TRAVAUX EN COMMISSION
I. AUDITION DE M. STÉPHANE TRAVERT, MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE L'ALIMENTATION
Réunie en commission le mercredi 6 juin 2018, dans la perspective de l'examen au Sénat du projet de loi n° 525 (2017-2018) pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, la commission a auditionné M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation .
Mme Sophie Primas , présidente. - Mes chers collègues nous avons le plaisir d'accueillir cet après-midi M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation, qui vient nous présenter le projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.
Je tiens à le remercier, car je sais que l'examen de la loi à l'Assemblée nationale, la semaine dernière, a constitué un véritable marathon.
Monsieur le ministre, ce projet de loi se veut être la mise en oeuvre législative de certaines conclusions des états généraux de l'alimentation, qui avaient rassemblé tous les acteurs des filières entre juillet et décembre 2017. Ce temps de réflexion partagée a nourri légitimement de nombreuses espérances chez toutes les parties prenantes. Certaines d'entre elles étaient peut-être contradictoires, ce qui explique probablement l'inflation qu'a connue le projet de loi à l'Assemblée nationale, passant de 17 à 92 articles.
Les grandes lignes du projet de loi nous sont déjà connues et nous attendons surtout cet après-midi des explications sur les modifications apportées par l'Assemblée nationale. En premier lieu, comment expliquez-vous que le Gouvernement ait permis une telle inflation législative en donnant de nombreux avis favorables à des articles additionnels relevant, le plus souvent, du domaine réglementaire ou n'ayant aucune portée normative, alors même que le projet gouvernemental de révision constitutionnelle entend durcir les conditions de recevabilité des amendements ?
Le projet de loi trace trois axes prioritaires : assurer un meilleur équilibre des relations commerciales entre le producteur, le transformateur et le distributeur, promouvoir des choix alimentaires favorables à la qualité, à la sécurité sanitaire et à la durabilité de la production et - permettez-moi de vous citer, monsieur le ministre, pour ce dernier volet - « réduire la dépendance de l'agriculture aux produits phytosanitaires ».
Je ne puis m'empêcher de vous dire que ce dernier sujet est devenu un « marronnier » de toutes les lois touchant de près ou de loin à l'agriculture et à l'alimentation. Il me semble que la sagesse serait de laisser le temps d'appliquer les lois que nous votons, de les évaluer et de les faire évoluer si besoin est, et enfin d'ancrer la science au coeur de nos réflexions.
Je souhaiterais vous interpeller sur l'un des aspects malheureusement le moins discuté du texte dans la presse mais le plus important, à savoir les propositions du Gouvernement pour assurer une meilleure répartition de la valeur tout au long de la chaîne des produits alimentaires.
Il convient avant tout de dissiper une idée fausse, que vous infléchirez ou non : le producteur ne sera pas rémunéré à son coût de revient après le projet de loi. Ce serait pourtant une bonne nouvelle !
Le texte prévoit l'utilisation d'indicateurs de coût de production, de prix de marché et de qualité dans la construction du prix. Dans la version initiale du projet de loi, ces indicateurs pouvaient être proposés par les parties ou repris parmi les indicateurs diffusés par les interprofessions.
Le fait de laisser les parties construire leurs propres indicateurs sans aucune procédure de validation exposait la partie la plus faible au contrat - le producteur - à se voir imposer un indicateur construit par l'aval.
Le texte a été modifié par les députés en séance publique, malgré votre avis défavorable. Il prévoit que les interprofessions diffusent des indicateurs. À défaut, l'Observatoire de la formation des prix et des marges pourra en proposer ou, éventuellement, valider des indicateurs proposés par d'autres acteurs, dont les parties elles-mêmes. Quelle est la position du Gouvernement sur cette nouvelle modalité ?
En second lieu, je souhaite revenir sur le seuil de revente à perte « SRP + 10 ». Pouvez-vous expliquer devant notre commission en quoi cette mesure va « ruisseler jusqu'aux producteurs » ? Je comprends en quoi elle va améliorer la marge des distributeurs, mais le lien avec le producteur me semble plus questionnable.
Je me permets une deuxième question sur l'équilibre général du texte. La première partie vise à augmenter les revenus des agriculteurs, alors qu'à l'inverse la seconde partie crée de nouvelles charges potentiellement importantes, en instaurant un conseil indépendant de la vente concernant l'utilisation de produits phytopharmaceutiques, à la charge du producteur, ou en interdisant les remises, rabais et ristournes sur la vente de tels produits, les privant d'une démarche collective d'achat contraire à l'esprit de toutes les dernières lois que vous avez vous-même soutenues dans les gouvernements précédents.
Or l'étude d'impact a été jugée insuffisante par le Conseil d'État. Disposez-vous, monsieur le ministre, d'éléments chiffrés sur l'effet de ces mesures sur la consommation de produits phytopharmaceutiques, ainsi que sur les revenus des producteurs ?
Enfin, pour revenir à mon propos introductif, permettez-moi de dire, de façon un peu sévère mais déterminée, que le problème principal traité par ce projet de loi doit demeurer l'amélioration des revenus des agriculteurs et des producteurs. À titre personnel, j'ai été très surprise par la discussion inflationniste permise par l'Assemblée nationale, qui a fait ressembler les débats à des discussions de comptoir, alors qu'il existe de vrais sujets dans votre texte - cadrage coopératif, encadrement des promotions, hausse du SRP, ruissellement des différentes valeurs ajoutées.
Ce sont des sujets sur lesquels nous pouvons discuter, à propos desquels les débats sont importants. Nous pouvons nous y retrouver ou non, mais ces questions doivent être au coeur de notre action. Le Sénat sera très attentif à bien se focaliser sur l'essentiel.
Monsieur le ministre, vous avez la parole, avant que les rapporteurs, Mme Loisier et M. Raison, et M. Médevielle pour la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, ainsi que l'ensemble de mes collègues, ne vous interrogent.
M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. - Merci, madame la présidente.
Je suis très heureux de pouvoir échanger avec vous cet après-midi, avant de nous retrouver, à partir du 25 juin, dans l'hémicycle du Sénat.
Nous avons passé 77 heures à l'Assemblée nationale pour traiter de ce projet de loi. Aujourd'hui, l'Assemblée nationale vous passe le relais pour enrichir un texte clé pour l'agriculture et l'alimentation de notre pays.
Le texte qui vous parvient, vous l'avez rappelé, madame la présidente, est plus long que la version initiale du Gouvernement, des thèmes nouveaux ayant été ajoutés durant la discussion.
Pourtant, il présente toujours les mêmes lignes de force qui sont destinées à répondre aux mêmes défis et aux mêmes exigences qui sont les nôtres, qui ont été identifiés pendant les états généraux de l'alimentation.
L'urgence consiste d'abord à restaurer la capacité des agriculteurs à tirer un revenu décent de leur travail, mais également de répondre aux attentes des consommateurs et des citoyens en proposant à tous une alimentation saine, sûre et durable.
Ce projet de loi est le premier outil de la feuille de route de la politique de l'alimentation, que nous avons mise en place le 21 décembre dernier, lors de la clôture des états généraux. Il n'est cependant pas le seul, et il importe de jouer de la complémentarité de l'ensemble des outils pour avancer sur les sujets agricoles et alimentaires :
- les plans de filière, qui signent l'engagement fort des acteurs économiques ;
- le programme Ambition Bio 2022, le renforcement de la stratégie relative au bien-être animal, la feuille de route sur les produits phytopharmaceutiques et une agriculture moins dépendante aux pesticides, qui témoignent des dynamiques de transformation qui sont à l'oeuvre ;
- le plan d'action sur la bioéconomie, qui ouvre des pistes de diversification des revenus agricoles ;
- le volet agricole du grand plan d'investissement et le travail sur la fiscalité agricole, que j'ai engagé avec Bruno Le Maire, des parlementaires et des représentants des acteurs de l'agriculture, qui marquent la volonté de l'État d'être présent aux côtés des acteurs pour accompagner les évolutions en cours ou à venir.
Cette liste, bien évidemment, n'est pas exhaustive, mais il me paraissait important de remettre en perspective le travail que nous conduisons. Nous avons besoin d'un cadre légal qui soit clair, facilitateur, et qui laisse chacun des acteurs exercer à la fois ses compétences, mais aussi ses responsabilités.
Il est également nécessaire que les acteurs puissent s'approprier pleinement ce cadre et construire des dynamiques nouvelles. Durant ce mois de juin, les interprofessions seront de nouveau reçues dans mon ministère afin de faire le point sur la mise en oeuvre des plans de filière, qu'il s'agisse du travail sur les indicateurs ou de l'affinement de la concrétisation des engagements sociétaux que les filières ont pris dans leur ensemble, dans un dialogue particulier et singulier avec la société civile.
En abordant la discussion de ce projet de loi, nous devons d'abord penser aux agriculteurs et à tous nos concitoyens, comme nous l'avons fait pendant les états généraux de l'alimentation.
À travers ce projet de loi, je veux défendre une agriculture compétitive, innovante, durable, riche de sa diversité et de ses modèles agricoles. Vous le savez - j'ai déjà eu l'occasion de le dire dans cette enceinte -, il ne s'agit pas d'opposer les modèles, mais de faire au contraire en sorte qu'ils soient complémentaires les uns des autres et de créer des ressources suffisantes pour développer nos économies locales, puis gagner sur les marchés nationaux et internationaux.
