Article 24 (art. L. 17 du code des pensions civiles et militaires de retraite) Réforme de la pension minimale garantie dans la fonction publique

Objet : Cet article tend à rapprocher les règles applicables aux fonctionnaires pour l'obtention du minimum garanti de pension de celles en vigueur pour l'obtention du minimum contributif par les salariés du secteur privé.

I - Les dispositions initiales du projet de loi

1. Le minimum garanti dans la fonction publique

L'article L. 17 du code des pensions civiles et militaires de retraite dont la rédaction actuelle résulte de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, prévoit que le montant de la pension des fonctionnaires ne peut être inférieur à un montant minimum.

Lors de la liquidation d'une pension, le service gestionnaire procède à une comparaison du montant de la pension calculé selon les règles de droit commun (durée de services, bonifications, indice détenu, durée d'assurance) avec celui issu du calcul du minimum garanti. Le montant le plus favorable est retenu.

Le minimum garanti est calculé en proportion d'un indice de référence, dont la valeur en euros a été constatée au 1 er janvier 2004 puis revalorisée chaque année conformément à l'évolution de l'indice des prix à la consommation des ménages hors tabac.

Cet indice de référence était l'indice majoré 216 pour les pensions liquidées en 2003 ; ce sera l'indice majoré 227 pour les pensions liquidées en 2013. En contrepartie de cette progression du pouvoir d'achat des pensions portées au niveau du minimum garanti, le taux plein du minimum garanti est acquis pour une durée de service plus longue. Celle-ci augmente de façon progressive, passant de vingt-cinq à quarante ans entre 2007 et 2013.

Au 1 er janvier 2013, le taux de liquidation obtenu après quinze années de services correspondra à 57,5 % du montant maximum du minimum garanti. Il progressera ensuite de 2,5 points par an entre quinze et trente ans de services et de 0,5 point par année supplémentaire au-delà et jusqu'à quarante années pour atteindre alors 100 %.

Pour les pensions liquidées en 2010, le montant annuel brut du minimum garanti de l'article L. 17 est de 12 914,93 euros, soit 1 076,24 euros par mois.

Comme le souligne l'étude d'impact du projet de loi, le minimum garanti diffère à plusieurs titres du minimum contributif du régime général :

- les fonctionnaires, contrairement aux salariés du privé, bénéficient de ce minimum dès qu'ils atteignent l'âge d'ouverture des droits ;

- son montant est plus élevé dans la fonction publique ;

- son calcul n'est pas linéaire et ne favorise pas la poursuite de l'activité.

Dans son cinquième rapport 67 ( * ) publié en novembre 2007, le Cor a formulé plusieurs observations, proches de celles qui viennent d'être énumérées sur le minimum garanti dans la fonction publique : « certaines particularités du minimum garanti nécessiteraient néanmoins d'être examinées. En particulier, son attribution, contrairement au minimum contributif, n'est pas subordonnée à l'obtention du taux plein et son calcul n'est pas linéaire en fonction de la durée de cotisation. Alors qu'un barème linéaire conduirait à accorder 2,5 % du minimum garanti pour chaque année de service (soit 100 % pour quarante ans), le dispositif, mis en place par la loi de 2003, conduit à accorder un pourcentage plus élevé du minimum garanti pour chacune des premières années de service et, à l'inverse, un pourcentage plus faible pour les dernières années de la carrière (à partir de la trentième année, dans le dispositif prévu à terme en 2013, il ne sera que de 0,5 %). Ce barème favorise les personnes, généralement polypensionnées, ayant eu une faible durée de cotisation dans un régime de la fonction publique. Il n'incite pas ceux qui ont validé une durée plus longue à prolonger leur activité dans la fonction publique au-delà de l'âge minimum de liquidation, compte tenu de sa faible progressivité ».

2. Le dispositif proposé

L'article 24 tend à rapprocher le régime du minimum garanti de celui du minimum contributif du secteur privé tout en prenant en compte les observations du Cor.

Le paragraphe I modifie l'article L. 17 du code des pensions civiles et militaires de retraite pour prévoir que le minimum garanti ne peut être accordé lors de la liquidation d'une pension que :

- si le nombre de trimestres de durée d'assurance est égal au nombre de trimestres nécessaires pour obtenir le pourcentage maximum de pension ;

- ou si l'intéressé a atteint l'âge ou la durée de services auquel s'annule le coefficient de minoration (décote) ;

- ou si la liquidation intervient pour un des motifs mentionnés aux 2° à 5° du I de l'article L. 24 ou pour les motifs d'infirmité prévus aux 1° et 2° du II du même article.

Les 2° à 5° du I de l'article L. 24 concernent la liquidation de pension des fonctionnaires civils :

lorsque le fonctionnaire est mis à la retraite pour invalidité et qu'il n'a pas pu être reclassé dans un emploi compatible avec son état de santé ;

lorsque le fonctionnaire est parent d'un enfant vivant, âgé de plus d'un an et atteint d'une invalidité égale ou supérieure à 80 %, à condition qu'il ait, pour cet enfant, interrompu son activité ;

lorsque le fonctionnaire ou son conjoint est atteint d'une infirmité ou d'une maladie incurable le plaçant dans l'impossibilité d'exercer une quelconque profession sous réserve que le fonctionnaire ait accompli au moins quinze ans de services ;

lorsque le fonctionnaire handicapé totalise, alors qu'il était atteint d'une incapacité permanente d'au moins 80 %, une durée d'assurance au moins égale à une limite fixée par décret, tout ou partie de cette durée ayant donné lieu à versement de retenue pour pensions.

