d'une réduction du niveau de la surface minimale de développement communal de période décennale en période décennale, afin de converger vers la « zéro artificialisation nette » . Si l'on doit atteindre en 2050 une artificialisation nette nulle, il est nécessaire que le plancher institué par l'article soit progressivement réduit, en chemin vers une plus grande sobriété foncière. Le seuil minimal ne serait ainsi d'un hectare que pour la période 2021-2031 : il sera réévalué à la baisse à l'issue du bilan tiré à la fin de la première période.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 8
Instauration d'une part réservée au
développement territorial
Cet article vise à instaurer, aux niveaux de la région, du schéma de cohérence territoriale, et de l'intercommunalité, une « part réservée au développement territorial ». Cette mise en réserve d'une partie de l'enveloppe affectée à chaque niveau de la déclinaison territoriale des objectifs de réduction de l'artificialisation permettrait de pouvoir autoriser, en cours de période décennale des projets non anticipés et d'abonder l'enveloppe propre de communes ou d'EPCI pour leur permettre d'accueillir des projets d'intérêt pour le développement territorial.
La commission a adopté trois amendements visant à clarifier que la part réservée au développement territorial ne modifie pas les objectifs de lutte contre l'artificialisation applicables à chaque Région ou SCoT ; à renforcer la justification des projets éligibles à la part réservée au vu des exigences de sobriété foncière ; et à supprimer la possibilité d'instaurer une part réservée à l'échelon intercommunal.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - La territorialisation des objectifs de la loi Climat-résilience laisse peu de place aux projets locaux qui pourraient émerger en cours de période décennale
La loi Climat-résilience a prévu la traduction des objectifs nationaux de lutte contre l'artificialisation des sols au sein des documents élaborés par les collectivités territoriales, selon une méthode « en cascade » et un calendrier précis entre 2021 et 2027 (se référer au I du commentaire de l'article 7) .
Les documents de planification de l'échelon régional 60 ( * ) sont d'abord tenus d'être modifiés d'ici le 22 février 2024 , et devront intégrer un objectif de réduction de l'artificialisation au moins égal à 50 % . Par le biais du rapport de compatibilité qui lie ces documents régionaux aux schémas de cohérence territoriale ( SCoT ) portés par l'échelon intercommunal, les SCoT devront à leur tour fixer des objectifs de réduction de l'artificialisation sur leur périmètre cohérents avec les objectifs régionaux. Enfin, de la même manière, les documents communaux et intercommunaux ( plans locaux d'urbanisme et cartes communales ) devront intégrer des objectifs compatibles avec ceux inscrits au SCoT.
Dans un esprit de différenciation, l'article 194 de la loi Climat-résilience , à l'initiative du Sénat, a également permis aux schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) puis aux SCoT de décliner leur objectif global de réduction de l'artificialisation entre les différentes parties du périmètre de la région ou du SCoT . Les objectifs applicables à chaque plan local d'urbanisme ou carte communale seront donc encadrés par les choix de territorialisation opérés au niveau de la région et du SCoT.
La fixation d'objectifs quantitatifs de réduction de l'artificialisation, applicables par période décennale, au sein de chaque document régional et de chaque document d'urbanisme local implique un travail important de planification et d'anticipation des besoins des collectivités territoriales . En effet, le pourcentage de réduction qui sera établi d'ici 2027 contraindra les possibilités de construction et d'aménagement jusqu'en 2031. Pour les tranches suivantes, il faudra là aussi prévoir, jusqu'à dix ans à l'avance, les projets envisagés et déterminer en conséquence la répartition de l'effort régional ou territorial ainsi que les objectifs applicables à chaque commune ou établissement public de coopération intercommunale (EPCI) .
Le dispositif « en cascade » prévu par la loi à ce titre contraignant, en ce qu'il implique que l'émergence d'un projet non anticipé sur une commune, s'il ne peut être réalisé dans le cadre quantitatif fixé par la loi, impose de réviser l'ensemble des documents d'urbanisme de niveau régional, territorial et local afin d'adapter la répartition initialement prévue . Or, les procédures d'évolution des documents d'urbanisme sont lourdes, tant en termes de délais que de coûts. Cette rigidité fait porter un risque significatif sur les projets locaux d'intérêt communal et intercommunal, qui peuvent plus difficilement être anticipés et ne bénéficieront pas toujours d'une pleine reconnaissance au sein des SCoT et des SRADDET .
De plus, en l'absence de territorialisation réussie, si l'ensemble des communes françaises se voyaient appliquer l'objectif uniforme de réduction de 50 % de l'artificialisation, les petites communes et les communes rurales, qui ont peu voire n'ont pas artificialisé au cours de la dernière décennie, pourraient subir une forme de « gel de la construction » . Entre 2011 et 2021, 9 811 communes françaises ont ainsi consommé moins de 1 hectare, dont 993 n'ayant pas artificialisé du tout.
Ces communes ne seraient donc plus en mesure d'accueillir, par exemple, des projets d'équipements publics ou de développement économique, même dans le cas où ceux-ci présenteraient un intérêt réel pour le territoire .
II. Le dispositif envisagé - Prévoir une « part réservée au développement territorial » à chaque échelon de déclinaison des objectifs, permettant de réaliser des projets non anticipés ou d'abonder les enveloppes des communes peu dotées
L'article 8 de la proposition de loi propose de réserver, à chaque étape de déclinaison des objectifs de réduction de l'artificialisation, une part de l'enveloppe globale au profit de projets d'intérêt pour le développement territorial . Cette réserve serait dénommée « part réservée au développement territorial » .
De manière concrète, elle serait mise en place à trois niveaux :
• dans les EPCI compétents en matière de document d'urbanisme, lors de la fixation des objectifs applicables au plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) (3° du I, article L. 151-5 du code de l'urbanisme) ;
• au sein du SCoT, pour les territoires qui en sont dotés (2° du I, nouvel article L. 141-8-2 du code de l'urbanisme) . La part réservée au niveau du SCoT ne serait applicable qu'en dehors des EPCI de son territoire ayant déjà fixé une part réservée, pour éviter une « double mise en réserve » ;
• en dehors des territoires dotés de SCoT et de PLUi, au niveau du SRADDET (II, article L ; 4251-1 du code général des collectivités territoriales) . Le SRADDET assurera ainsi que l'ensemble des communes du périmètre régional pourront bénéficier, sous l'une des trois modalités, du dispositif de part réservée.
Dans les trois cas, la mobilisation de la part réservée en faveur d'un projet d'intérêt pour le développement territorial serait décidée par l'échelon correspondant , c'est-à-dire par délibération de l'organe délibérant de l'EPCI, de l'établissement porteur de SCoT ou de la Région, selon les cas.
La délibération serait tenue à une obligation de justification des projets retenus , au regard de son intérêt au regard des besoins d'habitat, de revitalisation des zones rurales, de développement économique et agricole ou de services publics du territoire. L'incompatibilité du projet avec les objectifs de lutte contre l'artificialisation de la commune devra aussi être démontrée, afin d'assurer le bon ciblage de la part réservée. Son impact en matière d'artificialisation devra être évalué.
La part réservée serait fixée par le document pour la période décennale à venir et pourrait donc permettre d'autoriser des projets locaux pour un montant d'artificialisation correspondant, sur cette même période, même lorsque ces projets amèneraient à dépasser les enveloppes communales ou intercommunales prévues. La rédaction précise que cette part réservée est prélevée sur l'enveloppe d'artificialisation permise au SRADDET, au SCoT, ou au PLUi : elle ne vient pas s'y ajouter et ne constitue donc pas une dérogation à la comptabilisation de l'artificialisation .
III. La position de la commission - Un mécanisme de solidarité territoriale, qui redonne de la souplesse à l'architecture complexe du « ZAN »
La commission a validé le principe et les orientations du mécanisme de part réservée proposé par le texte . Au dispositif rigide et descendant qu'est la déclinaison territoriale des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols, il apporte souplesse et bon sens .
Il permettra aux élus locaux, notamment des petites villes et de la ruralité, de continuer à accueillir des projets d'intérêt général, parfois essentiels à l'accès des populations aux services publics, au logement ou à l'emploi . Sans un tel mécanisme, vecteur d'une réelle solidarité territoriale , les projets nouveaux se concentreront sur le territoire des communes ayant préalablement davantage artificialisé, seules à même de pouvoir les accueillir, entraînant une spirale de la déprise au sein des territoires plus sobres.
Surtout, il permettra de nuancer la logique strictement décennale de la politique de lutte contre l'artificialisation des sols mise en oeuvre par la loi Climat et résilience, qui n'offre que peu de souplesse pour des projets émergeant en cours de période ou en cas d'évolution rapide des besoins fonciers. Les projections et anticipations des dynamiques locales sur lesquelles s'étaient basées les travaux en début de période décennale peuvent rapidement évoluer - par exemple par l'installation d'une nouvelle entreprise ou la fermeture de certains services -, rendant obsolètes la répartition initialement décidée. La part réservée offre donc aussi le moyen d'éviter que les incontournables imprévus qui se présenteront ne viennent gripper la « mécanique du ZAN » et conduire au blocage , au détriment des collectivités territoriales.
Dans ce même esprit de simplification du dispositif, la commission a adopté un amendement COM-47 de M. Vial visant à supprimer la possibilité d'instaurer une part réservée à l'échelon intercommunal . La juxtaposition des parts réservées intercommunales et territoriales est source de complexité, pouvant constituer un doublon. D'autre part, elle entraînerait une forme de « mitage » du périmètre du SCoT, qui ne s'appliquerait plus alors qu'aux intercommunalités n'ayant pas mis en oeuvre leur « propre » part réservée. L'amendement adopté par la commission vise à limiter ces risques et simplifier le dispositif de part réservée porté par l'article 8.
Sur proposition du rapporteur, la commission a également adopté un amendement COM-78 clarifiant que la part réservée au développement territorial n'emporte aucune dérogation à la comptabilisation de l'artificialisation des sols : elle sera bien prélevée, selon les cas, sur l'enveloppe régionale ou l'enveloppe du SCoT, sans y ajouter des droits supplémentaires.
Enfin, à l'initiative du rapporteur, la commission a adopté un amendement COM-79 renforçant les exigences de justification de la qualification des projets d'intérêt pour le développement territorial. En cohérence avec l'objectif de sobriété foncière porté par les collectivités territoriales et par le Sénat, la délibération de qualification devra justifier que le projet éligible à la part réservée ne pourrait pas être réalisé dans les espaces déjà urbanisés de la commune d'accueil.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 9
Modalités d'appréciation du
caractère artificialisé ou non des surfaces
Cet article vise à concilier l'objectif de préservation de la nature en ville avec celui de densification du tissu urbain et de recyclage foncier.
Pour ce faire, il se fonde sur un dispositif à double détente afin d'offrir de la souplesse au bloc communal : il prévoit dans un premier temps que les surfaces végétalisées soient considérées par défaut comme non artificialisées, tout en permettant aux communes et EPCI de délimiter dans leurs documents d'urbanisme des « périmètres de densification et de recyclage foncier », au sein desquels l'artificialisation des surfaces herbacées n'est pas décomptée.
La commission a adopté trois amendements, dont un rédactionnel, visant d'une part à exclure les pelouses situées sur les parcelles affectées à une activité secondaire ou tertiaire des surfaces considérées comme artificialisées, d'autre part à y inclure les surfaces herbacées attenantes à des infrastructures de transport et à considérer comme artificialisées les surfaces dont l'état de pollution des sols est incompatible avec un usage résidentiel, récréatif ou agricole.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - La concision de la définition législative des sols artificialisés, à l'origine d'un excès de pouvoir interprétatif de l'autorité réglementaire
A. L'émergence récente d'une définition générique de l'artificialisation des sols dans la loi
Avant la promulgation de la loi Climat-résilience du 22 août 2021, il n'existait pas de définition stabilisée de l'artificialisation des sols ni d'objectifs chiffrés de réduction de son rythme.
Ce souci de freiner l'artificialisation des espaces naturels, agricoles et forestiers n'était cependant pas absent des politiques d'aménagement du territoire antérieures. En réponse aux préoccupations environnementales croissantes des élus, le droit de l'urbanisme a fixé depuis plusieurs décennies pour cibles l'utilisation économe des espaces, la protection des espaces naturels, agricoles et forestiers et la lutte contre l'étalement urbain.
Le chapitre III (« Lutter contre l'artificialisation des sols en adaptant les règles d'urbanisme ») du titre V de la loi Climat-résilience a défini une trajectoire de réduction de l'artificialisation des sols en deux temps, avec la réduction de moitié du rythme de l'artificialisation constatée d'ici à 2031 par rapport à la décennie précédente et l'absence de toute artificialisation nette en 2050, ainsi qu'une méthode pour y parvenir , fondée sur la concertation, la différenciation et la prise en compte des réalités territoriales.
Pour ce faire, l'article 192 de la loi Climat-résilience a codifié, à l'article L. 101-2-1 du code de l'urbanisme, une définition de l'artificialisation comme « l'altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d'un sol, en particulier de ses fonctions biologiques, hydriques et climatiques, ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage ».
