TITRE 1ER

ANTICIPATION DE LA PERTE D'AUTONOMIE

Article 3
(art. L. 233-1 à L. 233-5 [nouveaux] du code de l'action sociale et des familles)
Conférence des financeurs de la prévention
de la perte d'autonomie des personnes âgées

Objet : Cet article a pour objet de créer, dans chaque département, une instance chargée de financer des actions de prévention de la perte d'autonomie auprès des personnes âgées de soixante ans et plus.

I - Le dispositif proposé


Missions et moyens de la conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées

Le présent article constitue la disposition centrale du titre I er relatif à l'anticipation de la perte d'autonomie. Il crée, dans chaque département, une conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées ayant pour mission d'assurer le financement et la programmation d'actions individuelles ou collectives de prévention auprès des personnes âgées de soixante ans et plus. Ces actions ont vocation à intervenir en complément des prestations légales et réglementaires.

L'objectif est de réunir, au sein d'une structure unique, l'ensemble des organismes susceptibles de contribuer au financement de la perte d'autonomie. Un tel dispositif doit également permettre de mutualiser les moyens de ces organismes pour davantage d'efficacité.

Un chapitre III, composé de cinq articles, est inséré au sein du titre III du livre II du code de l'action sociale et des familles. L'article L. 233-5 (nouveau) , dernier de ces cinq articles, prévoit que les modalités d'application de l'ensemble des dispositions du nouveau chapitre seront définies par décret en Conseil d'Etat.

L'article L. 233-1 (nouveau) définit les missions et le champ d'action de la conférence des financeurs. Dans le texte du Gouvernement, ces missions sont au nombre de cinq :

- améliorer l'accès aux équipements et aux aides techniques individuelles favorisant le soutien à domicile ; il est précisé que cette mission peut notamment s'effectuer par la promotion de modes innovants d'achat et de mise à disposition ;

- programmer les aides correspondant au forfait autonomie dont l'article 11 prévoit qu'il a vocation à être versé aux logements-foyers - rebaptisés résidences autonomie - qui ne perçoivent pas le forfait soins, sous réserve de la conclusion d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (Cpom) avec le département ;

- coordonner et appuyer des actions de prévention mises en oeuvre par les services d'aide et d'accompagnement à domicile intervenant auprès des personnes âgées ;

- encourager des actions d'accompagnement des proches aidants des personnes âgées en perte d'autonomie ;

- favoriser le développement d'autres actions collectives de prévention.

Pour exercer ces missions, les conférences disposeront d'une enveloppe de financement correspondant à une partie du produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa) dont l'article 4 prévoit qu'elle sera versée à la section V du budget de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). L'étude d'impact, qui détaille les modalités d'utilisation de la Casa sur la base d'un produit estimé de 645 millions d'euros, indique que 140 millions d'euros devraient être consacrés aux aides individuelles et collectives de prévention et 40 millions d'euros au forfait autonomie.

Rien n'empêche que s'ajoutent à ces enveloppes des financements complémentaires qui seraient attribués par les membres de la conférence des financeurs. La logique même de cette conférence est de permettre la mise en commun des expertises, des projets et des financements dans une optique de mutualisation et, in fine , d'amélioration de l'offre et de la lisibilité des dispositifs de prévention destinés aux personnes âgées de soixante ans et plus.

S'agissant du suivi de l'activité de la conférence des financeurs, l'article L. 233-4 (nouveau) du code de l'action sociale et des familles prévoit la transmission annuelle, par le président du conseil général, d'un rapport d'activité. L'absence de transmission après mise en demeure par la CNSA empêchera tout nouveau versement au titre de la conférence des financeurs.


Les modalités d'allocation des financements accordés par la conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées

L'article L. 233-2 (nouveau) précise qu'au moins 40 % des dépenses consacrées aux aides techniques individuelles et aux autres actions collectives de prévention devront être réservées à des personnes ne remplissant pas les conditions d'éligibilité à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), c'est-à-dire relevant des GIR 5 et 6. L'objectif d'une telle disposition est d'assurer qu'une part substantielle des financements puisse être distribuée en amont de la perte d'autonomie.

S'agissant du bénéfice des seules aides techniques individuelles, des conditions de ressources, variables selon la zone géographique de résidence, seront définies par décret. Ces critères d'allocation s'appliqueront également aux financements complémentaires alloués par la conférence des financeurs.


