Article additionnel avant l'article 7 sexies
Ratification de
l'ordonnance n° 2005-1566 du 15 décembre 2005
relative
à la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux
Avant l'article 7 sexies , votre commission vous propose d'adopter un amendement portant article additionnel afin de ratifier l'ordonnance n° 2005-1566 du 15 décembre 2005 relative à la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux.
Celle-ci a été prise sur le fondement de l'article 122 de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, qui habilitait le Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures nécessaires à la lutte contre l'habitat insalubre et des mesures relatives aux immeubles menaçant ruine et aux établissements à usage total ou partiel d'habitation hébergeant des personnes dans des conditions indignes.
A cet effet, le libellé de l'habilitation fixait aux ordonnances les objectifs suivants : 1° Simplifier et harmoniser les divers régimes de police administrative ; 2° Faciliter la réalisation des travaux ainsi que l'hébergement et le relogement des occupants et préciser en la matière les responsabilités respectives des autorités de l'Etat et des collectivités locales ou de leurs groupements ; 3° Mieux préserver les droits des occupants et propriétaires de bonne foi ; 4° Compléter le régime des sanctions pénales prévues à l'article L. 1336-4 du code de la santé publique et aux articles L. 511-6 et L. 521-4 du code de la construction et de l'habitation et les harmoniser avec les dispositions du code pénal actuellement en vigueur ; 5° Créer un dispositif de séquestre immobilier spécial permettant de récupérer tout ou partie de la créance due à la collectivité publique qui a assuré des travaux d'office ou supporté des dépenses d'hébergement ou de relogement des occupants incombant au propriétaire. Ce dispositif est applicable dans les mêmes conditions lorsque la créance due à la collectivité publique résulte de travaux exécutés d'office dans les cas prévus aux articles L. 129-2 et L. 129-3 du code de la construction et de l'habitation ; 6° Faciliter le traitement d'urgence des situations d'insalubrité ; 7° Permettre l'application par le maire de la commune concernée des mesures d'urgence prises par le préfet en application de l'article L. 1311-4 du code de la santé publique, et le recouvrement des sommes ainsi engagées ; 8° Aménager la loi n° 70-612 du 10 juillet 1970 tendant à faciliter la suppression de l'habitat insalubre, notamment pour accélérer l'expropriation des immeubles déclarés insalubres irrémédiables. |
Elle constitue la traduction législative des huit alinéas ci-dessus, à l'exception du 5°, le législateur ayant prévu, compte tenu de la complexité du sujet, un délai de seize mois à compter de la promulgation de la loi de programmation pour la cohésion sociale pour prendre l'ordonnance visant à créer un dispositif de séquestre immobilier .
En revanche, la ou les ordonnances légiférant dans les autres domaines devaient être prises dans un délai de douze mois, c'est-à-dire avant le 18 janvier 2006. L'ordonnance n° 2005-1566 respecte donc parfaitement cette obligation formelle puisqu'elle a été adoptée le 15 décembre 2005.
De même, le projet de loi de ratification satisfait aux prescriptions de date-limite qui lui étaient imposées par le dernier alinéa de l'article 122 de la loi de cohésion sociale, qui fixait à trois mois suivant la publication des ordonnances, c'est-à-dire au 16 mars 2006, le terme maximal du délai dans lequel devait être déposé devant le Parlement le projet de loi de ratification : or, celui-ci l'a été sur le bureau du Sénat le 8 mars dernier.
Ces dispositions de procédure étant respectées, votre commission vous propose, par cet article additionnel, de ratifier l'ordonnance du 15 décembre 2005 dans le cadre du présent projet de loi plutôt qu'en examinant, dans quelques mois, le projet de loi de ratification déposé par le Gouvernement. Tout comme pour la ratification de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme proposée par un amendement portant article additionnel avant l'article 3, plusieurs éléments conjugués démontrent que cette proposition s'inscrit parfaitement dans le cadre de la récente jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le droit d'amendement visant à proscrire l'insertion de dispositions nouvelles après la première lecture d'un texte par les deux assemblées.
En effet, le contenu de l'ordonnance est tout d'abord en relation directe avec une disposition du projet de loi restant en discussion, en l'espèce l'article 7 nonies qui instaure un permis de louer pour les immeubles ou parties d'immeubles de plus de trente ans situés en zone urbaine sensible afin de permettre aux maires de s'opposer à la mise en location de logements ne répondant pas aux exigences de décence et de salubrité. Du reste, l'article additionnel qu'il est proposé d'insérer figure sous le titre III, intitulé « Lutter contre l'insalubrité et la vacances de logements » du titre II du projet de loi.
D'autre part, tout comme cela a été relevé par le commentaire du précédent amendement portant article additionnel, en procédant à la ratification d'une ordonnance, cet amendement assure le respect des principes constitutionnels d'intelligibilité et de stabilité de la loi.
