2. Admettre le principe de la création d'un fichier positif
La création d'une centrale des crédits aux particuliers, encore appelée fichier positif ou « credit bureau » , est le deuxième des grands débats qui ont nourri durant six semaines les travaux de votre commission spéciale. En effet, tous les grands pays européens en disposent, qu'ils soient de nature publique comme en Belgique, ou de nature privée partout ailleurs. La France occupe donc une place très singulière en la matière. Pourtant, comme en ont clairement témoigné les auditions, il n'existe aujourd'hui pas de consensus à ce sujet .
Seules trois catégories d'acteurs , les banques, au travers de la Fédération bancaire française (FBF), les commerçants, représentés notamment par la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution (FCD), l' Union du grand commerce de centre ville (UCV) et le Conseil du commerce de France (CCF), et les associations d'accompagnement des personnes en difficulté, telles que l' Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE), la Chambre régionale du surendettement social (CRESUS) ou encore le Secours catholique , expriment un avis homogène : la première est opposée au fichier positif , les deux autres - et ça n'est pas le moindre des paradoxes que de les voir se rejoindre sur ce point -, y sont favorables 156 ( * ) .
Toutes les autres « familles » sont partagées , à tel point, s'agissant des établissements de crédit , que leur organe représentatif, l'Association française des sociétés financières (ASF), n'a pas pris position lors de son audition . Parmi ses membres, le partage s'effectue, schématiquement, entre les établissements importants adossés à des opérateurs bancaires 157 ( * ) et les sociétés plus modestes ou détenues par des capitaux commerciaux 158 ( * ) . Chez les consommateurs , la tendance est assez sensiblement au refus , comme en témoignent les prises de position quasi-unanimes lors de l'audition de leurs principales associations représentatives 159 ( * ) , seule la puissante Union nationale des associations familiales (UNAF) exprimant son accord. Il en est de même du côté des institutions publiques : au nom du Gouvernement, Mme Christine Lagarde a réitéré au cours de ses deux auditions par la commission 160 ( * ) les raisons la conduisant à préférer une profonde réforme du FICP à la création d'un fichier positif ; la Banque de France partage cet avis ; le Conseil économique, social et environnemental , par la voix de Mme Pierrette Crosemarie, rapporteur d'un avis de la section des finances sur le surendettement des particuliers, ne s'est pas positionné sur cette question, ce qui souligne à tout le moins qu'il n'y est pas favorable ; quant à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), si elle s'en remet à la souveraine décision du législateur, c'est peu dire qu'elle ne voit aucun avantage à la création d'une centrale de crédit puisque l'intégralité des remarques formulées lors de son audition par notre excellent collègue Jean-Paul Amoudry, commissaire responsable du secteur « Banque et crédit » , étaient « à charge ». En définitive, seul le Médiateur de la République , M. Jean-Paul Delevoye, milite en faveur de cet outil et ce, il convient de l'observer, avec une constance qui l'honore.
Dans un contexte aussi partagé, sur une question qui, comme l'a très justement relevé Jean-Paul Amoudry, relève d'un choix de société qui entendrait « assurer la prééminence des choix économiques et sociaux sur la protection des libertés individuelles » , il paraît naturel à votre rapporteur que le Gouvernement, nonobstant son propre avis, se soit abstenu de proposer une réforme.
Au contraire, ceux de nos collègues qui sont depuis longtemps convaincus du caractère indispensable d'un fichier positif pour vérifier réellement la solvabilité des emprunteurs et lutter efficacement contre le surendettement ont déposé des amendements reprenant en la matière les dispositions figurant dans leurs propositions de loi. C'est ainsi que M. Michel Mercier , M. Claude Biwer , Mme Muguette Dini et la plupart de leurs collègues du groupe de l'Union centriste d'une part, Mme Nicole Bricq et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés d'autre part, ont appelé à la création d'un répertoire national des crédits aux particuliers pour des besoins non professionnels, géré par la Banque de France. Leurs amendements semblent correspondre aux attentes des auteurs de la proposition de loi de M. Charles Revet et certains de ses collègues du groupe UMP.