Cette définition, fondée sur l'atteinte aux fonctions des sols, fait référence au changement d'état d'un sol par rapport à son état naturel , en raison de son mode d'usage ou d'occupation, notamment par le biais du bâti, de revêtements comme le bitume, ou de stabilisation, c'est-à-dire d'ajouts de couches artificielles.
Faute de temps pour préciser cette définition dans le délai d'examen contraint d'un texte aussi volumineux (plus de 300 articles au terme de la navette parlementaire) et pour éviter de contribuer à la dégradation de l'intelligibilité de loi, le législateur a confié à un décret en Conseil d'État l'établissement d'une nomenclature des sols devant être considérés comme artificialisés dans les documents de planification et d'urbanisme, ainsi que l'échelle à laquelle l'artificialisation des sols devait être appréciée.
Pour encadrer l'exercice du pouvoir réglementaire , le législateur a pris le soin de préciser :
- qu'une surface dont les sols sont soit imperméabilisés en raison du bâti ou d'un revêtement, soit stabilisés et compactés, soit constitués de matériaux composites devait être considérée comme artificialisée ;
- qu'une surface soit naturelle, nue ou couverte d'eau, soit végétalisée, constituant un habitat naturel ou utilisée à usage de cultures devait être regardée comme non artificialisée.
Ces caractéristiques génériques ont été élaborées avec le souci de ne pas introduire de nouvel étage de complexité dans la stratégie de lutte contre l'artificialisation des sols, pour faciliter la qualification du caractère artificialisé ou non des surfaces par toutes les collectivités territoriales, y compris celles peu dotées en ingénierie, ainsi que par les porteurs de projet.
Dans l'esprit du législateur, ces caractéristiques devaient servir de socle à l'élaboration du décret, dont le rôle consistait à déterminer, par le moyen d'une nomenclature précise et spécifique, les sols devant être regardés comme artificialisés.
B. Un décret sur les sols artificialisés qui a bafoué l'intention du législateur
Ce décret, en date du 29 avril 2022 61 ( * ) , a été pris après un avis défavorable du Conseil national d'évaluation des normes , dont le collège des élus a constaté un « désaccord de fond résultant de la volonté du Gouvernement de publier dans des délais très restreints les projets de texte d'application de la loi du 22 août 2021, objectif qui entre en contradiction avec celui poursuivi par l'ensemble des associations nationales d'élus de garantir l'efficience de la réforme, nécessitant un approfondissement du travail technique. 62 ( * ) » Ce décret a également été contesté par des associations représentatives des élus locaux. Ainsi, le Bureau de l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) a décidé à l'unanimité, le 22 juin 2022, de déposer un recours devant le Conseil d'État, au motif que ce décret a été publié dans la précipitation, sans étude d'impact, « dans une approche de recentralisation rigide ». Ce recours est toujours pendant devant la juridiction administrative suprême.
Le décret précité élabore la nomenclature des sols voulue par le législateur en application de l'article 192 de la loi Climat-résilience et apporte plusieurs précisions concernant ses conditions d'application, notamment le fait que seules les surfaces terrestres sont concernées par le suivi de l'artificialisation nette des sols, jusqu'à la limite haute du rivage de la mer. Il précise également que le classement des surfaces est effectué selon l'occupation effective du sol observée , et non selon les zones ou secteurs délimités par les documents de planification et d'urbanisme.
Outre ces éléments conformes à l'esprit de la stratégie de réduction de l'artificialisation des sols définie par la loi « Climat et résilience », ce décret comporte en annexe, sous la forme d'un tableau reproduit ci-dessous, la nomenclature des catégories de surfaces devant être considérées comme artificialisées et non artificialisées.
Catégories de surfaces |
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Surfaces artificialisées |
1° Surfaces dont les sols sont imperméabilisés en raison du bâti (constructions, aménagements, ouvrages ou installations). |
2° Surfaces dont les sols sont imperméabilisés en raison d'un revêtement (artificiel, asphalté, bétonné, couvert de pavés ou de dalles). |
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3° Surfaces partiellement ou totalement perméables dont les sols sont stabilisés et compactés ou recouverts de matériaux minéraux. |
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4° Surfaces partiellement ou totalement perméables dont les sols sont constitués de matériaux composites (couverture hétérogène et artificielle avec un mélange de matériaux non minéraux). |
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5° Surfaces à usage résidentiel, de production secondaire ou tertiaire, ou d'infrastructures notamment de transport ou de logistique, dont les sols sont couverts par une végétation herbacée, y compris si ces surfaces sont en chantier ou sont en état d'abandon. |
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Surfaces non artificialisées |
6° Surfaces naturelles qui sont soit nues (sable, galets, rochers, pierres ou tout autre matériau minéral, y compris les surfaces d'activités extractives de matériaux en exploitation) soit couvertes en permanence d'eau, de neige ou de glace. |
7° Surfaces à usage de cultures, qui sont végétalisées (agriculture, sylviculture) ou en eau (pêche, aquaculture, saliculture). |
|
8° Surfaces naturelles ou végétalisées constituant un habitat naturel, qui n'entrent pas dans les catégories 5°, 6° et 7°. |
Les surfaces de la catégorie 5 ont particulièrement attiré l'attention des élus et des acteurs fonciers : le fait de considérer comme artificialisées les surfaces à usage résidentiel, de production secondaire ou tertiaire, ou d'infrastructures notamment de transport ou de logistique, couvertes par une végétation herbacée ne va non seulement pas de soi, mais contrevient à la définition du législateur de considérer les surfaces végétalisées comme non artificialisées.
Un fâcheux glissement sémantique a été opéré par le décret , entre la « surface végétalisée » figurant dans la loi et les « sols couverts par une végétation herbacée » visés par le décret. La notion de surface végétalisée est plus englobante, dans la mesure où elle intègre l'ensemble des couverts végétaux, incluant les pelouses, les arbustes et les arbres. La notion de végétation herbacée désigne quant à elle un type de végétation à caractère ras - essentiellement les pelouses.
Le décret a ainsi pris une liberté que ne lui autorisait pas la loi en introduisant cette distinction sémantique non voulue par le législateur, ce que déplorent le rapporteur et nombre des personnes entendues au cours des auditions conduites par la commission spéciale.
II. Le dispositif envisagé - Le retour à l'intention originelle du législateur à propos des parcs et jardins et l'introduction d'une faculté pour les élus du bloc communal de les densifier sans amoindrir leurs droits à construire
A. La réaffirmation appuyée de la volonté de considérer les pelouses comme non artificialisées
L'article prévoit explicitement que les surfaces végétalisées à usage résidentiel, secondaire ou tertiaire (jardins particuliers, parcs, pelouses...) soient considérées comme non artificialisées , dans le double objectif d'inciter les constructeurs à préserver des îlots végétaux au sein de leurs projets futurs et de ne pas pénaliser la renaturation dans les espaces urbains.
Cette disposition, qui ajoute à l'article L. 101-2-1 du code de l'urbanisme une catégorie de surfaces non artificialisées , précise qu'au regard du décompte de l'occupation effective des sols dans le cadre de la stratégie de lutte contre l'artificialisation, « une surface à usage résidentiel, de loisirs, ou de production secondaire ou tertiaire, dont les sols sont couverts par une végétation herbacée » est considérée comme non artificialisée.
Aux termes de cette classification, les surfaces de pelouses rases à usage résidentiel, à l'instar des jardins pavillonnaires, attenantes aux surfaces de production secondaire ou tertiaire seraient considérées comme non artificialisées, afin de promouvoir et préserver la nature en ville . Si les sols qui n'accueillent pas une végétation arbustive ou arborée sont présumés remplir des fonctionnalités écologiques moindres, les jardins n'en constituent pas moins des espaces verts propices à la biodiversité et qui améliorent le cadre de vie urbain.
En somme, outre le gain de lisibilité et de compréhension de la nomenclature des sols , cette disposition permet d' améliorer l'identification des espaces de nature en ville et d'accroître l'intérêt des opérations de renaturation afin de compenser les nouvelles surfaces artificialisées.
B. Une souplesse donnée aux communes et aux EPCI de densifier ces espaces pour faciliter la mise en oeuvre de la sobriété foncière
En parallèle, l'article permet aux communes et aux EPCI de délimiter, via leurs documents d'urbanisme et au sein des espaces urbanisés, des périmètres de densification et de recyclage foncier . Pour ce faire, il crée dans le code de l'urbanisme un article L. 101-2-2 qui définit ces périmètres et leurs conditions d'élaboration.
Dans ces périmètres définis par l'autorité communale ou intercommunale, l'utilisation des espaces végétalisés à des fins de densification ne sera pas regardée comme de l'artificialisation . Les aménagements, constructions, installations et travaux entrepris au sein de ces périmètres ne seront donc pas décomptés de l'enveloppe foncière établie pour respecter les trajectoires de réduction du rythme d'artificialisation.
Ce dispositif mis en oeuvre par la proposition de loi sénatoriale pourra bénéficier, par exemple, à la densification des lotissements, au recyclage des friches ou au remplissage des dents creuses au sein des hameaux. L'article décline les surfaces qui peuvent être intégrées à ces périmètres, à la fois pour les communes couvertes par un plan local d'urbanisme (PLU) et celles couvertes par une carte communale.
Au sein des communes couvertes par un PLU, les périmètres sont délimités par le règlement et peuvent inclure des parcelles situées :
- 1° au sein des zones urbaines identifiées par le règlement du PLU ;
- 2° au sein des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées (STECAL) dans les zones naturelles, agricoles ou forestières ;
- 3° au sein des secteurs déjà urbanisés délimités par le PLU ;
- 4° au sein des hameaux et groupes d'habitations nouveaux intégrés à l'environnement ;
- 5° sur une friche au sens de l'article L. 111-26.
Afin de conserver la souplesse voulue pour ce mécanisme et ne pas ajouter aux nombreuses modifications des documents d'urbanisme induites par la stratégie de lutte contre l'artificialisation des sols, l'article prévoit que la délimitation ou la révision des périmètres peut être mise en oeuvre selon la procédure de modification simplifiée prévue aux articles L. 153-45 à L. 153-48 du code de l'urbanisme
Pour les communes couvertes par une carte communale, les périmètres sont identifiés au sein d'un document graphique simplifié annexé à la carte communale et peuvent inclure :
- 1° au sein des secteurs constructibles délimités par la carte communale ;
- 2° au sein des secteurs déjà urbanisés identifiés et délimités ;
- 3° au sein des hameaux et groupes d'habitation nouveaux intégrés à l'environnement ;
- 4° sur une friche au sens de l'article L. 111-26.
Ces dispositions sont de nature à réoutiller les élus locaux qui ont le sentiment de vivre les objectifs « ZAN » comme une politique publique descendante sur lesquels ils n'ont pas prise. Ces périmètres sont conçus comme une réponse à la demande forte, exprimée par les élus et leurs associations représentatives, de mise à disposition de leviers fonciers différenciés et adaptatifs pour favoriser l'atteinte des trajectoires de lutte contre l'artificialisation.
III. La position de la commission - Conforter l'intention du législateur sur la comptabilisation des surfaces au regard de la stratégie « ZAN » en préservant la densification économique et en créant des incitations à la renaturation
Guidée par le souhait de simplifier et de rendre lisibles, pour les élus et les acteurs de terrain, les critères d'appréciation du caractère artificialisé ou non des sols , la commission spéciale a adopté l'amendement COM-80 du rapporteur visant à exclure les surfaces situées sur des parcelles affectées à un usage secondaire ou tertiaire des surfaces considérées comme non artificialisées dès lors que leur sol est couvert par une végétation herbacée, et à y inclure à l'inverse les surfaces herbacées affectées à des infrastructures de transport, à l'instar des talus ou des dépendances vertes.
Cette disposition permet ainsi de favoriser la densification industrielle et économique à l'échelle de la parcelle en ne pénalisant pas les projets d'extension, dans le but de faciliter la réindustrialisation de l'économie française et la relocalisation de productions stratégiques. Dans le même temps, cet amendement vise à réduire l'emprise souvent très importante des infrastructures de transport en ne considérant pas les étendues herbacées attenantes aux ouvrages et infrastructures comme artificialisées.
Par l'adoption de l'amendement COM-81 du rapporteur, la commission spéciale a également souhaité considérer comme artificialisées les parcelles dont l'état de pollution des sols est incompatible avec un usage résidentiel, récréatif ou agricole , afin de créer une incitation à y conduire des opérations de dépollution permettant de les réutiliser pour des projets nouveaux de construction ou d'aménagement ou à les renaturer, permettant d'améliorer le solde net d'artificialisation de la collectivité.
Cette disposition vertueuse et respectant l'esprit de la stratégie de lutte contre l'artificialisation constitue également une contrepartie aux coûts et délais souvent importants nécessaires à la pollution des sols .
