CHAPITRE IV Dispositions diverses
Article 16 (art. L. 1235-1, L. 1471-1 [nouveau], L. 3245-1 du code du travail ; art. 80 duodecies du code général des impôts) Conciliation devant le conseil des prud'hommes et aménagement des règles de prescription
Objet : Cet article, conformément aux articles 25 et 26 de l'Ani, encourage le recours à la phase de conciliation devant le juge prud'homal par l'instauration par décret d'un barème indicatif. Il limite à deux ans le délai de saisine du juge pour les actions relatives à l'exécution ou la rupture du contrat de travail et à trois ans la prescription des actions en salaire.
I - Le dispositif proposé
Cet article comprend cinq paragraphes.
Le paragraphe I modifie l'article L. 1235-1 du code du travail, relatif aux contestations et irrégularités du licenciement devant le juge prud'homal .
L'article L. 1235-1 dispose actuellement qu'en cas de litige, le juge prud'homal doit apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur. Il forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
Pour mémoire, la phase de jugement est obligatoirement précédée d'une phase de conciliation infructueuse, en vertu de l'article L. 1411-1. L'accord issu d'une conciliation et constaté dans le procès-verbal signé devant le bureau de conciliation (R. 1454-11 du code du travail) peut s'analyser en une transaction à propos de laquelle l'article 2052 du code civil prévoit qu'elles ont, « entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort », ce qui signifie que les demandes formulées dans le cadre de la conciliation ne peuvent être rejugées (sauf si un recours en annulation de l'accord est introduit).
Le projet de loi apporte deux modifications substantielles à l'article L. 1235-1.
D'une part, il insère en début d'article deux alinéas relatifs à la conciliation.
Ainsi, en cas de litige, lors de la conciliation prévue à l'article L. 1411-1 l'employeur et le salarié peuvent convenir ou le bureau de conciliation proposer d'y mettre un terme par accord. Cet accord prévoit le versement par l'employeur au salarié d'une indemnité forfaitaire dont le montant est déterminé sur le fondement d'un barème fixé par décret en fonction de l'ancienneté du salarié. Selon les informations fournies par le Gouvernement à votre rapporteur, un décret devrait reprendre à l'identique les montants préconisés par l'article 25 de l'Ani.
Barème des indemnités forfaitaires selon l'article 25 de l'Ani L'indemnité forfaitaire accordée devant le bureau de conciliation prud'homale est calculée en fonction de l'ancienneté du salarié selon l'Ani. Son montant est fixé à : - 2 mois de salaire pour une ancienneté inférieure à 2 ans ; - 4 mois de salaire pour une ancienneté comprise entre 2 et 8 ans ; - 8 mois de salaire pour une ancienneté comprise entre 8 et 15 ans ; - 10 mois de salaire pour une ancienneté comprise entre 15 et 25 ans ; - 14 mois de salaire pour une ancienneté de plus de 25 ans. Ce barème doit être mis en regard des règles actuelles d'indemnité accordée par le juge prud'homal statuant au fond un litige : - 6 mois de salaire minimum en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse et de refus du salarié ou de l'employeur de réintégrer l'entreprise (L. 1235-3) ; - 1 mois de salaire maximum en cas d'irrégularité de la procédure de licenciement (à condition que le motif du licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse) (L. 1235-2). Les indemnités prévues en cas de rupture dépourvue de motifs réels et sérieux ne se cumulent pas avec celles sanctionnant l'inobservation des règles de forme : seules les premières sont accordées en cas de cumul de violation des règles de licenciement. Il convient de noter que ces indemnités ne s'appliquent pas aux salariés ayant moins de 2 ans d'ancienneté dans une entreprise de moins de 11 salariés. Le salarié peut alors seulement prétendre, en cas de licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi (toutefois, si l'employeur a oublié de mentionner dans sa lettre de convocation la possibilité de se faire assister par un conseiller, le salarié a droit a une indemnité égale à un mois de salaire maximum). |
Par ailleurs, le procès-verbal constatant l'accord vaut renonciation des parties à toutes réclamations et indemnités relatives à la rupture du contrat de travail prévues par le chapitre V du titre III du livre II de la première partie du code du travail.