Tous tiennent pour un exemple probant la création en Belgique d'une Centrale des crédits aux particuliers (CCP) qui, depuis 2003, assure à la fois les fonctions d'un fichier positif, où sont mentionnés tous les types de crédits contractés par des personnes physiques pour leurs besoins personnels, et celles d'un fichier négatif, recensant les incidents de paiement portant sur ces crédits. Une délégation de votre commission spéciale, conduite par M. Laurent Béteille, vice-président, et constituée, outre votre rapporteur, de M. Claude Biwer, vice-président, de Mme Nicole Bricq, vice-présidente, et de Mme Brigitte Bout, s'est rendue à Bruxelles pour entendre les différentes parties prenantes 161 ( * ) : force est de constater l'unanimité de celles-ci en faveur de la CCP, qui aurait tout à la fois permis une légère diminution des incidents de paiement et une forte augmentation de l'accès au crédit entre 2003 et 2007, les débuts de la crise financière ayant interrompu ce cycle vertueux à compter de l'année 2008.
Pour autant cette unanimité n'a pas emporté la conviction de votre rapporteur quant à l'efficacité d'un tel fichier dans la lutte contre le surendettement. Il lui semble que son utilité pour vérifier la solvabilité des emprunteurs est fortement altérée par le principe de proportionnalité évoqué par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, que toute création d'un fichier de données personnelles doit respecter. Au-delà du respect des principes de libertés individuelles, qui constitue pour lui un credo fondamental, il observe par ailleurs que la présentation du fichier belge fait toujours abstraction de considérations dont la prise en compte pourrait en atténuer les vertus, et par conséquent le caractère exemplaire.
S'agissant du principe, il lui semble difficile de justifier le fichage de plus de 15 millions d'individus - voire bien davantage si le principe de la carte Double Action lancée l'an dernier par le Crédit Agricole , qui associe automatiquement une ligne de crédit renouvelable à la carte de paiement, était généralisé à toutes les cartes bancaires 162 ( * ) - pour prévenir certaines des difficultés financières, aussi douloureuses soient-elles pour les intéressés, de quelques dizaines de milliers de personnes en situation de surendettement. Et encore cette estimation est-elle très largement inexacte : en effet, chacun s'accorde à reconnaître que le surendettement des ménages est très loin de résulter seulement d'une mauvaise utilisation du crédit.
Sans entrer dans une querelle de chiffres, on rappellera que les plus rigoristes évaluent à 13 % la proportion des quelque 726 000 ménages en cours de « désendettement » 163 ( * ) dont la situation résulte d'une mauvaise gestion de leurs crédits. Pour d'autres, c'est davantage un pourcentage de 25 à 30 % qu'il conviendrait de retenir, le solde résultant de ce qui est couramment qualifié « d'accidents de la vie » (chômage, divorce ou séparation, maladie, accidents...). Enfin, l'association CRESUS, s'appuyant sur un tout récent sondage réalisé pour son compte 164 ( * ) , souligne que 65 % des personnes interrogées estiment que le fait d'avoir contracté trop de crédits est l'une des deux principales causes de leur surendettement, 41 % d'entre elles la citant en premier. Dans ce contexte, considérer qu'environ la moitié des personnes surendettées (soit 360 000) pourrait être potentiellement concernée par une amélioration des conditions de vérification préalable de la solvabilité des emprunteurs constitue déjà une assez large appréciation.
Par ailleurs, si l'on se réfère aux résultats, fournis par la Banque nationale de Belgique 165 ( * ) , de la création de la CCP belge sur le nombre des incidents de paiement observés dans le royaume entre 2003 et 2007 166 ( * ) , on observe que la proportion des contrats défaillants est passée de 7,6 % à 6,5 % et celle des emprunteurs défaillants de 8 % à 7,2 % . En d'autres termes, l'accroissement de l'efficacité de la vérification de la solvabilité des prêteurs qui aurait résulté de la création de la CCP est compris entre 10 et 15 % , selon le critère que l'on retient (les emprunteurs ou les contrats). Seul ce pourcentage présente une réelle signification pour apprécier le rôle du fichier positif belge, abstraction faite de toute autre considération, en particulier de contexte macro-économique.