La commission spéciale a enfin adopté un amendement rédactionnel COM-82 du rapporteur pour améliorer la rédaction de l'article.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 10
Prise en compte des spécificités des
communes littorales
soumises au recul du trait de côte
Cet article vise à décompter les parcelles rendues inutilisables en raison de l'érosion côtière de l'artificialisation constatée sur le périmètre de la commune, et de les considérer comme de la renaturation et à ne pas comptabiliser la consommation foncière des projets de relocalisation des parcelles touchées par le recul du trait de côte.
Il vise également à garantir une meilleure prise en compte des spécificités des communes littorales et des zones de montagne dans le cadre de la territorialisation des objectifs de réduction de l'artificialisation.
La commission a adopté 3 amendements tendant d'une part à garantir que les surfaces artificialisées rendues impropres à l'usage en raison du recul du trait de côte ne seront considérées comme renaturées que si elles font l'objet d'actions ou d'opérations effectives de restauration, d'autre part à faire précéder les relocalisations induites par le recul du trait de côte d'une étude de densification des zones déjà urbanisées et enfin à tenir compte des contraintes et des efforts des communes ultramarines incluses dans le périmètre d'un schéma de mise en valeur de la mer.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - Certains territoires font face à des risques nouveaux ou présentent des spécificités qui compliquent l'atteinte des objectifs de réduction de l'artificialisation
A. Les communes littorales, soumises à l'inquiétant phénomène du recul du trait de côté et à des spécificités législatives
Sous l'effet du changement climatique et de la hausse du niveau moyen des températures, le littoral est soumis à d'importantes pressions naturelles qui ont conduit les pouvoirs publics à adopter des stratégies d'adaptation des territoires au recul du trait de côte et à l'érosion côtière, afin de renforcer la résilience des espaces littoraux et les accompagner dans leur recomposition spatiale.
En vue d'améliorer la connaissance du phénomène de recul du trait de côte et la mise en oeuvre d'actions de prévention et d'adaptation, la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a introduit une nouvelle section « Gestion intégrée du trait de côte » au sein du code de l'environnement :
- l'article L. 321-13 prévoit la réalisation par l'État d'une cartographie du recul du trait de côte fondée sur un indicateur national d'érosion littorale afin de mieux appréhender et anticiper ce phénomène ;
- l'article L. 321-14 prévoit que le schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET) des régions littorales, ou le schéma d'aménagement régional (SAR) peuvent fixer des objectifs de moyen et long termes en matière de gestion du trait de côte.
Quelques données chiffrées
relatives
au recul du trait de côte
Environ 22 % du trait de côte naturel est en recul en France, soit l'équivalent d'un linéaire côtier d'environ 920 km répartis sur 200 communes. 270 km sont concernés par une vitesse moyenne de recul de l'ordre de 50 cm par an.
Ce phénomène fait peser un risque sur 5 000 à 50 000 logements d'ici à 2100. Le rapport du député Buchou remis au Premier ministre sur l'érosion côtière 63 ( * ) indique quant à lui que 16 500 bâtiments sont concernés par le recul pour une valeur globale de 3,7 milliards d'euros ainsi que 22 000 km d'infrastructures de transport.
Depuis cinquante ans, ce sont l'équivalent de plus de 30 km² de terre qui ont été submergés par la mer .
Source : Cerema, sauf indication contraire
La loi Climat-résilience a consacré au niveau législatif la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte , dans le code de l'environnement aux articles L. 321-13A et suivants. Cette stratégie est définie dans un document qui constitue le cadre de référence pour la protection du milieu et la gestion intégrée et concertée des activités au regard de l'évolution du trait de côte à l'échelle d'une cellule hydro-sédimentaire et du risque qui en résulte.
Par la même occasion, le législateur a considérablement renforcé la prise en compte de ces enjeux dans les documents de planification et d'urbanisme . La loi a par ailleurs mis en place un dispositif permettant à des communes volontaires concernées par ce phénomène d'intégrer une cartographie de zones exposées et de pouvoir bénéficier d'une « boîte à outils » via des leviers spécifiques : règles d'urbanisme dans les zones 0-30 et 30-100 ans ; droit de préemption ; bail réel d'adaptation ; etc .
Le législateur a également oeuvré à la mise en oeuvre d'un dispositif d'information des acquéreurs et des locataires sur les risques spécifiques au recul du trait de côte, préalablement à la vente ou la location d'un bien immobilier. L'état des risques, remis au potentiel acquéreur ou locataire lors de la première visite du bien, doit être établi depuis moins de six mois.
Un décret d'avril 2022 64 ( * ) a identifié une liste de 126 communes en tenant compte de la particulière vulnérabilité de leur territoire au recul du trait de côte. Cette vulnérabilité a été déterminée en fonction de l'état des connaissances scientifiques résultant notamment de l'indicateur national de l'érosion littorale et de la connaissance des biens et activités exposés à ce phénomène.
Dans ces communes, l'action en matière d'urbanisme et la politique d'aménagement doivent être adaptées aux phénomènes hydro-sédimentaires entraînant l'érosion du littoral. Elles ont l'obligation de cartographier les zones susceptibles d'être touchées dans trente et cent ans , puis d'intégrer ce document à leur plan local d'urbanisme pour geler ou limiter la constructibilité.
Ces contraintes ne sont cependant assorties d'aucune souplesse pour garantir le respect de leur trajectoire de réduction de la consommation foncière , compliqué par un risque naturel qui dépasse de loin les capacités d'adaptation d'un territoire. Ces communes sont en effet soumises au droit commun de la stratégie « ZAN », alors qu'elles font face à la fois au risque de voir certaines surfaces rendues impropres à l'usage et à la nécessité de relocaliser des aménagements et des constructions.
Enfin, les marges de manoeuvre des communes littorales en matière de planification et d'urbanisme sont encadrées par les dispositions de la loi Littoral de 1986 65 ( * ) , qui constitue le texte-cadre pour favoriser l'urbanisation cohérente et maîtrisée des territoires littoraux en instaurant divers principes et prescriptions. À cette fin, elle vise à limiter l'urbanisation en front de mer, orienter le développement et les aménagements vers les secteurs rétro-littoraux en évitant le mitage à travers le principe de l'extension de l'urbanisation en continuité de l'urbanisation existante et à protéger des altérations humaines les espaces naturels les plus sensibles du littoral.
Les dispositions de la loi Littoral, qui s'imposent aux documents d'urbanisme, constituent une contrainte complémentaire à intégrer pour les communes littorales pour l'atteinte de leurs objectifs « ZAN ». En l'absence d'une différenciation propre à ces territoires, la marche de la réduction de l'artificialisation serait plus haute que pour les autres territoires .
B. Les territoires de montagne font face à des contraintes naturelles et urbanistiques spécifiques
Aux termes de l'article 3 de la loi montagne de 1985 66 ( * ) , les « zones de montagne se caractérisent par des handicaps significatifs entraînant des conditions de vie plus difficiles et restreignant l'exercice de certaines activités économiques ». Le législateur a opéré une différenciation et une reconnaissance des contraintes particulières de ces territoires , notamment en matière d'aménagement du territoire. Les communes de montagne sont ainsi caractérisées par le législateur comme faisant face à une « limitation considérable des possibilités d'utilisation des terres et un accroissement important des coûts des travaux ».
Ces caractéristiques naturelles et économiques s'accompagnent de dispositions législatives spécifiques visant à concilier développement et protection des territoires de montagne , dans le but de promouvoir le développement équitable et durable de la montagne, érigé au rang d'enjeu majeur. Elles portent notamment sur l'extension de l'urbanisation en continu (article L. 122-5 du code de l'urbanisme), l'adaptation des règles de construction, la préservation des terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières ou encore les prescriptions relatives à la création de routes nouvelles.
Par ailleurs, sous l'effet du changement climatique, les territoires de montagne subissent des pressions majeures qui bouleversent leurs perspectives de développement et leurs modèles économiques . On estime ainsi que les territoires de montagne, sentinelles du climat, se réchauffent environ deux fois plus vite que les autres territoires 67 ( * ) : au cours du 20? siècle, dans les Alpes et les Pyrénées françaises, la température a augmenté de + 2° C, contre + 1,4° C dans le reste de la France. La fonte des glaciers induite par la hausse des températures entraîne par ailleurs une hausse des risques naturels , principalement en raison des effondrements glaciaires et des glissements de terrain. Autant de phénomènes qui font peser des contraintes plus fortes sur les politiques d'urbanisme et d'aménagement des 5 000 communes de montagne .
Les documents d'urbanisme chargés de décliner les trajectoires foncières visant à réduire la consommation d'espaces et l'artificialisation (SRADDET, SCoT et PLU) doivent tenir compte des spécificités des territoires de montagne .
Ces prescriptions se retrouvent dans plusieurs articles du code de l'urbanisme : le 3° de l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme prévoit en effet déjà que le document d'orientation et d'objectifs du SCoT peut décliner l'objectif de réduction de l'artificialisation des sols en tenant compte « de l'impact des législations relatives à la protection du littoral, de la montagne et des espaces naturels sur la disponibilité du foncier ». Le 1° de l'article L. 131-1 précise quant à lui que les SCoT doivent être compatibles avec « les dispositions particulières au littoral et aux zones de montagne » .
C) Les territoires ultramarins bénéficient d'un calendrier moins contraignant qu'en métropole, mais leurs spécificités sont mal prises en compte par la stratégie de lutte contre l'artificialisation des sols
Dans les départements et régions d'outre-mer, la mise en oeuvre de l'objectif « ZAN » suscite à la fois des attentes fortes pour contenir l'érosion de la remarquable biodiversité de ces territoires et préserver la rareté du foncier d'espaces souvent insulaires, mais également des inquiétudes concernant sa mise en oeuvre , qui nécessitera un accompagnement particulier des services de l'État.
La mise en oeuvre de la stratégie de sobriété foncière dans les territoires ultramarins soulève des questions spécifiques, notamment en ce qui concerne les données nécessaires pour apprécier les consommations d'espaces au cours de la décennie précédant la promulgation de la loi Climat-résilience : certaines données sont inexistantes ou incomplètes, par exemple celles issues des fichiers fonciers qui ne permettent pas d'appréhender correctement la consommation d'espace dû à l'habitat informel. Il est par conséquent compliqué, pour les collectivités ultramarines, de déterminer correctement les efforts à fournir, faute de connaître la trajectoire passée .
Conscient de ces spécificités, le législateur a introduit un principe d'adaptation fort au bénéfice des territoires ultramarins . Aux termes de l'article 194 de la loi Climat-résilience, les schémas d'aménagement régionaux (SAR) doivent fixer une trajectoire permettant d'aboutir à l'absence de toute artificialisation nette des sols ainsi que, par tranche de dix années, un objectif de réduction du rythme de l'artificialisation. Néanmoins, à la différence des SRADDET, la loi n'impose pas aux SAR de fixer un objectif intermédiaire de réduction d'au moins 50 % de cette consommation . Il revient donc aux collectivités de définir leurs cibles d'artificialisation, en fonction de leurs contraintes.
Les spécificités ultramarines en matière d'aménagement et d'urbanisme sont nombreuses : démographie et superficie disparates entre territoires, importance de l'habitat informel, bande littorale soumise aux évolutions du trait de côte, espaces naturels avec une biodiversité exceptionnelle et un grand nombre d'espèces endémiques, insularité, forte sensibilité au changement climatique, etc . Ces facteurs plaident pour une meilleure différenciation territoriale des objectifs « ZAN » dans les territoires d'outre-mer .
II. Le dispositif envisagé - La différenciation plus marquée de la stratégie de lutte contre l'artificialisation des sols, une nécessité pour ne pas faire subir une « double peine » à certains territoires
A. Renforcer les capacités foncières des communes littorales, aux avant-postes de l'adaptation au changement climatique
Le recul du trait de côte représente pour les communes littorales une menace forte, dont les effets sur les politiques d'aménagement et de développement local sont potentiellement importants mais difficilement mesurables, en raison des incertitudes sur les scénarios de recul du trait de côte et de montée des eaux sous l'effet du changement climatique. Ce risque est également susceptible d' obérer substantiellement les capacités financières des communes qui auront à faire face à la relocalisation des aménagements et installations et à la recomposition spatiale du littoral.
En l'état du droit, le recul du trait de côte ne fait l'objet d'aucune prise en compte spécifique dans le cadre de la stratégie de réduction de l'artificialisation des sols, alors qu'il combinera deux phénomènes qui produiront des effets majeurs sur les trajectoires foncières : une partie des surfaces artificialisées seront rendues impropres à l'usage et les relocalisations des constructions et des activités généreront une artificialisation contrainte en zone rétro-littorale , ce risque naturel constituant un cas typique de force majeure.
Afin de ne pas faire subir aux communes littorales une « double peine », l'article 10 articule un dispositif en deux temps pour les accompagner face au risque de recul du trait de côte, sans pénaliser les perspectives de développement de ces territoires bien souvent denses et attractifs :
- dans un premier temps, les surfaces artificialisées rendues impropres à l'usage en raison de l'érosion côtière sont considérées comme ayant fait l'objet d'une renaturation . Ce dispositif emporte pour effet que ces surfaces seront décomptées de l'artificialisation ou de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers constatée sur la période de dix ans concernée ;
- dans un second temps, l'artificialisation des sols ou la consommation d'ENAF résultant des projets de relocalisation rendus nécessaires par le recul du trait de côte n'est pas prise en compte dans l'enveloppe territoriale pour évaluer l'atteinte des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols.