Enfin, au-delà de ces considérations, il en reste une dernière, qui semble au demeurant de loin la plus importante puisque, précisément, elle relève d'un double objectif de clarté et de stabilité juridiques. Certains articles du présent projet de loi font référence à des articles de codes résultant eux-mêmes de l'ordonnance du 15 décembre 2005. A titre d'exemple, l'article 8 sexies E du projet de loi complète l'article L. 443-15-1 du code de la construction et de l'habitation par une phrase visant les articles L. 353-15 et L. 442-6 du même code, lesquels ont eux-mêmes été complétés par l'article 9 de l'ordonnance. Il est par conséquent opportun de stabiliser cette construction juridique en en consolidant aussi rapidement que possible l'assise, c'est-à-dire en ratifiant l'ordonnance. Cette nécessité est du reste renforcée par l'ambition de votre commission de rectifier le contenu de l'article 8 sexies E en modifiant directement la rédaction des articles L. 353-15 et L. 442-6 susvisés ( voir infra ).
On pourra objecter que la modification par une loi, sur la base du troisième alinéa de l'article 38 de la Constitution, d'un article de loi ou de code dont le texte résulte d'une ordonnance non expressément ratifiée est assimilée par la jurisprudence à une ratification implicite et en produit les effets. Dès lors, quelles nécessités imposeraient-elles à la commission de proposer la ratification ? Elles relèvent de deux catégories : la première est celle des corrections formelles qu'après une analyse attentive du texte de l'ordonnance, il convient de lui apporter ; la seconde, plus politique, résulte du retour à la plénitude du pouvoir législatif du Parlement, qui l'autorise à ne pas valider nécessairement toutes les dispositions d'une ordonnance dans le texte adopté par le Gouvernement. La ratification implicite ne permet pas de procéder à ces deux types d'exercice dans sa globalité, de manière rationnelle, cohérente et rapide, au contraire de la ratification explicite. Seule celle-ci permet de satisfaire totalement au principe constitutionnel de clarté de la loi.
Pour cet ensemble conjugué de raisons, il ne semble donc pas contraire à la Constitution de proposer en deuxième lecture, dans le chapitre du présent projet de loi consacré notamment à la lutte contre l'insalubrité des logements, un article additionnel procédant, sous certaines réserves et modifications, à la ratification de l'ordonnance n° 2005-1566 du 15 décembre 2005 relative à la lutte contre l'habitat insalubre ou dangereux.
I. Le texte de l'ordonnance
Constituée de 15 articles, l'ordonnance est organisée en cinq titres .
A. Titre I er (trois articles) - Dispositions relatives aux immeubles insalubres
L'article 1 er complète l'article L. 1311-4 du code de la santé publique (CSP) qui autorise le préfet à ordonner, en cas de danger ponctuel imminent, l'exécution immédiate des mesures prescrites par les règles générales d'hygiène prévues par le code de la santé publique.
En application de l'article L. 1311-1 du CSP, ces règles visent à préserver la santé de l'homme, notamment en matière : - de prévention des maladies transmissibles ; - de salubrité des habitations, des agglomérations et de tous les milieux de vie de l'homme ; - d'alimentation en eau destinée à la consommation humaine ; - d'exercice d'activités non soumises à la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ; - d'évacuation, de traitement, d'élimination et d'utilisation des eaux usées et des déchets ; - de lutte contre les bruits de voisinage et la pollution atmosphérique d'origine domestique ; - de préparation, de distribution, de transport et de conservation des denrées alimentaires. |
Le complément apporté à ce dispositif par l'article 1 er permet au maire ou, à défaut, au préfet, de procéder d'office, aux frais de la personne concernée par ces mesures et en cas d'inexécution de sa part, à l'exécution des mesures ayant pour objet d'assurer le respect des règles d'hygiène en matière d'habitat.
En ce cas, la créance de la collectivité publique qui aura procédé à l'avance des frais sera recouvrée comme en matière de contributions directes. Dans l'hypothèse où la personne redevable de l'obligation ne pourrait être identifiée, les frais seront mis à la charge de l'Etat.
L'article 2 concerne les mesures administratives de nature à mettre fin à l'insalubrité de locaux. Composé de neufs paragraphes , il réorganise formellement le chapitre I er du titre III du livre III de la première partie du CSP et procède à de nombreuses modifications de fond.
- Le paragraphe I déplace un article (le L. 1331-25 devient le L. 1331-17) et en abroge un autre (le L. 1331-32) pour tenir compte des dispositions prévues par les paragraphes suivants.
- Le paragraphe II insère un article L. 1331-22, relatif aux locaux impropres à l'habitation, dont le texte reprend et complète celui de l'article L. 1337-3, lui-même abrogé par le I de l'article 3 de l'ordonnance.
Son dispositif élargit la liste des locaux ne pouvant être mis à disposition aux fins d'habitation en l'étendant à tous les locaux par nature impropres à l'habitation. Dans le cas contraire, le préfet se voit toujours reconnu la possibilité de mettre en demeure la personne mettant ces locaux inhabitables à disposition de faire cesser cette situation dans un délai qu'il fixe. En outre, il rend applicables aux locaux concernés par la mise en demeure les dispositions de l'article L. 521-2 du code de la construction et de l'habitation (CCH) et prévoit, en application des articles L. 521-3-1 et L. 521-3-2 dudit code, que le propriétaire des locaux ou, à défaut, le maire, est tenu de reloger les occupants 26 ( * ) .