Si la création d'un fichier positif en France permettait d'atteindre de tels pourcentages, voire les dépassait pour approcher par exemple 20 %, et qu'on supposait en outre que leur effet sur le nombre des personnes dont la situation de surendettement résulte directement d'un crédit excessif ou mal structuré est mécanique (toutes hypothèses favorables que nul n'est en mesure de prouver), ce seraient donc environ 70 000 personnes qui, aujourd'hui, ne seraient pas en situation de surendettement. Soit, puisqu'il s'agit là d'un stock sur quatre ans (2003 à 2007), 17 500 ménages surendettés de moins par an , pour un minimum de 15 millions de personnes fichées .
Ainsi, dans le meilleur des cas, tous les éléments les plus favorables à la création d'un fichier positif ayant été pris en considération , en termes de nombre de personnes fichées (qui diminue le dénominateur) comme de nombre de bénéficiaires potentiels (qui augmente le numérateur), le fichage d'une partie significative de la population adulte française (environ 30 % des plus de quinze ans) aurait pour meilleur résultat d'améliorer la situation au regard du surendettement d'un peu plus de un pour mille des personnes fichées . Pour votre rapporteur, cela n'est raisonnable ni au plan des principes, ni au niveau économique. Pour reprendre les termes de l'article 5 de la Convention pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé de données à caractère personnel signée à Strasbourg le 28 janvier 1981, la création d'un tel fichier n'est une solution ni « pertinente » , ni « adéquate » , et elle est « excessive » au regard de la finalité qu'elle poursuit, aussi légitime soit celle-ci.
Une seconde considération doit être avancée. Dans l'hypothèse où un fichier des crédits apparaît satisfaisant, la tentation devient grande de l'élargir à d'autres créances . C'est ainsi qu'en Belgique, comme l'ont indiqué tous les interlocuteurs de la délégation, le débat ne porte plus désormais sur l'existence même du fichier, dont se félicitent tant les associations de consommateurs, qui n'en avaient pas demandé la création, que l'UPC, qui y était pourtant très opposée à l'origine, mais bien sur son « enrichissement » de données portant sur d'autres lignes du budget des ménages : l'énergie, l'eau, la téléphonie... Si l'UPC est très favorable à cet élargissement de la CCP, toutes les associations de consommateurs, les parlementaires ainsi que les représentants ministériels rencontrés par la délégation y sont farouchement opposés pour des raisons de... protection des libertés individuelles . Mais dès lors que la BNB observe que 30 % des personnes inscrites à la procédure de règlement collectif de dettes ( i.e. procédure de surendettement belge) n'ont aucun crédit en défaut de paiement enregistré dans la centrale, confirmant ainsi que les causes du surendettement ne se limitent pas au crédit, comment refuser l'extension du fichier à toutes les créances si l'on considère qu'il est indispensable à la lutte contre le surendettement ? Pour votre rapporteur, ce débat révèle une profonde contradiction idéologique interne : soit on privilégie la protection des libertés individuelles à la lutte contre le surendettement, et l'on doit alors s'opposer à tout fichier positif, soit on fait le choix inverse, et l'on ne peut qu'accepter l'extension du fichier à toutes les créances susceptibles de déséquilibrer les comptes des ménages.
En France, il s'agirait alors d'un fichier de 50 millions de personnes . A lui seul, ce nombre fait frémir. Mais qui peut dire qu'en cas de création d'une centrale des crédits, le débat que connaît aujourd'hui la Belgique, et qui est apparemment loin d'être tranché, ne surgirait pas aussi rapidement ? L'ombre de « Big Brother » plane alentour...