La composition de la conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées

Dans sa rédaction initiale, le présent article dispose que la conférence des financeurs sera présidée par le président du conseil général. Celui-ci dispose d'une voix prépondérante dans la prise de décision. Elle sera composée :

- de représentants des collectivités territoriales : département et autres collectivités territoriales contribuant au financement ;

- de représentants de l'agence nationale de l'habitat (Anah) et de l'agence régionale de santé (ARS) dans le département ;

- de représentants des régimes de base d'assurance vieillesse et d'assurance maladie et des fédérations des institutions de retraite complémentaire ;

- de représentants des organismes régis par le code de la mutualité.

Le nombre de participants à la conférence des financeurs est volontairement restreint aux seuls organismes directement impliqués dans le financement de la prévention de la perte d'autonomie. Votre commission partage ce choix qui doit permettre de faire de la conférence des financeurs un groupe de travail, réactif et doté d'une véritable capacité de décision.

La gouvernance de la conférence n'est cependant pas fermée puisque ses membres de droit pourront décider, à la majorité, d'autoriser « toute autre personne physique ou morale concernée par les politiques de prévention de la perte d'autonomie » à participer à ses travaux. Une telle disposition pourrait par exemple concerner les représentants des personnes âgées et des retraités. Il convient par ailleurs de noter que l'article 54 bis relatif au conseil départemental de la citoyenneté et de l'autonomie (CDCA), qui regroupera de façon très large l'ensemble des parties prenantes aux politiques du vieillissement, prévoit sa consultation sur le programme défini par la conférence des financeurs.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Sur proposition de sa rapporteure, Mme Martine Pinville, la commission des affaires sociales a précisé l'intitulé du chapitre créé au sein du code de l'action sociale et des familles. Celui-ci s'intitule désormais « Prévention de la perte d'autonomie » et non plus seulement « Prévention ».

A l'initiative de Mme Michèle Delaunay et des commissaires socialistes, il a été prévu, à l'article L. 233-2 (nouveau), que le conseil général puisse déléguer à l'un des membres de la conférence des financeurs la gestion des dépenses relatives aux aides techniques et aux actions collectives de prévention. Les modalités de cette délégation devront alors être fixées par convention, selon des principes définis par décret.

Les missions de la conférence des financeurs ont été complétées en séance publique. A l'initiative de plusieurs députés UMP, il a été ajouté que la conférence des financeurs serait chargée de recenser les initiatives locales. L'Assemblée nationale a également adopté un amendement du Gouvernement indiquant que la conférence des financeurs pourrait appuyer et coordonner les actions de prévention mises en oeuvre par les services polyvalents d'aide et de soins à domicile (Spasad) lorsque ceux-ci interviennent auprès des personnes âgées. Une telle mission d'appui et de coordination était déjà prévue par le texte initial concernant les services d'aide et d'accompagnement à domicile.

Toujours sur proposition du Gouvernement, l'Assemblée nationale a modifié la gouvernance de la conférence des financeurs en confiant sa vice-présidence au directeur général de l'ARS. De cette façon est instauré un copilotage qui reproduit, au niveau de la conférence des financeurs, l'organisation existante en matière de gouvernance du secteur médico-social. Les situations de blocage dans la prise de décision devraient être évitées grâce à la voix prépondérante dont disposera le président.

Enfin, à l'initiative de Mme Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes, et des membres du groupe socialiste, il a été précisé que les données transmises chaque année par le conseil général à la CNSA devraient comporter des indicateurs sexués.

III - La position de la commission

Votre commission salue la création, dans chaque département, d'une conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie. Sa gouvernance resserrée et ses missions clairement définies devraient permettre d'en faire un outil pleinement opérationnel pour mettre en place des mesures ambitieuses pour anticiper les effets du vieillissement.

Sur proposition de ses rapporteurs, elle a adopté un amendement tendant à préciser le contenu des missions de la conférence des financeurs en distinguant ce qui relève du rôle général de la conférence des financeurs et ce qui doit être contenu dans le programme de financement. Le présent article dispose pour le moment que ce programme doit permettre de répondre aux besoins des personnes âgées de soixante ans et plus qui résident dans le département, recensés notamment dans le schéma départemental d'organisation sociale et médico-sociale et dans le projet régional de santé. L'Assemblée nationale a par ailleurs ajouté que la conférence devait recenser les initiatives locales. L'évaluation des besoins et le recensement des initiatives locales doivent intervenir en amont de la définition du programme de financement. C'est ce que prévoit l'amendement adopté par votre commission qui réécrit le premier alinéa de l'article L. 233-1 (nouveau) : « Dans chaque département, une conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées établit un diagnostic des besoins des personnes âgées de soixante ans et plus résidant sur le territoire départemental, recense les initiatives locales et définit un programme coordonné de financement des actions individuelles et collectives de prévention. Les financements alloués interviennent en complément des prestations légales ou réglementaires. » Le contenu du programme de financement, organisé autour de six missions, est ensuite clairement énuméré dans le respect de la position adoptée par l'Assemblée nationale.

