ANNEXE IV -
PRINCIPAUX ÉLEMENTS DE POLITIQUE
ÉTRANGÈRE
Eléments transmis par le ministère des affaires étrangères et du développement international.
I. LES RELATIONS FRANCO-TCHÈQUES 45 ( * )
A. DES RELATIONS ÉTROITES DÈS LE XIV E SIÈCLE
Les relations étroites qui unissent la France et la République tchèque remontent au XIV e siècle. C'est à cette époque que Jean de Luxembourg, élevé à la cours de France, est couronné à la tête du Royaume de Bohême en 1311. Vassal du Roi de France, il mourut le 26 août 1346 aux côtés des troupes françaises qui affrontaient les Anglais à Crécy.
Son fils, élevé lui aussi à la Cour de France, marié à Blanche de Valois, renforça encore les liens entre les deux pays. Une fois proclamé empereur sous le nom de Charles IV en 1355, il confia à l'architecte français Matthieu d'Arras, la construction de la Cathédrale Saint-Guy, inspirée des cathédrales de Narbonne et de Rodez. Il ordonna également la création d'une Université à Prague, sur le modèle de la Sorbonne.
La révolte hussite marqua un éloignement entre les deux pays. Celui-ci était notamment dû aux rumeurs qui couraient en France sur « l'intolérance des hérétiques tchèques ». Ce phénomène fut encore accentué par l'influence germanique croissante. Après la bataille de la Montagne Blanche le 8 novembre 1620, cette influence fit place à la domination autrichienne.
La France a par ailleurs implanté dès 1897 un Consulat à Prague, alors que les pays tchèques appartenaient encore à l'Empire austro-hongrois. Elle cherchait chez les jeunes nations européennes de possibles alliés dans le cas d'une éventuelle revanche sur l'Allemagne.
B. L'ÂGE D'OR DES RELATIONS FRANCO-TCHÉCOSLOVAQUES (1914-1930)
Pendant la Première Guerre mondiale, Paris a été la capitale des exilés tchécoslovaques, dont T.G. Masaryk et E. Bene, tous deux futurs Présidents de la I ère République. Le gouvernement français a été le premier à reconnaître l'indépendance de la Tchécoslovaquie, avant même sa proclamation officielle le 28 octobre 1918.
La République française a aussi été la première à envoyer une délégation présenter ses lettres de créances au Président tchécoslovaque. C'est alors que l'Ambassade de France s'installe au Palais Buquoy où elle se trouve encore aujourd'hui. [...]
Par la suite, des relations fortes se sont aussi développées dans le domaine culturel, en particulier avec la fondation de l'Institut français par Ernest Denis en 1920.
C. LA PÉRIODE INTERMÉDIAIRE (1938-1945)
Les années 1930 ont été une période de déclin dans les relations bilatérales. Celui-ci a abouti à la signature des Accords de Munich en 1938. En 1997, M. Jacques Chirac, Président de la République française, a qualifié cet accord de « honteuse démission des démocraties ».
Pendant la Seconde guerre mondiale, les contacts se sont surtout poursuivis à Londres, entre exilés. C'est à cet égard un ancien résistant, Maurice Dejean, qui réinvestit le Palais Buquoy le 7 septembre 1945, en tant qu'Ambassadeur de France.
D. 40 ANNÉES DE RUPTURE (1948-1989)
Avec l'arrivée des communistes au pouvoir, les relations franco-tchécoslovaques ont été sensiblement malmenées. L'Ambassade de France fut alors surveillée et marginalisée et les francophiles et francophones non communistes inquiétés. Cette période sombre a atteint son paroxysme en 1951. Cette année-là, le Consul de France à Bratislava a été expulsé, l'Institut français de Prague fermé et la ligne aérienne Prague-Paris interrompue.