Au-delà du principe, deux autres remarques peuvent être formulées . D'abord, les statistiques de la BNB portent sur une période durant laquelle les risques du crédit , à la consommation comme immobilier, ont été les plus bas dans toute l'Union européenne . Tous les Etats membres ont ainsi connu entre 2003 et 2007 une amélioration sensible en matière d' incidents de paiement comme d' élargissement de l'accès au crédit . A titre d'exemple, en France, le nombre annuel d'inscriptions supplémentaires au FICP est passé de 143 000 en 2003 (point culminant de la décennie écoulée) à un peu plus de 50 000 en 2007 (point le plus bas) : non seulement les bornes sont exactement les mêmes que celles retenues par la BNB pour étayer sa démonstration, mais le résultat statistique français est incomparablement meilleur puisque la réduction observée atteint 65 % . Ainsi, il est tout à fait excessif de prétendre que les évolutions du marché du crédit en Belgique ont pour origine la création de la CCP en 2003, année qui est précisément celle du début d'un cycle de croissance générale du crédit observé partout en Europe. Du reste, c'est ce qu'a concédé à demi-mot M. Jean Hilgers, membre du comité de direction de la BNB, trésorier et responsable de la Centrale des crédits aux particuliers , quand, lors de son entretien avec la délégation de votre commission spéciale à Bruxelles, il a affirmé sa conviction que « si la CCP n'explique pas à elle seule la baisse du taux des incidents de paiement et la hausse de l'accès au crédit observées entre 2003 et 2007, ces mouvements ne s'expliquent pas totalement sans la CCP » .
Par ailleurs, si l'on entre dans le détail des indications figurant dans le document fourni par la BNB, on peut faire cette très intéressante observation : si la CCP a éventuellement servi à quelque chose, c'est au crédit... immobilier. Il représente près de 30 % du total des contrats inscrits au fichier et, effectivement, la diminution de son taux de défaillances, qui n'était déjà pas très élevé en début de période (2,3 %), est nette puisqu'il passe à 1,6 % en 2008 : ça représente donc une réduction de 30 %. Mais, dans le même temps, le nombre de défaillances de ce que les Belges appellent « l'ouverture de crédit » et qui constitue du crédit renouvelable ou s'y apparente, a augmenté pour sa part sur la période de... 9,7 % ! Aucun des interlocuteurs de la délégation s'étant rendue à Bruxelles n'a fait état de cette situation. Si, comme on l'affirme communément, et sans aucun doute non sans raison, c'est le crédit renouvelable excessif qui est la cause principale du surendettement « actif », il apparaît ainsi clairement que ce fichier n'est pas de nature à le limiter .
Dès lors, pour des raisons tant de principe que de réalité économique, votre rapporteur demeure très réservé et peu convaincu de la nécessité d'avoir une centrale de crédit pour lutter contre le surendettement. Mais s'il fallait un dernier argument pour affirmer sa conviction, il suffirait d'observer dans les statistiques de la BNB que le nombre des nouvelles demandes de règlement collectif de dettes enregistrées par les tribunaux du travail en Belgique a augmenté de + 8,8 % en 2008 .
Quand, pendant la même année, le nombre des dossiers déposés auprès des commissions de surendettement françaises n'a progressé pour sa part que de + 3,08 % ...
Pour autant, votre rapporteur a une perception beaucoup plus favorable à l'utilité d'une centrale des crédits aux particuliers si le but qu'on lui assigne est de renforcer les conditions de la concurrence sur le marché du crédit .
Il est ainsi frappant de constater que, parmi les professionnels du crédit, les opposants au fichier sont soit les établissements bancaires, qui disposent eux-mêmes de toutes les informations pertinentes sur leurs clientèles dans leurs propres fichiers, soit les établissements financiers adossés à des banques, qui sont du reste les plus importants du marché et qui gèrent également des fichiers importants, quand ils n'échangent pas certaines de leurs informations, comme ont été autorisés par la CNIL à le faire FINAREF et SOFINCO en septembre 2005 et CETELEM et COFINOGA en novembre 2006. A l'inverse, tous les établissements de crédit favorables au fichier sont des sociétés de moindre envergure, dont la position de marché est plus restreinte et que la faible qualité des informations auxquelles ils peuvent accéder constitue à l'évidence un handicap de développement. Ainsi, les positionnements respectifs s'appuient sur des considérations concurrentielles évidentes , les établissements installés répugnant à l'idée de partager avec des challengers, voire de nouveaux entrants, des données qu'ils savent précieuses 167 ( * ) .
