B. LA FRANCE DOIT NÉANMOINS POURSUIVRE SES EFFORTS
Malgré les nombreuses réformes déjà intervenues, la Commission européenne estime que la France n'a pas transposé, comme elle l'aurait dû, l'ensemble des textes communautaires applicables au secteur. C'est ainsi que, le 26 juin 2008, les autorités bruxelloises ont adressé au Gouvernement une lettre de mise en demeure. Les griefs de la Commission portent sur trois points principaux.
1. Le système français de tarification ferroviaire ne répond pas aux exigences d'indépendance et de performance
Dans sa lettre de mise en demeure, la Commission européenne critique le dispositif français qui régit les péages ferroviaires acquittés par les entreprises utilisant le réseau. Elle fait valoir que le régime de ces redevances n'est pas déterminé de façon indépendante par le gestionnaire du réseau (RFF), comme l'exigerait l'article 4 (1) de la directive 2001/14/CE. En effet, cette décision relève en France du ministère chargé des Transports 21 ( * ) .
Au-delà de la procédure de fixation des redevances proprement dite, les griefs de la Commission portent sur des aspects plus techniques du système de péage, qui touchent au contenu même de la tarification, à savoir :
- le fait que le montant des péages acquittés par les trains de fret soit inférieur aux coûts marginaux d'utilisation de l'infrastructure, en violation des dispositions de l'article 7 (3) de la directive 2001/14/CE ;
- et l'absence, dans la tarification, d'éléments incitant les entreprises ferroviaires et le gestionnaire de l'infrastructure à réduire au minimum les défaillances et à améliorer les performances du réseau, comme prévu à l'article 11 de la directive 2001/14/CE.
2. La gestion de l'infrastructure n'offre pas de garanties d'indépendance suffisantes à l'égard des opérateurs
La Commission européenne rappelle que si en vertu de l'article 6 de la directive 91/440/CEE modifiée « les Etats membres peuvent prévoir que cette séparation comporte des divisions distinctes au sein d'une même entreprise ou que la gestion de l'infrastructure est assurée par une entité distincte », ils doivent assurer « la séparation entre la gestion de l'infrastructure et l'activité de transports ».
Le même texte 22 ( * ) précise que les Etats membres ont obligation de prendre « les mesures nécessaires pour assurer que les fonctions essentielles en vue de garantir un accès équitable et non discriminatoire à l'infrastructure (...) soient confiées à des instances ou entreprises qui ne sont pas elles-mêmes fournisseurs de services de transport ferroviaire. Quelles que soient les structures organisationnelles, cet objectif doit être atteint d'une manière probante. » Il est reproché à la France de ne pas respecter cette règle , dans la mesure où la loi française du 13 février 1997 23 ( * ) impose au gestionnaire du réseau (RFF) de déléguer l'exécution de ses missions aux services de la SNCF en charge de l'infrastructure , services qui ont été regroupés au sein de l'entité SNCF Infra. Or, cet ensemble n'est nullement indépendant du reste de l'entreprise, dont l'activité principale demeure la fourniture de services de transport ferroviaire.
Au nombre des missions déléguées par RFF à SNCF Infra, figure notamment l'allocation des sillons, c'est-à-dire l'octroi aux différents transporteurs -parmi lesquels la SNCF proprement dite- des autorisations d'utilisation des capacités du réseau. Cette activité revêt une importance déterminante pour le bon fonctionnement du jeu de la concurrence. C'est pourquoi le droit communautaire l'identifie aux « fonctions essentielles en vue de garantir un accès équitable et non discriminatoire à l'infrastructure » 24 ( * ) . Ces fonctions devant être assurées de façon strictement indépendante des entreprises de transport ferroviaire, la Commission européenne fait grief à la France d'en avoir confié l'exécution à la SNCF.
* 21 Décret n° 97-446 et arrêté interministériel du 30 décembre 1997 relatif aux redevances d'utilisation du réseau ferré national, modifié en dernier lieu le 10 décembre 2004.
* 22 Articles 6 (2) et 6 (3) de la directive.
* 23 Loi 97-135 portant création de l'établissement public Réseau ferré de France.
* 24 Annexe II de la directive précitée.