CHAPITRE II - Dispositions en faveur de la cohésion sociale

Article 6 (art. L. 131-6, L. 131-6-2, L. 133-6-2 et L. 136-3 du code de la sécurité sociale) - Cotisation sociale proportionnelle au chiffre d'affaires

Objet : Cet article institue une cotisation sociale proportionnelle au chiffre d'affaires pour les travailleurs indépendants bénéficiant du régime de la microentreprise.

I - Le dispositif proposé

Annoncée par le Président de la République le 14 novembre 2006, cette mesure destinée à faciliter le démarrage de petites activités indépendantes a fait l'objet d'un amendement du Gouvernement au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007. Adoptée par le Sénat le jour même de sa présentation par le Président de la République, elle a été annulée par le Conseil constitutionnel pour des raisons de procédure.

Le présent article reprend ce dispositif en l'insérant dans une série de mesures en faveur de la cohésion sociale.

Il s'agit de remédier à une situation aussi pénalisante que démotivante, lorsque le niveau des cotisations forfaitaires dues par les travailleurs indépendants commençant une activité s'avère supérieur au chiffre d'affaires réalisé.

Cette anomalie a été maintes fois dénoncée, en particulier dans le rapport « Pour un contrat d'accompagnement généralisé - Contrat de travail accompagné ou contrat de création accompagné » remis par votre rapporteur au Premier ministre en mai 2003. Celui-ci indiquait que « pour ce type d'initiative économique (les microentreprises constituées par un travailleur indépendant) , la solution est à rechercher du côté d'une progressivité spéciale » .

Le régime actuel de la microentreprise

Selon la législation actuelle, les travailleurs indépendants soumis au régime fiscal de la microentreprise, déterminé aux articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts, doivent s'acquitter d'une contribution sociale forfaitaire dans les conditions suivantes :

- pour les activités commerciales, le montant maximum du chiffre d'affaires permettant de bénéficier du régime est de 76.300 euros ;

- pour les activités artisanales et de service, le plafond annuel de chiffre d'affaires est de 27.300 euros ;

- le forfait de charges sociales à acquitter est au minimum de 3.123 euros la première année et de 4.470 euros la deuxième année, quel que soit le chiffre d'affaires réalisé.

Cela signifie que, trois mois après avoir démarré son activité et avant même d'avoir encaissé un euro de chiffre d'affaires, le travailleur indépendant doit s'acquitter de 781 euros de charges sociales.

Cette situation n'est à l'évidence pas favorable à l'émergence de petites activités, ni à celui de l'insertion professionnelle et sociale. Elle a même sans doute pu contribuer à développer le travail illégal.

Par exemple, un travailleur qui perçoit un peu plus que le RMI en exerçant une activité indépendante quelques jours par semaine seulement peut aujourd'hui dépenser plus des deux tiers de son revenu en prélèvements sociaux.

L'instauration d'un « bouclier social »

La réforme vise donc à lever le frein manifeste à l'activité d'une cotisation forfaitaire « aveugle » et parfois nettement excessive.

Selon le Gouvernement, elle répond à quatre objectifs :

- un objectif de justice sociale, en instaurant le principe d'un paiement à hauteur des moyens ;

- un objectif d'égalité entre salariat et travail indépendant, le salarié n'ayant pas à s'acquitter d'une cotisation minimale, mais bénéficiant au contraire d'exonérations pour une rémunération modeste ;

- un objectif de soutien du pouvoir d'achat des revenus les plus modestes ;

- un objectif d'emploi, en luttant contre le travail illégal, en simplifiant les procédures et en rendant le travail plus rémunérateur.

Aussi, afin de garantir que les prélèvements sociaux ne représentent pas une part trop importante des revenus tirés de l'activité, le présent article met en place une cotisation sociale proportionnelle . Avec ce nouveau mode de calcul, les cotisations seront limitées à 14 % du chiffre d'affaires pour les activités de commerce et à 24,5 % pour les services.

En outre, pour que le paiement des charges sociales devienne une opération simple dans la phase de montée en charge de l'entreprise, le travailleur pourra payer ses charges sociales chaque trimestre sur la base du chiffre d'affaires constaté.