Votre rapporteur a du reste constaté que, pour un certain nombre d'établissements financiers étrangers, l'absence de centrale de crédits aux particuliers permettant d'étudier la solvabilité, donc le coût du risque, représente un particularisme de nature protectionniste compte tenu du fait que la France est le seul pays développé qui se dispense d'un tel instrument .
Dès lors, on a toutes les raisons de penser que l'absence de fichier est un frein à la concurrence sur le marché du crédit et que la création d'une centrale de crédit viendrait, à l'inverse, activer celui-ci, pour le plus grand bénéfice des consommateurs .
Dans cette optique , votre rapporteur considère intéressante l'idée d'instituer en France une centrale des crédits aux particuliers . Elle lui paraît d'autant plus séduisante que si l'objet de ce fichier est précisément défini comme tel, il interdit par principe un élargissement de la base de données à d'autres types de créances, qui ne sont d'aucune utilité pour renforcer la concurrence sur le marché du crédit aux ménages. Dès lors, les craintes qui sont les siennes quant à l'adéquation de l'outil à son usage en seraient atténuées.
Il s'agirait certes de prendre toutes les dispositions nécessaires pour éviter les dérives que l'on connaît dans certains pays, en particulier nordiques ou anglo-saxons, où de tels fichiers sont essentiellement utilisés en matière de prospection et de démarchage des consommateurs. Il conviendrait également d' assurer la protection des données personnelles et d'apporter les garanties pour éviter les erreurs, notamment d'homonymie, ou les fraudes.
Il n'a ainsi pas échappé à votre rapporteur que toute la sécurité du système belge repose sur le numéro de la carte nationale d'identité qui, en Belgique, est un document obligatoire (au point que les résidents étrangers se voient également attribuer une carte d'identité dotée du même algorithme numérique). La France, pour sa part, a toujours refusé, pour des raisons de principe, d'attribuer à chaque citoyen ou résident permanent un numéro identifiant unique valable pour toutes les relations entretenues avec les différentes administrations du pays. Ce choix rend bien plus délicat la gestion de la sécurité du système et si des erreurs sont toujours des événements pénibles dans des fichiers limités, que penser de celles qui adviendraient dans un vaste fichier général où seraient recensées toutes les opérations de crédit, erreurs qui pourraient alors interdire à ceux qui en sont victimes de contractualiser dans nombre de domaines ? Il sera à tout le moins indispensable d'examiner cette question de la protection des données avec une attention soutenue le jour où un tel fichier sera créé en France.
Les techniques existent d'ores et pour éviter ces deux types de difficultés. Pour assurer une sécurité maximale, le contrôle du dispositif pourrait être confié à un organisme public en garantissant la bonne application : à l'instar de la Belgique, ce pourrait être la Banque de France, nonobstant ses réticences actuelles. Mais ce choix rendrait nécessaire des procédés technologiques appropriés pour assurer que le fichier est accessible en permanence, soit pour le consulter, soit pour le renseigner, et pas seulement aux horaires d'ouverture de la Banque de France 168 ( * ) .
De ces considérations découlent d'autres interrogations, sur la nature des données enregistrées, sur les coûts d'investissements à prévoir comme sur ceux d'utilisation, sur le financement du dispositif, sur le devenir du FICP actuel et son articulation avec le fichier positif...
On le voit, la création d'une centrale de crédits aux particuliers n'est pas un acte qui peut être décidé sans un minimum d'expertise préalable, ni un encadrement législatif plus prononcé que celui des deux amendements préconisant la création d'un répertoire national des crédits aux particuliers pour des besoins professionnels. Du reste, la loi belge du 10 août 2001 relative à la Centrale des crédits aux particuliers ne fait pas moins de 34 articles et de trois pages (version française) du Moniteur belge .
Aussi votre commission spéciale a-t-elle approuvé la proposition de votre rapporteur et de votre président consistant, à l' article 27 bis , à prévoir que le principe de la création d'une centrale des crédits aux particuliers , placée sous la responsabilité de la Banque de France, fasse l'objet d'un rapport remis au Gouvernement et au Parlement , dans un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi , élaboré par une commission temporaire d'évaluation de celle-ci créée par l' article 33 A . Ce rapport précisera les conditions dans lesquelles des données à caractère personnel, complémentaires à celles figurant dans le FICP et susceptibles de constituer des indicateurs de l'état d'endettement des personnes physiques ayant contracté des crédits à la consommation, peuvent être inscrites au sein de ce fichier afin d'assurer une meilleure information des prêteurs sur la solvabilité des emprunteurs, dans le respect de la loi Informatique et libertés du 6 janvier 1978.