Votre commission a ensuite adopté deux amendements de clarification rédactionnelle et de précision ainsi qu' un amendement visant à mieux définir le contenu des rapports d'activité de chaque conférence. Devront y figurer des données sur : le nombre et le type de demandes adressées à la conférence des financeurs ; le nombre et le types d'actions financées ainsi que la répartition des dépenses par type d'actions ; le nombre et les caractéristiques des bénéficiaires de ces actions, cette dernière disposition étant inchangée par rapport à la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 4
(art. L. 14-10-5 du code de l'action sociale et des familles)
Financement des actions de prévention de la perte d'autonomie
par la section V du budget de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie

Objet : Cet article vise à prévoir, au sein du budget de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, les modalités de financement des actions de prévention.

I - Le dispositif proposé


Le budget de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA)

Le budget de la CNSA est construit selon des règles définies à l'article L. 14-10-5 du code de l'action sociale et des familles. Il est initialement composé de six sections. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 en a créé une septième à titre transitoire, destinée à assurer la mise en réserve du produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa). Cette recette a en effet été créée dans la perspective de la mise en oeuvre du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement.

Présentation simplifiée du budget de la CNSA

Produits

Charges

Section I

Financement des établissements et services médico-sociaux, des Maia et des GEM

Sous-section 1

Entre 10% et 14% du produit de la CSA
Contribution de l'assurance maladie

Financement des établissements et services pour personnes handicapées et des GEM

Sous-section 2

40% du produit de la CSA
Contribution de l'assurance maladie

Financement des établissements et services pour personnes âgées et des Maia

Section II

20% du produit de la CSA
Une participation des régimes obligatoires de base d'assurance vieillesse
Une part du produit de CSG affecté à la CNSA

Contribution au financement de l'APA

Section III

Entre 26% et 30% du produit de la CSA

Contribution au financement de la PCH

Section IV

Entre 5% et 12% du produit de CSG affecté à la CNSA
Au maximum 12% du produit de la CSA

Actions innovantes
Formation des aidants et accueillants familiaux
Professionnalisation des métiers de services auprès des personnes âgées et handicapées

Section V

Autres dépenses, notamment d'animation, de prévention et d'études
Section utilisée pour le financement des plans d'aide à l'investissement (PAI)

Sous-section 1

Fraction, définie par arrêté, des produits alloués à la sous-section 2 de la section I

Sous-section 2

Fraction, définie par arrêté, du produit de la CSA

Section V bis

Produit de la Casa

Mise en réserve en vue de l'adoption du projet de loi vieillissement

Section VI

Prélèvement sur les ressources de la CNSA

Frais de gestion


L'affectation du produit de la Casa à la mise en oeuvre de la loi

Le présent article doit être analysé en regard des articles 8 et 38 qui modifient, eux aussi, l'article L. 14-10-5 du code de l'action sociale, respectivement pour prévoir le financement par la section IV d'actions de formation et celui par la section II de la réforme de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA). Le présent article concerne quant à lui le volet prévention du projet de loi.

Ses et 3 ° font passer de sept à six le nombre de sections au sein du budget de la CNSA et suppriment la section V bis consacrée à la mise en réserve du produit de la Casa.

Le complète l'objet de la section V du budget de la CNSA.

Son a) ajoute aux frais d'étude financés par la section V des frais d'expertise. Ce changement s'inscrit dans la logique de l'affirmation du rôle de pilote de la CNSA concernant la mise en oeuvre des politiques de l'autonomie.

Son b) mentionne explicitement comme relevant de la section V les dépenses consacrées par la conférence des financeurs au financement d'aides techniques individuelles, au forfait autonomie et aux actions collectives de prévention. Le champ des dépenses financées par la Casa n'a donc pas vocation à couvrir entièrement celui des missions de la conférence des financeurs : sont exclus la coordination et l'appui des actions de prévention mises en oeuvre par les services d'aide et d'accompagnement à domicile ainsi que l'encouragement des actions d'accompagnement des proches aidants des personnes âgées en perte d'autonomie.