C'est parce que nous voulons une agriculture prospère, compétitive et durable que notre projet vise à soutenir les agriculteurs, afin qu'ils puissent vivre de leur travail.
Nous pensons aussi à nos concitoyens, qui sont tous attentifs à ce qu'ils mangent. Ils sont également préoccupés par l'alimentation des personnes les moins favorisées, comme en témoigne la générosité de leurs dons aux différentes associations caritatives, mais également soucieux du bien-être animal et vigilants en matière d'enjeux environnementaux.
Le projet de loi qui arrive en discussion devant vous ne consiste donc pas en de simples ajustements techniques, mais appelle à un changement de paradigme. C'est ce qu'attendent le monde agricole et l'ensemble des consommateurs.
Ce texte doit pouvoir redonner du pouvoir aux producteurs dans la chaîne de valeurs. Nous partageons tous le même constat : la situation n'a que trop duré. Les agriculteurs subissent de plein fouet une guerre des prix et ne dégagent plus les marges suffisantes pour rémunérer leur travail ou permettre la montée en gamme des productions agroalimentaires.
Cette guerre des prix se nourrit du déséquilibre de l'offre et de la demande, de l'absence d'organisation de production, de la concentration toujours plus forte du secteur de la distribution, mais aussi parfois de la défiance des consommateurs et des injonctions contradictoires qu'ils envoient aux producteurs.
Je ne crois pas que l'on puisse avoir des productions toujours plus saines, plus élaborées, plus durables en ayant des prix toujours plus bas et des promotions toujours plus attrayantes.
Entre 2000 et 2016, le prix du lait payé aux producteurs est passé de 30 centimes d'euros à 32 centimes d'euros par litre, soit deux centimes de plus par litre en seize ans, alors que l'inflation, durant la même période, a été de plus de 27 % et l'accroissement du PIB de 45 %.
Ce qui vaut pour le lait vaut aussi pour de nombreuses autres productions agricoles, comme la viande bovine, le porc, la volaille et les productions végétales. Il nous faut apporter des réponses à ce sujet, qui est celui de la relance de la création de valeur, pour lutter contre des prix anormalement bas.
Ma priorité, à travers ce texte, est de permettre aux agriculteurs de vendre leurs productions au juste prix, en leur assurant la visibilité indispensable à tout entrepreneur pour penser le temps long et produire ainsi une alimentation de qualité, dans le respect des règles sociales, environnementales et sanitaires renforcées.
Nous devons renforcer les organisations de producteurs pour permettre aux agriculteurs de peser collectivement, en leur offrant la possibilité de définir ensemble le prix de vente de leurs produits.
Sachez que plus de la moitié des éleveurs qui livrent leurs produits aux entreprises privées n'adhèrent pas à une organisation de producteurs ou à une coopérative laitière. C'est également vrai pour le secteur de la viande et des fruits et légumes, qui comptent chacun plus de 250 organisations parmi les 600 qui sont recensées aujourd'hui en France.
Que dit aujourd'hui le projet de loi ? Il comporte deux titres principaux, le premier consacré à une dominante économique et le deuxième à une dominante sociétale. Le premier titre constitue une palette de dispositifs destinés à redonner leur place à tous les maillons de la chaîne agricole et alimentaire : construction du prix à partir de l'amont, clauses de renégociation, lutte contre les prix abusivement bas, contrôles et sanctions, rôle accru de la médiation, renforcement des interprofessions, travail sur le statut et le rôle de la coopération agricole, encadrement des promotions, seuil de revente à perte fixé à 10 %.
C'est un édifice cohérent qui repositionne chacun des acteurs sur ses compétences. Si chacun prend ses responsabilités, comme nous le souhaitons, cette loi sera efficace et opérationnelle. Elle ne laissera place à aucune interprétation en ce qui concerne la répartition de la valeur créée.
Je suis convaincu - et je pense que vous l'êtes aussi - que le premier des défis qui attend nos modèles agricoles est de recréer des marges financières pour offrir à la fois de la visibilité, investir et transformer durablement nos modèles.
Les titres suivants du projet de loi sont à mes yeux aussi importants que le premier, parce qu'ils viennent soutenir la première jambe du texte, la finalité de la production agricole, qui est de fournir une alimentation sûre, saine et durable.
C'est bien plus qu'un besoin élémentaire - et les états généraux l'avaient d'ailleurs souligné : nos concitoyens y accordent un sens presque politique, au sens noble du terme. Comment notre alimentation contribue-t-elle à nous maintenir en bonne santé, comment contribue-t-elle à la protection de notre environnement ?
Le projet de loi traduit la volonté du Gouvernement de porter une politique alimentaire qui favorise les choix qui préservent le capital santé de chacun et le capital environnemental de tous.
En matière de commercialisation de produits phytopharmaceutiques, nous proposons d'interdire les rabais, ristournes et remises lors de la vente de ces produits. Nous proposons également de séparer les activités de vente et de conseil, mais de sécuriser également le dispositif des certificats d'économie de produits phytosanitaires (CEPP) par voie d'ordonnance pour contribuer à réduire l'utilisation des produits phytopharmaceutiques.
En matière de sécurité sanitaire, nous renforçons les pouvoirs d'enquête et de contrôle des agents chargés de la protection de la santé et de la protection animale pour accroître l'efficience des contrôles de l'État.
Dans le domaine du bien-être animal, le projet initial du Gouvernement proposait déjà d'étendre le délit de maltraitance animale, ainsi qu'un doublement des peines en cas de délit constaté lors de contrôles officiels.
Nous proposions aussi de donner la possibilité aux associations de protection des animaux de se porter partie civile en cas d'infraction constatée par un contrôle officiel. Ces dispositions ont été complétées par d'autres articles adoptés par l'Assemblée nationale. Ces ajouts vont dans le bon sens pour mieux assurer le bien-être animal. C'est un sujet auquel le Gouvernement est particulièrement attentif.
Le Gouvernement veut faire aussi de la politique de l'alimentation un moteur de réduction des inégalités sociales. Pour tenter de les réduire, il vous est proposé de faire de la restauration collective un levier d'amélioration de l'alimentation pour tous dès le plus jeune âge.
La restauration collective, vous le savez, c'est 7,3 milliards de repas hors foyer par an. Le projet de loi propose que la restauration collective publique comporte au moins 50 % de produits issus de l'agriculture biologique, de produits locaux ou sous signe de qualité à compter du 1er janvier 2022.
Enfin, nous proposons de lutter contre la précarité alimentaire et de limiter les conséquences environnementales du gaspillage. Les articles 12 et 15 ont pour objectif de réduire le gaspillage alimentaire dans la restauration collective avec la mise en place d'un diagnostic obligatoire, et d'étendre le don alimentaire à la restauration collective et à l'industrie agroalimentaire.
Voilà dépeint rapidement le panorama global du texte qui vous sera soumis. Je serai bien évidemment totalement à l'écoute des propositions que vous voudrez bien formuler pour améliorer et enrichir le projet.
Nous devons nous inscrire collectivement et résolument dans une trajectoire qui respectera tant les hommes, du producteur au consommateur, que l'environnement dans lequel ils évoluent.
Nous devons construire une trajectoire pour tirer notre agriculture vers le haut par l'innovation, l'investissement, la montée en gamme, la confiance. C'est ainsi que nous lui donnerons toutes les chances de résister aux défis de la mondialisation qui sont, vous le savez, lourds et importants.
Avec le Président de la République et le Premier ministre, nous voulons refonder le pacte social entre les agriculteurs et la société, pour qu'ils soient à nouveau fiers de leur travail et que la France soit fière de son agriculture.
Je vous remercie de votre attention.
Mme Sophie Primas , présidente. - La parole est aux rapporteurs.
M. Michel Raison , rapporteur. - Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les états généraux de l'alimentation n'ont pas été une si mauvaise chose : ils ont permis de faire émerger un certain nombre d'idées.
Je pourrais presque adhérer au discours que le Président de la République a prononcé à l'issue des états généraux si nous n'étions pas en train d'étudier ce texte. Attention à ne pas faire inutilement rêver la population, en particulier les paysans !
Vous avez parlé d'un pacte social et évoqué la fierté des paysans. Il ne faut pas les croire stupides. L'ensemble des Français sont d'ailleurs pratiquement tous issus du monde paysan. Le Président de la République lui-même doit bien avoir un arrière-grand-père paysan ! Les paysans ont beaucoup de bon sens et ne se laisseront pas abuser par de simples mots. Ils regarderont si ce texte peut, dans un premier temps, leur apporter quelque chose.
Vous affirmez que les relations contractuelles entre l'agriculteur et son premier acheteur ont progressé. Il y a eu beaucoup de confusion à l'Assemblée nationale sur la relation entre agriculteur, premier acheteur et distributeur. L'agriculteur, mis à part dans le domaine des fruits et légumes et quelques autres produits spécifiques, a rarement des relations directes avec le distributeur.
Ces relations existaient déjà : vous les inversez. La contractualisation a été créée par la loi de modernisation agricole, puis renforcée par la loi Sapin 2. Elle a besoin de vivre et d'être améliorée. Le contrat doit définir une quantité, une durée et comporter des indices. C'était déjà le cas.
La première modification touche donc l'inversion du contrat : ce n'est plus l'acheteur qui propose le contrat, mais l'agriculteur, et le cas échéant, par le biais de ses organisations de producteurs. C'est une bonne chose, mais il y aura cependant toujours des négociations.
