C. LA NÉCESSITÉ DE FAIRE FACE À DE NOUVEAUX DÉFIS
Le bilan qui peut être dressé de la PAC au bout d'une cinquantaine d'années d'existence est globalement très positif. En dépit de certaines imperfections, cette politique a en effet permis de moderniser le secteur agricole européen, de parvenir à l'autosuffisance alimentaire, d'améliorer la qualité et la sécurité des aliments, d'intégrer des préoccupations en matière d'environnement et de bien-être animal, et de conserver une activité économique et des paysages sur l'ensemble du territoire européen, y compris dans les zones les plus défavorisées.
Pourtant, la PAC doit aujourd'hui évoluer afin de s'adapter à un environnement en pleine mutation. L'agriculture européenne du XXI e siècle devra ainsi faire face à cinq grands défis, qui seront également autant d'opportunités à saisir pour son développement futur.
1. Le défi alimentaire
Notre planète, peuplée aujourd'hui par 6 milliards d'habitants, en comptera 9 en 2050. Alliée à l'élévation rapide du niveau de vie dans les pays émergents, cette croissance démographique devrait conduire à un doublement de la demande alimentaire d'ici une quarantaine d'années, notamment en produits carnés. Dans le même temps, l'accès à la sécurité alimentaire de près de 800 millions de personnes souffrant de malnutrition constitue une urgence à relever dès à présent. Enfin, à une échelle plus régionale, la satisfaction des besoins alimentaires des 500 millions d'européens devra être un objectif prioritaire.
Or, compte tenu de ses atouts agronomiques et climatiques, du haut degré de technicité de son agriculture et des performances de son industrie agroalimentaire, l'Union européenne est idéalement placée pour relever ce défi crucial. Ce à condition, toutefois, que l'agriculture européenne continue de faire l'objet d'une politique intégrée bénéficiant d'un investissement budgétaire et politique important.
2. Le défi des prix et des revenus.
Orientés depuis des années à la baisse, les cours des matières premières agricoles ont connu une évolution à la hausse en 2006 (+ 5,2 %) et surtout en 2007 (+ 10 %), la tendance s'étant confirmée durant le premier trimestre 2008, avant de s'infléchir ensuite, et même de connaître un retournement.
Sur le long terme cependant, la tendance devrait être à l'augmentation des cours des matières premières agricoles, du fait de la limitation structurelle de l'offre (intensification des bouleversements climatiques, réduction des surfaces agricoles, accroissement du prix des intrants ...) et de la croissance de la demande (hausse du pouvoir d'achat dans les pays émergents, développement des besoins en biocarburants, hausse des besoins en alimentation animale ...).
L'augmentation de long terme du niveau moyen des prix devrait s'accompagner d'un accroissement de leur volatilité, du fait d'une imbrication croissante des marchés et d'une intensification des mouvements spéculatifs sur les matières premières. Selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) 3 ( * ) , les prix des produits agricoles devraient ainsi rester élevés et volatiles sur la prochaine décennie.
Cette évolution, qui a bien sûr profité aux agriculteurs des filières en croissance, cache en fait des réalités disparates : si les producteurs de céréales ont vu leurs revenus doubler, les éleveurs ont vu les leurs diminuer, de même que ceux du secteur des fruits et légumes.
Dans un environnement de plus en plus sensible aux signaux économiques, climatiques ou sanitaires, le monde agricole devra disposer d'outils institutionnels et financiers lui permettant de lisser les variations de cours et de faire face aux crises de toute sorte. Cela passe d'abord par un maintien, au niveau communautaire, d'outils d'intervention adaptés aux variations des marchés. Cela doit également se traduire par la promotion d'un système assurantiel cofinancé par les pouvoirs publics et les professionnels.
* 3 Perspectives agricoles, mai 2008.