Les motifs d'infirmité prévus au 1° et 2° du II de l'article L. 24 visent les cas de radiation, par suite d'infirmités, des officiers ou militaires non-officiers.

Ainsi, dorénavant, pour bénéficier du minimum garanti, il sera nécessaire, sauf exception, d'avoir la durée d'assurance pour obtenir le pourcentage maximal de pension ou d'avoir atteint l'âge d'annulation du coefficient de minoration.

Le paragraphe II prévoit qu'à titre transitoire, pour l'application des règles relatives au minimum garanti, l'âge auquel s'annule le coefficient de minoration prévu par l'article L. 14 du code des pensions civiles et militaires de retraite et l'article 66 de la loi du 21 août 2003 est minoré d'un nombre de trimestres défini par décret en Conseil d'Etat.

Comme dans le régime général, un mécanisme de minoration de la pension a été instauré par la loi du 21 août 2003 lorsque la durée d'assurance est inférieure à la durée d'assurance nécessaire pour obtenir la liquidation au taux plein. Une montée en charge progressive s'étalant de 2006 à 2020 a été prévue. Cette montée en charge porte à la fois sur le coefficient de la décote, qui passe de 0,125 % par trimestre manquant en 2006 à 1,25 % en 2015, et sur le plafonnement de l'effet de la décote, qui passe de quatre trimestres en 2006 à vingt trimestres en 2020.

Afin de rendre les modifications des conditions d'obtention du minimum garanti moins abruptes, le paragraphe II prévoit un abaissement transitoire de l'âge d'annulation du coefficient de minoration uniquement pour l'attribution du minimum garanti.

Enfin, le paragraphe III dispose que les nouvelles règles applicables au minimum garanti s'appliquent aux pensions liquidées à compter de l'entrée en vigueur de la loi. Cependant, une exception est prévue pour les fonctionnaires civils et les magistrats qui auront atteint, avant cette date, l'âge d'ouverture des droits à pension qui leur est applicable en vertu des dispositions législatives actuellement en vigueur. Les fonctionnaires qui ont déjà, à la date d'entrée en vigueur de la loi, un droit à pension ouvert conservent le bénéfice du minimum garanti dans les conditions résultant du droit antérieur.

Selon l'étude d'impact accompagnant le projet de loi, la réforme du minimum garanti conduirait aux économies suivantes :

(en millions d'euros)

2015

2020

CAS « Pensions »

140

270

CNRACL

350

650

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - Le texte adopté par la commission

Votre commission approuve la réforme du minimum garanti qui permettra de rapprocher les règles applicables dans le secteur public de celles qui perdurent dans le secteur privé, même si ce rapprochement demeure incomplet, le montant du minimum garanti restant supérieur à celui du minimum contributif du régime général.

Elle souhaite cependant formuler deux observations :

en premier lieu, le texte proposé prévoit des exceptions à la nécessité de bénéficier de la durée d'assurance requise pour une pension à taux plein ou d'atteindre l'âge d'annulation du coefficient de minoration pour bénéficier du minimum garanti. Ces exceptions sont différentes pour les fonctionnaires civils et les militaires, sans que ces différences soient justifiées par des raisons objectives. Ainsi, le cas d'infirmité ou de maladie incurable d'un conjoint de militaire et celui dans lequel un officier est parent d'un enfant atteint d'une invalidité égale ou supérieure à 80 % ne sont pas visés alors qu'ils sont prévus pour les fonctionnaires civils. Sur la proposition de son rapporteur, la commission a en conséquence adopté un amendement étendant les exceptions aux cas qui viennent d'être mentionnés ;

en second lieu, l'article 24 prévoit une application du texte aux pensions liquidées à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi. Le choix de cette date pourrait soulever des difficultés. Les fonctionnaires qui liquideront leur pension au cours des mois suivant l'adoption du projet de loi ont bien souvent d'ores et déjà effectué des demandes de simulation du montant de leur pension. Lorsque la liquidation interviendra, elle sera opérée sous l'emprise de la nouvelle loi tandis que la simulation aura été réalisée en tenant compte des règles antérieures.

Certes, le risque d'une telle situation est largement limité par la non-application de la réforme aux personnes qui ont d'ores et déjà atteint l'âge d'ouverture des droits à la retraite, mais il demeure réel pour toutes celles qui atteindront l'âge d'ouverture des droits dans les semaines suivant l'entrée en vigueur de la loi. En conséquence, sur la proposition de son rapporteur, la commission a adopté un amendement renvoyant l'application de cet article aux pensions liquidées à compter du 1 er janvier 2011 .

Elle a adopté cet article ainsi modifié.


* 67 Retraites : vingt fiches d'actualisation pour le rendez-vous de 2008.

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