En outre, l'indicateur de prix de revient n'est qu'un indicateur. Je ne vous en fais pas reproche : on ne peut établir un contrat avec un prix fixe, quel que soit le marché. Vous n'avez pas de baguette magique, mais il ne faut pas tenter de faire croire qu'il en existe une ! Or ce texte essaie de nous convaincre du contraire en laissant penser que l'agriculteur peut percevoir le prix réel de son travail.
Je distingue bien la notion de prix du produit du revenu agricole. C'est une notion qu'il convient de ne pas mélanger. Le prix du produit est une composante du revenu agricole, avec les primes de la politique agricole commune et autres, et les charges. Tout cela n'est pas abordé. Il s'agit d'un texte très restrictif, qui traite uniquement de la relation contractuelle entre l'agriculteur et l'acheteur.
S'agissant des indicateurs, comment va-t-on réussir à établir un indicateur national concernant le lait, par exemple ? Les contrats ont surtout été établis après la suppression des quotas laitiers, pour calmer les inquiétudes relatives au ramassage quotidien, mais ils sont également obligatoires pour les fruits et légumes, etc.
De quoi ce nouvel indicateur va-t-il pouvoir être constitué ? J'émets une réserve - il n'est d'ailleurs pas interdit que je dépose des amendements à ce sujet - sur le fait que l'on puisse donner son prix de revient à son acheteur. Ceux qui ont déjà fait du commerce le savent, c'est dangereux ! Lorsque le cours est très bas, cela peut éventuellement être utile, mais qu'en sera-t-il le jour où le cours sera haut ? En ce moment, c'est plutôt le cas. On a une vision positive de l'année à venir, mais on ne sait pas ce qui se passera en 2020. Le cours peut baisser au fur et à mesure qu'on se rapproche des élections...
L'acheteur final, en aval, observera le prix de revient. Lorsque celui-ci sera par exemple à 350 euros la tonne, que le cours sera bon et que le transformateur sera capable de payer 400 euros la tonne, Leclerc - qui est souvent à l'origine d'un certain nombre de dégâts - refusera de payer le fromage au prix qui lui est demandé, en arguant du fait que le paysan a assez de 350 euros la tonne. C'est dangereux, car cela peut ne jouer que dans un sens.
Ma deuxième question est liée aux pratiques restrictives de concurrence. Dans ce domaine, le texte revêt pour moi des aspects positifs. Tout le monde ne le comprend pas forcément de la même façon, et nous avons eu des discussions entre nous à ce sujet. Cela comprend le seuil de revente à perte et l'encadrement des promotions. On ne peut, selon moi, être contre le relèvement d'un seuil de revente à perte, même sans entretenir trop de rêves.
Je rappelle que la vente à perte, c'est-à-dire la vente à prix coûtant d'un produit, se fait ponctuellement sur certains produits, mais pas sur tous les produits. Un distributeur ne peut vendre à prix coûtant en permanence. Il a en gros 30 % de charges. En moyenne, il couvre ses charges, sans quoi il aurait déjà déposé le bilan.
Par ailleurs, je ne suis pas systématiquement contre l'idée d'ordonnance, comme pour la loi « travail », afin d'aller vite et d'éviter les discussions inutiles, mais ici, pourquoi souhaitez-vous y recourir puisqu'on est à peu près tous d'accord ? J'attends vos explications à ce sujet.
Pour ce qui est de l'encadrement des promotions, c'est un peu plus complexe : comment l'imaginez-vous ? Cela concernera-t-il l'ensemble des denrées alimentaires ou cela se fera-t-il en fonction de leur nature ? Pour un gros fournisseur, s'agit-il du chiffre d'affaires moyen ou produit par produit ?
Enfin, concernant la délocalisation des négociations avec les fournisseurs, on ne peut pas laisser se développer l'escroquerie.
Depuis l'après-guerre, la population parvient à se nourrir à un prix raisonnable, avec des produits de meilleure qualité. On parle d'alimentation saine : cela signifie-t-il qu'elle ne l'était pas auparavant ? Cela chagrine les paysans. On peut toujours trouver quelques problèmes ça ou là, comme dans toute activité, mais je puis vous assurer que, depuis l'après-guerre, les paysans sont montés en gamme en permanence, sans forcément en percevoir les dividendes. Leurs produits, tant sur le plan sanitaire, qualitatif que gustatif, même si des erreurs ont été commises pour certaines variétés de fruits, se sont améliorés peu à peu. Énormément de maladies ont été éradiquées. Les Français ne se souviennent plus de tout cela ! Ils s'en moquent ! Il n'y a plus de brucellose, de fièvre vitulaire, plus de tuberculose ou très peu, d'ergot du blé, de fusariose, et on est en train de leur dire qu'ils n'ont pas bien travaillé, qu'ils n'ont pas produit une nourriture saine et que, passant de l'« ancien monde » au « nouveau monde », ils vont maintenant enfin pouvoir le faire !
Selon les scientifiques, la durée de vie a fortement augmenté depuis l'après-guerre. Il est préférable de travailler sur la base d'études scientifiques plutôt qu'à partir de slogans d'associations parfois voisines de sectes. Si l'hygiène et la médecine ont certes connu des progrès, c'est avant tout la qualité de l'alimentation et l'assurance de pouvoir se nourrir correctement, à des prix très bas, qui ont permis cette augmentation de la durée de vie !
Mme Anne-Catherine Loisier , rapporteure. - Vous l'avez dit, monsieur le ministre, le titre II a vocation à servir le titre premier concernant le juste revenu des agriculteurs, en même temps que l'ambition d'une alimentation sûre, saine et durable.
J'articulerai mes deux questions autour de ces objets de la loi, qui me semblent importants. Il ne faudrait pas en effet que le titre II vienne défaire ce que le titre premier aurait pu réussir à améliorer.
Comment être sûr que l'article 14, qui préconise l'interdiction des ristournes, des rabais et des remises, et l'article 15, qui porte sur la séparation entre conseil et vente, ne se traduisent pas pour les agriculteurs par une charge supplémentaire contraire à l'objectif de la loi ?
L'articulation avec le dispositif de CEPP peut également poser problème puisque ces acteurs pourraient, après la séparation, avoir du mal à remplir leurs obligations. Quelles mesures envisagez-vous dans les ordonnances qui sont prévues pour pallier ces difficultés ?
Ma deuxième question concerne l'approvisionnement en matière de restauration collective. Nous partageons avec vous l'ambition d'améliorer la qualité des repas et de promouvoir en particulier les produits locaux auxquels nous tenons tous, même si la commande publique va nous obliger à être assez créatifs en la matière. Toutefois, pour atteindre les objectifs ambitieux prévus par le texte, il sera à notre sens impératif d'accompagner les acteurs publics et surtout d'aider à la structuration de la filière pour que cela ne se traduise pas par une explosion des importations de produits bio.
Quels outils concrets comptez-vous mettre en oeuvre pour structurer l'offre nationale et permettre à nos produits locaux nationaux d'alimenter la restauration collective au niveau de la gamme et de la qualité attendues ? Je suis convaincue que les plans alimentaires territoriaux sont de véritables outils qu'il va nous falloir renforcer, mais ces projets ne décolleront que s'ils sont accompagnés financièrement.
M. Pierre Médevielle , rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Monsieur le ministre, je partage bien entendu les mêmes inquiétudes que mes deux collègues : notre agriculture perd des places sur le podium européen. Les agriculteurs sont depuis longtemps habitués au régime de la douche froide. Ce texte va globalement dans le bon sens, mais si l'on ne veut pas qu'il demeure un recueil de voeux pieux, il faudra l'accompagner de mesures fortes, avec un engagement de l'État et des collectivités.
L'article 11 apparaît ambitieux : 50 % de produits qualité, dont 20 % issus du bio. Cela semble difficilement réalisable, mais cela va dans le bon sens. Il faut donc tenir le cap, même si l'on n'est pas sûr d'y parvenir. Cela permettra d'accompagner la transition de certains agriculteurs vers le bio et d'augmenter la surface agricole utile. Si l'on arrive à 15 %, ce sera très bien.
Nous soutiendrons donc cet article, même si l'on souhaite qu'il soit accompagné de mesures fortes et d'engagements financiers, car on a beau le tourner dans tous les sens, il y aura un surcoût pour les gestionnaires de restaurants. En moyenne, un produit végétal bio représente 25 % de plus. Pour un produit carné, on arrive à 50 %. On peut tabler sur une augmentation de 30 % des approvisionnements, même si, avec le gaspillage, on arrive à corriger ces effets.
Un autre point nous a heurtés. Vous avez l'intention de créer dès cet été une nouvelle structure, le Conseil national de la restauration collective. Or le projet de loi est silencieux sur ce point important, ce que nous déplorons.
Pouvez-vous nous indiquer tout d'abord, pourquoi il ne figure pas dans le texte, ce qui aurait permis à la représentation nationale d'en débattre ? Qu'en sera-t-il de cette nouvelle structure ? A-t-elle vocation à remplacer le Conseil national de l'alimentation ? Quelle sera sa composition ? Les élus locaux et les associations y auront-ils leur place ?
Sur les phytosanitaires, l'objectif de diminution fonctionne bien. Des progrès ont été réalisés, avec des pistes intéressantes à propos de certains épandeurs intelligents, équipés de microcaméras, de meilleurs conseils pratiques, un guide pratique des bons usages. Je crois que ceci va dans le bon sens.