La section V est composée de deux sous-sections, l'une consacrée aux personnes âgées, l'autre aux personnes handicapées. Le b) du complète la sous-section consacrée aux personnes âgées. Il indique en premier lieu que le montant des dépenses de prévention financées par la conférence des financeurs sera fixé chaque année par arrêté des ministres chargés de l'action sociale, de la sécurité sociale et du budget. En second lieu, il complète les recettes de cette sous-section par une partie du produit de la Casa. La fraction de Casa affectée à la sous-section sera définie selon un principe de vases communicants entre sections, peu lisible mais qui s'applique déjà à d'autres dispositions de l'article L. 14-10-5. Ainsi, la sous-section personnes âgées est à l'heure actuelle alimentée par une partie des produits alloués à la sous-section 2 de la section I, qui retrace l'objectif global de dépenses (OGD) pour les personnes âgées. S'agissant de la fraction de Casa qui ira à la sous-section personnes âgées de la section V, la règle d'affectation envisagée est la suivante :

Part de la Casa allouée aux conférences des financeurs pour leurs dépenses de prévention :

= Produit total de la Casa

- Fraction de la Casa consacrée à la réforme de l'APA

- Fraction de la Casa allouée au fonds de compensation du handicap

L'affectation d'une partie du produit de la Casa au fonds de compensation du handicap est elle-même prévue au c) du . Elle doit être fixée par arrêté des ministres chargés des personnes handicapées et du budget.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

A l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un amendement résultant de l'extension des missions de la conférence des financeurs à laquelle il a été procédé à l'article 3. Il a ainsi été prévu que les dépenses de prévention des Spasad puissent être financées par les conférences des financeurs.

III - La position de la commission

Sur proposition de ses rapporteurs, votre commission a tout d'abord adopté un amendement tendant à effectuer, au sein des dispositions qui définissent l'objet de la section V, une coordination avec l'élargissement des missions de la conférence des financeurs aux Spasad, tel qu'il a été proposé par Gouvernement, ainsi qu'avec les changements introduits à l'article 3 par votre commission.

Elle a ensuite adopté un amendement visant à définir précisément quelle part du produit de la Casa ira au financement d'actions de prévention ainsi qu'au fonds de compensation du handicap. La répartition proposée se fonde sur les indications fournies par l'étude d'impact concernant l'utilisation du produit de la Casa : 28 % du produit de la Casa pour les conférences des financeurs ; 0,5 % pour le fonds de compensation du handicap.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 5
(art. L. 14-10-10 [nouveau] du code de l'action sociale et des familles)
Répartition des concours de la caisse nationale de solidarité
pour l'autonomie entre départements

Objet : Cet article a pour objet de définir les modalités de répartition entre départements des financements alloués par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie aux conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie.

I - Le dispositif proposé

Le présent article crée un article L. 14-10-10 (nouveau) au sein du code de l'action sociale et des familles. Celui-ci a pour objet de définir les modalités selon lesquelles les financements alloués par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) aux conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie seront répartis entre départements.

S'agissant du forfait autonomie, les enveloppes seront allouées en fonction du nombre de places dans les résidences autonomie éligibles.

Pour ce qui est des autres actions de prévention (financement des aides techniques individuelles, financement des autres actions collectives de prévention), les concours seront définis en fonction du nombre de personnes âgées de soixante ans et plus dans chaque département.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de la commission

Sur proposition de ses rapporteurs, votre commission a adopté un amendement rédactionnel.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 6
(art. L. 115-2-1 et L. 115-9 [nouveaux] du code de la sécurité sociale)
Action sociale interrégimes des caisses de retraite et échanges d'informations entre organismes de sécurité sociale

Objet : Cet article vise à inscrire dans la loi l'action interrégimes des caisses de retraite en faveur de l'autonomie des personnes âgées en prévoyant que celles-ci signent une convention pluriannuelle avec l'Etat sur ce thème et en autorisant des échanges d'information entre elles, ainsi qu'avec les caisses d'assurance maladie, afin d'améliorer l'accès de leurs ressortissants à des prestations et avantages sociaux qu'elles servent ainsi qu'aux actions qu'elles mettent en oeuvre en vue de prévenir la perte d'autonomie.