B. Mieux prendre en compte les spécificités des territoires littoraux et de montagne dans les documents d'urbanisme
Comme indiqué plus haut, les territoires littoraux et de montagne font face à des spécificités topographiques, économiques et urbanistiques qui peuvent compliquer l'atteinte des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols . Le législateur, lors de l'examen de la loi Climat-résilience, a intégré les contraintes particulières à ces territoires dans la déclinaison territoriale du « ZAN » : le SRADDET et les documents d'urbanisme sont chargés de tenir compte de ces spécificités territoriales aux trajectoires de sobriété foncière.
En l'état du droit, l'impact des législations relatives à la protection du littoral, de la montagne et des espaces naturels sur la disponibilité du foncier n'est pas ignoré des documents de planification et d'urbanisme. Au cours des travaux et des auditions de la commission spéciale, il est cependant apparu que certains élus de ces territoires peinaient, au cours de la concertation territoriale relative à la stratégie « ZAN », à faire reconnaître leurs spécificités locales dans la déclinaison des trajectoires de réduction de la consommation d'espaces.
Pour ancrer plus fermement dans le droit de l'urbanisme cette nécessaire différenciation au bénéfice de ces territoires , l'article 10 prévoit, à l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, que la trajectoire fixée par le SRADDET permettant de réduire l'artificialisation nette des sols tient compte des spécificités des territoires de montagne et des communes littorales .
Il prévoit les mêmes dispositions à l'article L. 141-8 du code de l'urbanisme pour le document d'orientation et d'objectifs contenu dans le schéma de cohérence territoriale et à l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme pour le projet d'aménagement et de développement durables contenu dans le plan local d'urbanisme.
C. Le souhait de mieux prendre en compte les spécificités des territoires ultramarins
La mise en oeuvre des trajectoires de réduction de l'artificialisation des sols dans les territoires ultramarins nécessite des adaptations pour tenir compte de leurs spécificités démographiques, géographiques, topographiques et économiques . Des mécanismes de différenciation et de territorialisation au bénéfice des territoires d'outre-mer ont d'ores et déjà été mis en oeuvre par la loi Climat-résilience, mais leur opérationnalité reste à parfaire, pour une meilleure appropriation par les collectivités.
Les échanges de la commission spéciale avec Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer, ont démontré les forts besoins d'adaptation des territoires ultramarins pour l'atteinte des objectifs de sobriété foncière. La phase de révision des schémas d'aménagement régionaux, actuellement en cours, est l'occasion pour les exécutifs régionaux d'opérer la déclinaison territoriale et de définir les objectifs de réduction de l'artificialisation territoire par territoire.
Plutôt que fixer dans la loi des dispositions qui pourraient aller à l'encontre de cet exercice de territorialisation, l'article 10 prévoit la remise au Parlement d'un rapport du Gouvernement relatif à l'application des objectifs « ZAN » aux territoires ultramarins , pour la rédaction duquel la consultation des élus ultramarins permettra de dégager des pistes de différenciation plus marquée et de clarifier la mise en oeuvre des objectifs de sobriété foncière.
Ce rapport, à remettre au Parlement un an après la promulgation de la présente proposition de loi, veillera notamment à présenter l' impact du « ZAN » pour les territoires ultramarins et proposera des solutions législatives et réglementaires pour une meilleure prise en compte des spécificités liées à leur insularité, à l'occupation irrégulière d'une partie du foncier ultramarin, à la diversité de l'habitat, au cumul des législations protectrices du littoral et de la montagne et aux enjeux de développement économique et touristique, avec un développement spécifique sur les enjeux particuliers de prise en compte de l'habitat informel dans le calcul des surfaces artificialisées passées .
III. La position de la commission - Faciliter les recompositions spatiales induites par le recul du trait de côte dans une logique de sobriété foncière et de préservation des écosystèmes marins
Soucieuse de tenir compte des difficultés des communes littorales soumises au risque du recul du trait de côte dans l'esprit de la loi Littoral et avec la préoccupation de préserver ces espaces sensibles à l'interface terre-mer, la commission a adopté un amendement COM-83 du rapporteur, visant à garantir que les surfaces artificialisées rendues impropres à l'usage en raison du recul du trait de côte feront bien l'objet d'actions ou d'opérations effectives de restauration avant d'être considérées comme renaturées au sens de la stratégie « ZAN ».
Ce dispositif préserve l'intention de la commission spéciale de concilier les difficultés et sujétions particulières aux communes littorales exposées à l'érosion côtière , phénomène naturel sur lequel elles n'ont pas de prise et qui entraîne des recompositions spatiales coûteuses et complexes à mettre en oeuvre sur des territoires à forte concentration démographique, avec un plus grand degré d'exigence quant à la gestion des terrains perdus du fait du recul du trait de côte, afin de ne pas perturber ou polluer les écosystèmes côtiers et marins.
En adoptant l'amendement COM-84 du rapporteur, la commission spéciale a également voulu encadrer l'acte fort de différenciation territoriale au bénéfice des territoires littoraux que constitue l'absence de prise en compte, au sens de la stratégie « ZAN », de l'artificialisation induite par les relocalisations rendues nécessaires par le recul du trait de côte. Le dispositif adopté prévoit que les relocalisations des aménagements et constructions rendues nécessaires en raison du recul du trait de côte fassent l'objet d'une étude préalable de densification , afin de limiter et rationaliser la consommation de nouveaux espaces qui en résultera. Cette étude permet de satisfaire à l'exigence cardinale de sobriété foncière, qui est au fondement de la lutte contre l'artificialisation des sols.
La commission a enfin adopté deux amendements identiques, le COM-19 de Mme Malet et le COM-33 de Mme Cukierman, afin d' améliorer la prise en compte des spécificités et contraintes des communes littorales en outre-mer , en précisant que la trajectoire de réduction de l'artificialisation des sols fixée par les schémas d'aménagement régionaux (SAR) tient compte des contraintes et des efforts déjà réalisés par les communes incluses dans le périmètre d'un schéma de mise en valeur de la mer.
Ce schéma, créé peu après la loi Littoral de 1986, précise les conditions de l'utilisation de l'espace marin et littoral, l'état de l'environnement et détermine la vocation générale des différentes zones, ainsi que les orientations en matière de développement, de protection et d'équipement à l'intérieur du périmètre.
Sans être un document d'urbanisme, ce document peut prescrire des sujétions particulières nécessaires à la préservation du milieu marin et littoral, et particulièrement au maintien des équilibres biologiques. En tenir compte pour la détermination des trajectoires de sobriété foncière des collectivités ultramarines est une mesure qui s'inscrit dans la logique de souplesse et de différenciation territoriale voulue par la commission spéciale .
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
CHAPITRE
IV
Prévoir les outils pour faciliter la transition vers le
« ZAN »
Article 11
Dispositions relatives aux données
d'artificialisation
Cet article vise à inciter l'État et ses opérateurs à établir et transmettre aux collectivités territoriales, dans les meilleurs délais, des données fiables et complètes sur l'artificialisation des sols et la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers. La rapidité de la transmission est un préalable indispensable à l'atteinte des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols.
Afin de ne pas créer de blocage, à défaut de mise à disposition dans les six mois, les collectivités territoriales sont autorisées à utiliser les données locales dont elles disposent pour mesurer l'atteinte de leurs objectifs de réduction de l'artificialisation.
La commission a adopté deux amendements, pour permettre d'une part aux collectivités de continuer à utiliser les données de consommation d'espaces et d'artificialisation qu'elles ont recueillies à travers leurs propres outils d'observation et, d'autre part, pour demander la remise d'un rapport au Parlement recensant les terrains à renaturer, leur qualité ainsi que l'estimation du coût des opérations de renaturation.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - Les données relatives à la consommation d'espaces, une boussole indispensable aux collectivités territoriales pour fixer le bon cap de réduction de l'artificialisation des sols
A. Les données sont l'épine dorsale de l'architecture de la stratégie de réduction du rythme d'artificialisation
Des données fiables et consolidées de consommation des espaces sont essentielles pour permettre à chaque collectivité, par l'intermédiaire d'un référentiel homogène et harmonisé au niveau national, de construire un projet de développement respectant la sobriété foncière et de mesurer les évolutions de sa trajectoire dans le cadre de la stratégie « ZAN ».
Ces données sont centrales pour le pilotage territorial des projets d'urbanisme et des trajectoires foncières ; sans elles, les décisions d'aménagement se feraient « à l'aveugle » et induiraient des inégalités territoriales, au détriment des collectivités ne disposant pas d'observatoires fonciers ou n'ayant pas les outils pour recueillir les données de consommations d'espaces. La publicité de ces données permet par ailleurs d'assurer une meilleure connaissance par le public des dynamiques d'artificialisation des sols dans leurs territoires et de garantir l'accès à l'information des particuliers, notamment en matière environnementale, conformément à l'article 7 de la Charte de l'environnement.
Le législateur de Climat-résilience, conscient de ces enjeux, a pris le soin d'en encadrer la production. L'article 206 de ladite loi a ainsi prévu qu'un décret en Conseil d'État précise les conditions dans lesquelles l'État met à la disposition des collectivités concernées les données de l'observatoire de l'artificialisation, afin de garantir une approche globale, régulière, harmonisée et cohérente de la fixation et du suivi de la consommation des espaces et de l'artificialisation des sols.
Bien que sa publication ait été envisagée en mars 2022 d'après l'échéance figurant dans le dossier législatif de la loi Climat-résilience sur Légifrance, ce décret en est toujours au stade des consultations publiques et n'a pas été pris. En l'état du projet de décret 68 ( * ) , il est prévu que « les communes et les établissements publics de coopération intercommunale compétents peuvent librement et gratuitement disposer des données de l'observatoire de l'artificialisation ».
Malgré ce retard pris pour les mesures d'application de la loi et la fragilité du socle juridique encadrant la production des données de consommation d'espaces, un observatoire de l'artificialisation a néanmoins été instauré , sous l'égide du Cerema.
B. Un pilotage des données de consommations foncières assuré par le Cerema qui gagnerait à être plus fin
Depuis juillet 2019, les données de consommation d'espaces, issues des fichiers fonciers, sont mises à disposition par le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) à travers le portail de l'artificialisation des sols, accessible librement sur internet à l'adresse https://artificialisation.developpement-durable.gouv.fr .
Les données ont une profondeur historique remontant au 1 er janvier 2009 , et couvrent actuellement la période allant du 1 er janvier 2009 au 1 er janvier 2021. L'accès aux données comporte plusieurs entrées et méthodes de visualisation possibles. Elles se déclinent à la fois sous la forme d'un tableur compilant les données pour l'ensemble des communes, mais également sous la forme de cartes et de tableaux de bord, qui permettent de visualiser les données de consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers en France métropolitaine, à différentes mailles territoriales (communes, intercommunalités, départements et régions).
Le délai de production des données , issues des données de la direction générale des Finances publiques, est de l'ordre de 18 mois . Les données de l'année 2021 sont en cours de production et seront disponibles en juin 2023.
La mesure de l'artificialisation des sols
Jusqu'en 2031, le calcul des trajectoires de sobriété foncière se fonde sur l'observation de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF). La mesure de la consommation d'espaces permet d'apprécier les changements de destination ou d'usage des espaces, en distinguant les ENAF des espaces urbanisés. Elle est adaptée à la quantification des phénomènes d'étalement urbain et de mitage. Cette notion ne permet toutefois pas d'évaluer finement le processus d'artificialisation des sols, qui appréhende l'évolution de leur couverture et de leur usage, y compris au sein de la tâche urbaine ou de l'espace urbanisé.
À partir de 2031, la mesure de la trajectoire foncière des territoires s'appuiera sur les données d'artificialisation. Le référentiel de mesure de l'artificialisation a vocation à être produit par l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN), à travers les données d'occupation du sol à grande échelle (OCSGE).
Ces données sont mises en ligne progressivement, département par département, sur le portail national de l'artificialisation des sols. Elles permettront de mesurer finement l'artificialisation des sols en s'appuyant sur des prises de vues aériennes . D'après les indications fournies à la commission spéciale par la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP), près de 25 départements seront couverts par cette nouvelle méthodologie d'ici à fin 2023, et l'ensemble de la France sera couvert d'ici fin 2024.
Ces données ont vocation à apporter un socle commun en termes de connaissance d'occupation et d'usage des sols à l'ensemble des territoires, y compris ceux qui pâtissent d'un déficit d'ingénierie. Contrairement aux données de consommations d'espaces NAF qui sont produites tous les ans, les données relatives à l'artificialisation seront produites tous les 3 ans , par tiers de France, en fonction de la disponibilité des données de prise de vue aérienne.
À compter de 2031, les deux notions et objectifs coexisteront, et seront suivis de manière complémentaire par les autorités compétentes en matière d'urbanisme.