D'autre part, le projet de loi indique que le juge prud'homal, à défaut d'accord pendant la conciliation, justifie dans le jugement qu'il prononce le montant des indemnités qu'il octroie. Pour mémoire, l'obligation de motivation résulte du principe du contradictoire à valeur constitutionnelle. Le juge doit justifier et expliquer les motifs de sa décision. Ce principe a été décliné en partie réglementaire aux termes de l'article 455 du code de procédure civile qui s'applique aux décisions prud'homales. La Cour de cassation contrôle l'existence de cette motivation et prononce des annulations en cas de défaut au visa de l'article 458 du code de procédure civile.
Le paragraphe II prévoit que les indemnités versées pendant la phase de conciliation prud'homale sont non imposables, à travers une modification de l'article 80 duodecies du code général des impôts.
Le paragraphe III complète le livre IV de la première partie du code du travail par un titre VII, intitulé « prescriptions des actions en justice », composé d'un chapitre et d'un article uniques.
L'article L. 1471-1 en question comprend deux alinéas.
Le premier alinéa prévoit que toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit au lieu de 5 ans aujourd'hui.
Ce principe connaît cependant des exceptions énumérées au second alinéa.
D'une part, cette règle de 2 ans pour la prescription ne s'applique pas :
- aux actions en réparation d'un dommage corporel causé à l'occasion de l'exécution du contrat de travail (les victimes d'accident du travail ou de maladie professionnelle disposent d'un délai de 2 ans pour engager une action, mais les points de départ de la prescription varient selon les hypothèses, tandis que des règles spécifiques existent en cas de faute intentionnelle ou d'exposition à l'amiante) ;
- aux actions en paiement ou en répétition du salaire (le projet de loi fait passer la prescription de 5 à 3 ans, voire infra ) ;
- et aux actions exercées sur le fondement des articles L. 1132-1 (délai de 5 ans pour introduire l'action en réparation du préjudice et réparation possible de « l'entier préjudice » résultant de la discrimination pendant toute sa durée), L. 1152-1 (le délai de prescription du délit de harcèlement moral est de 3 ans) et L. 1153-1 (le délai de prescription du délit de harcèlement sexuel est également de 3 ans).
D'autre part, et inversement, cette règle ne fait pas obstacle aux délais de prescription plus courts prévus par le code du travail.
Le projet de loi énumère dans ce cadre les articles suivants :
- L. 1233-67 : toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail est prescrite dans les 12 mois suivant l'adhésion à un contrat de sécurisation professionnelle ;
- L. 1234-20 : le salarié ne peut dénoncer le reçu pour solde de tout compte que dans les 6 mois qui suivent sa signature ;
- L. 1235-7 : toute contestation portant sur la régularité ou la validité du licenciement se prescrit par 12 mois à compter de la dernière réunion du comité d'entreprise ou, dans le cadre de l'exercice par le salarié de son droit individuel à contester la régularité ou la validité du licenciement, à compter de la notification de celui-ci ;
- L. 1237-14 : le recours juridictionnel contre une décision d'homologation de rupture conventionnelle doit être formé dans un délai de 12 mois.
Le paragraphe IV modifie l'article L. 3245-1, qui dispose que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil.
Le projet de loi indique que la prescription passe désormais de 5 à 3 ans à compter du jour où celui qui exerce une action en justice a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
Enfin, le paragraphe V précise les règles d'entrée en vigueur de ces diverses règles de prescription.
Le premier alinéa prévoit que les dispositions du III et IV s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription ne puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
Le second alinéa dispose que lorsqu'une instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
Aucun amendement n'a été adopté sur cet article en commission.
En séance, les principaux amendements adoptés ont visé à:
- préciser que l'indemnité versée lors de la phase de conciliation prud'homale ne se substitue pas aux indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles auxquelles peut prétendre le salarié ;
- élargir le champ de l'exception à la prescription de deux ans aux actions relatives aux dommages et intérêts pour réparer l'entier préjudice résultant d'une discrimination ;
- permettre à un salarié qui introduit, postérieurement à la rupture de son contrat de travail, une action en paiement ou en répétition du salaire de réclamer le versement des sommes dues au titre des trois années précédant la rupture, conformément à une stipulation explicite de l'Ani.
III - Le texte adopté par la commission
S'agissant de la conciliation devant le juge prud'homal, votre rapporteur ne peut qu'être favorable au dispositif proposé, qui respecte la liberté de chaque partie d'accepter ou de refuser l'accord proposé. Le barème proposé dans l'Ani n'étant qu'indicatif, les parties sont libres de le suivre ou de s'en écarter. Ce renouveau des procédures de conciliation permettra peut-être d'éviter aux salariés de longues et incertaines procédures judiciaires, et leur permettre de « tourner rapidement la page ».