I - Le dispositif proposé


L'action sociale interrégimes des caisses de retraites, une dynamique impulsée dès 2011 et qui s'est pleinement concrétisée en 2014

Les caisses de retraite mènent depuis de longues années une politique d'action sociale centrée sur l'accompagnement de l'avancée en âge et la prévention de la perte d'autonomie des retraités. Dans cette perspective, elles prennent notamment en charge grâce à leurs crédits d'action sociale les personnes âgées fragilisées mais non dépendantes (GIR 5 et 6), afin d'éviter qu'elles ne perdent leur autonomie.

Les caisses de retraite peuvent en effet répondre efficacement aux objectifs d'anticipation du vieillissement et de prévention de la perte d'autonomie car elles connaissent précisément les retraités, avec qui elles sont en relation étroite avant même la liquidation de leur pension, et sont capables de repérer ceux d'entre eux qui sont les plus fragilisés pour les sensibiliser au bien vieillir et leur venir en aide afin d'empêcher, ou tout du moins de retarder, la perte d'autonomie.

L'action des caisses de retraite
en faveur de l'autonomie des personnes âgées en chiffres

En 2012, la Cnav, la CCMSA et le RSI ont réalisé pour leurs retraités :

- 550 000 aides au maintien à domicile ;

- 280 000 évaluations globales de leurs besoins ;

- 65 000 aides au retour à domicile après hospitalisation ;

- 200 000 actions collectives de prévention.

Elles ont accordé plus de 80 millions d'euros de prêts à taux zéro pour financer des lieux de vie collectifs, tels que les foyers-logements ou les Marpa (Maison d'accueil rural pour personnes âgées).

Source : Cnav, MSA et RSI

Depuis l'adoption par leurs conseils d'administration d'une délibération commune en mai 2011, la Cnav et les Carsat, qui forment le réseau de l'assurance retraite, la Mutualité sociale agricole (MSA) et le Régime social des indépendants (RSI) ont impulsé une dynamique interrégimes à l'ensemble de leur action de prévention de la perte d'autonomie, qui a donné lieu à la création d'un comité de pilotage de coordination des politiques d'action sociale et de prévention de la perte d'autonomie en faveur des retraités fragilisés Cnav-CCMSA-RSI, le 17 juillet 2012. Cette instance se réunit à échéances régulières pour définir les priorités et actions à mener sur les territoires.

Parallèlement, des structures locales interrégimes ont été créées sous forme de groupement de coopération sociale et médico-sociale (GCSMS), de groupement d'intérêt économique (GIE) ou d'associations au niveau des territoires et couvrent désormais la quasi-totalité des départements.

Un exemple de coordination interrégimes dans les territoires :
le Programme régional interinstitutionnel de prévention Aquitain (PRIP)

Dès 2010, la Carsat Aquitaine, les trois MSA de l'Aquitaine et le RSI Aquitaine ont signé un accord les impliquant conjointement dans l'élaboration d'un programme régional de prévention en faveur des seniors, visant à informer les retraités et futurs retraités sur les thématiques de l'autonomie, à prévenir la perte d'autonomie des personnes fragilisées et à favoriser leur maintien à domicile en proposant aux seniors un parcours de prévention coordonné. La Mutualité Française Aquitaine a rejoint ce partenariat en janvier 2012 et la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) en septembre de la même année.

Les caisses ont délégué la mise en oeuvre de ce programme régional sur le terrain aux associations santé éducation et prévention sur les territoires (Asept), opérateur traditionnel de la MSA, et qui sont au nombre de quatre en Aquitaine (Gironde, Dordogne, Lot-et-Garonne et Sud-Aquitaine, c'est-à-dire Landes et Pyrénées Atlantiques). Les Asept signent des conventions avec les opérateurs locaux (Clic, Ccas, associations d'aide à domicile) pour former leurs salariés à l'animation d'ateliers de prévention. Elles assurent également des missions d'information (conférences-débats, réunions de sensibilisation) et des ateliers du « bien vieillir » consacrés à la forme physique, à la nutrition, au sommeil ou bien encore à la mémoire.

Ces actions ont ainsi touché 6 000 seniors en Aquitaine en 2013 grâce à 72 conférences-débats, 113 réunions de sensibilisation et 252 ateliers.