Attention toutefois, dans l'euphorie, à ne pas chercher à arriver à zéro produit phytosanitaire, comme on l'a fait pour les communes. Il y a une grande différence entre les communes et l'agriculture intensive. Il est nécessaire - et nous en parlions hier avec l'ANSES - de conserver une pharmacopée suffisante. Il y aura toujours des maladies fongiques, bactériennes, des insectes : ne nous démunissons pas trop et gardons quelques armes, qui sont indispensables !
S'agissant de l'article 15 et de la moralisation des pratiques commerciales, j'ai un peu de mal à comprendre. Je suis d'accord avec le système des ordonnances pour séparer les activités de vente et de conseil, encadrer ou supprimer les remises, les ristournes, les rabais. Ce qui me gêne, c'est que cela risque de retomber comme toujours sur les agriculteurs, sur qui les remises étaient répercutées. Cela représente pour eux un surcoût.
Par ailleurs, qui va exercer les activités de conseil ? Selon le directeur général de l'alimentation, les agriculteurs devront en financer environ 400 millions d'euros. On ne sait qui seront ces conseillers ni la formation qu'ils recevront.
Par ailleurs, ils ne disposent pas d'une structure comme la Haute autorité de santé qui pourrait leur délivrer des informations. Ils devront peut-être solliciter les laboratoires pour ce faire. Où place-t-on le curseur entre information et publicité ? Cela me paraît assez flou et dangereux pour les agriculteurs.
Nous aimerions obtenir davantage de précisions sur ce système, dont ne voit pas très bien comment il va se mettre en place.
Mme Nicole Bonnefoy . - Monsieur le ministre, en 2012, une mission d'information sénatoriale, dont Sophie Primas était la présidente et dont j'étais rapporteure, concernant les produits phytosanitaires, faisait le constat que les risques phytosanitaires étaient sous-évalués.
Ceci a été largement confirmé par l'INSERM en 2013, puis par l'ANSES en 2016, et plus récemment par l'IGAS, en janvier dernier, trois corps d'inspection d'État, dont le vôtre, monsieur le ministre, affirmant que « le degré de certitude d'ores et déjà acquis sur les effets des produits phytopharmaceutiques commande de prendre des mesures fortes et rapides, sauf à engager la responsabilité des pouvoirs publics ».
C'est en ce sens que le Sénat a examiné une proposition de loi visant à créer un fonds d'indemnisation pour les victimes des produits phytosanitaires. Nous l'avons adopté le 1er février dernier. Il facilite le parcours de reconnaissance des malades, qui est aujourd'hui un parcours du combattant, permet la réparation intégrale, aujourd'hui seulement forfaitaire, et qui responsabilise les firmes puisqu'elles participent financièrement.
Ce fonds d'indemnisation a été proposé par voie d'amendement à la loi agricole à l'Assemblée nationale, mais a subi un sort moins glorieux qu'au Sénat.
Je me fais donc ici le relais des associations de malades, comme Phyto-Victimes, qui se bat au quotidien, et qui en vient à se demander si la santé des animaux n'est pas mieux considérée que celle des agriculteurs.
Ma question est simple : serez-vous plus ouvert au Sénat que vous ne l'avez été à l'Assemblée nationale, ou allez-vous continuer à vous retrancher derrière le fait qu'il est urgent d'attendre, au motif qu'il faut encore engager des études, alors qu'il en existe déjà pléthore ? Vous avez dit à l'Assemblée - et cela m'a choquée - que l'inversion de la charge de la preuve vous posait problème. Je crains que la preuve soit difficile à établir pour le malade. Je pense à Paul François qui, seul, depuis dix ans, alors qu'il a été empoisonné de façon aiguë par le Lasso, aujourd'hui interdit, se bat pour faire reconnaître le préjudice qu'il a subi, ou à ceux pour qui la présomption de causalité est forte mais qui n'arrivent pas à obtenir la composition intégrale du produit parce qu'on leur oppose le secret industriel. Le fonds d'indemnisation est là pour régler ces problèmes !
J'espère que vous y serez ouvert...
Mme Cécile Cukierman . - Monsieur le ministre, vous avez conclu vos propos en parlant d'un nouveau pacte social et de confiance. Nous aurons bien évidemment le débat en séance mais, en l'état, le texte tel qu'il sort de l'Assemblée nationale est très en retrait par rapport aux attentes de l'ensemble du monde agricole dans sa diversité, et même par rapport aux annonces et aux espoirs qui ont été suscités par le discours du Président de la République à Rungis, à l'issue des états généraux de l'alimentation.
Pour ce qui est des indicateurs, au vu des premières interventions, nous aurons un débat en séance. S'il n'existe pas de baguette magique, la puissance publique doit être garante de la contractualisation. Même s'il y a une volonté d'inverser la tendance, les rapports de force, parfois déguisés, risquent de perdurer.
Je regrette que les pouvoirs publics ne soient pas suffisamment présents sur la question de la garantie du respect des indicateurs.
Enfin, la problématique foncière est absente de ce texte, alors que c'est un enjeu important pour l'installation de nombreux jeunes agriculteurs, notamment en matière d'endettement.
Par ailleurs, un certain nombre de pratiques agricoles sont liées aux problématiques du prix et de l'endettement, et poussent un certain nombre de nos agriculteurs à des pratiques intensives peu respectueuses de l'environnement. On peut regretter que ce sujet ne soit pas traité dans le texte.
Mme Patricia Morhet-Richaud . - Monsieur le ministre, au risque d'être redondante, je voudrais vous interroger sur quelques points.
Si certaines mesures contenues dans le projet de loi sont porteuses d'espoirs, nos agriculteurs attendent une politique agricole pragmatique qui corresponde à leurs besoins et qui ne se limite pas aux seules relations commerciales.
Nos agricultrices et nos agriculteurs souffrent, vous le savez. Ils attendent des propositions concrètes en matière de compétitivité, de simplification administrative, de coût du travail, de revalorisation des retraites, ou encore de soutien à l'exportation et de protection des terres agricoles.
Croyez-vous sincèrement que ce texte offre une véritable solution à ce secteur économique en souffrance ?
S'agissant des produits phytosanitaires, existe-t-il une alternative au glyphosate ? Une des pistes avancées est la mécanisation. Or cette pratique entraînera un surcoût de production. Comment l'agriculture française pourra-t-elle dans ce cas être compétitive ? Où en est la recherche à ce sujet ?
Enfin, alors que le pastoralisme est synonyme d'élevage extensif, le plan national d'action 2018-2023 relatif au loup et aux activités d'élevage prévoit des mesures de protection des troupeaux de plus en plus restrictives. Dans ce contexte, pensez-vous que ce mode d'élevage ait encore de l'avenir en France, notamment dans les Alpes du sud ?
Mme Nadia Sollogoub . - Monsieur le ministre, quelle place les acteurs de la prévention dans le milieu agricole trouveront-ils dans ce texte ? Si l'on a aujourd'hui des filières d'excellence dans notre agriculture, c'est parce que certains ont travaillé à la prévention des épizooties et des épidémies.
Par ailleurs, les vétérinaires, que nous respectons beaucoup dans cette maison, et que le milieu agricole respecte également, sont des acteurs très importants de nos territoires, en particuliers ruraux.
J'attire votre attention une fois de plus sur la situation des vétérinaires sanitaires. Au cours des années 1955 à 1990, le cheptel français était menacé par des épidémies. C'est parce que l'État s'est appuyé sur les vétérinaires, leur a confié des missions de vaccination de masse et de prophylaxie que le cheptel a pu être protégé.
Or l'État a oublié de cotiser pour leurs retraites. L'erreur a été reconnue tardivement, l'État a été condamné à la réparer, et environ un millier de vétérinaires ont été indemnisés. On oppose aux 600 derniers une clause de prescription qui nous semble particulièrement injuste.
Les vétérinaires, en milieu rural, sont soit au « cul des vaches », soit sur les routes, soit en train d'accomplir des missions concrètes. Ce ne sont pas des professions habituées à remplir des dossiers d'indemnisation. Nous demanderons donc, à travers des amendements, réparation de cette situation que vous aurez, j'en suis certaine, à coeur d'étudier avec bienveillance.
M. Jean-Marie Janssens . - Monsieur le ministre, les restaurateurs auront l'obligation de proposer des doggy bags à leurs clients qui en feront la demande à partir du 1 er juillet 2021. Je ne peux que me féliciter de la proposition du Gouvernement de réduire le gaspillage alimentaire, véritable enjeu de société. Toutefois, nous ne pouvons ignorer les contraintes et les coûts que cette mesure va engendrer pour les restaurateurs. À cela s'ajoute l'impact écologique que représentent les doggy bags , nouvelle source de déchets.
Enfin et surtout, je m'inquiète de la surabondance de normes qui freine l'activité économique au lieu de la stimuler. Une incitation en remplacement d'une obligation ne serait-elle pas plus pertinente ?
Ma seconde question porte sur l'obligation d'un minimum de 50 % de produits agricoles locaux dans la restauration collective publique à l'horizon 2022. Ce surcoût de 90 euros par élève est à la charge des familles, ce qui risque d'entraîner des difficultés financières pour les plus modestes. Comment envisager que ce surcoût puisse être pris en charge par les communes, les départements ou les régions, alors que les dotations de l'État s'affaiblissent ? Quelles solutions viables de financement proposez-vous ?
M. Henri Cabanel . - Monsieur le ministre, nous ne pouvons pas parler d'avenir de l'agriculture sans aborder la question centrale du foncier. Sans terre agricole, il n'y a pas d'agriculteur ni d'agriculture ! Cette dimension aurait dû être au coeur de votre projet de loi. À l'Assemblée nationale, vous avez renvoyé toutes ces questions à une future loi traitant de ce sujet. Nous en prenons acte. Permettez-moi de vous dire qu'il faudra prendre le temps nécessaire pour traiter ce sujet éminemment important.