Certains acteurs entendus par la commission ont néanmoins soulevé le manque de robustesse et des discordances parfois significatives entre les données de consommations d'ENAF produites par le Cerema et celles issues de l'observation locale. Stella Gass, directrice générale de la Fédération des Scot, indique par exemple que « les relevés de l'observatoire de l'artificialisation du Cerema, ceux qui doivent servir à établir un point de comparaison entre territoires pour la réduction de l'artificialisation, sont contestés par les élus locaux parce qu'ils sont incomplets, et parfois faux sur le terrain » .
La fiabilité et l'exhaustivité des données doivent être améliorées , d'autant que de la comptabilisation des surfaces consommées lors de la décennie précédente dépend directement les droits à construire et à aménagement lors de la décennie 2021-2031. Ainsi, la Fédération nationale des SCoT a indiqué à la consommation spéciale que « les travaux engagés par les Conférences des SCoT ont montré que nous n'avions pas la vision rétrospective complète, notamment pour le foncier utilisé ces 10 dernières années pour les grands projets, la transition énergétique ou encore le bâti agricole par exemple. Or la loi n'écarte aucun motif de consommation de foncier pour les 10 prochaines années. Il faudra donc que les enveloppes de foncier de ces dix dernières années soient complètes avant de les diviser par deux » .
II. Le dispositif envisagé - La nécessité de sécuriser l'accès des collectivités à des données fiables et exhaustives et de garantir la continuité des séries d'observations
La proposition de loi initiale vise à donner aux collectivités les clefs pour apprécier leur trajectoire foncière et piloter leur aménagement en disposant de toutes les informations nécessaires, en leur garantissant un droit d'accès aux données les concernant dans les délais les plus courts possible, équivalent à la durée nécessaire à leur production.
Pour ce faire, le dispositif proposé à l'article 9 dispose que l'État met gratuitement à la disposition des collectivités territoriales, au format numérique et commune par commune, les données complètes et continues de consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers, d'artificialisation et de renaturation des sols constatées sur la décennie de référence fixée par la loi Climat-résilience.
Afin de réduire les ruptures de continuité des séries de données et éviter tout risque d'asymétrie d'information entre les collectivités, le dispositif prévoit que l'État actualise périodiquement ces données, selon une temporalité et des modalités précisées par décret.
En outre, afin d'inciter l'État à produire ces données dans les meilleurs délais et pour tenir compte du fait que le compteur de consommation d'espaces tourne depuis le 23 août 2021, cet article prévoit également que si l'État ne met pas à disposition ces données dans un délai de six moins à compter de la promulgation de la présente proposition de loi, les collectivités et leurs groupements peuvent utiliser les données recueillies par leurs soins pour évaluer le respect des trajectoires et des objectifs du « ZAN ».
Cette disposition est de plus conforme au projet de décret sus-mentionné relatif au rapport local de suivi de l'artificialisation des sols, dont la publication est à venir, qui prévoit que « les données soient mises à disposition sans préjudice de celles résultant le cas échéant de dispositifs d'observation développés et mis en oeuvre localement ».
Ce dispositif introduit cependant une inégalité entre les collectivités qui ont instauré des observatoires ou des dispositifs de recueil de consommations d'espaces et celles qui ne disposent pas de l'ingénierie ou des ressources humaines adéquates.
III. La position de la commission - Garantir une comptabilité du « ZAN » efficiente et au plus proche des territoires, en permettant aux collectivités d'utiliser les données foncières recueillies à leur initiative
Lors de ses travaux et au cours des auditions qu'elle a menées, la commission spéciale s'est forgée la conviction que la fiabilité, la disponibilité et l'actualisation des données de consommation foncière étaient fondamentales afin d'évaluer les trajectoires pertinentes pour l'atteinte des objectifs de la stratégie de réduction de l'artificialisation des sols. L'État et ses opérateurs, au premier rang desquels le Cerema et l'IGN, ont donc un rôle clef pour l'élaboration des métriques « ZAN ».
Sans préjudice de la nécessaire mise à disposition des données nationales élaborées selon une méthodologie uniforme , la commission spéciale a souhaité, en adoptant l'amendement COM-85 du rapporteur et deux amendements identiques présentés par M. Redon-Sarrazy ( COM-14 ) et Mme Estrosi Sassone ( COM-23 ), que les collectivités territoriales puissent continuer à utiliser les données qu'elles ont collectées à travers des observatoires régionaux ou locaux.
Ce dispositif permet de faire coexister les données nationales avec les dispositifs d'observation foncière établis localement par les collectivités désireuses d'opérer un suivi fin de leur trajectoire d'artificialisation. Il présente en outre l'avantage de permettre la vérification, par croisement, des données produites par l'État et d'améliorer ainsi la qualité des bases de données grâce à cette double observation, qui reste facultative et à la libre appréciation des collectivités territoriales. Cette mesure permet de répondre à l'inquiétude que certains élus ont exprimée concernant la robustesse et la fiabilité des données de consommation d'ENAF disponibles sur le portail de l'artificialisation des sols.
La commission spéciale a également adopté un amendement de Mme Préville ( COM-17 ) demandant la remise d'un rapport au Parlement recensant les terrains à renaturer à l'échelle du territoire national ainsi que leur localisation , leur qualité et l'estimation du coût des opérations de renaturation . Les friches et les terrains pouvant faire l'objet d'actions ou d'opérations de renaturation sont un levier essentiel pour réussir le « ZAN » , qui repose sur une logique de réduction de l'artificialisation nette des sols, ce qui signifie que la renaturation de certaines parcelles artificialisées génère, en parallèle, des droits équivalents à artificialiser.
En complément de l'outil Cartofriches, la connaissance de la localisation, de la qualité et du coût estimatif de renaturation des friches et des terrains à renaturer, qui oscillent selon les estimations entre 150 000 et 170 000 hectares, permettra aux territoires de mieux connaître leurs marges de manoeuvre pour faire évoluer leur enveloppe foncière et engranger de nouveaux droits à aménager et à construire, en s'appuyant sur le gisement des friches et des espaces à renaturer.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 12
Création d'un sursis à statuer, d'un droit
de préemption et d'un motif
de refus d'autorisation d'urbanisme
spécifiques
aux enjeux de lutte contre l'artificialisation des
sols
Cet article vise à créer deux outils nouveaux au bénéfice des collectivités territoriales, en vue de faciliter la gestion du foncier disponible et de permettre une meilleure maîtrise des projets générant de l'artificialisation.
Il instaure un nouveau type de sursis à statuer, mobilisable avant que ne débute la modification des documents d'urbanisme locaux pour y intégrer les exigences de la loi Climat-résilience. Ce sursis permettra de différer la décision de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale sur des projets très artificialisants susceptibles de mettre en danger l'atteinte des objectifs de réduction de l'artificialisation qui seront fixés au cours des prochaines années.
Dans la même logique, et pour les cas les plus significatifs, il permet aussi à l'autorité compétente de refuser d'octroyer une autorisation d'urbanisme à un projet qui serait manifestement incompatible avec l'atteinte des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols.
Il crée également un droit de préemption nouveau, qui pourra être utilisé par la commune ou l'EPCI à l'endroit de terrains présentant de forts enjeux en matière de recyclage foncier ou de renaturation. Il pourra notamment s'appliquer en dehors des zones urbanisées, dès lors qu'un zonage dédié aura été intégré au sein du document d'urbanisme.
La commission a adopté trois amendements visant à préciser le dispositif de « droit de préemption ZAN » et à renforcer le sursis à statuer, notamment en étendant sa durée et la période durant laquelle il pourra y être recouru et en permettant aux élus locaux de l'utiliser dès l'adoption du SCoT modifié pour y intégrer les objectifs du « ZAN ».
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - La mise en oeuvre d'une politique de lutte contre l'artificialisation des sols exige la création de nouveaux outils de gestion foncière au bénéfice des collectivités territoriales
A. L'intensification de la lutte contre l'artificialisation des sols exige de doter les collectivités territoriales d'outils de maîtrise foncière renforcée
Les objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols fixés par le chapitre III du titre V de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite « Climat-résilience ») imposent aux collectivités territoriales d'intensifier leurs efforts de sobriété foncière. Surtout, ils impliquent un contrôle plus fin et plus quantitatif de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers et de l'artificialisation des sols, à l'intérieur de l'enveloppe urbaine comme à l'extérieur.
Les collectivités seront ainsi responsables de l'atteinte d'objectifs chiffrés de réduction de l'artificialisation des sols 69 ( * ) , fixés par période décennale et par document d'urbanisme local, à une échelle donc communale ou intercommunale.
Selon le calendrier fixé par la loi Climat-résilience, puis modifié par l'article 194 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale (dite « 3DS »), les documents de planification régionaux 70 ( * ) devront d'abord être modifiés d'ici le 22 février 2024, avant que les schémas de cohérence territoriale ( SCoT ) ne soient modifiés d'ici le 22 août 2026 , et enfin les plans locaux d'urbanisme communaux et intercommunaux (PLU, PLUi) ainsi que les cartes communales (CC) ne soient modifiés d'ici le 22 août 2027 .
Ces modifications doivent permettre de durcir les projets et les règles portés par les documents d'urbanisme locaux, en vue d'une plus grande sobriété foncière. Concrètement, les zonages et les dispositions du règlement de PLU, en particulier, devront évoluer dans le sens d'une constructibilité moins large.
En l'attente de ces modifications de documents néanmoins, les communes et EPCI compétents sont dépourvus d'outils spécifiques leur permettant de limiter l'artificialisation des sols . Leur compétence étant liée, ils sont tenus d'autoriser tout projet respectant les règles fixées par les documents d'urbanisme « pré-ZAN », y compris si ce projet s'avère extrêmement artificialisant et serait de nature à compromettre l'atteinte des objectifs communaux ou intercommunaux ou à consommer toute l'enveloppe d'artificialisation autorisée.
Or, la première période de réduction de l'artificialisation est fixée par la loi à la décennie 2021-2031 : les « compteurs d'artificialisation » tournent donc déjà en vue de l'atteinte de l'objectif de l'ordre de - 50 %. Il est donc impératif de doter rapidement les collectivités des outils appropriés de maîtrise foncière, sans lesquels elles ne pourront raisonnablement être tenus responsables de la dynamique d'artificialisation.
Par ailleurs, les auditions conduites par la mission conjointe de contrôle du Sénat sur le « ZAN », entre octobre et décembre 2022, et celles conduites par le rapporteur dans le cadre du présent rapport ont mis en évidence deux phénomènes :
• d'une part, une hausse des demandes de certificat d'urbanisme et des demandes d'autorisation d'urbanisme, qui témoigne d'une forme de « ruée vers les autorisations » . Les communes et EPCI n'étant pas en mesure de refuser les demandes conformes aux documents d'urbanisme, et les autorisations octroyées aujourd'hui permettant de réaliser les travaux autorisés jusqu'à trois ans plus tard, la situation actuelle peut conduire les collectivités à devoir autoriser jusqu'en 2027 nombre de projets artificialisants qui pourront sortir de terre jusqu'en 2030, peu avant la fin de la période décennale de réduction de l'artificialisation . De même, le certificat d'urbanisme attaché à un terrain permet de « figer » le droit applicable à celui-ci pendant 18 mois, pouvant ainsi prolonger la durée d'application du droit existant, plus permissif en termes d'artificialisation ;
• d'autre part, un intérêt accru envers les gisements de foncier, parfois à visée spéculative en raison de la hausse attendue des prix du foncier artificialisé mais aujourd'hui inutilisé. Les collectivités territoriales craignent ainsi qu'avec la raréfaction du foncier recyclable (friches, parcelles construites en changement d'usage...), elles ne soient plus en mesure de s'assurer les réserves foncières nécessaires à la conduite de leurs projets d'intérêt général . La diminution des ressources budgétaires et fiscales locales, en particulier, réduit fortement leur « pouvoir d'achat » foncier . Or, l'accès à un foncier « recyclable » ou « renaturable » sera essentiel dans la période de « zéro artificialisation nette » qui s'annonce.
Le code de l'urbanisme prévoit déjà plusieurs outils qui permettent, dans le contexte « pré-ZAN », de conférer aux collectivités territoriales une plus grande maîtrise foncière, au premier rang desquels le droit de préemption et le sursis à statuer. Ces deux dispositifs présentent toutefois des insuffisances au regard des enjeux du « ZAN » et de l'urgence de la situation actuelle de transition .
A. Le sursis à statuer existant est encadré par des conditions d'application trop restrictives pour être utilisé efficacement dans la période transitoire vers le « ZAN »
L'article L. 424-1 du code de l'urbanisme prévoit qu'il peut être sursis à statuer sur les demandes d'autorisation dans deux catégories de cas : d'une part, lorsque le projet concerné met en péril la réalisation d'une opération déjà programmée ; de l'autre, lorsque le projet met en péril l'exécution d'un plan ou d'un document en cours d'élaboration .
L'objectif du sursis à statuer est de préserver la capacité de la collectivité territoriale à mettre en oeuvre un projet de territoire déjà élaboré , qu'il s'agisse d'opérations d'aménagement précises ou de l'application d'un nouveau document d'urbanisme. Ainsi, l'autorité compétente peut réserver sa décision sur une demande d'autorisation en l'attente de la finalisation de l'opération ou du document concerné.