Source : Cnav, MSA et RSI

L'action sociale interrégimes des caisses de retraite est particulièrement pertinente car elle :

- apporte des gains d'efficacité, grâce à une mutualisation de l'offre de prévention, des outils et des prestations des caisses et à la suppression de dispositifs redondants ;

- garantit une plus grande équité dans la prise en charge des personnes fragiles, quel que soit le régime auquel elles sont affiliées ;

- permet une couverture plus large du territoire et un meilleur accès des retraités à l'aide sociale, grâce à l'utilisation simultanée des trois réseaux des principaux régimes (les Carsat sont davantage présentes en milieu urbain et les caisses locales de la MSA en milieu rural).

Dans le cadre de la concertation relative au présent projet de loi, les trois caisses nationales ont participé aux travaux du comité Avancée en âge présidé par le docteur Jean-Pierre Aquino, au sein d'un groupe de travail dédié à la formalisation d'une offre commune de prévention de la perte d'autonomie.

Les travaux de ce groupe ont abouti à l'élaboration de la convention « La retraite pour le bien vieillir - L'offre commune interrégimes pour la prévention et la préservation de l'autonomie ». A travers cette offre commune, la Cnav, la CCMSA et le RSI ont pris cinq engagements pour aider leurs retraités à bien vivre leur retraite et à préserver leur autonomie :

- informer et conseiller les retraités sur des thématiques telles que la nutrition, la mémoire, l'équilibre, le sommeil, l'activité physique ou le logement, en proposant sur l'ensemble du territoire des supports d'information (brochures, vidéos) et des conférences de sensibilisation ainsi que des ateliers en petit groupe pour des conseils personnalisés. Cette mission d'information est assurée en partenariat avec l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes) ;

- proposer une évaluation globale des besoins à domicile pour les retraités fragilisés (GIR 5 et 6). En fonction de l'évaluation, les caisses de retraite proposeront des prestations utiles au bien-être (aides à la vie quotidienne, aux loisirs, aux transports, assistance sécurité) et des aides pour améliorer la qualité de vie à domicile (participation financière à l'achat et à la pose d'aides techniques, aides pour les travaux d'adaptation du logement) ;

- accompagner les retraités dans les situations de rupture (retour à domicile après hospitalisation, perte d'un proche) ;

- favoriser le développement de logements adaptés au vieillissement ;

- simplifier les démarches en collaborant avec de nombreux partenaires dont les collectivités territoriales.


Définir, dans le cadre d'un contrat pluriannuel signé par l'Etat et les caisses de retraite, l'action sociale interrégimes des caisses visant à prévenir la perte d'autonomie de leurs ressortissants

Afin de reconnaître et consacrer par la loi la dynamique interrégimes des caisses de retraite impulsée depuis 2011 et renforcée par la convention adoptée en janvier 2014, le présent article dispose que la Cnav, la CCMSA et la Caisse nationale du RSI concluent avec l'Etat une convention pluriannuelle fixant les objectifs d'une politique coordonnée d'action sociale en vue de la préservation de l'autonomie des personnes, conduite par les régimes que ces organismes gèrent.

Cette convention pluriannuelle devra respecter les conventions d'objectifs et de gestion (COG) que ces organismes signent par ailleurs avec l'Etat.

Elle pourra également être signée par les autres organismes nationaux chargés de la gestion d'un régime de retraite obligatoire de base et par les organismes nationaux chargés de la gestion des régimes complémentaires légalement obligatoires d'assurance retraite, à savoir l'Agirc et Arrco.

Cette convention pluriannuelle signée par la Cnav, la CNMSA et le RSI avec l'Etat permettra de définir des orientations communes à l'ensemble des régimes de base, en conformité avec les stipulations des COG respectives, d'inciter d'autres régimes à rejoindre l'action sociale interrégimes et de mieux coordonner la participation des caisses de retraite aux politiques de l'autonomie avec celle de l'Etat et celle des collectivités territoriales, en particulier les départements.


Permettre les échanges entre les organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale d'informations nécessaires à l'appréciation de la situation de leurs ressortissants

Pour mener à bien leur action sociale interrégimes en faveur de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées, les caisses de retraite ont besoin de se doter d'outils de détection des personnes présentant un risque élevé de perte d'autonomie, en raison de leur situation sociale, de leur état de santé ou de leur environnement (personnes de retour d'une hospitalisation, qui ont perdu leur conjoint, en situation de précarité par exemple). Ces personnes sont en effet souvent les plus éloignées de l'accès aux droits alors qu'elles devraient au contraire bénéficier en priorité des prestations d'action sociale.