Toutefois, le présent projet aurait pu permettre de faire adopter des mesures d'urgence, cette loi devant n'entrer en vigueur que dans un ou deux ans, voire trois.
Il s'agirait par exemple de mettre fin le plus rapidement possible à toute tentative d'accaparement de terres agricoles pour des motifs qui reviendraient à remettre en cause notre modèle agricole, voire notre souveraineté nationale.
Les députés de la Nouvelle Gauche, à l'Assemblée nationale, ont déposé un amendement permettant d'introduire un veto ou un système d'autorisation préalable pour les investissements étrangers dans le secteur agricole. Il s'agissait d'étendre le décret Montebourg audit secteur. Vous avez refusé cet amendement sans apporter davantage de précision. Pouvez-vous nous indiquer les raisons de votre choix ?
M. Jean-Claude Tissot . - Tout le monde a adhéré aux états généraux de l'alimentation et au discours de Rungis, que les syndicats avaient même trouvé bon.
Au lendemain de la discussion du texte à l'Assemblée nationale, on se rend compte que les objectifs ne sont pas atteints.
On peut déplorer que la réflexion n'ait pas été globale. On a trop ciblé, à mon sens, des questions et des réponses. Aujourd'hui, quoi qu'on dise, on ne peut plus parler d'agriculture sans parler d'environnement ou de santé.
Ne stigmatisons pas le producteur. On l'a trop mis en avant. Aujourd'hui, on ne sait pas fabriquer un prix avec les outils dont on dispose. Prenons les saisonnalités : j'ai été longtemps producteur d'agneaux. Je les vendais mieux à Pâques qu'en juin. Quel prix de revient retenir ? Comment va-t-on l'écrire dans la loi ?
Nous sommes dans le viseur de la société. Fin juin, on saura quelle orientation le Gouvernement aura voulu donner à cette loi. On parlera bien sûr d'environnement, de bien-être animal, d'agriculture, de foncier - c'est indispensable -, mais j'ai peur qu'on n'ait pas de réponse claire.
Êtes-vous donc prêt, monsieur le ministre, à modifier votre texte en conséquence au lendemain du passage au Sénat ?
M. Laurent Duplomb . - Monsieur le ministre, c'est l'agriculteur qui parle ici, car j'ai conservé mon activité d'élevage.
Quel gâchis ! Nous sommes tous d'accord avec le fait que l'agriculture est en crise économique, sociale et morale. Personne n'en a véritablement parlé, mais la France n'a plus aucune croissance positive en agriculture. Le montant des exportations plafonne à 58 milliards d'euros là où l'Allemagne se situe à 72 milliards d'euros, et les Pays-Bas à 80 milliards d'euros.
Nous sommes stables en matière de productions céréalière et porcine mais, alors qu'on exportait autrefois nos produits vers l'Allemagne, c'est aujourd'hui l'Allemagne qui exporte ses produits chez nous. La production laitière est stable. Depuis que les quotas ont été supprimés, la production de lait en Europe a augmenté de 13 milliards de litres. En France, pas un litre de plus !
Tout ceci a conduit à une augmentation incessante de nos importations. En restauration collective, 85 % des poulets sont importés et 70 % de la viande de boeuf l'est également. Il me semble qu'au vu de cette situation, on aurait besoin d'une vraie loi agricole, une loi qui offre un avenir à nos agriculteurs, qui les rende fiers de continuer à faire leur métier. Or c'est exactement le contraire ! L'article 1 er va régler à la marge quelques points qui ne changeront rien à la problématique de la productivité de l'agriculture et de la rémunération.
On a assisté à 72 heures de défouloir à l'Assemblée nationale autour du principe du bien-être animal et des phytosanitaires. Les agriculteurs ont été choqués par les débats qui ont eu lieu dans cet hémicycle. Un agriculteur n'achète pas des produits phytosanitaires pour faire plaisir aux lobbys , mais parce qu'il en a besoin pour protéger ses cultures.
Comment redonner du sens à la politique agricole française alors qu'on crucifie le modèle hexagonal, qu'on accepte des accords avec le Mercosur et qu'on vote une loi qui ne fait que mettre en avant nos défauts dans ce secteur, sans jamais parler de nos qualités ?
Mme Élisabeth Lamure . - Monsieur le ministre, dans le texte sorti de l'Assemblée nationale est apparu un nouveau titre II bis « mesures de simplification dans le domaine agricole ». A priori , c'est une très bonne chose. À la lecture, c'est plutôt décevant, et je crains qu'il ne s'agisse davantage de « mesurettes » que de mesures fortes.
Pouvez-vous dire quelles sont les simplifications que présente ce texte ? En contrepartie, de nouvelles obligations et de nouvelles règles vont peser sur les agriculteurs.
Vous avez évoqué la fiscalité agricole dans votre propos liminaire, et plus particulièrement la transmission des exploitations. Nous allons débattre demain d'un texte sur la transmission des entreprises. C'est tout aussi important dans le domaine agricole. Est-ce un point que vous pourriez aborder dans ce texte ou le sujet sera-t-il reporté ? J'ai cru comprendre que vous étiez en discussion avec d'autres acteurs à ce sujet.
M. Roland Courteau . - Monsieur le ministre, un amendement a été adopté à l'Assemblée nationale visant à renforcer l'étiquetage du pays d'origine sur les bouteilles de vin. Il s'agit d'éviter que le consommateur soit induit en erreur en cas d'omission de cette mention. Les cas sont innombrables. Pourquoi vous êtes-vous opposé à cet amendement qui vise à éviter les tromperies et à assurer plus de transparence ?
Concernant le bien-être animal, loin de moi l'idée de faire un procès général à nos abattoirs, mais force est de constater que certains ont des comportements inacceptables, voire barbares, et des pratiques d'abattage indignes. Pourquoi se contenter de vidéosurveillances basées sur le volontariat, comme le suggère l'Assemblée nationale ? Seriez-vous d'accord pour rendre cette vidéosurveillance obligatoire ?
Par ailleurs, la lutte contre le gaspillage alimentaire est une question de première importance. Romain Rolland disait que tout passe par les bancs de l'école. C'est assurément le cas de la valeur de l'alimentation, notamment économique et marchande, mais aussi culturelle et patrimoniale. Accepteriez-vous des amendements intégrant la lutte contre le gaspillage alimentaire au parcours scolaire ?
Enfin, concernant le glyphosate et son interdiction en 2021, pourquoi refuser d'inscrire cet engagement du Président de la République dans la loi ?
M. Jean-Pierre Decool . - Monsieur le ministre, le premier volet du projet de loi procède à une inversion de la construction des prix. Je m'interroge sur les modalités pratiques de ce nouveau mécanisme. À quelles échelles géographiques seront déterminés les cours de production sur lesquels se basera dorénavant le prix de produits ?
Le diable étant dans les détails, je vous propose un exemple très pragmatique... On sait qu'un élevage de 150 vaches laitières en plaine et un élevage de 50 vaches laitières en montagne ont des coûts de production radicalement différents.
Votre référence en termes de coût de production sera-t-elle basée sur une moyenne régionale ou nationale, une moyenne par taille d'exploitation ou par filière ? Comment allez-vous vous assurer que les prix fixés reflètent les coûts de production de façon équitable ?
Mme Françoise Férat . - Monsieur le ministre, je ne sais si je suis accablée, triste ou les deux à la fois. Je ne rencontre pas les agriculteurs par hasard au cours de mes déplacements : je les côtoie au quotidien.
Je mesure parfaitement la situation de chacun, mais je sais que tout le monde essaie malgré tout d'être force de propositions. J'en veux pour preuve le contrat de solutions qui vous a été soumis, monsieur le ministre. Que veulent nos agriculteurs ? Tout simplement vivre dignement de leur travail ! C'est ce qui nous préoccupe ici.
Le projet de loi a pour objectif initial d'améliorer le revenu des agriculteurs, notamment par la prise en compte du coût de production dans la fixation des prix de vente. De multiples réunions ont rassemblé nombre de participants et ont donné lieu à des milliers de contributions. Pour reprendre ce que disait mon collègue, c'est à mon sens un immense gâchis. Tout ceci pour en arriver là !
Que constate-t-on ? Le texte s'oriente vers toujours plus de contraintes pour les agriculteurs - séparation de la vente et du conseil phytosanitaire, fin des rabais, ristournes et remises, augmentation de la redevance relative à la population, suppression du CICE sans compensation. Vous tentez, cet après-midi, de nous faire partager votre satisfaction. Pardonnez-moi, je ne suis pas complètement convaincue ! Vous allez probablement vous féliciter des avancées qui ont été réalisées. Je ne les nie pas, mais le compte n'y est pas.
La souffrance des agriculteurs est immense, monsieur le ministre, et ce texte, avait suscité bien des espoirs, ainsi que j'ai pu le mesurer dans mon département. Malheureusement, je crains que la déception ne soit encore plus grande !
M. Fabien Gay . - Monsieur le ministre, je ne veux pas empiéter sur les débats qui auront lieu dans l'hémicycle.
Beaucoup de questions ont été traitées et l'on reparlera plus tard de sécurité alimentaire, des surfaces agricoles qui diminuent, de la responsabilisation des grands distributeurs et des quatre centrales d'achats.