Votre rapporteur tient à nuancer la portée de la réduction des délais de prescription. Lors de son audition le 2 avril devant votre commission, M. Thouvenel, représentant de la CFTC, a reconnu que la réduction du délai de prescription constituait une « régression » des droits des salariés, mais qu'il s'agissait d'une concession faite aux représentants des employeurs lors des négociations de l'Ani, en contrepartie des nombreux droits nouveaux obtenus pour les salariés, individuellement et collectivement. En outre, un salarié lésé aura toujours la possibilité à l'avenir de demander des dommages et intérêts pour les préjudices non couverts à cause de ces nouvelles règles de prescription. Enfin, votre rapporteur rappelle que la très grande majorité des recours devant le juge prud'homal sont introduits moins de deux ans après la rupture du contrat de travail.
Votre rapporteur constate avec satisfaction que le projet de loi a clarifié et précisé les dispositions de l'article 26 de l'Ani relatif aux prescriptions. En effet, les partenaires sociaux n'avaient pas expressément exclus de la réduction des délais de prescriptions les actions relatives aux accidents du travail, aux harcèlements moral et sexuel et aux discriminations.
La commission a adopté cet article sans modification.
Article 16 bis (nouveau)
Rapport sur les conditions d'accès
à la justice prud'homale
Objet : Cet article additionnel demande au Gouvernement la remise d'un rapport sur les conditions d'accès à la justice prud'homale.
La commission a adopté, après avis favorable de votre rapporteur, un amendement du groupe CRC visant à demander au Gouvernement un rapport, six mois après la promulgation de la loi, sur les conditions d'accès à la justice prud'homale.
Votre rapporteur souligne la nécessité de renforcer les moyens de la justice prud'homale, qui apparaît aujourd'hui comme le parent pauvre du système judiciaire français . La sécurisation des règles procédurales en cas de plan de sauvegarde de l'emploi, à travers le renforcement des missions des Direccte et la compétence du juge administratif, ne doit pas occulter la nécessité de réformer en profondeur la justice prud'homale. Lors de ses auditions, votre rapporteur a ainsi découvert avec stupéfaction que les juges prud'homaux ne disposaient pas d'accès internet, ni d'adresses électroniques institutionnelles, ni de codes du travail en exemplaires suffisants ; que les formations continues n'étaient pas obligatoires ; que les indemnités des juges étaient très peu élevées.
La commission a adopté cet article additionnel dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 17 (art. L.2314-2, L. 2322-2 et L. 2324-3 du code du travail) Aménagement de la mise en place des institutions représentatives du personnel en cas de franchissement des seuils d'effectifs
Objet : Cet article, transposant l'article 17 de l'Ani, autorise les entreprises qui viennent de franchir les seuils de onze et cinquante salariés à organiser respectivement les élections des délégués du personnel et des membres du comité d'entreprise dans les quatre-vingt-dix jours suivant le jour de l'affichage, au lieu de quarante-cinq jours aujourd'hui ; l'employeur dispose en outre d'un délai d'un an à compter du franchissement du seuil de 50 salariés pour se conformer aux obligations récurrentes d'information et de consultation du comité d'entreprise.
I - Le dispositif proposé
Cet article compte trois paragraphes.
Son paragraphe I modifie l'article L. 2314-2 du code du travail, relatif aux délais pour organiser les élections des délégués du personnel.
Cet article prévoit actuellement que l'employeur informe tous les quatre ans le personnel par affichage de l'organisation des élections des délégués du personnel. Le document affiché précise la date envisagée pour le premier tour. Celui-ci doit se tenir, au plus tard, le quarante-cinquième jour suivant le jour de l'affichage, sous réserve qu'une périodicité différente n'ait pas été fixée par accord en application de l'article L. 2314-27 (un accord de branche, de groupe ou d'entreprise peut fixer une durée de mandat des DP comprise entre 2 et 4 ans).
Le projet de loi maintient ces dispositions mais les complète en précisant que lorsque l'organisation de l'élection est consécutive au franchissement du seuil mentionné à l'article L. 2312-2 (onze salariés et plus pendant douze mois, consécutifs ou non, au cours des trois dernières années), le premier tour doit se tenir dans les 90 jours suivant le jour de l'affichage.
