3. Le défi environnemental
En prise directe avec les écosystèmes, l'agriculture a certes des effets néfastes sur l'environnement (sollicitation intensive de la ressource en eau, responsabilité partielle dans la pollution des sols ...), mais également, et sans doute en proportion bien plus importante, des externalités positives en termes de préservation des ressources naturelles et de gestion de la biodiversité. Les activités agricoles contribuent en effet à prévenir ou limiter les conséquences de risques naturels (crues, incendies, érosion des sols ...) ou de nuisances environnementales provenant d'autres secteurs d'activité (utilisation des boues de stations d'épuration, des composts d'ordures ménagères ...).
Cette dimension environnementale de l'agriculture est aujourd'hui très largement prise en compte par la PAC, une inflexion majeure ayant été donnée à cet égard avec l'introduction lors de sa dernière réforme du principe d'éco-conditionnalité. S'il est indispensable de conserver et de pérenniser cette orientation, il importe cependant de ne pas surcharger de contraintes les producteurs, de les soumettre à des règles claires et continues, et surtout de ne les édicter que lorsqu'elles correspondent à des nécessités reconnues et auxquelles il est techniquement et économiquement possible de pourvoir.
4. Le défi énergétique
La réduction des stocks d'énergie fossile et l'engagement de la communauté internationale -relayée avec force par l'Union européenne- à limiter le réchauffement climatique ouvrent une nouvelle voie au monde agricole.
La production de biocarburants et l'utilisation de la biomasse permettront en effet d'atteindre ces objectifs tout en valorisant les espaces naturels les accueillant. Par ailleurs, les exploitations agricoles devraient devenir très largement productrices d'énergie à usage interne, comme l'illustre la volonté du ministère en charge de l'agriculture de rendre les agriculteurs autonomes sur le plan énergétique.
De consommatrice nette d'énergie, l'agriculture européenne doit devenir aujourd'hui productrice nette et constituer une alternative naturelle aux ressources énergétiques traditionnelles. Cela suppose le soutien, avant tout à l'échelle communautaire, d'une politique d'accompagnement efficace, mais également une protection du marché européen contre la concurrence déloyale de productions ne respectant pas les mêmes critères sociaux ou environnementaux que ceux auxquels sont soumis nos producteurs.
5. Le défi d'une croissance ancrée dans les territoires
Difficilement délocalisable, située dans des bassins de production répartis sur tout le territoire et générant un réseau dense d'entreprises en prise directe avec l'économie locale et largement pourvoyeuse d'emplois, l'agriculture participe plus que tout autre secteur d'activité à la cohésion territoriale, composante majeure de la cohésion sociale dans une société largement urbanisée.
De récents rapports sénatoriaux, portant par exemple sur les filières arboricole, viticole et ovine, ont montré l'enjeu fondamental que constitue le maintien d'activités de production ou d'élevage dans des zones aux alternatives limitées, où elles constituent souvent les « dernières activités avant la friche » et où elles induisent une activité faisant vivre ces territoires.
Cette action de préservation des équilibres territoriaux, située au coeur de la PAC originelle et largement déclinée par notre pays, doit constituer à la fois l'objectif et la justification du maintien d'une politique commune forte en matière agricole. Si elle relève aujourd'hui plus particulièrement du second pilier de la PAC et d'aides découplées, cette externalité positive doit continuer de recevoir un soutien également au titre du premier pilier : ce n'est que parce qu'ils retirent un revenu de leur activité que les agriculteurs seront incités à la maintenir sur des territoires qu'ils contribuent à animer.