Vous avez évoqué le nouveau pacte social - je ne reviens pas sur la question du revenu agricole, au sujet de laquelle je partage les interventions précédentes. Je pense qu'il faut que l'on prenne garde aux mots, car les attentes sont fortes. Nous ne nions pas qu'il existe des avancées, mais on voit mal comment ce texte va améliorer le revenu des paysans, d'autant que votre Gouvernement vient de refuser il y a quelques semaines l'augmentation des retraites agricoles, pourtant adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale ! Pensez-vous vraiment que votre texte réponde aux attentes ?
Par ailleurs, votre légitime ambition apparaît contradictoire avec les traités de libre-échange, comme le CETA, en particulier en matière de souveraineté alimentaire de l'Union européenne et de la France.
M. Guillaume Gontard . - Monsieur le ministre, on peut difficilement parler du projet de loi débattu à l'Assemblée nationale sans aborder en parallèle la renégociation de la PAC 2021-2027. Cette politique agricole qui renvoie à chaque État la responsabilité de l'orientation et disloque le modèle agricole européen n'a plus rien de commune !
Êtes-vous en phase avec ce qu'a déclaré Nicolas Hulot au Sénat dernièrement : « La PAC ne peut plus être centrée uniquement sur les rendements. La course au toujours plus détruit en effet les fondements mêmes de l'agriculture, c'est-à-dire les sols et la biodiversité, ainsi que l'eau. Les aides doivent être centrées sur ce nouveau modèle, à la fois plus protecteur pour la planète et les consommateurs, et plus rémunérateur pour les agriculteurs. »
Partagez-vous les orientations du ministre de l'environnement ?
Comme vient de le dire Fabien Gay, ce projet de loi apparaît en totale contradiction avec les textes sur le CETA et le Mercosur. Quelle suite allez-vous donner à ces deux traités, qui ne manqueront pas d'avoir des conséquences sur le secteur agricole en termes de distorsions de concurrence ?
M. Daniel Laurent . - Monsieur le ministre, comme tous mes collègues, je suis très inquiet pour le monde agricole. Je voudrais que vous nous entendiez, nous, sénateurs des territoires, parlant au nom des agriculteurs, que nous côtoyons tous les jours.
Vous n'êtes pas sans savoir qu'une partie de certaines régions viticoles ont été récemment sinistrées par la grêle - 20 000 hectares en Aquitaine ou en Champagne, dans le Lubéron et à travers toute la France.
En février dernier, ainsi que la semaine dernière, je vous ai déjà posé une question à ce sujet pour qu'on revoie la fiscalité agricole, qui constitue un sujet urgent. Il conviendrait aussi d'étudier la création d'une réserve de gestion des risques sur tous les territoires, indispensable pour préserver la viticulture.
Par ailleurs, pouvez-vous m'apporter des précisions concernant le « cagnottage » ? Vous avez indiqué que le code rural et la pêche maritime protègent déjà les produits bénéficiant d'une AOC ou d'une IGP contre les pratiques de détournement. Le champ des ordonnances prévues à l'article 9 devrait inclure cette problématique. Quelle assurance pouvez-vous apporter à la profession sur cette question ?
Enfin, je rappelle que l'activité de saliculture constitue bien une activité agricole, mais qu'elle n'est toujours pas reconnue en tant que telle. Vous m'aviez assuré que vous y porteriez une attention toute particulière. J'espère que ce sera le cas prochainement.
M. Daniel Gremillet . - Monsieur le ministre, je rejoins les propos de notre rapporteur, qui vous a invité à être prudent : n'oublions pas d'où l'on vient ! Cela fait 61 ans que le traité de Rome a été signé. Il y a 61 ans, la France avait faim. L'Europe des Six avait faim. Les paysans et les territoires français ont nourri le peuple européen et le peuple français.
L'espérance de vie a augmenté de manière extraordinaire. Prenons garde de ne pas faire injure au travail des femmes et des hommes des générations précédentes. J'ai horreur du mot « durable » : le durable existait avant nous ! On ne travaille qu'en fonction du savoir du moment.
Monsieur le ministre, quelle est votre ambition pour les agriculteurs et pour l'agriculture française ? C'est là la véritable question ! Vous prétendez vouloir assurer le revenu des agriculteurs français. Comment allez-vous vous y prendre ?
En tant que ministre, vous défendez les agriculteurs français face aux autres membres de l'Union européenne. Or le Sénat a voté une résolution favorable aux échanges internationaux à condition que chacun soit soumis aux mêmes contraintes. Comment allez-vous faire, avec ce qui est inscrit dans le projet de loi, pour ne pas mentir aux agriculteurs et aux consommateurs français ?
Mme Angèle Préville . - Monsieur le ministre, je voudrais évoquer le gel du vignoble de Cahors l'année dernière, qui a mis en danger les viticulteurs du Lot. Ces phénomènes sont de plus en plus nombreux. Peut-être faudra-t-il envisager de les prendre en compte et changer les modes actuels d'indemnisation des viticulteurs.
Par ailleurs, je salue votre engagement en faveur de 50 % de produits bio et des circuits courts dans la restauration collective. C'est vertueux. Lorsque j'étais élue départementale, le collège de mon secteur y est passé en deux ans. Grâce à un principal de bonne volonté et à des réunions pour que tout le monde se rencontre, on a atteint 40 % en deux dans. Il est donc possible d'y arriver. C'est mieux pour tout le monde. Les enfants mangent mieux, et les producteurs peuvent trouver des débouchés par le biais de la contractualisation. Il n'y a là que du positif.
Enfin, l'article 11 ter vise à interdire dans les cantines les contenants plastiques, qui constituent des perturbateurs endocriniens. C'est une très bonne chose ! Des chercheurs américains ont mis en évidence le fait que les cellules cancéreuses cultivées dans des tubes à essai en plastique se développent plus vite que dans des tubes en verre. Il n'y a rien de plus à ajouter !
Je rappelle que les matières plastiques ont également un impact très important sur les océans. Je rappelle que celles-ci ne sont pas biodégradables, mais se divisent en se cassant. Depuis qu'on les utilise, les morceaux sont devenus si petits qu'on en retrouve partout !
M. Claude Bérit-Débat . - Ma question fait écho à ce qu'a dit Michel Raison au sujet de la filière du lait. La fin des quotas laitiers a obligé la profession à s'organiser. C'est pourquoi je suis heureux d'avoir pu accompagner une AOP dans son parcours vers une reconnaissance nationale.
Quelle place ces AOP vont-elles prendre dans la représentation interprofessionnelle ? Est-on assurée qu'elles y seront ? Le prix de départ sera-t-il bien celui du producteur ?
M. Joël Labbé . - Monsieur le ministre, je prévois un certain nombre d'amendements sur ce texte qui, je l'espère, sera enrichi par le Sénat, dont c'est le rôle.
Je suis satisfait de la mesure en faveur de 50 % de produits bio, sous signe de qualité et de produits locaux. C'est extrêmement important. Se donner les moyens d'y parvenir, c'est aussi se projeter dans l'avenir. Je déposerai un amendement pour lequel j'aurais besoin de votre soutien, monsieur le ministre, sur la façon d'y arriver.
Un outil extraordinaire a été intégré à la loi d'avenir agricole : il s'agit des projets alimentaires territoriaux. Ils permettent, partout où ils sont mis en place, d'accélérer la relocalisation de l'alimentation. Un amendement que je déposerai visera à rendre obligatoire pour 2022 voire 2023 la couverture du territoire national par des projets alimentaires territoriaux.
S'agissant par ailleurs des apiculteurs, Sandrine Le Feur et moi-même avons été déçus de la réponse que vous avez apportée à ce sujet lors des questions orales au Gouvernement.
Les apiculteurs vont manifester demain aux Invalides. Je serai à leurs côtés avec un certain nombre de collègues. Une véritable réponse est nécessaire s'agissant de la création d'un fonds d'urgence destiné à permettre aux apiculteurs de continuer leur activité.
M. Jean-Marc Boyer . - Monsieur le ministre, nous avons à deux reprises discuté au Sénat de la revalorisation des retraites agricoles. Nous avons à chaque fois eu droit à un vote bloqué du Gouvernement, et Mme la ministre de la santé et des affaires sociales refuse toute avancée sur ce dossier alors que nous étions quasiment unanimes. Ce refus a été ressenti comme profondément méprisant.
Quel est votre position personnelle, monsieur le ministre, sur ce dossier important pour de nombreux retraités agricoles et pour la reconnaissance que nous devons avoir envers nos anciens après toute une vie de labeur ?
Par ailleurs, j'ai cru lire que l'avenir de l'enseignement agricole était en péril et pourrait disparaître d'ici 2030 au motif qu'il ne serait pas suffisamment en phase avec les nouvelles orientations des métiers de l'agriculture. J'espère qu'il s'agit de fake news !
J'ai fait toute ma carrière dans l'enseignement agricole. Celui-ci a toujours été très innovant, à la pointe des méthodes pédagogiques, très souvent copiées par l'éducation nationale.
Le dernier exemple est celui du contrôle continu pour le baccalauréat : l'éducation nationale a l'impression d'avoir inventé l'eau chaude, alors qu'il existe depuis au moins quinze ans dans l'enseignement agricole.
J'aimerais connaître votre sentiment à ce sujet.
Mme Annie Guillemot . - Monsieur le ministre, peut-on continuer à ne rien faire pour les retraites et attendre encore deux ou trois ans ?