La commission temporaire d'évaluation sera composée de parlementaires (l'un d'entre eux en étant le président) et de représentants de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements de crédits et d'associations délivrant du microcrédit, ainsi que des associations familiales ou de consommateurs. Cette collégialité devrait permettre, conformément à l'expérience belge du Comité d'accompagnement de la CCP, de rapprocher les points de vues entre les différentes parties prenantes et de parvenir à formaliser les conditions conduisant à la création d'un fichier des crédits dont les objectifs et les spécificités seraient clairement et précisément définis .
* 156 Ainsi que les intermédiaires de l' Association française des intermédiaires bancaires (AFIB) et du Syndicat des intermédiaires en opérations de banque (SIOB).
* 157 CETELEM -BNP Paribas Personnal Finance (groupe BNP Paribas), COFIDIS ( groupe Crédit Mutuel ) , SOFINCO-FINAREF ( groupe Crédit Agricole ) .
* 158 Banque Accord (groupe Auchan), groupe Casino , LaSer Cofinoga (groupe Galeries Lafayettes et BNP Paribas PF), Banque S2P Pass (groupe Carrefour et BNP Paribas PF).
* 159 L' Association de défense d'éducation et d'information du consommateur (ADEIC), l' Association Force Ouvrière Consommateurs (AFOC), l' Association française des usagers des banques (AFUB), la Confédération de la Consommation, du Logement et du Cadre de Vie (CLCV), la Confédération syndicale des familles (CSF) et l' UFC Que Choisir . Seule s'est exprimée favorablement la représentante de Familles rurales , association adhérente de l' UNAF .
* 160 Les mercredis 27 avril et 25 mai 2009, comptes rendus consultables sur le site du Sénat aux adresses suivantes : http://www.senat.fr/bulletin/20090427/cionspeciale.html#toc3 et http://www.senat.fr/bulletin/20090525/cionspeciale.html#toc2.
* 161 Des représentants de la Banque nationale de Belgique (BNB), du gouvernement central, des associations de consommateurs et de l' Union professionnelle du Crédit (UPC), qui regroupe la plupart des établissements de crédit, ainsi que des parlementaires (voir la liste des personnes rencontrées en annexe II, page 364).
* 162 A titre d'exemple, près de 33,8 millions de cartes du réseau Carte Bleue étaient en circulation en France à la fin de l'année 2008 et, au total, le nombre des cartes bancaires est estimé à 55 millions.
* 163 Baromètre du surendettement de la Banque de France à la fin du mois de mars 2009.
* 164 Etude auprès de personnes en situation de surendettement réalisée par téléphone du 23 au 28 mars 2009 sur un échantillon national de 1002 personnes âgées de plus de 18 ans - Institut CSA.
* 165 Statistiques - Centrale des crédits aux particuliers - 2008 - Banque nationale de Belgique.
* 166 Choix le plus favorable, effectué pour que les évolutions positives ne soient pas affectées par la modification du contexte économique et financier intervenue dans le courant de l'année 2008.
* 167 C'est du reste ce qu'a indiqué à la délégation s'étant rendue à Bruxelles M. Bernard Beyens, président sortant de l'UPC, General Counsel de Citibank Belgium , pour expliquer les réticences initiales de l'UPC.
* 168 En Belgique, la CCP n'est ouverte que du lundi au vendredi de 6 heures à 23h30 (mais pas les jours de fermeture bancaire, qui ne sont pas exclusivement des jours fériés), ainsi que le samedi de 9 heures à 17 heures. Ainsi, toutes les activités commerciales à crédit doivent être normalement interrompues le samedi en fin de journée, précisément au moment du « rush » des clients, et évidemment le dimanche, sauf à ce que les prêteurs prennent d'importants risques.