Article 4 (Article
L. 542-1-1 [nouveau] du code de l'environnement)
Principes et plan
national de gestion des matières et des déchets radioactifs
Le droit en vigueur
Dans sa rédaction actuellement en vigueur, l'article L. 542-1 du code de l'environnement dispose que la gestion des déchets radioactifs à haute activité et à vie longue doit être assurée dans le respect de la protection de la nature, de l'environnement et de la santé, en prenant en considération les droits des générations futures.
C'est selon ce principe qu'est préparé depuis trois ans un plan national de gestion de ces déchets, conformément aux voeux formulés, à partir de mars 2000, par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) et renouvelés à plusieurs reprises 51 ( * ) .
Le texte du projet de loi initial
A l'origine, l'article 4 comprend deux paragraphes consacrés à un plan national de gestion des matières et déchets radioactifs.
Le paragraphe I propose d'insérer, au sein du code de l'environnement, un nouvel article L. 542-1-1 dont le principal objet est la création d'un plan définissant des filières de gestion pour chaque type de déchets radioactifs.
Cet article codifié comprend lui-même quatre paragraphes dont le premier établit des principes généraux de gestion des matières et des déchets radioactifs, les trois suivants étant relatifs au plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGDR).
Son premier paragraphe dispose que la gestion des matières et déchets radioactifs doit être assurée dans le respect de la protection de la nature, de l'environnement, de la santé des personnes et de la sécurité en prévenant ou en limitant les charges qui seront supportées par les générations futures. Ces dispositions se distinguent de celles de l'actuel article L. 542-1 sur trois points :
- la mention de la sécurité parmi les intérêts à respecter ;
- la formulation plus contraignante des obligations vis-à-vis des générations futures ;
- et surtout, un champ d'affectation plus large puisqu'il n'est plus question ici des seuls déchets radioactifs mais, à la fois, des matières et déchets radioactifs, conformément au champ couvert par la présente loi.
Le paragraphe II de l'article L. 542-1-1 définit le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs.
Son premier alinéa assigne à ce plan la mission d'organiser les filières de gestion des matières et déchets :
- en dressant le bilan des modes de gestion des matières et déchets radioactifs existants ;
- en recensant les besoins prévisibles d'installations d'entreposage ou de stockage ;
- en précisant les capacités nécessaires pour ces installations ainsi que les durées d'entreposage ;
- ainsi qu'en déterminant les objectifs à atteindre dans la gestion des déchets radioactifs qui ne font pas l'objet d'un mode de gestion définitif.
Le second alinéa du II dispose que le plan a pour second objet l'organisation de la mise en oeuvre du programme de recherches et d'études défini à l'article 1 er du projet de loi, en particulier en fixant les échéances pour la mise en oeuvre des nouveaux modes de gestion et pour la création ou la modification d'installations.
Le paragraphe III de l'article L. 542-1-1 précise que le plan est établi ou mis à jour tous les trois ans et qu'il établit des prescriptions prenant la forme d'un décret. S'agissant du contenu du plan, le projet de loi lui impose le respect de plusieurs principes, à savoir :
- la recherche de la réduction de la quantité et de la nocivité des déchets, notamment par le traitement ou le conditionnement des combustibles usés et des déchets ;
- l'entreposage des matières radioactives en attente de traitement et des déchets radioactifs ultimes en attente d'un stockage ;
- le stockage en couche géologique profonde des déchets radioactifs ultimes ne pouvant être stockés en surface ou en faible profondeur après leur entreposage.
L'article inséré se termine par un paragraphe IV donnant une véritable portée normative aux prescriptions du plan en prévoyant que les décisions administratives doivent être compatibles avec elles.
Le paragraphe II de l'article 4 prévoit que le premier plan est établi avant le 31 décembre 2006.
Le texte adopté par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a modifié l'article 4 sur plusieurs points :
Dans le paragraphe I a été supprimé le I de l'article L. 542-1-1 du code de l'environnement posant les principes devant être respectés par la gestion des matières et des déchets radioactifs, ces dispositions ayant été transférées par les députés à l'article 1 A.
En revanche, l'Assemblée a ajouté, audit article L. 542-1-1, un article I bis consacrant la responsabilité des producteurs de combustibles usés et des déchets radioactifs. Il est précisé que cette responsabilité s'entend sans préjudice de celle qui incombe aux détenteurs de ces substances en tant que responsables d'activités nucléaires (par exemple, Areva qui détient des combustibles usés d'EDF à La Hague, ou l'Andra, qui pourrait détenir un jour des déchets dans un centre de stockage souterrain).