Ces mesures pourront être utilisées pendant une période maximum de trois ans. Naturellement, les droits sociaux équivalents en termes de retraite ou d'assurance maladie sont garantis.

La mesure proposée

Le paragraphe I modifie l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale qui fixe les règles d'assujettissement aux cotisations sociales (maladie, famille, vieillesse) des professions non salariées artisanales, industrielles ou commerciales. Ainsi, il prévoit que les travailleurs indépendants entrant dans le champ du « bouclier social » peuvent demander, au cours de leur première année d'activité professionnelle, ainsi qu'au cours des deux années civiles suivantes, que l'ensemble des cotisations sociales dont ils sont redevables soient calculées trimestriellement en appliquant le taux relatif à leur situation au montant de leur chiffre d'affaires ou de leurs revenus non commerciaux effectivement réalisés.

Compte tenu de ces dispositions, le paragraphe II effectue une coordination au sein de l'article L. 131-6-1 du même code afin de ne pas permettre l'utilisation simultanée de deux dispositifs favorables : le bouclier social, d'une part, la possibilité de reporter les cotisations dues au titre de la première année et d'en fractionner le paiement sur cinq ans, d'autre part.

Le paragraphe III insère un nouvel article dans le code de la sécurité sociale, l'article L. 131-6-2, pour définir le régime du bouclier social. Celui-ci s'adresse aux travailleurs non salariés non agricoles imposés suivant le régime fiscal de la microentreprise et donc remplissant les conditions de seuil de chiffre d'affaires et de revenus définis aux articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts. Ils bénéficient d'une exonération de cotisations sociales égale à la différence entre le total des cotisations dont ils sont redevables et une fraction de leur chiffre d'affaires ou de leurs revenus non commerciaux qui sera fixée par décret.

Cette disposition n'est pas applicable lorsque les travailleurs concernés bénéficient d'autres régimes d'exonérations, qui sont d'ailleurs plus favorables : au titre de l'aide à la création ou reprise d'entreprise (Accre), de la création d'entreprise dans les départements d'outre-mer, de l'installation dans une zone franche urbaine ou une zone de redynamisation urbaine.

Le paragraphe IV prévoit une dérogation au principe de déclaration obligatoire des revenus des travailleurs indépendants au régime social des indépendants : les personnes bénéficiant du bouclier social sont dispensées de cette déclaration, un décret devant fixer les obligations déclaratives particulières qui leur seront applicables.

Le paragraphe V apporte deux précisions à l'article L. 136-3 du code de la sécurité sociale : l'établissement de la contribution sur une base annuelle et le caractère optionnel du bénéfice du bouclier social, de son mode de déclaration et de paiement simplifié chaque trimestre.

Enfin, le paragraphe VI spécifie que le bouclier social s'appliquera pour la première fois au calcul des cotisations assises sur les revenus de l'année 2007.

II - La position de votre commission

Votre commission se félicite de l'avancée incontestable que doit permettre l'adoption de cette mesure.

Elle l'estime bien ciblée envers les microactivités , voie privilégiée pour une insertion professionnelle et sociale, tant en métropole qu'outre-mer où nombre de petites activités échappent trop souvent aux prélèvements fiscaux et sociaux, en raison de la complexité des procédures et du coût du « ticket d'entrée » au statut de microentrepreneur.

Elle constate néanmoins que, malgré un souci affiché de simplification, le dispositif prévu reste encore complexe et nécessitera de gros efforts d'accompagnement de la part des Urssaf et du régime social des indépendants (RSI).

Par ailleurs, pour les personnes remplissant les conditions du régime de la microentreprise, le bouclier social ne sera favorable que jusqu'à un seuil de chiffre d'affaires ou de revenus rapidement atteint. En effet, dès un montant de chiffre d'affaires annuel proche de 22.000 euros, le commerçant sera pénalisé, dans sa gestion de trésorerie, par l'application d'une cotisation proportionnelle de 14 %. L'artisan dont les revenus atteindront plus de 12.000 euros annuels sera pénalisé dans les mêmes conditions.

Ces seuils de neutralité apparaissent extrêmement bas et impliqueront beaucoup de vigilance de la part des travailleurs indépendants pour choisir le système de paiement de cotisations le plus favorable - proportionnel ou forfaitaire -, ce choix pouvant avoir un effet non négligeable sur la gestion de leur trésorerie. L'idéal serait que le travailleur indépendant puisse automatiquement bénéficier du meilleur système en fonction de sa situation.