Pour alimenter ces outils, les caisses de retraite (Cnav, MSA, RSI) ont besoin d'échanger entre elles des informations sur leurs ressortissants, notamment lorsque elles interviennent auprès de retraités qui relèvent de plusieurs régimes (polypensionnés) ou auprès de couples dont les membres relèvent de régimes différents.

Elles peuvent également avoir besoin d'échanger des informations avec les caisses d'assurance maladie, et en particulier avec la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (Cnam).

Or, en l'état actuel du droit, ces échanges d'information sont limités par la protection de la vie privée des retraités ainsi que par le secret professionnel auxquels sont soumis les organismes de sécurité sociale.

C'est pourquoi le présent article prévoit que les organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale - en l'occurrence, les caisses de retraite que sont la Cnav, la MSA et le RSI mais aussi la Cnam par exemple - échangent les renseignements, autres que médicaux, qu'ils détiennent et qui sont nécessaires à l'appréciation de la situation de leurs ressortissants pour l'accès aux prestations et avantages sociaux qu'ils servent ainsi qu'aux actions qu'ils mettent en oeuvre en vue de prévenir la perte d'autonomie des personnes âgées. Ces dispositions permettront de mieux repérer les retraités en situation de fragilité afin de leur proposer une aide adaptée à leurs difficultés et de prévenir leur perte d'autonomie.

Afin de bien encadrer juridiquement ces échanges de renseignements entre les caisses de retraite, le présent article dispose qu'un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), précise la nature des informations qui peuvent être transmises, les conditions de cette transmission ainsi que les organismes susceptibles d'en être destinataires.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel à cet article.

III - La position de la commission

Vos rapporteurs considèrent que la dynamique interrégimes des caisses de retraite en matière de prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées, clairement perceptible sur le terrain, mérite pleinement d'être consacrée par la loi et d'être formalisée dans une convention pluriannuelle signée avec l'Etat.

Votre commission a adopté un amendement rédactionnel présenté par ses rapporteurs.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 7
(art. L. 113-2-1 [nouveau] du code de l'action sociale et des familles)
Reconnaissance mutuelle de la perte d'autonomie
selon la grille Aggir entre départements et caisses de retraite

Objet : Cet article prévoit que les départements et les caisses de retraite définissent les modalités assurant la reconnaissance mutuelle de la perte d'autonomie des personnes âgées selon la grille Aggir.

I - Le dispositif proposé

Depuis 2001, les départements prennent en charge, via l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), les personnes dépendantes (GIR 1 à 4) 24 ( * ) .

Dans une démarche de prévention de la perte d'autonomie, les caisses de retraite prennent en charge sur leurs crédits d'action sociale les personnes âgées fragilisées mais non dépendantes (GIR 5 et 6), afin d'éviter qu'elles ne perdent leur autonomie.

Si les départements et les caisses de retraite utilisent le même outil - la grille Aggir - pour évaluer la perte d'autonomie d'une personne âgée, cette évaluation ne fait pas toujours l'objet d'une culture partagée entre eux. Ces différences d'approche peuvent induire de ce fait des disparités non justifiées dans les prises en charge. Ainsi, une même personne pourra être considérée par les évaluateurs de sa caisse de retraite comme ressortissant du GIR 4, donc éligible à l'APA, alors que leurs homologues du département la situeront en GIR 5, de la compétence de l'action sociale des caisses de retraite.

La grille Aggir

L'APA et l'aide sociale des caisses de retraite sont attribuées par référence à la grille Aggir (autonomie, gérontologie, groupes iso-ressources) qui classe les personnes en six groupes iso-ressources (GIR) selon leur degré d'autonomie :

- GIR 1 : perte de l'autonomie motrice et mentale ;

- GIR 2 : besoin de prise en charge de la plupart des activités de la vie courante ;

- GIR 3 : besoin d'aide à l'autonomie corporelle ;

- GIR 4 : besoin d'aide à l'activité corporelle et repas ;

- GIR 5 et 6 : personnes fragiles mais peu ou pas dépendantes.

L'aide sociale aux personnes en GIR 1 à 4 relève des départements tandis que l'aide sociale aux personnes en GIR 5 et 6 relève des caisses de retraite.