La mort de Staline en mars 1953 permit une certaine détente dans les relations entre les deux Etats. L'Ambassadeur de France mit alors l'accent sur son action culturelle. Pourtant, l'amélioration ne fut que de courte durée. Le contexte défavorable de l'année 1956 - avec l'écrasement du soulèvement de Budapest, la crise de Suez et la guerre d'Algérie - a entraîné un nouveau recul.
En 1964 s'est amorcée une embellie durable et les rapports culturels se firent plus fluides de 1966 à 1969.
Après la « normalisation » qui suivit le Printemps de Prague, en 1968, de nombreux francophiles s'exilèrent, dont le célèbre écrivain Milan Kundera. A l'époque, les relations les plus intenses ne se développaient pas au niveau politique mais au sein de la société civile, notamment parmi les intellectuels - l'Ambassade ne jouant alors qu'un rôle très minime.
Ainsi, le philosophe français Jacques Derrida avait fondé l'association Jan Hus qui soutenait les réseaux clandestins tchèques tels que le VONS (Comité de soutien des personnes injustement accusées) ou les signataires de la Charte 77. L'association avait pour but de fournir une aide matérielle et surtout intellectuelle aux universitaires et aux étudiants tchécoslovaques qui n'avaient plus la possibilité de poursuivre leurs travaux et leurs études. Jusqu'en 1989, l'association Jan Hus a organisé des rencontres et des échanges clandestins entre les intellectuels tchécoslovaques et français. Cette activité a permis aux dissidents de maintenir des contacts avec l'extérieur et de préserver un certain niveau de réflexion et de recherche. Le journaliste résistant Pavel Tigrid, qui avait participé à la création de la rédaction tchèque de Radio Libre-Europe, a également joué un grand rôle dans l'information de la dissidence tchèque. Il édita en France, à partir de 1960, la revue culturelle et politique Témoignage, dont les 20 000 exemplaires étaient diffusés chaque trimestre en Tchécoslovaquie communiste.
E. LE RENOUVEAU DES RELATIONS FRANCO-TCHÈQUES
Des changements en profondeur se profilent à la fin des années 80. Ils se concrétisent quand Mikhaïl Gorbatchev lance la « perestroïka ». C'est dans ce contexte que François Mitterrand, Président de la République française s'est rendu en Tchécoslovaquie en décembre 1988. A l'occasion de cette visite, il a rencontré le Président Husak qu'il a encouragé à faire évoluer son pays. Lors de ce même voyage, François Mitterrand a tenu à rencontrer des dissidents au régime, dont Vaclav Havel, invités à un petit-déjeuner au Palais Buquoy le 9 décembre 1988. Cette rencontre marque la première reconnaissance officielle de la dissidence tchèque.
La révolution de Velours marque le retour à des relations bilatérales de qualité. Cette période a été marquée par le rétablissement de l'Institut Français de Prague et l'inauguration du Centre français de Recherche en Sciences sociales (CEFRES) à Prague en 1991.
En tant que membre de l'Union européenne depuis 2004, la République tchèque est à ce titre un proche partenaire de la France.
II. POLITIQUE EUROPÉENNE
La République tchèque est entrée dans l'UE le 1 er mai 2004 (77,3 % de « oui » au référendum de juin 2003). Prague a exercé la présidence du Conseil de l'Union européenne au 1 er semestre 2009, au cours de laquelle fut lancé le partenariat oriental (sommet du 7 mai 2009 à Prague). L'ancien ministre chargé des Affaires européennes du gouvernement Fischer, tefan Füle, est devenu commissaire pour l'Elargissement, également chargé de la politique de voisinage, dans la Commission de février 2010.
Il a succédé à l'ancien premier ministre social-démocrate (2004-2009), Vladimir pidla, en charge de l'emploi, affaires sociales et égalité des chances dans la Commission précédente.
La République tchèque a contribué à hauteur de 1,58 Mds€ au budget 2012 de l'Union européenne. Avec 4,5 Mds€ de fonds en provenance de l'Union européenne, elle est donc bénéficiaire net (2,93 Mds€). Les deux plus gros postes d'affectation des fonds européens en 2012 sont la politique de cohésion (3,2 Mds€) et la politique agricole commune (1,2 Mds€).