Il apparaît donc nécessaire d'engager rapidement une réflexion sur cette question, de façon à poursuivre le processus de simplification et à réellement faciliter la création de petites activités en rendant plus aisément prévisible et mieux lissé l'acquittement des cotisations sociales.

Votre commission constate par ailleurs avec satisfaction que, pour le Gouvernement, cette mesure doit bien, conformément à l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, faire l'objet d'une compensation au régime de sécurité sociale des indépendants , ainsi que cela est précisé dans l'exposé des motifs.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification .

Article 7 (art. L. 117-2 nouveau du code de l'action sociale et des familles) - Création d'une aide à la réinsertion familiale et sociale des vieux migrants

Objet : Cet article a pour objet d'améliorer les conditions d'existence de certains anciens migrants, aujourd'hui âgés et vivant toujours dans des foyers d'hébergement, en leur donnant la possibilité d'effectuer plus facilement des allers et retours entre la France et leur pays d'origine.

I - Le dispositif proposé

Le présent article tend à créer un mécanisme nouveau, et à certains égards inédit, d'aide à la réinsertion familiale et sociale des anciens migrants dans leur pays d'origine. Il propose dans cet objectif d'insérer un nouvel article L. 117-2 dans le code de l'action sociale et des familles.

Ce dispositif s'adresse essentiellement aux vieux travailleurs immigrés hébergés dans les foyers de l'Adoma, c'est-à-dire de l'ancienne société nationale de construction pour les travailleurs (Sonacotra), qui ont des revenus modestes et souhaitent séjourner durablement dans leur pays d'origine, tout en effectuant des allers et retours en France. Or, aujourd'hui, ces personnes renoncent à ce désir bien légitime, car elles ne veulent pas perdre le bénéfice du minimum vieillesse.

Il convient en effet de rappeler :

- que les retraités français et étrangers sont libres, en règle générale, de percevoir la retraite pour laquelle ils ont cotisé aussi bien en France qu'à l'extérieur du territoire national ;

- qu'en revanche, le service d'une prestation non contributive comme le minimum vieillesse et l'ensemble des minima sociaux, est soumis à une condition de séjour régulier en France ;

- que l'article 76 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 (n° 2005-1579 du 19 décembre 2005), a mis un terme, depuis le 1 er janvier 2006, à l'exportation du minimum vieillesse à l'étranger. Toutefois, les 260.000 personnes auxquelles cet avantage a été accordé entre 1998 et 2005 continueront à le percevoir jusqu'à leur décès. Cela représentera, au cours de ces prochaines décennies, un coût de plusieurs milliards d'euros pour les finances publiques ;

- que la Cour des comptes avait réclamé la suppression de l'exportation du minimum vieillesse dans son rapport de septembre 2005 sur l'exécution de la loi de financement de la sécurité sociale ;

- que cette prestation représente dans les pays en développement un montant plusieurs fois supérieur, en termes de parité de pouvoir d'achat, à son niveau relatif en France.

Les vieux migrants de l'Adoma qui touchent une retraite très modeste constituent donc un cas particulier au sein de ce nouveau cadre juridique, car ils se trouvent en quelque sorte obligés de rester en France. Le Gouvernement souhaite donc améliorer leurs conditions d'existence, avant tout pour des considérations humanitaires, mais également pour libérer des places dans ces foyers suroccupés.

Dans cet objectif, le projet de loi propose en substance de leur permettre de recevoir une aide équivalant à la somme qu'ils auraient perçue si le minimum vieillesse était toujours exportable. Ces personnes auraient alors les moyens de réaliser des allers et retours dans leur pays d'origine, tout en continuant à résider en France quelques mois par an, dans le cadre d'un système de location alternée. A ce titre, l'exposé des motifs du projet de loi fournit quelques précisions importantes :

« ... (...) la demande de logement en foyers de travailleurs migrants et en résidences sociales est, surtout dans certaines régions, forte et difficile à satisfaire. Plusieurs gestionnaires de ces foyers ou résidences sociales expérimentent aujourd'hui un système de location alternée, permettant de loger quatre personnes alternativement dans la même chambre, à raison, en moyenne, de trois mois par an chacune.