Son paragraphe II modifie l'article L. 2322-2, relatif au seuil d'effectif rendant obligatoire la mise en place d'un comité d'entreprise.
L'article L. 2322-2 prévoit que la mise en place d'un comité d'entreprise n'est obligatoire que si l'effectif d'au moins cinquante salariés est atteint pendant douze mois, consécutifs ou non, au cours des trois années précédentes.
Le projet de loi conserve cette disposition mais précise que l'employeur dispose d'un délai d'un an à compter du franchissement de ce seuil pour se conformer aux obligations récurrentes d'information et de consultation du comité d'entreprise prévues par le présent code, selon des modalités déterminées par un décret en Conseil d'État.
Enfin, le III de cet article complète l'article L. 2324-3, relatif aux délais pour organiser les élections du comité d'entreprise.
L'article L. 2324-3 impose tout d'abord la simultanéité des élections des représentants du personnel au comité d'entreprise et celle des DP. En outre, cet article reprend les mêmes conditions de délai pour l'affichage et l'organisation du premier tour de l'organisation des élections du comité d'entreprise que celles présentées plus haut pour les DP.
Le projet de loi, par coordination avec les modifications apportées par le I de l'article 17, prévoit que lorsque l'organisation de l'élection est consécutive au franchissement du seuil de cinquante salariés mentionné à l'article L. 2322-2, le premier tour doit se tenir dans les quatre-vingt-dix jours suivant le jour de l'affichage.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
En commission, un amendement a précisé que l'employeur dispose d'un délai d'un an à compter du franchissement du seuil de cinquante salariés pour se conformer « complètement » aux obligations récurrentes d'information et de consultation du comité d'entreprise.
Aucun amendement n'a été adopté en séance publique sur cet article.
III - La position de la commission
Votre rapporteur constate que les seuils d'effectifs, à tort ou à raison, suscitent parfois la crainte de certains employeurs. Parmi les nombreux seuils d'effectifs en vigueur, c'est celui de cinquante salariés qui semble provoquer le plus d'inquiétude selon les représentants de la CGPME. Les dispositions du présent article autorisent l'employeur, s'il le souhaite, à se donner un an pour fournir les documents récurrents au comité d'entreprise, qu'il s'agisse des consultations sur des sujets spécifiques comme la formation, ou de consultations plus globales comme la situation économique ou sociale de l'entreprise. Les élus du personnel conservent l'intégralité de leurs droits même si l'employeur recourt aux dispositions du présent article.
A l'initiative de votre rapporteur, un amendement rédactionnel a été adopté.
La commission a adopté cet article dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 18 Expérimentation des contrats de travail intermittents dans certains secteurs d'activités
Objet : Cet article autorise, à titre expérimental jusqu'au 31 décembre 2014, les entreprises de moins de cinquante salariés, relevant de trois secteurs d'activité, à recruter des salariés en contrat de travail intermittent sans convention ou accord collectif.
I - Le dispositif proposé
Le contrat de travail intermittent est défini aux articles L. 3123-31 à L. 3123-37 du code du travail.
Comme le prévoit l'article L. 3123-31 , ce contrat de travail pourvoit un emploi permanent qui par nature comporte une alternance de périodes travaillées et de périodes non travaillées.
La conclusion de tels contrats n'est aujourd'hui possible que dans les entreprises dans lesquelles une convention ou un accord collectif de travail étendu le prévoit, ou si une convention ou un accord d'entreprise est conclu sur ce sujet.
On compte aujourd'hui environ 20 conventions collectives autorisant le recours aux CDI intermittents, regroupant 400 000 salariés, dans des domaines aussi divers que l'expertise comptable et les commissaires aux comptes, l'immobilier ou la pâtisserie.
Le contrat de travail est un contrat à durée indéterminée, conformément aux dispositions de l'article L. 3123-33 . Il doit mentionner :
- la qualification du salarié ;
- les éléments de la rémunération ;
- la durée annuelle minimale de travail du salarié ;
- les périodes de travail ;
- et la répartition des heures de travail à l'intérieur de ces périodes.
L'article L. 3123-34 dispose que les heures dépassant la durée annuelle minimale fixée au contrat de travail intermittent ne peuvent excéder le tiers de cette durée sauf accord du salarié.