Dans le paragraphe II de l'article L. 542-1-1, l'Assemblée a adopté plusieurs amendements rédactionnels et complété le paragraphe par un nouvel alinéa posant la nécessité pour le PNGDR de comporter, en annexe, une synthèse des réalisations et des recherches conduites dans les pays étrangers.
Le paragraphe III de l'article L. 542-1-1 a lui aussi été l'objet d'amendements rédactionnels, complétés par un amendement plus substantiel visant à ne plus mentionner le conditionnement des combustibles usés comme un des axes du plan.
Le paragraphe IV de l'article codifié a été modifié dans sa rédaction, sans incidence sur le fond.
Enfin, le paragraphe II de l'article 4 relatif à la date d'établissement du plan n'a lui aussi été affecté que d'une très légère modification de forme.
Propositions de votre commission
Dans le paragraphe I de l'article 4, votre commission estime que la fusion réalisée par l'Assemblée nationale entre l'article L. 542-1 du code de l'environnement et le I de l'article L. 542-1-1 est tout à fait opportune dans la mesure où elle évite de laisser subsister la confusion née de la coexistence de deux articles du même code extrêmement proches par leurs formulations mais distincts quant à leur champ d'application.
S'agissant de l'insertion du I bis , votre commission considère qu'il contient des dispositions très utiles dans la mesure où il vise à garantir que tout déchet ou combustible usé relève d'un responsable : la personne physique ou morale qui le détient (ou le propriétaire de ces substances). Un tel principe aurait toutefois davantage sa place parmi les principes posés à l'article 1 A, conformément à l'amendement proposé à cet article. Par coordination, votre commission vous soumet donc un amendement de suppression de ce paragraphe.
Concernant le principe du plan national lui-même, votre commission approuve les dispositions proposées par l'Assemblée nationale dans la mesure où elles seront mises en oeuvre de façon à ne pas diffuser d'informations susceptibles de porter atteinte au secret de certaines informations. Il ne faudrait notamment pas que ce plan, en rendant publics les moyens et besoins de stockage et d'entreposage, ne donne des indications facilitant des actes de malveillance. Un tel danger n'est toutefois pas présenté par le document préparatoire du plan transmis à votre rapporteur. Votre commission ayant obtenu des assurances sur ce point, elle ne vous propose pas d'amendement sur les impératifs de sécurité liés au plan.
Par ailleurs, outre l'adoption de deux amendements rédactionnels , votre commission considère qu'une amélioration de fond semble pouvoir être apportée à cet article. Celle-ci consiste en une précision introduite par un amendement indiquant, au premier alinéa du III de l'article L. 542-1-1, que les prescriptions du plan juridiquement opposables sont celles qui seront contenues dans le décret pris pour son application. Il pourrait en effet s'avérer dangereux d'ouvrir la possibilité de recours contentieux ayant pour base le respect d'un document de plus de 150 pages, comme c'est le cas de l'actuel projet de PNGDR.
Est par ailleurs préconisée l'adoption de deux amendements de clarification visant à distinguer les dispositions relatives, d'une part, à la périodicité et à la publicité, et, d'autre part, à la responsabilité de l'établissement du plan national. Il est notamment proposé de faire figurer l'obligation de transmission au Parlement du plan, actuellement prévue par l'article 18 du projet de loi dans un article L. 542-15 du code de l'environnement, directement à l'article L. 542-1-1 par souci de logique et de lisibilité.
Enfin, votre commission s'est interrogée sur l'opportunité de rétablir la rédaction proposée par le projet de loi initial pour le deuxième aliéna (1°) du III de l'article 542-1-1, aux termes duquel la réduction de la quantité et de la nocivité des déchets radioactifs est recherchée notamment par le traitement ou le conditionnement des combustibles usés et des déchets radioactifs. La suppression du mot notamment réalisée par l'Assemblée nationale pourrait avoir pour inconvénient de rendre le traitement obligatoire, alors qu'il n'est pas envisageable pour certains combustibles comme ceux des sous-marins nucléaires ou des réacteurs de recherche. L'objectif étant toutefois de maintenir le principe selon lequel le traitement des combustibles usés demeure la solution de référence en France, votre commission a pris la décision de ne pas trancher la question de cet amendement lors de sa réunion du 18 mai 2006 et de l'examiner lors de sa prochaine réunion.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié. |
* 51 Le plus récemment, dans le rapport n° 250 (2004-2005) sur l'état d'avancement et les perspectives des recherches sur la gestion des déchets radioactifs, déposé le 16 mars 2005.