« Une convention-type est alors signée entre le gestionnaire et le résident (le locataire). La généralisation de ce dispositif serait de nature à répondre aux souhaits de nombreux retraités et de libérer des places dans les foyers. »

Le présent article du projet de loi définit le cadre général de cette aide à la réinsertion, notamment en ce qui concerne ses conditions d'accès et ses modalités de calcul. Il en renvoie néanmoins très largement les modalités au pouvoir réglementaire, sur lesquelles le Gouvernement devra apporter des précisions à l'occasion des débats en séance publique. Par ailleurs, la mise en oeuvre de ces dispositions législatives nécessitera la généralisation de ce système de location alternée actuellement en cours d'expérimentation.

Les conditions d'accès

Pour bénéficier de cette aide, les demandeurs devront répondre à sept critères cumulatifs. Il convient d'ailleurs de souligner que la rédaction proposée pour ce nouvel article L. 117-2 du code de l'action sociale et des familles innove, en consacrant la notion juridique de « vieux migrant » , au lieu d'avoir recours à celle de « vieux travailleur » , couramment utilisée dans notre droit social. Le choix de ce terme illustre sans doute la spécificité de la situation de ces personnes, comme de leur mode d'hébergement.

Cette nouvelle aide à la réinsertion s'adresse :

- aux étrangers extérieurs aux pays de l'Union européenne et de l'Espace économique européen ;

- vivant en situation régulière en France ;

- âgés au minimum de soixante-cinq ans, ou de soixante ans en cas d'invalidité ;

- célibataires ;

- justifiant d'une résidence régulière et ininterrompue en France pendant les quinze ans précédant la demande d'aide ;

- dont les revenus sont inférieurs à un seuil fixé par décret ;

- qui disposent d'un logement éligible au titre de l'allocation logement à caractère social (ALS) ou de l'allocation de logement familial (ALF). Cette rédaction très large signifie d'ailleurs que le champ d'application envisagée pour la mesure dépasse sensiblement le seul cas des foyers d'hébergement de l'Adoma et des autres bailleurs sociaux du même type.

Modalités de calcul

Les dispositions du projet de loi exposent les principales modalités de versement de cette aide. Il est prévu d'en confier la gestion à l'agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations. Son montant sera calculé en fonction des ressources du bénéficiaire, versé annuellement et révisé, en fonction de l'inflation.

Caractéristiques financières et juridiques

Cette mesure présente des caractéristiques lui donnant une nature tout à fait spécifique, voire exceptionnelle, dans notre droit social. Il convient en effet de noter que cette aide au logement pourra être perçue alors que son bénéficiaire résidera la plus grande de partie du temps à l'étranger.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit :

- qu'elle est exclusive de toute aide personnelle au logement et de tout minimum social ;

- qu'elle doit être supprimée lorsqu'il est constaté que l'une des conditions exigées pour son service n'est plus remplie ;

- qu'elle est cessible et saisissable dans les mêmes conditions et limites que les salaires, à l'exception toutefois des frais hospitaliers pour lesquels une limite de 90 % sera applicable au profit des établissements hospitaliers et des caisses de sécurité sociale.

Enfin, ce nouvel article L. 117-2 du code de l'action sociale et des familles procède, en son dernier alinéa, à un large renvoi au pouvoir réglementaire. Il serait donc souhaitable, pour que le Sénat apprécie pleinement les effets de cette mesure, que les débats en séance publique fournissent au Gouvernement l'opportunité :

- de préciser le contenu de la « condition de résidence régulière et ininterrompue en France pendant les quinze années précédant la demande d'aide » imposée par le projet de loi ;

- d'indiquer en quoi consiste l'obligation d'effectuer « des séjours de longue durée dans leur pays d'origine » et quelle pourrait être la durée de ces séjours ;

- de préciser quelles seront les modalités financières de cette aide, la rédaction du projet de loi se bornant en effet à indiquer que « son montant est calculé en fonction des ressources du bénéficiaire » ;

- d'indiquer quel sera le régime applicable à ces personnes amenées à l'avenir à résider la plus grande partie du temps à l'étranger, en ce qui concerne la prise en charge des frais d'hospitalisation, d'une part, de l'ensemble des dépenses d'assurance maladie, d'autre part ;

- de préciser si cette aide sera cumulable avec une pension d'ancien combattant.