Enfin, l'article L. 3123-36 indique que le salarié titulaire d'un contrat de travail intermittent bénéficie des droits reconnus aux salariés à temps complet, sauf si un accord collectif en dispose autrement. En outre, pour la détermination des droits liés à l'ancienneté, les périodes non travaillées sont prises en compte en totalité.
Le présent article 18 propose une expérimentation de ces contrats de travail intermittents dérogatoires au cadre fixé par l'article L. 3123-31.
Des contrats de travail intermittents pourront être conclus avant le 31 décembre 2014 dans des entreprises occupant moins de cinquante salariés dans trois secteurs déterminés par arrêté du ministre chargé du travail (et choisis par les partenaires sociaux dans le cadre de l'Ani), sans accord collectif préalable.
Ces trois secteurs sont :
- les organismes de formation, à l'exception des salariés formateurs en langue ;
- les commerces d'articles de sport et d'équipements de loisirs ;
- les détaillants et/ou fabricants de confiserie, chocolaterie et biscuits.
Au total, environ 160 000 salariés sont potentiellement concernés par cette expérimentation.
Si aucun accord collectif n'est obligatoire dans ces trois nouveaux secteurs, l'employeur doit toutefois informer les délégués du personnel.
Le contrat de travail devra indiquer que la rémunération versée mensuellement au salarié est indépendante de l'horaire réel effectué et est lissée sur l'année.
Les dispositions des articles L. 3123-33, L. 3123-34 et L. 3123-36 sont applicables pendant l'expérimentation.
Enfin, le Gouvernement devra transmettre au Parlement un rapport d'évaluation de l'expérimentation avant le 31 décembre 2014.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
• En commission, un amendement du rapporteur a
indiqué les trois secteurs concernés par l'expérimentation
des CDI intermittents sans convention ou accord collectif :
- les organismes de formation, à l'exclusion des formateurs en langues ;
- le commerce des articles de sport et des équipements de loisirs ;
- les détaillants et détaillants-fabricants de confiserie, chocolaterie, biscuiterie.
• En séance, un amendement du Gouvernement est
revenu sur la modification apportée en commission et a rétabli le
renvoi à un arrêté du ministre pour définir les
secteurs concernés par l'expérimentation.
III - Le texte adopté par la commission
Votre rapporteur prend acte de cette volonté d'expérimenter les contrats de travail intermittents dans des entreprises de moins de cinquante salariés, relevant de secteurs bien identifiés, et sans recourir à des conventions ou accords préalables. Il sera attentif au rapport qui en sera fait d'ici fin 2014 afin de déterminer les suites à donner à cette expérimentation.
La commission a adopté cet article sans modification.
Article 19 Habilitation du Gouvernement à modifier par voie d'ordonnance le code du travail applicable à Mayotte afin d'y adapter les dispositions du projet de loi
Objet : Cet article autorise le Gouvernement à adapter, par voie d'ordonnance, le droit applicable à Mayotte pour le mettre en conformité avec le projet de loi.
I - Le dispositif proposé
Mayotte, territoire devenu un département français à part entière le 31 mars 2011, reste régi dans certains domaines par des dispositions dérogatoires au droit commun applicable dans le reste de la France. Ainsi, son code du travail est spécifique, de même que de nombreuses autres réglementations. Cet article a pour objet de permettre le Gouvernement de prendre les mesures nécessaires par ordonnance afin que les dispositions du projet de loi puissent s'y appliquer.
Selon les termes de l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement peut « demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ». Elles sont prises en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat mais deviennent caduques si, dans un délai fixé par la loi d'habilitation, un projet de loi de ratification n'a pas été déposé devant le Parlement.
Le paragraphe I pose donc le champ de cette habilitation : le code du travail applicable à Mayotte, le code de commerce et le régime de protection sociale applicable localement. Il fixe sa durée à dix-huit mois.
Le paragraphe II porte, quant à lui, sur le délai de dépôt du projet de loi de ratification de l'ordonnance. Il sera de six mois suivant la publication de celle-ci.
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II - Le texte adopté par la commission
Comme le précise l'étude d'impact annexée au projet de loi, de nombreux domaines du droit du travail applicable à Mayotte ne permettent pas la mise en oeuvre du présent projet de loi :
- les Ani et les accords de branche ne couvrent pas les entreprises mahoraises ;
- le régime d'indemnisation du chômage, ainsi que celui du chômage partiel, ne sont pas identiques à ceux en vigueur dans l'hexagone ;
- le travail à temps partiel n'y est pas précisément encadré.