Par ailleurs, face au mal-être des animaux, peut-on renoncer à installer des caméras partout ? Ce serait légitime ! C'est, je crois, une attente de toute la population.
Troisièmement, vous avez dit que l'on devait rendre leur dignité aux agriculteurs. Bien évidemment ! Cela étant, ceci aura des conséquences sur les populations qui devront subir la hausse des prix si rien n'est fait pour contraindre les grands distributeurs. On voit ce que cela peut faire quand on enlève 5 euros d'APL aux ménages. Le Gouvernement doit réfléchir aux conséquences de la hausse éventuelle du prix du lait, de la viande bovine et de la volaille, même s'il faut favoriser la hausse des prix de production.
Enfin, en matière de restauration scolaire, beaucoup de maires s'élèvent contre les quotas. Outre le fait que le code des marchés publics ne prévoit pas d'indicateurs géographiques - alors que certaines communes connaissent aujourd'hui de graves difficultés - la structuration des filières est insuffisante. Je crois d'ailleurs que l'AMF vient de vous saisir à ce propos.
Le Conseil d'État vient d'estimer que les normes posaient problème. Allez-vous les conserver ? Sans structuration suffisante, on risque en effet de se tourner vers l'achat de produits importés, au mieux européens. Aujourd'hui, 72 % des produits bio proviennent de l'étranger !
Mme Sophie Primas , présidente. - Avec des normes qui ne sont probablement pas les nôtres !
Mme Françoise Cartron . - Monsieur le ministre, même si on a beaucoup pointé le malaise des agriculteurs, je connais dans mon département beaucoup de jeunes agriculteurs totalement innovants qui s'installent et ont envie de s'investir dans cette profession. Ils se trouvent toutefois souvent démunis, en mal d'accompagnement où en difficulté les premières années. Existe-t-il une réflexion pour les accompagner plus spécifiquement, en particulier en matière de formation ?
Par ailleurs, quelle est la place des lycées agricoles, qui sont de véritables plateformes ? Comment peut-on les associer en tant que pôles de ressources, diffuseurs de bonnes pratiques et d'informations ?
Mme Anne-Marie Bertrand . - Monsieur le ministre, vous nous avez dit en introduction que vous désiriez une agriculture prospère et compétitive. Nous sommes tous d'accord avec vous sur ce point.
Les producteurs de fruits et de légumes connaissent déjà la contractualisation. Cependant, l'affichage environnemental des denrées alimentaires et l'indication du nombre de traitements par des produits phytosanitaires sur les fruits et légumes, qui figurent à l'article 11, m'inquiètent. C'est techniquement impossible !
Tout dépend des produits - bio ou non - et de la parcelle. Ces mesures ne constituent-elles pas de nouvelles distorsions de concurrence par rapport aux produits importés, qui ne seront pas soumis aux mêmes règles ?
M. Franck Montaugé . - Monsieur le ministre, dans mon département, le Gers - mais cela vaut pour d'autres territoires -, un drame absolu est en train de se nouer, un drame économique, social et moral.
C'est un drame économique, parce qu'on va connaître un million d'euros de perte sur 6 millions d'euros d'indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN). C'est un drame social qui va toucher 140 éleveurs et leur famille. C'est enfin un drame moral comme - hélas - l'agriculture française en connaît beaucoup depuis longtemps, car les suicides que nous déplorons nous interrogent tous.
Sur ces territoires, malgré les critères ubuesques des règlements européens, on ne peut faire que de l'élevage. Pour la plupart des 140 éleveurs qui peinent tout au long de l'année, il n'y aura d'autre possibilité que d'arrêter. On empêchera également de jeunes agriculteurs passionnés d'élevage de prendre la suite de leur père.
Que comptez-vous faire par rapport à cette situation dramatique, et notamment dans le cadre futur de la PAC qui se profile à l'horizon, avec la latitude qui est aujourd'hui laissée aux États en la matière ? On a éprouvé des difficultés à discuter avec vous sur ce sujet, monsieur le ministre. Tous les élus, tous les représentants des filières et tous les syndicats se sont mobilisés, mais nous n'avons que très peu progressé, voire pas du tout.
Enfin, le dispositif prévoit que la sortie de la carte des zones défavorisées se traduira pour les éleveurs concernés par 80 % d'indemnisations d'ICHN la première année et 20 % la seconde. Cependant, la référence étant 2013, cette indemnisation ne sera que de 30 % et 10 %. C'est une véritable insulte - je pèse mes mots - pour ces 140 éleveurs et pour les Gersois dans leur ensemble, très attachés à leur agriculture. Que comptez-vous faire à ce sujet ? C'est un exemple paroxystique de la nécessité de soutenir l'agriculture ! Vous avez les moyens d'agir : faites-le ! Merci.
Mme Sophie Primas , présidente. - Monsieur le ministre, vous avez la parole.
M. Stéphane Travert, ministre. - Merci, madame la présidente.
Certains d'entre vous ont abordé des sujets relevant de la PAC. Nous débattrons d'une proposition de résolution européenne tout à l'heure dans l'hémicycle à ce sujet. J'aurai l'occasion de revenir sur la position française et la manière dont nous comptons travailler pour défendre le revenu de nos agriculteurs, car c'est bien ce dont il s'agit à travers le texte que nous vous présentons.
Je pèse mes mots, car je suis pragmatique : je connais bien la situation de l'agriculture, notamment celle de l'élevage et des producteurs de lait, puisque j'ai la chance de vivre au milieu d'eux.
J'ai dit que je souhaite que l'on crée un nouveau pacte social avec les agriculteurs. Ce ne sont pas de vains mots : nous avons en effet besoin d'encourager notre agriculture et d'en parler de manière positive. Jamais vous n'entendrez dans ma bouche une quelconque mise en cause de ce que peuvent faire les agriculteurs. Nous avons besoin de leur accorder cette reconnaissance et de les accompagner dans la transformation de l'agriculture que nous vivons.
Nous sommes dans une période de transition. La société civile prend à bras-le-corps un certain nombre de sujets. Lorsqu'on parle d'alimentation saine et durable, cela ne signifie pas que nous n'avons pas eu jusqu'à présent une alimentation saine, mais que nous devons améliorer encore la qualité, monter en gamme, car ceci peut permettre aux agriculteurs d'avoir, demain, des niveaux de revenus supérieurs, d'investir et d'innover pour continuer à travailler, d'avoir de la visibilité.
Un certain nombre des points que vous avez abordés entrent dans le cadre de la loi que nous aurons à débattre ensemble. Je suis là pour enrichir le texte avec vous. Je ne me présente pas à vous avec une position totalement fermée - sinon l'exercice ne sert à rien !
Étudions comment nous pouvons, de manière simple et concrète, faire en sorte que l'objectif du texte de loi soit, une fois nos travaux achevés, totalement respecté.
Ce texte, vous l'avez compris, constitue une brique. Nous sommes aujourd'hui en train de construire la maison de l'agriculture française. Cette maison doit reposer sur quatre murs, avec des fondations solides - et elle en dispose.
La fiscalité correspond à un autre pan de mur. Nous ne l'abordons pas dans ce texte. C'est un sujet sur lequel nous travaillons avec Bruno Le Maire. Les propositions issues du groupe de travail formé par le Sénat, l'Assemblée nationale et les professionnels seront étudiées fin juin ou début juillet, pour être ensuite intégrées dans la prochaine loi de finances.
Nous ne parlons pas non plus de foncier dans le texte car il existe une réflexion parlementaire sur le sujet sur laquelle nous continuons à travailler. Nous savons qu'il y a derrière des enjeux éminemment importants, notamment la question de l'accaparement des terres, qui doit permettre aux jeunes d'avoir accès aux terres pour les exploiter, voire à des personnes qui ne sont pas issues du métier de s'installer, par exemple en agriculture biologique, sans avoir à payer le double. Pour porter la surface agricole utile en agriculture biologique de 6,5 % à 15 %, nous avons besoin d'encourager les conversions. Cela nous permettra de structurer l'offre.
Ce projet de loi n'aborde pas non plus le sujet des retraites agricoles, non parce que nous traitons le sujet par le mépris ou que nous nous désintéressons de la question, mais nous avons choisi de prendre ce sujet éminemment important à bras-le-corps.
Jean-Paul Delevoye a ouvert une concertation sur les retraites. Nous avons décidé de faire en sorte que les indépendants puissent demain cotiser au même titre que les personnes relevant du régime général. Or les agriculteurs sont des indépendants. Nous travaillons donc de façon globale la question de leurs retraites avec celle des indépendants. La retraite des agriculteurs sera bien évidemment traitée dans le cadre du texte sur l'évolution des retraites.
M. Pierre Cuypers . - Cela ne peut pas attendre !
M. Stéphane Travert, ministre. - J'entends parfaitement ce que vous dites, mais c'est la manière de faire que nous avons choisie. Cela n'empêche pas d'apporter à notre agriculture des solutions dès maintenant. C'est l'objectif du projet de loi. Ce n'est pas une loi qui oriente, mais une loi qui est faite pour agir sur la question des prix et d'une alimentation plus saine et plus durable répondant aux demandes de la société.
Nous ne parlons évidemment pas dans ce texte de tout ce qui est en rapport avec les enjeux liés aux accords commerciaux. Je sais que c'est un sujet important, qui inquiète nos agriculteurs - et j'aurai l'occasion d'y revenir dans le débat tout à l'heure.