Dans un contexte financier rendu de plus en plus contraint, les départements comme les caisses de retraite ont parfois pu rechercher des moyens de réguler le nombre de prestations accordées, ainsi que le contenu des plans d'aide, d'où l'existence dans un certain nombre de cas de contestations pour les situations sécantes GIR 5/4, certains département estimant que les caisses de retraite classaient intentionnellement des personnes fragiles mais non dépendantes en GIR 4 afin qu'elles relèvent de l'APA et vice-versa.

Comme l'a expliqué à vos rapporteurs l'observatoire national de l'action sociale décentralisée (Odas), des éléments de réponse ont été apportés au cours du temps à ce problème qui tend à devenir de plus en plus résiduel.

Ainsi, les évaluations de la perte d'autonomie des personnes âgées sont désormais réalisées par une seule et même équipe dans un département sur cinq (en général, par les équipes médico-sociales des départements).

En outre, les centres locaux d'information et de coordination gérontologique (Clic), lorsqu'ils sont à la fois proches du département et de la Carsat, peuvent contribuer à l'analyse des besoins.

Enfin, un certain nombre de départements et de Carsat ont mis en place des modalités de reconnaissance de leurs évaluations réciproques. Cette reconnaissance des évaluations est ainsi pleinement réciproque dans 25 % des départements, auxquels s'ajoutent 15 % des départements dans lesquels les Carsat reconnaissent les évaluations réalisées par les équipes médico-sociales du département sans que l'inverse soit valable.

Afin de définitivement résoudre ce problème et de garantir aux personnes fragiles ou en perte d'autonomie un continuum et plus de fluidité dans leur accompagnement, le présent article prévoit que le département et les organismes de sécurité sociale définissent les modalités assurant la reconnaissance mutuelle de la perte d'autonomie des personnes âgées selon la grille Aggir.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de la commission

Cet article permettra de mettre fin aux dernières difficultés entre les départements et les caisses de retraite en matière de reconnaissance mutuelle de la perte d'autonomie des personnes âgées.

Au-delà de cette règle nouvelle d'opposabilité des évaluations de la perte d'autonomie entre départements et caisses retraite, vos rapporteurs soulignent qu'il sera également indispensable à l'avenir de mieux former les équipes médico-sociales pour réduire les ambigüités inhérentes aux évaluations des situations sécantes GIR 5/4. Ces formations devront favoriser une appropriation commune de la grille Aggir et sensibiliser les équipes départementales au repérage des critères de fragilité et à l'évaluation globale pratiquée par les caisses de retraite.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 8
(art. L. 14-10-5 du code de l'action sociale et des familles)
Financement des actions de formation au profit des intervenants bénévoles par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie

Objet : Cet article a pour objet de prévoir le financement, par une partie du produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie, des dépenses de formation des bénévoles qui interviennent dans le cadre de la lutte contre l'isolement des personnes âgées.

I - Le dispositif proposé

Le présent article modifie la section IV du budget de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). Celle-ci est jusqu'à présent consacrée à la promotion d'actions innovantes, à la formation des aidants familiaux, des accueillants familiaux et au renforcement de la professionnalisation des métiers de service exercés auprès des personnes âgées et handicapées.

Deux ressources viennent l'alimenter :

- une fraction comprise entre 5 % et 12 % de la part de contribution sociale généralisée (CSG) affectée à la CNSA ;

- une fraction de 12 % maximum du produit de la contribution de solidarité pour l'autonomie (CSA).

Le du présent article ajoute une troisième ressource correspondant, au maximum, à 4 % de la part du produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie (Casa) affectée à la sous-section a) de la section V du budget de la CNSA.

Le précise que, parmi les charges retracées dans cette section IV, seront comprises :

- des dépenses de professionnalisation des personnels des services d'aide à domicile ; ces dépenses n'étaient jusqu'à présent pas explicitement définies comme des charges supportées par la section IV mais étaient inclues dans l'objet de celle-ci ;

- des dépenses de professionnalisation des intervenants directs au domicile des personnes âgées en perte d'autonomie et handicapées ;

- des dépenses de formation et de soutien des intervenants bénévoles qui contribuent au maintien du lien social des personnes âgées et des personnes handicapées.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

III - La position de la commission

Sur proposition des rapporteurs, votre commission a adopté un amendement visant à inscrire dans la loi le fait que 1% du produit de la Casa financera ces actions de formation. L'affectation prévue correspond aux données fournies l'étude d'impact et évite le renvoi à des dispositions réglementaires.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.


* 24 Loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie.

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