Le recours au sursis à statuer est notamment ouvert par l'article L. 424-1 précité dans les cas où un projet est susceptible de compromettre ou de rendre plus onéreuse l'exécution d'un plan local d'urbanisme en cours d'élaboration ou d'évolution , et ce dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable (PADD).
LISTE DES CAS DANS LESQUELS IL PEUT ÊTRE RECOURU AU
SURSIS À STATUER
SUR UN PROJET AU TITRE DE
L'ARTICLE L. 424-1 DU CODE DE L'URBANISME
Il peut être sursis à statuer dans le cas :
• d'un projet susceptible de compromettre ou de rendre plus onéreuse la réalisation d'une opération d'aménagement prise en considération et délimitée ;
• d'un projet situé dans les zones exposées au recul du trait de côte , susceptible de compromettre ou de rendre plus onéreuse l'exécution du plan de prévention des risques littoraux ;
• d'un projet susceptible de compromettre ou de rendre plus onéreux l'aménagement et l'équipement d'une zone d'aménagement concerté (ZAC), à compter de l'acte de création ;
• d'un projet situé au sein d'un parc national et qui aurait pour effet de modifier l'état des lieux ou l'aspect des espaces ;
• d'un projet compris dans une opération devant faire l'objet d'une déclaration d'utilité publique , dès lors que l'enquête préalable a été ouverte ;
• d'un projet susceptible de compromettre ou de rendre plus onéreuse l'exécution de travaux publics pris en considération et délimités ;
• d'un projet susceptible de compromettre ou de rendre plus onéreuse l'exécution d'un plan local d'urbanisme en cours d'élaboration ou d'évolution , et ce dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable (PADD).
Au titre de l'article L. 424-1 précité, ce sursis à statuer ne peut excéder deux ans (ou trois ans en cas de deuxième sursis, pris pour des motifs distincts). À l'issue de ce délai, l'autorité compétente est tenue de statuer sur la demande d'autorisation, en l'état du droit lorsqu'elle statue (par exemple, au vu des dispositions du nouveau PLU si le sursis à statuer avait été opposé au motif d'une révision du PLU). L'article L. 424-1 précise en outre que lorsque la demande d'autorisation est rejetée à l'issue du sursis à statuer, le propriétaire du terrain peut mettre en demeure la collectivité de procéder à l'acquisition du terrain concerné.
Dans le cas de la mise en application des objectifs du « ZAN », les conditions d'application actuelles du sursis à statuer, décrites ci-dessus, s'avèrent trop restrictives. La modification des documents d'urbanisme ne pouvant intervenir qu'à compter de l'entrée en vigueur des SCoT, au plus tard en août 2026, il sera impossible aux communes et EPCI de recourir au sursis à statuer pour cause d'évolution de document d'urbanisme avant 2027, au mieux : le droit en vigueur exige en effet - ce qu'a confirmé la jurisprudence - que le débat sur les orientations générales du PADD du projet de PLU ait été tenu (article L. 153-11 du code de l'urbanisme).
Entre 2021 et 2027, les communes et EPCI n'auront donc pas la possibilité de refuser ni de surseoir à statuer sur des projets fortement artificialisants , qui seraient de nature à consommer une grande partie de l'enveloppe autorisée au titre des objectifs de « ZAN », et partant, à empêcher la réalisation de tout autre projet d'initiative publique ou privée.
En outre, le sursis à statuer prévu par l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme ne concerne que les évolutions de plan local d'urbanisme, et non celles des cartes communales. Les communes non couvertes par un PLU ou un PLUi, mais par une carte communale, ne peuvent aujourd'hui pas y recourir . C'est là une carence importante dans la période transitoire entre 2021 et 2027, près de 5700 communes en France étant couvertes par une CC.
B. Des droits de préemption multiples, qui ne répondent pas pleinement aux enjeux de recyclage foncier et de renaturation
Afin de permettre aux autorités publiques de constituer les réserves foncières nécessaires à la conduite des projets d'intérêt général, ou en vue de protéger certaines ressources foncières porteuses d'enjeux spécifiques, le code de l'urbanisme permet d'instaurer plusieurs types de droits de préemption, notamment :
• le droit de préemption urbain (DPU), compétence des communes ou EPCI couverts par un PLU , et applicable dans une zone spécifique délimitée au sein du PLU (article L. 211-1 du code de l'urbanisme) ;
• le droit de préemption dans les espaces sensibles naturels , compétence du département, en vue de la mise en oeuvre de la politique de protection, de gestion et d'ouverture au public de ces espaces (article L. 113-8 du code de l'urbanisme).
• le droit de préemption au sein des zones d'aménagement différé (ZAD) , compétence de l'État, qui peut être institué dans un périmètre provisoire de ZAD ou dans une ZAD (article L. 212-1 du code de l'urbanisme).
Les droits de préemption existants présentent toutefois des carences notables . Tout d'abord, seul le droit de préemption urbain relève de la compétence du bloc intercommunal, compétent en matière d'urbanisme et responsable de l'atteinte des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols. De plus, ce DPU est fortement encadré, à la fois dans ses finalités (en vue de la réalisation d'un équipement ou d'une opération d'aménagement, en vue de la relocalisation d'activités industrielles, commerciales, artisanales ou de services ou encore en vue du relogement d'occupants évincés de leur logement) et dans son périmètre géographique (zones urbaines et d'urbanisation future du PLU, périmètres de protection rapprochée de prélèvement d'eau, secteurs des plan de prévention des risques technologiques, zones soumises à servitudes en matière de gestion de l'eau, zones d'urbanisation diffuse, secteurs couverts par un plan de sauvegarde).
Si la limitation du DPU aux secteurs urbanisés s'entendait jusqu'alors, puisque les collectivités territoriales avaient vocation à intervenir principalement dans l'aménagement de l'enveloppe urbaine des communes, la situation est radicalement différente sous le régime du « ZAN ». Des gisements de foncier artificialisés peuvent exister en dehors de l'enveloppe urbaine , et présenter un potentiel stratégique pour la renaturation. La limitation aux seules opérations d'aménagement ou de réalisation d'équipement n'est pas non plus satisfaisante , car elle n'intègre pas, par exemple, la réalisation de projets de renaturation.
II. Le dispositif envisagé - Créer deux nouveaux outils de maîtrise foncière pour le bloc communal : un sursis à statuer et un droit de préemption « ZAN » aux champs d'application étendus
L'article 12 de la proposition de loi prévoit d'introduire deux nouveaux outils de maîtrise foncière au bénéfice des collectivités territoriales : un sursis à statuer et un droit de préemption « ZAN » , aux champs d'application étendus par rapport aux dispositifs de droit commun. Il propose aussi que la commune ou l'EPCI compétent puisse refuser une demande d'autorisation d'urbanisme pour un projet qui est en contradiction flagrante avec ses objectifs de lutte contre l'artificialisation .
A. Un droit de préemption sur les espaces propices à la renaturation ou au recyclage foncier
Le 2° de l'article 12 propose de créer un nouveau chapitre VI bis au sein du titre I er du livre II du code de l'urbanisme relatif aux droits de préemption. Ce chapitre serait composé d'un article unique L. 216-2 introduisant un nouveau dispositif de droit de préemption .
Ce « droit de préemption sur les espaces propices à la renaturation ou au recyclage foncier » relèverait de la compétence de la commune ou de l'EPCI compétent en matière de document d'urbanisme. La commune ou l'EPCI pourrait délimiter, au sein du document d'urbanisme, des « zones à fort enjeu pour la politique de lutte contre l'artificialisation des sols ».
À l'intérieur de ces zones (qui pourraient par exemple concerner un ensemble de friches à requalifier, une parcelle offrant un fort potentiel de renaturation, un espace sous-densifié, etc.), la commune ou l'EPCI pourrait préempter les terrains et bâtis :
• contribuant à la préservation de la nature en ville (incluant les surfaces végétalisées ou naturelles situées au sein des espaces urbanisés) ;
• présentant un potentiel fort en matière de renaturation ou de recyclage foncier ;
• situés sur des terrains constituant des friches au sens de l'article L. 111-26 du code de l'urbanisme.
Ce droit de préemption « ZAN » se différencierait du droit de préemption urbain par la nature des motifs permettant de l'instaurer (pouvant par exemple inclure la renaturation ou la préservation de la nature en ville) et par sa portée géographique (non limitée aux espaces urbanisés). En dehors de ces spécificités, ce droit de préemption serait régi par les règles applicables aux autres droits de préemption (en matière de délégation notamment).
À fin de coordination , le 1° de l'article propose également d'étendre, à l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, la liste des finalités des droits de préemption institués par le titre I er du livre II du code de l'urbanisme, afin d'y inclure les finalités du droit de préemption nouvellement créé : la renaturation et le recyclage foncier.
B. Un sursis à statuer spécifique, avant que les documents d'urbanisme locaux ne puissent intégrer le « ZAN »
Le 4° de l'article 12 prévoit également d'instaurer un nouveau type de sursis à statuer, permettant aux communes et EPCI de surseoir aux demandes concernant des projets fortement artificialisants, même avant que l'évolution de leur document d'urbanisme pour y intégrer le « ZAN » n'ait débuté . L'article L. 424-1 du code de l'urbanisme serait ainsi complété d'un II portant ce sursis à statuer spécifique.
Ce sursis à statuer serait opposable aux projets « susceptibles de compromettre l'atteinte des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols de la commune ou de l'EPCI d'implantation ». Il pourrait être utilisé aussi bien dans les communes couvertes par un plan local d'urbanisme que dans les communes couvertes par une carte communale .
La rédaction proposée par l'article 12 encadre par trois conditions l'utilisation de ce sursis à statuer dérogatoire :
• tout d'abord, il ne serait applicable que dans les communes dont le document d'urbanisme est tenu d'être modifié en application de la loi Climat-résilience, pour y intégrer des objectifs du « ZAN » . Dans les documents qui prévoient déjà une réduction suffisante de la consommation d'espace, le droit issu de l'application du document existant est de nature à limiter l'artificialisation et le sursis à statuer spécifique n'a donc pas lieu à s'appliquer ;
• ensuite, il serait nécessaire que la commune ait arrêté, par délibération, un plafond indicatif et provisoire de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers qu'elle devra atteindre d'ici la fin de la première période décennale 2021-2031. Cette condition vise à assurer que la commune pourra justifier de l'impact du projet faisant l'objet du sursis à statuer par rapport à ses objectifs envisagés de réduction de l'artificialisation, et ce, avant que le document d'urbanisme ne soit effectivement modifié ;
• enfin, pour chaque projet faisant l'objet d'une décision de sursis à statuer, la commune ou l'EPCI devra justifier que l'impact du projet est significatif au regard du plafond indicatif précité, et que cet impact est de nature à compromettre la capacité de la commune ou de l'EPCI à répondre aux besoins anticipés sur son périmètre jusqu'à la fin de la période 2021-2031.
Par ailleurs, afin d'articuler ce sursis à statuer spécifique avec le sursis à statuer de droit commun , il est prévu que le sursis à statuer « ZAN » ne puisse s'appliquer que jusqu'à ce que le débat sur les orientations générales du PADD du projet de modification de PLU se soit tenu. Le sursis à statuer de droit commun pourrait alors prendre le relais avant l'adoption du document modifié.
C. Un nouveau motif de refus d'autorisation d'urbanisme : l'atteinte aux objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols
Enfin, le 3° de l'article 12 prolonge le dispositif de sursis à statuer précité, en introduisant un nouveau motif de refus d'autorisation d'urbanisme, à l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme.
Dans la période transitoire entre l'adoption de la loi Climat-résilience et l'adoption de documents d'urbanisme modifiés pour intégrer les objectifs du « ZAN », l'autorité compétente pourra refuser une demande de permis de construire ou d'aménager, dès lors qu'elle justifie qu'une double condition est remplie :
• le projet concerné a un « impact significatif en matière de consommation d'espaces naturels, agricoles ou forestiers ou d'artificialisation des sols » ;
• cet impact est de nature à compromettre la capacité de l'autorité compétente à « répondre, dans le respect des objectifs chiffrés qui lui sont fixés par la loi et par les documents de planification en matière de réduction du rythme de l'artificialisation des sols ou de la consommation d'espaces agricoles, naturels ou forestiers, aux besoins d'aménagement et de construction anticipés sur son périmètre ».
III. La position de la commission - Des outils indispensables aux collectivités territoriales pour organiser la transition vers le « ZAN » et atteindre les objectifs de réduction de l'artificialisation
Les auditions de la commission spéciale ont confirmé que les deux outils portés par l'article 12 de la proposition de loi sont extrêmement attendus par les élus locaux et font l'objet d'un large soutien.