La République tchèque dispose de 22 députés au Parlement européen et de 12 voix (sur 345 - soit 3,5%) au Conseil de l'UE. Selon les règles du Traité de Lisbonne fondées sur la population, la République tchèque ne disposera en 2014 que de 2,08% des voix (-1,4%, soit la plus importante perte avec la Hongrie) et élira donc 21 députés.
Le nouveau gouvernement de coalition nommé le 29 janvier 2014 s'est fixé un objectif clair de « mise en place d'une politique européenne active », prônant une attitude plus constructive sur la scène européenne et dans les négociations à venir, annonçant une future adhésion au TSCG et une possible adoption de l'euro à l'horizon 2020. Le gouvernement s'est également fixé comme objectif d'optimiser l'utilisation des fonds européens.
Le nouveau premier ministre B. Sobodka et le nouveau ministre des affaires étrangères L. Zaoralek sont sur la ligne pro-européenne de leur parti, le CSSD. L'engagement européen du KDU-CSL, le parti-chrétien démocrate, est connu. Le mouvement ANO 2001, pour sa part, rassemble un électorat hétéroclite, mais aucun de ses responsables ne s'est prononcé contre l'UE.
L'Allemagne occupe une place unique liée à l'histoire et aux réalités économiques (1 er partenaire commercial et le 1 er investisseur étranger en République tchèque). Elle est le moteur de la croissance tchèque mais aussi la référence politique des Tchèques, imprégnés par sa culture de stabilité. La Déclaration de réconciliation germano-tchèque, adoptée à l'initiative de Václav Klaus et Helmut Kohl en janvier 1997, a marqué la volonté des deux pays de dépasser les souvenirs douloureux de l'histoire pour s'orienter vers l'avenir, ce qu'illustre le rythme élevé des visites.
La question des décrets Bene de 1945 (par lesquels les Allemands et les Magyars se sont vus expropriés, déchus de leur citoyenneté et expulsés) demeure sensible dans les deux pays, bien que ces mesures aient été qualifiées dès 1989 par l'ancien président Havel d'« acte profondément immoral » et que le gouvernement Paroubek (4/2005-8/2006) ait reconnu en 2005 les mérites des « anti-fascistes allemands » fidèles à la Tchécoslovaquie sous le nazisme. La campagne présidentielle de l'hiver 2013 a par exemple donné lieu à des déclarations antigermaniques de la part de l'entourage du candidat Milo Zeman, accusant son adversaire Karel Schwarzenberg de vouloir remettre en cause les décrets Bene.
III. ÉLARGISSEMENT
Prague est favorable à la poursuite du processus d'élargissement dans son principe et considère qu'il ne doit pas être freiné par la crise actuelle. Traditionnellement favorable à l'adhésion de la Turquie, Prague a soutenu la relance du processus de négociation avec ce pays, même si le président Zeman affiche son opposition pour des raisons culturelles à l'intégration de la Turquie. La République tchèque soutient également le rapprochement européen des Balkans occidentaux, notamment de la Serbie.
La relation transatlantique est une priorité stratégique. Son appartenance à l'OTAN (depuis 1999, premier élargissement de l'Alliance à l'est) reste une référence obligée pour la diplomatie tchèque. Prague adhère pleinement au concept de spécialisation et estime que l'OTAN doit être le principal outil de développement de la coopération transatlantique sur les questions politiques et de sécurité.
IV. RELATIONS AVEC LA RUSSIE
Les relations économiques russo-tchèques sont denses avec près de 11 Mds€ d'échanges commerciaux (la Russie est le 5 e partenaire commercial de la République tchèque). La relation est déséquilibrée en raison de la facture énergétique (80% des importations tchèques de Russie). La République tchèque importe de Russie une partie significative de son énergie et exporte pour sa part essentiellement des matériels de transport et des machines (80% du total), dont une part croissante d'automobiles, notamment Skoda (27% en 2012 contre 23% en 2011).