II - La position de votre commission

Votre commission comprend parfaitement la nécessité humaine et morale de faciliter les conditions d'existence de ces vieux travailleurs migrants, auquel la France des Trente Glorieuses doit beaucoup. Elle ne peut néanmoins que formuler un jugement d'ensemble très nuancé sur les modalités de cette mesure, qui soulèvent d'importantes difficultés sur le plan juridique et financier :

- le coût potentiel pour les finances de l'Etat n'est pas connu avec exactitude. Certaines estimations officieuses recueillies par votre rapporteur font état de 80 millions d'euros par an, dans la mesure où les places libérées temporairement dans les foyers d'hébergement permettront d'accueillir des personnes nouvelles bénéficiant à leur tour des mécanismes d'aide au logement. Il conviendrait néanmoins d'obtenir des données chiffrées plus précises ;

- les modalités de lutte contre la fraude méritent d'être mieux définies ;

- le risque d'une requalification de cette aide en prestation de sécurité sociale par la Cour de justice des communautés européennes, à l'occasion d'une question préjudicielle ou d'un recours contentieux, ne doit pas être négligé. Or, dans cette hypothèse, la France pourrait être contrainte de rouvrir le bénéfice du minimum vieillesse à l'étranger, ce que votre commission ne souhaite pas.

En effet, la jurisprudence de la CJCE 10 ( * ) montre que les juges européens se livrent à un examen des mesures sociales en fonction de leur finalité, qu'ils examinent pour cela non seulement l'objet de ces mesures, leurs modalités, mais même leur mode de financement et qu'ils peuvent requalifier une allocation en prestation de sécurité sociale. A ce contrôle déjà extrêmement poussé de la qualification juridique des faits, s'ajoute la nécessité pour les Etats membres de respecter le droit communautaire, y compris dans l'exercice d'une compétence nationale comme la création d'une prestation.

Dans ces conditions, il convient de porter la plus grande attention à la rédaction du présent article.

Votre commission vous propose donc d'adopter six amendements destinés à renforcer sa sécurité juridique :

- en limitant ce dispositif à une période transitoire de trois ans, à l'issue de laquelle l'inspection générale des affaires sociales et l'inspection générale des finances réaliseront un premier bilan de ses effets ;

- en réservant cette aide aux locataires des grands bailleurs sociaux agréés par l'Etat, à commencer par l'Adoma ;

- en indiquant que cette aide est à la charge de l'Etat ;

- en définissant les conditions dans lesquelles les vieux migrants pourront rejoindre leur pays d'origine, sur la base d'une présence en France minimale de trois mois par an ;

- en précisant que, vu ses objectifs, son objet et son mode de financement, cette aide ne constitue en aucun cas une prestation de sécurité sociale ;

- en fixant le cadre général dans lequel les services de l'Etat pourront procéder à des contrôles.

Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 8 (art. 199 sexdecies du code général des impôts) - Crédit d'impôt « services à la personne »

Objet : Cet article vise à compléter l'article 70 de la loi de finances rectificative pour 2006 qui a institué un dispositif de crédit d'impôt sur le revenu au titre des services à la personne.

I - Le dispositif proposé

Annoncé lors de la conférence « emploi-revenus » du 14 décembre dernier, le crédit d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile, destiné aux ménages qui ne sont pas imposables à l'impôt sur le revenu, a été introduit dans la loi de finances rectificative par le Sénat, grâce au vote d'un amendement déposé par notre collègue Alain Gournac. La commission mixte paritaire réunie sur ce texte en a toutefois réduit le champ d'application. Le présent article propose de revenir sur ce vote, en élargissant le champ du crédit d'impôt, afin de rendre le droit applicable plus cohérent.

La réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile

Instituée par l'article 17 de la loi de finances rectificative pour 1991 et codifiée à l'article 199 sexdecies du code général des impôts, cette réduction permet de déduire 50 % du montant des dépenses effectuées pour l'emploi d'un salarié à domicile de la somme acquittée au titre de l'impôt sur le revenu, dans la limite d'un plafond.