Ils seront absolument nécessaires pour faire face à la « ruée vers le foncier » que l'on constate déjà dans certains territoires, en anticipation de la raréfaction des terrains artificialisés et des friches. Les élus locaux manquent, à ce stade, d'outils spécifiques pour ménager des réserves foncières nécessaires à leurs projets futurs, notamment sur des terrains artificialisés situés en dehors de l'enveloppe urbaine ; ou pour s'opposer aux projets fortement consommateurs d'espace que leurs documents d'urbanisme n'excluent pas pour l'instant, alors même que les compteurs d'artificialisation tournent d'ores et déjà.
La commission spéciale a donc confirmé les deux dispositifs, en y apportant toutefois quelques améliorations .
Concernant le droit de préemption , l'amendement COM-86 du rapporteur a précisé que la justification des espaces de préemption identifiés par la commune ou l'EPCI doit intervenir dès la délimitation de ces zones à fort enjeu au sein du document d'urbanisme, afin que le dispositif de préemption fasse l'objet d'un ciblage adéquat et donne à l'ensemble des acteurs la visibilité nécessaire.
L'amendement COM-87 du rapporteur a également précisé que les efforts de renaturation , qui pourront bénéficier du droit de préemption créé par le présent article, peuvent inclure des actions liées à la préservation ou la restauration des continuités écologiques. C'est un gage de meilleure articulation entre les différentes politiques publiques locales.
En matière de sursis à statuer, l'amendement COM-88 du rapporteur a réécrit le dispositif, afin de :
• préciser l'articulation du sursis à statuer « ZAN » avec le sursis à statuer de droit commun , en clarifiant la rédaction de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme ; et en levant la limitation temporelle relative au débat sur les orientations du PADD en vue d'éviter de contraindre l'autorité compétente à recourir successivement à deux formes de sursis différentes dans le cadre de la même procédure d'évolution du document ;
• élargir la durée durant laquelle il pourra être recouru au sursis à statuer afin de couvrir l'ensemble de la période de modification des documents d'urbanisme, telle que la prévoit la proposition de loi, c'est-à-dire jusqu'au 22 août 2028 (ou dès l'adoption du document d'urbanisme modifié) ; ainsi qu'étendre, pour les mêmes raisons, la durée maximale du sursis lorsqu'il est décidé par la commune ou l'EPCI, pour la porter à quatre ans ;
• permettre aux communes et intercommunalités couverts par un SCoT de recourir au sursis à statuer dès l'adoption du SCoT intégrant les objectifs du « ZAN » , afin d'intervenir plus tôt pour maîtriser l'artificialisation au cours de la première période, et de dispenser ces communes de fixer par délibération des objectifs indicatifs avant de sursoir à statuer ;
• simplifier la rédaction relative à la justification du sursis à statuer par l'autorité compétente, afin de limiter les risques juridiques pouvant peser sur ses décisions ;
• permettre à l'autorité compétente d'inviter le demandeur à modifier son projet dans le sens d'une plus grande sobriété foncière, afin que celui-ci puisse, le cas échéant, être autorisé et le sursis levé après un dialogue constructif.
• apporter diverses coordinations juridiques.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
Article 12 bis
(nouveau)
Comptabilisation sur la période 2011-2021
de
l'artificialisation des projets autorisés ou appartenant
à des
opérations autorisées avant 2021
Cet article prévoit que la consommation d'espaces résultant de projets réalisés à compter de 2021, mais autorisés avant la promulgation de la loi Climat-résilience ou faisant partie d'une opération d'ensemble autorisée avant cette promulgation, soit comptabilisée pour la période 2011-2021 plutôt que pour la période 2021-2031.
Adoptée sur proposition du rapporteur de la commission spéciale, cette mesure vise à ne pas remettre en cause des projets déjà dûment autorisés et engagés, ayant souvent fait l'objet d'acquisitions ou d'investissements par les porteurs de projet et les collectivités, mais dont la réalisation s'étalerait sur une période longue.
La commission a adopté l'amendement devenu article additionnel.
L'article 194 de la loi Climat-résilience a prévu que les collectivités territoriales séquencent leur trajectoire de réduction de l'artificialisation des sols, vers le « zéro artificialisation nette » en 2050, en périodes décennales. Pour chacune de ces périodes, elles sont tenues de définir un objectif chiffré de réduction de l'artificialisation des sols au regard de l'artificialisation de la période passée.
La première période décennale, qui a débuté à la promulgation de la loi, c'est-à-dire le 22 août 2021, est soumise à un régime particulier :
• le niveau des objectifs de réduction est encadré par la loi : l'article 194 prévoit que les objectifs fixés par les documents régionaux ne pourront être inférieurs à 50 % 71 ( * ) ;
• c'est la consommation effective d'espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF) et non l'artificialisation des sols qui sera retenue pour évaluer l'atteinte des objectifs, en l'attente de la création des outils nécessaires à la mesure de l'artificialisation.
Ainsi, à l'issue du processus de déclinaison territoriale des objectifs, prévu par la loi, les communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) compétents en matière d'urbanisme devront respecter des objectifs de réduction de la consommation d'ENAF de l'ordre de 50 % entre 2021 et 2031, par rapport à la période de référence 2011-2021 .
Or, puisque c'est bien la consommation d'ENAF effectivement constatée entre 2021 et 2031 qui sera mesurée pour évaluer l'atteinte des objectifs des communes et EPCI, l'impact de tous les projets réalisés à partir de 2021 sera imputé à la première période décennale, y compris dans les cas où ces projets auraient été décidés ou engagés avant la promulgation de la loi .
Cet état du droit implique que des opérations déjà lancées ou autorisées par les collectivités, avant même que n'aient été introduits dans la loi les objectifs de « ZAN » ou qu'elles aient pu en prendre connaissance, pèseront pourtant sur leurs enveloppes au titre de la première période décennale. Cela est particulièrement problématique pour les grandes opérations d'aménagement s'inscrivant dans la durée, souvent à initiative publique, telles les zones d'aménagement concerté (ZAC) , dont le programme de réalisation des équipements et des constructions peut s'étaler sur plusieurs années.
Il en va de même pour les autorisations d'urbanisme octroyées peu avant que ne soit présentée la loi Climat-résilience : la réglementation en vigueur (article R. 424-17 du code de l'urbanisme) prévoit que les permis de construire et d'aménager aient une durée de validité de trois ans. En conséquence, des projets autorisés en 2019 ou 2020, mais qui sortiraient effectivement de terre après la promulgation de la loi Climat-résilience, participeraient à dégrader le solde d'artificialisation de la commune ou de l'EPCI concerné pour la période 2021-2031.
En conséquence, sur proposition de son rapporteur, la commission spéciale a adopté un amendement portant article additionnel visant à rattacher à la période 2011-2021 la consommation d'ENAF entraînée par les projets :
• ayant fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme (permis de construire, permis d'aménager, déclaration préalable) délivrée avant le 22 août 2021, c'est-à-dire avant la promulgation de la loi ;
• ou prévus dans le programme d'opérations d'aménagement d'ensemble créées avant le 22 août 2021 , lorsqu'il s'agit d'une ZAC, d'une GOU ou d'une opération d'intérêt national (OIN).
La rédaction proposée crée à cette fin un nouveau 5° bis au III de l'article 194 de la loi Climat-résilience.
Le rapporteur a estimé que cette mesure est équitable, en ce qu'elle évite de pénaliser les collectivités territoriales pour avoir autorisé des projets préalablement à la loi, alors même qu'aucune obligation ni objectif n'était alors anticipé . Le droit actuel semble aller à l'encontre de l'esprit du principe de non-rétroactivité de la loi.
De plus, elle est nécessaire à ce qu'aboutissent les projets d'intérêt général portés par ces opérations d'aménagement . Les ZAC, en particulier, sont un outil très apprécié des élus locaux pour réaliser des équipements publics, tels que des infrastructures de transport (gares, routes) ou des réseaux d'assainissement. Remettre en cause ces projets nuirait à la qualité du service public, et irait à l'encontre d'années d'investissement matériel et organisationnel de la part des élus locaux (acquisition des terrains, planification du projet, études préalables, contrats avec les aménageurs...). Il est donc impératif de les sécuriser.
La commission a adopté l'amendement devenu article additionnel.
Article 13
Prise en compte dès 2021 des efforts de
renaturation
Cet article vise à prendre en compte avant 2031 les opérations de renaturation telles que définies à l'article L. 101-2-1 du code de l'urbanisme menées par les collectivités territoriales.
La commission a adopté sur proposition du rapporteur un amendement visant à ne pas prendre en compte les surfaces artificialisées temporairement lors d'opérations de travaux ou d'aménagements, afin de ne pas contraindre les possibilités d'artificialiser des communes et EPCI dans le même temps.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
I. La situation actuelle - L'absence de prise en compte des opérations de renaturation menées avant 2031 pénalise les collectivités vertueuses
A. La prise en compte des opérations de renaturation des sols artificialisés à compter de 2031 est prévue par la loi Climat-résilience...
La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le changement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite « Climat-résilience ») a introduit un objectif national visant à réduire le rythme d'artificialisation.
Cet objectif est décomposé en deux périodes :
- sur la période 2021-2031, un objectif de réduction de moitié de l'artificialisation constatée entre 2011 et 2021. Cette artificialisation est constatée en calculant la consommation d'espaces agricoles, naturels et forestiers durant cette période ;
- à compter de 2031 et à horizon 2050, un objectif d'absence d'artificialisation nette où toute action d'artificialisation devra être compensée par une opération de renaturation.
La loi Climat-résilience différencie les deux périodes 2021-2031 et 2031-2050 par un système de comptabilisation de l'artificialisation adapté. À compter de 2031, la notion de solde des surfaces artificialisées et non artificialisées se substituera ainsi à la comptabilité en consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers dans le calcul de l'artificialisation des territoires.
La notion d'artificialisation nette est définie à l'article L. 101-2-1 du code de l'urbanisme qui dispose que « L'artificialisation nette des sols est définie comme le solde de l'artificialisation et de la renaturation des sols constatées sur un périmètre et sur une période donnés. ». Par conséquent, à partir de 2031 toute opération de renaturation - c'est-à-dire la transformation d'une surface artificialisée en une surface non artificialisée - sera comptabilisée et retranchée de la somme des surfaces nouvellement artificialisées afin de calculer le solde de l'artificialisation nette des territoires. La définition des sols artificialisés et non artificialisés est précisée à l'article L. 101-2-1 du code de l'urbanisme :
« Au sein des documents de planification et d'urbanisme, lorsque la loi ou le règlement prévoit des objectifs de réduction de l'artificialisation des sols ou de son rythme, ces objectifs sont fixés et évalués en considérant comme :
a) Artificialisée une surface dont les sols sont soit imperméabilisés en raison du bâti ou d'un revêtement, soit stabilisés et compactés, soit constitués de matériaux composites ;
b) Non artificialisée une surface soit naturelle, nue ou couverte d'eau, soit végétalisée, constituant un habitat naturel ou utilisée à usage de cultures. »
La nomenclature de ces surfaces a été précisée par voie réglementaire dans le décret n° 2022-763 du 29 avril 2022 relatif à la nomenclature de l'artificialisation des sols pour la fixation et le suivi des objectifs dans les documents de planification et d'urbanisme. Le solde de l'artificialisation sera calculé au regard de ces huit catégories de surfaces, réparties en deux catégories de sols artificialisés et sols non artificialisés.
B. ...cependant, avant 2031, toute opération poursuivant l'objectif similaire de transformer un sol artificialisé en un sol non-artificialisé ne sera pas prise en compte
En effet, sur la période 2021-2031, la loi Climat-résilience prévoit un objectif global de réduction de - 50 % de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers par rapport à la consommation effectuée pendant la décennie précédente, sans prise en compte des opérations de renaturation effectuées dans le même temps. Il n'est pas prévu de comptabiliser les transformations d'espaces urbanisés en espaces naturels, agricoles et forestiers pendant la décennie 2021-2031, ni les transformations d'espaces considérés comme artificialisés au sens de l'article L. 101-2-1 en espaces non artificialisés. L'absence de prise en compte de ces actes vertueux de renaturation peut désinciter les territoires à effectuer de telles opération, ou les inciter à les reporter à compter de 2031.
II. Le dispositif envisagé - Une prise en compte des opérations de renaturation effective avant 2031
L'article 13 de la proposition de loi propose de prendre en compte les opérations de renaturation immédiatement, et non à compter de 2031 en complétant le 5° du III de l'article 194 de la loi Climat-résilience.
Si les efforts de sobriété foncière sont calculés en fonction de la réduction de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers pendant cette première décennie, cet article propose de comptabiliser les opérations de transformation des surfaces urbanisées selon les définitions de la renaturation et de la surface non artificialisée inscrites à l'article L. 101-2-1 du code de l'urbanisme. Ainsi, la transformation d'un espace urbanisé en une surface non artificialisée au sens de l'article L. 101-2-1 pourra être retranchée de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers d'une commune ou d'un EPCI sur la période 2021-2031.
La prise en compte immédiate des efforts de renaturation entrepris par les collectivités territoriales favorisera la mise en oeuvre de telles opérations sans attendre 2031.