Avant le sommet UE-Russie de janvier 2014, Prague souhaitait privilégier un « agenda positif » (avec l'identification de domaines dans lesquels existent de réelles perspectives de coopération concrète).
La situation en Ukraine a eu pour conséquence un changement de ton important. Plus encore que 1968, c'est 1938 qui s'invite dans la mémoire tchèque, d'où un véritable choc émotionnel ressenti dans le pays, doublé de la crainte que s'ouvre un nouveau conflit gelé. La ligne s'est encore durcie à l'égard de Moscou depuis l'annexion de la Crimée.
V. PARTENARIAT ORIENTAL
Le partenariat oriental est une priorité constante de la République tchèque, en raison de sa position géographique. Prague accorde une attention particulière à la situation en Ukraine. La République tchèque accueille une importante communauté ukrainienne (estimée à 120/150 000 personnes) qui dispose du statut de minorité nationale et avait accueilli quelques opposants au régime déchu.
Par ailleurs, une minorité tchèque historique (environ 20.000 personnes) est installée en Volhynie (nord-ouest de l'Ukraine).
VI. DES LIENS RESSERRÉS AVEC LES VOISINS D'EUROPE CENTRALE
Prague entretient des relations étroites avec ses partenaires centre-européens du Groupe de Viegrad. Les connivences restent évidemment grandes avec la Slovaquie : chaque nouveau ministre des Affaires étrangères y effectue sa première visite, chacun est le 2 e partenaire économique et commercial de l'autre. 46 % des travailleurs étrangers en République tchèque sont de nationalité slovaque, tandis que les étudiants slovaques ont la possibilité de passer leurs examens dans leur langue.
Prague a renforcé son partenariat avec la Pologne et favorise l'utilisation du polonais, dans le cadre de la Charte européenne pour les langues régionales ou minoritaires, dans l'audiovisuel tchèque et les communes de Silésie où se trouve la minorité polonaise.
La République tchèque entretient aussi des relations de bon voisinage avec la Hongrie et avec l'Autriche, 3 e investisseur. Le nucléaire est toutefois un sujet très sensible dans la relation avec l'Autriche. La question de la sécurité de la centrale nucléaire de Temelin, située à moins de 60 km de la frontière, est en effet source de préoccupation pour l'Autriche.
VII. POLITIQUE DE SÉCURITÉ ET DE DÉFENSE COMMUNE /OTAN
En plus du renforcement du partenariat UE-OTAN, Prague soutient, en matière de Politique de Sécurité et de Défense Commune (PSDC), le développement des capacités militaires (transport aérien, formation, participation des PME à la base industrielle et technologique de défense européenne, etc.).
La République tchèque participe aux missions de police de l'UE en Bosnie-Herzégovine et en Afghanistan. Présente en Afghanistan depuis 2008, l'armée tchèque a commencé le retrait de ses troupes. Les soldats opérant dans la province de Wardak (formation et conseil de la police locale) ont été rapatriés en octobre 2013. L'armée tchèque ne sera plus présente qu'à Kaboul et à la base aérienne de Bagram. L'engagement de la République tchèque devrait néanmoins être maintenu au-delà de la mission de la FIAS avec un contingent réduit à 340 hommes en 2014. En 2015, il ne devrait plus y avoir que 150 militaires tchèques (contre 720 en 2011).
Les derniers soldats tchèques (99) ont quitté le Kosovo début novembre 2011, à l'exception de quelques militaires au sein de l'état-major de la KFOR. Prague participe également à EUTM Mali à hauteur de 50 soldats, représentant ainsi le cinquième contributeur derrière la France, l'Allemagne, l'Espagne et le Royaume-Uni.
La République tchèque soutient le déploiement de la mission PSDC en RCA qu'elle considère comme une réponse appropriée de l'UE à la situation sur place.
* 45 http://www.france.cz/Presentation-historique.