Ce plafond, fixé à l'origine à 3.811 euros, a été porté à 13.720 euros par la loi de finances pour 1995. La loi de finances pour 1998 l'a ensuite diminué de moitié, sauf pour les contribuables ayant à leur charge une personne invalide ou un enfant handicapé. Par la suite, le dispositif a été relancé : l'article 8 de la loi de finances pour 2003 a porté le plafond à 10.000 euros.

Actuellement, le 3 de l'article 199 sexdecies du code général des impôts prévoit un plafond de 12.000 euros, majoré de 1.500 euros par enfant à charge, dans la limite de 15.000 euros, ce plafond étant porté à 20.000 euros pour les personnes ayant à leur charge une personne invalide ou un enfant handicapé.

La loi du 26 juillet 2005 sur le développement des services à la personne

Cette loi repose sur l'idée que les services à la personne constituent un important gisement d'emplois, en particulier les services auprès des personnes âgées et des enfants, et qu'il est donc nécessaire de les encourager, à la fois pour améliorer le confort des ménages et contribuer à la création d'emplois.

A cet effet, la loi a défini les services concernés et les conditions dans lesquelles ceux-ci peuvent entraîner le bénéfice d'un certain nombre d'avantages, en particulier fiscaux. Elle a également institué le chèque emploi-service universel.

Le crédit d'impôt « services à la personne »

L'article 70 de la loi de finances rectificative pour 2006 a réécrit l'article 199 sexdecies du code général des impôts afin de prévoir, en plus de la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile, un crédit d'impôt, régi par des modalités très similaires, destiné aux personnes qui ne sont pas redevables de l'impôt sur le revenu.

L'objectif sous-jacent est triple :

- favoriser l'emploi et lutter contre le travail au noir ;

- faire profiter les ménages les plus modestes, en principe non ou faiblement soumis à l'impôt sur le revenu, du bénéfice de l'avantage fiscal au titre des dépenses engagées pour l'emploi d'un salarié à domicile ;

- permettre la reprise d'un emploi en facilitant, par exemple, le recours à des gardes d'enfants et en limitant un certain nombre d'obstacles matériels trop souvent rencontrés par les personnes concernées.

Le crédit d'impôt est égal à 50 % des sommes engagées pour l'emploi d'un salarié à domicile, au titre de la garde d'enfant ou du soutien scolaire, dès lors que ces dépenses sont payées à l'aide du chèque emploi-service universel. Peuvent en bénéficier les ménages dont les deux conjoints travaillent ainsi que les personnes isolées qui ont une activité professionnelle. Le crédit d'impôt s'impute sur l'impôt sur le revenu après déduction des diverses réductions d'impôt prévues par le code, des crédits d'impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires. S'il excède l'impôt dû, la somme correspondante est restituée.

L'extension du crédit d'impôt

Le présent article complète et modifie de deux façons le dispositif voté dans la loi de finances rectificative pour 2006 :

- pour les personnes qui n'ont pas directement recours à un employé à domicile, il étend le bénéfice du crédit d'impôt aux personnes qui passent non seulement par l'intermédiaire d'une association ou d'une entreprise agréée mais également qui font appel à un organisme agréé ; cette précision vise en particulier les centres communaux d'action sociale ;

- il ne restreint pas le bénéfice du crédit d'impôt aux seuls services de garde d'enfant et de soutien scolaire à domicile mais le rend applicable à l'ensemble des services à la personne définis à l'article D. 129-35 du code du travail, soit à une vingtaine de métiers.

Il est précisé que cet article s'applique à compter de l'imposition des revenus de l'année 2007.

II - La position de votre commission

Votre commission se félicite que la mesure votée par le Sénat dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2006, mais restreinte par la commission mixte paritaire, soit rétablie de manière à en permettre une application plus complète et plus équitable.

Elle estime que, pour un montant raisonnable (environ 110 millions d'euros), elle aura un effet positif en termes de création d'emplois, ce qui entraînera d'ailleurs la perception de cotisations sociales. En outre, elle devrait apporter une aide appréciable pour les ménages à revenus modestes.

Aussi, elle vous demande d'adopter cet article sans modification .