III. La position de la commission - Une meilleure prise en compte de l'artificialisation réelle et finale des projets
La prise en compte des efforts de renaturation des collectivités territoriales est essentielle afin d'inciter dès à présent à désartificialiser les surfaces qui peuvent l'être. L'article 13 de la proposition de loi répond parfaitement à cette demande unanime des élus locaux.
Lors des auditions réalisées par la commission spéciale, le rapporteur a été averti du risque encouru par les élus locaux de voir leurs enveloppes de foncier à artificialiser considérablement réduites, ce en raison de l'artificialisation temporaire induite par les travaux et aménagements nécessaires à la réalisation de projets. Cela concernera en particulier les projets d'ampleur intercommunale, régionale, nationale ou européenne. En effet, les besoins de travaux ou d'aménagements nécessaires à la réalisation d'un projet peuvent donner lieu à une artificialisation temporaire dont l'emprise peut être jusqu'à deux fois supérieure à l'emprise foncière réelle et finale du projet. Selon les dispositions de la loi Climat-résilience, à compter de 2031, toute artificialisation, même temporaire, d'une surface sera comptabilisée dans le calcul du solde de l'artificialisation d'une collectivité territoriale. Cette comptabilisation comme artificialisées des surfaces qui seront renaturées au terme des travaux pénalise les communes et intercommunalités qui verront leur enveloppe d'artificialisation réduite pendant toute la durée des travaux et leurs possibilités de mener d'autres projets dans le même temps de facto contraintes.
Sur proposition du rapporteur, l a commission a adopté l'amendement COM-90 qui complète le 5° du III de l'article 194 de la loi Climat-résilience afin de ne pas compter comme artificialisée une surface initialement non artificialisée et artificialisée temporairement pour besoins de travaux et d'aménagements, à condition que la surface soit restituée à la même catégorie de surface non artificialisée, et dans les mêmes conditions que d'origine. La définition du caractère temporaire des travaux sera précisée par décret en Conseil d'État.
La commission a adopté l'article ainsi modifié.
* 1 Via un amendement adopté en séance à l'Assemblée nationale .
* 2 À savoir les métropoles, établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), syndicats mixtes, collectivités territoriales à statut situés sur le territoire de la région concernée, conseil économique, social et environnemental régional, autorité environnementale et conférence territoriale de l'action publique.
* 3 Hors cas de rectification d'erreur matérielle, l'évolution de la carte communale ne peut passer que par une procédure de révision classique.
* 4 Art. L. 4251-6 d code général des collectivités territoriales.
* 5 Quarante-deux mois à compter de la promulgation de la loi Climat-résilience, intervenue le 22 août 2021, au lieu de trente mois actuellement.
* 6 Six ans à compter de la promulgation de la loi Climat-résilience au lieu de cinq.
* 7 Sept ans à compter de la promulgation de la loi Climat-résilience au lieu de six.
* 8 Délai actuellement prévu à l'article R. 4251-16 du code général des collectivités territoriales.
* 9 Cf. ci-dessus.
* 10 Décret n° 2022-762 du 29 avril 2022 relatif aux objectifs et aux règles générales en matière de gestion économe de l'espace et de lutte contre l'artificialisation des sols du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires et décret n° 2022-763 du 29 avril 2022 relatif à la nomenclature de l'artificialisation des sols pour la fixation et le suivi des objectifs dans les documents de planification et d'urbanisme.
* 11 Décret n° 2022-1673 du 27 décembre 2022 portant diverses dispositions relatives à l'évaluation environnementale des actions ou opérations d'aménagement et aux mesures de compensation des incidences des projets sur l'environnement.
* 12 Rappelons que selon le bilan annuel de l'application des lois au 31 mars 2022, publié par le Sénat, le taux d'application de la loi Climat-résilience n'était que de 10 %.
* 13 Dont l'issue n'est pas encore connue. Cf. commentaire de l'article 2.
* 14 Le rapport d'objectifs du SRADDET de la région Occitanie mentionne d'ailleurs explicitement la nécessité d'une modification ultérieure du SRADDET pour intégrer « la double dimension de l'artificialisation (artificialisation au sens de la loi climat et au sens de consommation d'espaces) » en « intégrant la loi Climat-résilience avec notamment la fixation d'une trajectoire régionale ZAN » ( https://www.prefectures-regions.gouv.fr/occitanie/content/download/98 678/629 048/file/1_rapport_objectifs.pdf , p. 105).
* 15 Avis n° 650 (2020-2021) présenté au nom de la commission des affaires économiques sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, par M. Jean-Baptiste Blanc, Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Daniel Gremillet et Mme Anne-Catherine Loisier, déposé le 1 er juin 2021.
* 16 Les SRADDET de Bretagne, Centre-Val de Loire, Grand Est, Hauts-de-France, Normandie et Provence-Alpes-Côte d'Azur se fixent ainsi un objectif de réduction de moitié (voire davantage) de l'artificialisation d'ici 2030, et ceux de Bourgogne Franche-Comté, Bretagne, Centre-Val de Loire, Occitanie et Pays de la Loire du « ZAN » d'ici 2050 ou avant. Ces objectifs ne reposent cependant pas nécessairement sur les définitions de l'artificialisation et de la consommation d'espace inscrites dans la loi Climat-résilience.
* 17 Ibid .
* 18 Art. 10 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (loi NOTRe).
* 19 Avis n° 650 (2020-2021) présenté au nom de la commission des affaires économiques sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, par M. Jean-Baptiste Blanc, Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Daniel Grémillet et Mme Anne-Catherine Loisier, déposé le 1 er juin 2021, p. 553.
* 20 Décret n° 2022-762 du 29 avril 2022 relatif aux objectifs et aux règles générales en matière de gestion économe de l'espace et de lutte contre l'artificialisation des sols du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires.
* 21 Art. L. 143-16 du code de l'urbanisme.
* 22 Les territoires ultramarins et l'Île-de-France comportent peu de SCoT ; en outre, leurs documents régionaux de planification sont applicables aux documents d'urbanisme dans un rapport de compatibilité.
* 23 Article L. 4251-1 CGCT.
* 24 Communiqué de presse du 14 mars 2022 (https://www.senat.fr/presse/cp20220314a.html).
* 25 Avis n° 650 (2020-2021) présenté au nom de la commission des affaires économiques sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, par M. Jean-Baptiste Blanc, Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Daniel Gremillet et Mme Anne-Catherine Loisier, déposé le 1 er juin 2021, p. 553.
* 26 Cf. ci-dessus, art. 1.
* 27 Dans une seule région, Grand Est, des propositions chiffrées de territorialisation des objectifs de réduction de l'artificialisation ont été proposées, en fonction notamment des trajectoires passées et des contraintes des différentes catégories de territoires.
* 28 Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
* 29 Ce délai, qui était de six mois seulement lors de la promulgation de la loi Climat-résilience, a été prolongé par l'article 114 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.
* 30 « Les conférences de Scot permettent de sortir de la théorie de l'artificialisation pour passer à la pratique », entretien avec Stella Gass, directrice générale de la Fédération des SCoT, AEF Info, dépêche n° 681174, 21 octobre 2022.
* 31 Articles R. 132-10 et suivants du code de l'environnement.
* 32 Fédération nationale des agences d'urbanisme (FNAU), ZAN, les outils de mesure : enjeux, limites et perspective , synthèse de l'étude sur la mesure de la consommation des ENAF, sur la mesure de l'artificialisation et sur les conditions d'interopérabilité entre outils, décembre 2022.
* 33 Amendement n° COM-184 de Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour avis, au texte examiné en commission, déposé le 27 mai 2021.
* 34 Décret n° 2022-762 du 29 avril 2022 relatif aux objectifs et aux règles générales en matière de gestion économe de l'espace et de lutte contre l'artificialisation des sols du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires.
* 35 Pour mémoire, l' article L. 300-1 du code de l'urbanisme précise que « Les actions ou opérations d ' aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre une politique locale de l ' habitat, d ' organiser le maintien, l ' extension ou l ' accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l ' insalubrité, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. »
* 36 Article R. 212-16 du code de l'environnement.
* 37 Article L. 411-2 du code de l'environnement.
* 38 L'estimation porte notamment sur des projets pouvant être déclarés d'utilité publique par décret en Conseil d'État ou par arrêté ministériel, des actions ou opérations d'aménagement réalisées par un grand port maritime ou fluviomaritime, des opérations intéressant la défense ou de la sécurité nationales, des opérations de construction ou de réhabilitation d'un établissement pénitentiaire par l'Agence publique pour l'immobilier de la justice ou des actions ou opérations d'aménagement de l'État ou de l'un de ses établissements publics réalisées pour leur compte dans le périmètre d'une opération d'intérêt national (OIN).
* 39 Estimation transmise au rapporteur par la Fédération des SCoT.
* 40 Article L. 126-1 du code de l'environnement.
* 41 DGALN/DHUP/Bureau de la législation de l'urbanisme, « Déclaration de projet (code de l'urbanisme) emportant mise en compatibilité du plan local d'urbanisme », fiche technique, septembre 2016.
* 42 Schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), schéma directeur de la région d'Île-de-France (SDRIF), schéma d'aménagement régional (SAR) des collectivités de l'article 73 de la Constitution ou plan d'aménagement et de développement durables de Corse (PADDUC).
* 43 Charte de parc naturel régional ou de parc national, schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE), schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE), zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP), schéma régional de cohérence écologique (SRCE), plan climat-air-énergie territorial (PCAET).
* 44 Conseil d'État, 6 e et 1 re sous-sections réunies, 23 octobre 2013, Commune de Crolles , n° 350077.
* 45 Article R. 4251-8-1 précité du code général des collectivités territoriales.
* 46 Le Gouvernement annonçait ainsi, dès février 2022, que 782 projets de relocalisation d'activité avaient été soutenus par le plan de relance (Gouvernement, « Relocaliser » , dossier de presse, 17 février 2022).
* 47 Amendement COM-184 présenté par Jean-Baptiste Blanc, rapporteur pour avis, 27 mai 2021.
* 48 Voir notamment le commentaire de l'article premier de la présente proposition de loi.
* 49 Ordonnance n° 2020-744 du 17 juin 2020 relative à la modernisation des schémas de cohérence territoriale.
* 50 Article L. 141-3 du code de l'urbanisme.
* 51 Article L. 141-4 du code de l'urbanisme.
* 52 Article L. 151-5 du code de l'urbanisme.
* 53 Voir les articles L. 4211-1 et suivants .
* 54 Voir le commentaire de l'article 4 de la présente proposition de loi.
* 55 Décret n° 2022-762 du 29 avril 2022 relatif aux objectifs et aux règles générales en matière de gestion économe de l'espace et de lutte contre l'artificialisation des sols du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires.
* 56 Voir par exemple les articles L. 5214-16 et suivants pour les communautés de communes, L. 5215-20 et suivants pour les communautés urbaines, L. 5216-5 et suivants pour les communautés d'agglomération.
* 57 En application de l'article L. 4251-1 du code général des collectivités territoriales, l'Île-de-France, les régions d'outre-mer et les collectivités territoriales à statut particulier exerçant les compétences d'une région (dont la Corse) ne sont pas soumises à l'obligation d'élaborer un SRADDET, remplacé par d'autres documents.
* 58 La procédure de déclaration de projet a été présentée supra dans le commentaire de l'article 4.
* 59 Schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), Schémas d'aménagement régional (SAR), Plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC), Schéma directeur de la région Île-de-France (SDRIF).
* 60 Schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), Schémas d'aménagement régional (SAR), Plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC), Schéma directeur de la région Île-de-France (SDRIF).
* 61 Décret n° 2022-763 du 29 avril 2022 relatif à la nomenclature de l'artificialisation des sols pour la fixation et le suivi des objectifs dans les documents de planification et d'urbanisme.
* 62 https://www.cnen.dgcl.interieur.gouv.fr/inlinedocs/27a84ffbba04ba13c02a157e954ac6d3/cnen-3-mars-2022-deliberations.pdf
* 63 Stéphane Buchou, Quel littoral pour demain ? Vers un nouvel aménagement des territoires côtiers adapté au changement climatique , 28 novembre 2019, https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/2019.11.29_Quel-littoral-pour-demain.pdf .
* 64 Décret n° 2022-750 du 29 avril 2022 établissant la liste des communes dont l'action en matière d'urbanisme et la politique d'aménagement doivent être adaptées aux phénomènes hydro-sédimentaires entraînant l'érosion du littoral.
* 65 Loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral.
* 66 Loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.
* 67 https://www.adaptation-changement-climatique.gouv.fr/thematiques/montagne .
* 68 https://www.consultations-publiques.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/logl2201290d-projet_decret-rapport-local-zan.pdf
* 69 À compter de 2031. Avant 231, c'est la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers qui sera mesurée.
* 70 Schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), Schémas d'aménagement régional (SAR), Plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC), Schéma directeur de la région Île-de-France (SDRIF).
* 71 À l'exception de la Région Île-de-France, de la Corse, et des collectivités d'outre-mer couvertes par un schéma d'aménagement régional (SAR). Ces collectivités pourront fixer librement le niveau de leurs objectifs chiffrés.