Nous ne parlons pas de formation, même si elle est très présente, puisque nous comptons, pour accompagner le changement des pratiques alimentaires et assurer une meilleure alimentation, faire en sorte, dans le titre 2, que l'école soit un des pivots essentiels de cette formation à l'alimentation - manger moins gras, moins salé, moins sucré tout au long de sa vie, avoir des pratiques alimentaires plus saines.
Pour ce faire, nous devons travailler le projet à la racine et faire en sorte que nos agriculteurs ne subissent plus la guerre des prix les plus bas qui nous a entraînés vers une alimentation low cost , avec une diminution de la qualité de l'alimentation. Cela ne remet pas en cause la qualité du travail de nos producteurs, mais le fait de rechercher les prix les plus bas conduit à aller chercher les matières premières à l'extérieur de nos frontières. C'est ce qui a créé ce sentiment de « malbouffe » que vous dénoncez, tout comme nous le faisons.
S'agissant des abeilles, les apiculteurs seront reçus demain au ministère. Nous avons totalement conscience de la difficulté qu'ils rencontrent aujourd'hui. Qu'avons-nous fait à ce sujet ? Nous avons fait en sorte de créer un guichet unique, un observatoire de la mortalité des abeilles mellifères. Nous avons fait en sorte que chaque apiculteur qui vient déclarer la disparition d'un de ses essaims puisse bénéficier d'une visite vétérinaire. Nous avons besoin d'en connaître les causes précises. Les pesticides sont certes en cause, mais d'autres explications peuvent en être à l'origine de cette surmortalité. Nous avons besoin de les connaître. Est-ce la qualité de l'air ou autre chose ? Nous avons besoin de connaître l'ensemble des causes pour répondre à la détresse des apiculteurs.
Nous avons travaillé avec l'interprofession et travaillons avec l'institut technique. Pour le sauver, nous avons doté celui-ci de 400 000 euros.
Ce sont des sujets connexes au projet de loi, mais extrêmement importants. Ils figurent dans l'environnement de ce projet de loi, car nous souhaitons que celui-ci puisse apporter des solutions aux points que vous avez soulevés.
Je voudrais à présent répondre de manière plus précise à l'ensemble de vos questions. On a dit que j'ai été bavard durant la discussion du projet de loi à l'Assemblée nationale, mais ces 77 heures de débats n'ont pas constitué du bavardage : il y a aussi eu des réflexions importantes sur le fond. Ceci a été l'occasion d'expliquer ce que nous voulions faire, et je prendrai toujours le temps nécessaire pour répondre à l'ensemble des questions que vous aurez à poser pendant l'examen du projet de loi.
Tout d'abord, l'augmentation du SRP fait partie du dispositif global issu des états généraux de l'alimentation, avec l'inversion de la construction du prix, la cascade, l'encadrement des promotions.
Le relèvement du SRP peut entraîner une baisse des marges des distributeurs, mais il n'y a pas de fatalité à ce que cette marge reste chez le distributeur. Ce sont les engagements que les distributeurs ont pris, à travers les états généraux. Nous sommes là pour veiller qu'ils puissent être tenus.
Nous ne voulons pas augmenter les marges, mais les équilibrer, notamment concernant les produits agricoles. Les marges sur une célèbre pâte à tartiner ou sur les sodas sont aujourd'hui très faibles. On compense cette faiblesse par des volumes de vente très importants. Pendant ce temps, on applique des taux de marge élevés sur les produits agricoles qu'on a achetés à des prix très bas.
À travers l'inversion de la construction du prix et la contractualisation, nous voulons faire en sorte d'avoir une marge lissée sur l'ensemble des produits, de manière que les distributeurs jouent le jeu. Ils seront poussés à le faire du fait des engagements qu'ils ont pris.
M. Michel Raison , rapporteur. - S'ils prennent des grosses marges sur les produits agricoles, le seuil de revente à perte ne jouera que sur le Nutella !
M. Stéphane Travert, ministre. - Non, pas forcément. Il est nécessaire d'équilibrer les marges, mais avec des prix d'achat revus de manière que les produits agricoles ne jouent pas le rôle d'une variable d'ajustement pour reconstituer les marges de la grande distribution.
Ces mesures tiennent compte des engagements pris par tous les acteurs durant les états généraux de l'alimentation. De même, nous recourons aux ordonnances du fait de la demande des professionnels.
Le relèvement du seuil de revente à perte ne doit pas être pris isolément. L'ensemble des outils, avec la construction inversée, doit permettre le « ruissellement » du revenu des agriculteurs, pour reprendre le terme que vous avez employé tout à l'heure.
Par ailleurs, le cadre du recours aux ordonnances est connu. Les arbitrages ont été rendus : 10 % pour le SRP et 25 % à 35 % pour les promotions. Néanmoins, l'écriture législative est complexe et technique. Nous souhaitons une expérimentation sur deux ans sur le SRP et l'encadrement des promotions. Les ordonnances nous permettent d'avoir le temps de travailler le contenu avec les parlementaires, mais de prendre également le temps de la négociation et de la concertation, afin de trouver les mesures les plus simples et les plus efficaces.
Quant au contrôle des négociations et de ce qui est fait à l'étranger, le code du commerce s'applique déjà sur les transactions hors de France concernant les ventes sur le territoire national. Une jurisprudence récente l'a confirmé.
Nous avons travaillé avec le groupe UDI, Agir et indépendants à l'Assemblée nationale pour trouver des moyens supplémentaires afin d'éviter la concentration des grandes surfaces et pouvoir agir lorsque cela contrevient à la question du revenu de nos agriculteurs.
Quant aux indicateurs de prix, la responsabilité relève des filières. Nous souhaitons responsabiliser l'ensemble des filières et des interprofessions, qui ont pris des engagements à ce sujet. Nous recevrons les filières dans les jours à venir pour voir avec elles où elles en sont.
Ces indicateurs seront librement choisis par l'ensemble de la filière, de l'amont à l'aval. Les agriculteurs seront dedans, avec les OP ou les AOP. Une discussion aura lieu. Il faudra trouver des voies de compromis.
Les indicateurs peuvent aussi s'établir par bassin. Cela a fort bien été dit tout à l'heure : quand vous produisez du lait, le coût de collecte dans la plaine normande est radicalement différent de celui de la collecte en zone de montagne. On ne peut être sur un modèle national. Il faut être capable de réagir par bassin de production. Nous avons besoin d'amener nos producteurs à se regrouper dans des organisations et de renforcer celles-ci afin de peser sur les négociations avec le premier acheteur, que ce soit un distributeur ou un transformateur. C'est en ce sens que nous souhaitons accompagner nos agriculteurs.
Il ne faut pas se focaliser sur le coût de production. Les indicateurs prennent aussi en compte l'évolution des marchés. Il existe un certain nombre de critères, qui ne sont pas forcément les mêmes d'un territoire à l'autre, d'un bassin de production à l'autre, d'une filière à l'autre.
Nous aurons l'occasion de revenir sur les projets alimentaires territoriaux. Au Salon de l'agriculture, j'ai décerné des prix à des projets alimentaires territoriaux de qualité. On a besoin de structurer l'offre pour répondre à l'objectif de 50 % de produits bio, locaux ou sous signe de qualité dans la restauration collective.
Nous avons aussi un travail à mener sur nos filières nationales. 70 % de la viande bovine servie en restauration collective ne provient pas de France. Il y a là beaucoup à faire en matière d'investissements pour pouvoir fournir ce secteur.
Nous allons bien évidemment travailler sur la formation des acheteurs publics, modifier le cas échéant le code des marchés publics pour faire en sorte de disposer de tous les outils afin que lesdits acheteurs puissent choisir, sur leur territoire, les producteurs capables de fournir les restaurants scolaires ou les restaurants d'entreprises.
Nous avons donc besoin de structurer l'offre avec des produits locaux, à travers l'ensemble des filières, pour répondre à cet objectif.
L'accompagnement financier des projets alimentaires territoriaux par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation représente 1 million d'euros par an. Ce n'est donc pas un problème de financement.
La question du fonds d'indemnisation des victimes de pesticides, madame Bonnefoy, n'est pas une question abordée à la légère. En aucune façon nous ne l'avons traitée avec mépris. Nous n'avons pas voulu rester inactifs en repoussant l'amendement proposé à l'Assemblée nationale. Nous avons voulu améliorer la prise en charge opérée par l'intermédiaire des régimes existants. Nous souhaitons travailler sur le tableau des pathologies touchant les agriculteurs, comme les lymphomes ou les affections liées à l'utilisation de certains produits.
La mise en place de tableaux de maladies professionnelles, de façon à disposer d'une assise scientifique plus solide, est l'objet d'une saisine conjointe de l'INSERM et de l'ANSES au sujet des pesticides. Nous allons, en fonction de l'actualisation des données, faire évoluer le tableau des maladies professionnelles en lien avec les produits phytosanitaires. Ceci facilitera le recours des malades pour obtenir les indemnisations nécessaires.
J'aurai tout loisir de revenir avec vous sur ce sujet, si vous le souhaitez. C'est une question que nous souhaitons traiter à travers cet angle, afin d'avancer plus rapidement et régler ainsi au plus vite un certain nombre d'indemnisations.
Mme Sophie Primas , présidente. - Avec votre autorisation, monsieur le ministre, je vous propose de clore cette audition.
Faute de temps, vous n'avez pu apporter de réponses aux questions de tous les sénateurs. Votre cabinet pourra-t-il le faire par écrit ?
M. Stéphane Travert, ministre . - Je suis désolé. Nous leur adresserons en effet un courrier.
La réunion est close à 15 heures 55.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat .