Article 7 octies (nouveau)
(Articles 1407 et 1410 du code général des impôts)

Assujettissement des logements vacants à la taxe d'habitation

Malgré l'avis défavorable émis tant par la commission des affaires économiques que par le Gouvernement, les députés ont adopté un amendement de M. Yves Simon assujettissant les logements vacants au paiement de la taxe d'habitation. Ce dispositif prévoit que les propriétaires de logements vacants depuis plus de cinq ans sont redevables de la taxe d'habitation et majore de 50 % le montant de cette taxe à partir de la dixième année de vacance.

L'auteur de l'amendement a justifié sa proposition en indiquant que, malgré les nombreux outils mis à la disposition des collectivités territoriales pour lutter contre la vacance, il pouvait subsister un grand nombre de locaux inoccupés, particulièrement en zone rurale, se dégradant rapidement. Il peut également être ajouté, à l'appui de cette thèse, que le seul outil fiscal existant pour lutter contre la vacance, la TLV, n'est pas applicable en milieu rural.

A l'opposé, la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a fait valoir qu'il était préférable de remédier à ce problème en s'appuyant sur des moyens incitatifs et non pas coercitifs. Le Gouvernement a, quant à lui, indiqué qu'un tel dispositif risquerait d'être inefficace car il trouverait à s'appliquer de manière indifférente sur tout le territoire et notamment dans des zones non tendues, voire de dépression démographique. En outre, M. Jean-Louis Borloo a ajouté qu'il lui semblait délicat de mêler à la fois application de la TLV et taxe d'habitation (TH). En effet, un propriétaire d'un bien vacant situé dans une zone soumise à la TLV serait conduit à payer, au bout de la deuxième année de vacance, la TLV puis, au-delà de la cinquième année, cette même taxe ainsi que la TH, majorée de 50 % au bout de dix ans, ce qui conduirait à un système de double imposition.

Propositions de votre commission

Votre commission est sensible aux problèmes soulevés par l'auteur de l'amendement. Elle constate que la TLV n'est applicable que dans huit agglomérations françaises 30 ( * ) et ne permet pas de résoudre les problèmes de vacance dans les territoires péri-urbains ou ruraux.

Il n'en reste pas moins que le système préconisé par l'Assemblée nationale soulève un nombre important de difficultés. En effet, cette solution conduit, à l'évidence, à soumettre à une double imposition les propriétaires de logements vacants dans les agglomérations concernées par la TLV. En outre, cet assujettissement à la TH pourrait créer de graves difficultés pour certains propriétaires puisqu'il s'applique de manière uniforme. Comment expliquer à un propriétaire héritant d'un bien immobilier dégradé, qui souhaite le conserver mais ne dispose pas des moyens pour le rénover, qu'il devra payer une imposition supplémentaire ? Ce dispositif s'applique-t-il à la petite maison occupée de manière temporaire dans l'année ?

Votre rapporteur relève également que les collectivités publiques disposent déjà d'outils juridiques pour lutter contre les biens en état d'abandon.

La procédure d'abandon manifeste

A ce titre, les articles L. 2243-1 à L. 2243-4 du code général des collectivités territoriales autorisent les maires, lorsque des « immeubles, parties d'immeubles, voies privées assorties d'une servitude de passage public, installations et terrains sans occupant à titre habituel ne sont manifestement plus entretenus », à engager, à la demande du conseil municipal, la procédure de déclaration de la parcelle concernée en état d'abandon manifeste. Le constat d'abandon manifeste est dressé par procès-verbal provisoire, communiqué au propriétaire du bien et aux titulaires de droits réels. Ce procès-verbal détermine la nature des travaux indispensables pour faire cesser l'état d'abandon.

Six mois après l'exécution de ces mesures de publicité et de ces notifications, le maire constate par un procès-verbal définitif l'état d'abandon manifeste de la parcelle. Le conseil municipal, saisi par le maire, peut décider, s'il y a lieu, de déclarer la parcelle en état d'abandon manifeste et d'en poursuivre l'expropriation au profit de la commune, pour une destination qu'il détermine. Cette expropriation, qui doit être poursuivie dans les conditions prévues par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, doit alors avoir pour but « soit la construction de logements, soit tout objet d'intérêt collectif relevant d'une opération de restauration, de rénovation ou d'aménagement ».

Votre commission estime que la procédure manifeste d'abandon constitue un outil très intéressant permettant aux communes de remédier au problème des logements très dégradés qui sont situés sur leur territoire. Pour autant, elle comprend également le désir des élus des zones rurales de disposer d'un outil fiscal pour inciter les propriétaires à ne pas laisser leurs biens à l'abandon. Toutefois, votre commission juge que c'est aux élus locaux d'apprécier l'intérêt de mettre en oeuvre un dispositif coercitif de cette nature, qu'ils pourraient ne pas souhaiter si leur commune se trouvait dans une situation de déclin démographique.

Sur la base de ces réflexions, votre commission vous soumet un amendement rendant facultative l'application de la TH aux logements vacants depuis plus de cinq ans et permettant aux communes, sur délibération de leur conseil municipal, de l'instituer si elles le jugent opportun. Surtout, pour lever les difficultés liées aux situations de double imposition (TLV et TH), la proposition de votre commission interdit aux communes concernées par la TLV, instituée par l'article 232 du code général des impôts, de faire usage de cette faculté. Enfin, cet amendement ne reprend pas le dispositif de majoration à 50 % au bout de dix ans, votre commission estimant que, passé ce délai, il reviendra à la commune d'engager la procédure d'abandon manifeste s'il y a lieu.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

* 30 Paris, Lyon, Lille, Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Nice et Cannes-Grasse-Antibes.

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