Article 9 (art. L. 262-9-1 du code de l'action sociale et des familles, L. 380-3 et L. 512-1 du code de la sécurité sociale) - Accès aux prestations sociales non contributives des ressortissants de l'Union européenne

Objet : Cet article supprime l'accès à certaines prestations pour les citoyens de l'Union européenne tirant leur droit au séjour en France de la recherche d'un emploi.

I - Le dispositif proposé

Par cet article, il est décidé d'exclure du bénéfice du revenu minimum d'insertion (RMI), de la couverture maladie universelle (CMU) et des prestations familiales les ressortissants communautaires entrés en France pour y chercher un emploi et qui s'y maintiennent à ce titre.

Cette mesure intervient en application de la directive européenne 2004/38/CE du 29 avril 2004 relative aux droits des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres. Son article 24 prévoit en effet la possibilité de déroger au principe de l'égalité de traitement entre les citoyens de l'Union européenne, conformément à l'idée, inscrite dans le considérant (10) de la directive, selon laquelle il convient d'éviter que les personnes exerçant leur droit de séjour ne deviennent une charge déraisonnable pour le système d'assistance sociale de l'Etat membre d'accueil pendant une première période de séjour ».

Ainsi l'article 24 de la directive prévoit deux exceptions au principe d'égalité de traitement :

- l'Etat membre d'accueil n'est pas obligé d'accorder le droit à une prestation d'assistance sociale pendant les trois premiers mois de séjour ;

- il en est de même pendant la période plus longue prévue à l'article 14, c'est-à-dire lorsque les citoyens de l'Union sont entrés sur le territoire de l'Etat membre d'accueil pour y chercher un emploi (dans ce cas, les personnes concernées doivent être en mesure de faire la preuve qu'elles continuent à chercher un emploi et qu'elles ont des chances réelles d'être engagées).

Afin de « prévenir les abus » et, comme le précise encore une note gouvernementale, rendre impossible que des personnes viennent « s'installer en France dans le but de toucher les minima sociaux ou la CMU » et puissent en bénéficier « dès l'installation en France simplement en s'inscrivant à l'ANPE » , le présent article supprime le droit à l'obtention de trois séries de prestations pour les ressortissants communautaires en recherche d'emploi.

Le paragraphe I modifie en ce sens l'article L. 262-9-1 du code de l'action sociale et des familles, relatif au RMI, en y ajoutant la phrase suivante : « Les ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne et des autres Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen entrés en France pour y chercher un emploi et qui s'y maintiennent à ce titre ne bénéficient pas du revenu minimum d'insertion. ».

Le paragraphe II complète de la même façon l'article L. 380-3 du code de la sécurité sociale, en ce qui concerne la couverture maladie universelle.

Le paragraphe III fait de même à l'article L. 512-1 du même code qui définit les personnes éligibles aux prestations familiales.

II - La position de votre commission

Votre commission approuve ce dispositif qui ne fait que traduire en droit interne les dispositions de la directive 2004/38.

Elles viennent d'ailleurs compléter d'autres mesures législatives récemment adoptées, comme la loi du 23 mars 2006 qui exige d'un ressortissant communautaire qu'il remplisse deux conditions pour pouvoir bénéficier du RMI : être en accord avec les règles de droit au séjour et avoir résidé en France durant les trois mois précédant la demande.

Il s'agit d'éviter que l'arrivée, éventuellement en nombre, de ressortissants des nouveaux Etats membres ne pèse trop lourdement sur notre système d'aide sociale et que se créent des mouvements de population liés à de seuls effets d'aubaine.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Intitulé du projet de loi - Projet de loi instituant un droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale

Votre commission considère qu'il est plus exact de parler de droit au logement opposable, plutôt que de droit opposable au logement.

C'est pourquoi, elle propose d'intituler « projet de loi instituant un droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale » le texte qui lui est soumis.

Elle vous demande d'approuver l'intitulé du projet de loi dans la rédaction qu'elle vous propose.

*

* *

Votre commission vous propose d'adopter l'ensemble du projet de loi ainsi amendé.

* 10 Arrêt José-Perez-Naranjo du 16 janvier 2007 (affaire C-265-05) et arrêt Tas-Hagen du 26 octobre 2006 (affaire C-192/05).

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