Ainsi, il faudra réaliser, dans un premier temps, « les adaptations permettant au droit local d'être équivalent au droit du travail actuellement applicable dans l'hexagone », avant d'y transposer le projet de loi. En revanche, dans les départements d'outre-mer, à Saint-Martin, à Saint-Barthélemy et à Saint-Pierre-et-Miquelon, aucune disposition particulière d'adaptation n'est nécessaire.
Pour permettre le rapprochement du droit mahorais avec celui en vigueur dans l'hexagone, le recours à une ordonnance est nécessaire. Votre rapporteur comprend l'ampleur de la tâche mais souhaite qu'il ait lieu dans les meilleurs délais.
La commission a adopté cet article sans modification.
Article 19 bis (nouveau) Rapport sur le statut des personnels des chambres consulaires
Objet : Cet article additionnel demande au Gouvernement la remise d'un rapport sur l'articulation entre le code du travail et les statuts des personnels des chambres consulaires.
Inséré à l'initiative de votre rapporteur, cet article demande la réalisation d'un rapport sur l'articulation entre le code du travail et les statuts des personnels des chambres consulaires, que ce soient les chambres de commerce et d'industrie, les chambres des métiers ou les chambres d'agriculture. Il évalue notamment les modalités d'application de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 à ces personnels.
En effet, les personnels des chambres consulaires connaissent des statuts juridiques différents, de droit public ou de droit privé. Ils ne sont pourtant ni fonctionnaires ni salariés du secteur privé relevant pleinement du code du travail. Or, les dispositions spécifiques qui régissent leurs droits sont éparpillés et parcellaires, parfois très anciennes, ce qui crée des inégalités et des situations de précarité.
Ce rapport devra être remis par le Gouvernement au Parlement avant le 31 décembre 2013.
La commission a adopté cet article additionnel dans la rédaction issue de ses travaux.
Article 20 Rapport sur l'accession des bénéficiaires de l'AAH à la CMU-c, sans conditions de ressources
Objet : Inséré lors de l'examen du texte en séance publique par l'Assemblée nationale, cet article demande au Gouvernement la remise d'un rapport sur l'accession à la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c) des bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés (AAH).
I - Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale
Inséré à l'initiative de Jacqueline Fraysse, députée, et plusieurs de ses collègues du groupe Gauche démocrate et républicaine, cet article demande la réalisation d'un rapport évaluant les coûts et les conséquences d'une mesure permettant aux allocataires de l'AAH de bénéficier de la CMU-c sans conditions de ressources.
Il devra être remis par le Gouvernement au Parlement dans les six mois suivant la promulgation de la loi.
II - Le texte adopté par la commission
L'AAH est versée à la condition que les ressources du demandeur n'excèdent pas un plafond fixé à 9 319,08 euros par an pour une personne seule. Le plafond de ressources de la CMU-c est, quant à lui, fixé à 7 934 euros par an pour une personne seule, soit 661 euros par mois.
L'AAH peut être cumulée avec un complément de ressources, la majoration pour la vie autonome ou, dans certains cas, l'aide à l'autonomie. Dans la plupart des situations, le montant versé au titre de l'AAH permet au bénéficiaire de percevoir 776,59 euros par mois, soit 9 319,08 euros par an, ce qui situe les ressources des bénéficiaires de l'AAH environ 17 % au-dessus du plafond de la CMU-c. Les allocataires de l'AAH peuvent donc bénéficier de l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS) qui couvre environ la moitié d'un contrat individuel moyen.
S'il existe bien une question relative au plafond de la CMU-c, le Gouvernement en est pleinement conscient. Il a ainsi annoncé son relèvement de 7 % à l'été 2013 et il a engagé des travaux ayant pour objectif la généralisation de contrats complémentaires de qualité, tel que l'a indiqué le Président de la République en octobre 2012. Il a, en outre, confié à notre collègue Aline Archimbaud la mission de réaliser un rapport d'ici septembre 2013 sur l'accès aux soins des plus démunis.
Pour autant, fidèle à sa ligne de conduite sur ce projet de loi, la commission n'a pas remis en cause les demandes de rapport formulées par l'Assemblée nationale.
La commission a adopté cet article sans modification.