- Le paragraphe III actualise les dispositions de l'article L. 1331-24 en les distinguant sous deux articles L 1331-23 et L 1331-24.
L'article L. 1331-23 interdit à un bailleur de mettre à disposition, aux fins d'habitation, des locaux qui seront manifestement sur-occupés. Le préfet se voit conférer le pouvoir de mettre le responsable de cette situation en demeure de la faire cesser. Les dispositions du CCH relatives à la récupération des créances publiques et aux droits des occupants, visées au paragraphe précédent (L. 521-2, L. 521-3-1 et L. 521-3-2), sont rendues applicables à ce dispositif de mise en demeure.
Selon l'article L. 1331-24, l'utilisation faite de locaux ou d'installations qui présenteraient un danger pour la santé ou la sécurité de leurs occupants donnerait droit au préfet, après avis de la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires ou technologiques (CDERST), de mettre en demeure le propriétaire ou l'occupant de rendre, dans un délai qu'il fixe, leur utilisation conforme à des prescriptions qu'il édicte. Dans cette situation aussi, les dispositions de l'article L. 521-2 du CCH sont applicables. En outre, si la mise en demeure du préfet est assortie d'une interdiction temporaire ou définitive d'habiter, le propriétaire ou, à défaut, le maire, est tenu de procéder au relogement des occupants. Enfin, s'il n'est pas satisfait à la mise en demeure, le préfet prend, aux frais de la personne concernée, toute mesure jugée utile, la créance de l'Etat étant recouvrée comme en matière de contributions directes.
- Le paragraphe IV reprend, sous un nouvel article L. 1331-25, les dispositions de l'ancien article L. 1331-23 permettant au préfet de délimiter, par arrêté, des périmètres au sein desquels il déclare l'insalubrité des locaux et installations utilisés aux fins d'habitation mais impropres à cet objet pour des motifs d'hygiène, de salubrité ou de sécurité. L'arrêté du préfet est précédé d'un avis de la CDERST, pris après que le maire ou, le cas échéant, le président de l'EPCI compétent en matière d'habitat, a été invité à présenter ses observations, ainsi que d'une délibération du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'EPCI. Une fois pris, l'arrêté vaut interdiction d'habiter et d'utiliser les locaux ou installations désignés à cet effet. En outre, le régime de cette déclaration d'insalubrité est adapté afin de l'harmoniser avec celui de la déclaration d'insalubrité des immeubles et groupes d'immeubles visée par l'article L. 1331-26.
- S'agissant de cet article, le paragraphe V le complète par une définition de l'insalubrité « irrémédiable » : est ainsi qualifiée l'insalubrité de locaux pour lesquels il n'existe aucun moyen technique d'y mettre fin ou pour lesquels la reconstruction serait moins coûteuse que les travaux nécessaires à sa résorption. Cette précision de nature juridique vise à tarir une importante source de contentieux et à faire peser sur l'ensemble d'un bâtiment un risque de manière à inciter son propriétaire à entreprendre, à temps, des travaux de réhabilitation dans les parties les plus gravement dégradées.
- Le paragraphe VI crée un nouvel article L. 1331-26-1 destiné à faciliter le traitement d'urgence des situations d'insalubrité en limitant les droits et règles de procédure susceptibles de rendre trop longs les délais de réaction lorsque le danger pour la santé ou la sécurité des occupants est imminent. Cet article autorise ainsi le préfet, saisi par le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales ou le directeur du service communal d'hygiène et de santé, à mettre en demeure un propriétaire ou, s'il s'agit de locaux d'hébergement, un exploitant, de prendre des mesures pour faire cesser un risque imminent lié à une situation d'insalubrité et assurer les conditions minimales d'hygiène et de sécurité. Si les mesures prescrites n'ont pas été prises, le préfet a alors la possibilité de les faire exécuter d'office.
- Le paragraphe VII procède à la réécriture de l'article L. 1331-28 relatif aux déclarations d'insalubrité remédiable ou irrémédiable et à leurs effets.
Le I de cet article prévoit que l'insalubrité irrémédiable est déclarée par le préfet quand la CDERST ou le Haut conseil de la santé publique conclut à l'impossibilité de remédier à l'insalubrité. La déclaration entraîne l'interdiction définitive d'habiter les lieux dans un délai, fixé par le préfet, qui ne peut être supérieur à un an. Cette durée, deux fois supérieure à celle qui préexistait à l'ordonnance, a été retenue pour permettre le relogement effectif des occupants tout en tenant compte des difficultés locales et sociales.
Le préfet peut soit ordonner la démolition de l'immeuble, soit prescrire les mesures nécessaires pour empêcher l'accès aux locaux et leur utilisation. Ces dernières mesures peuvent aussi, en cas de nécessité, être prises par le maire, au nom de l'Etat : cette innovation par rapport au droit antérieurement en vigueur permet ainsi aux maires de procéder d'urgence à l'exécution des mesures indispensables, notamment pour prévenir les situations de « squat », y compris sur des immeubles vacants déclarés insalubres depuis longtemps.
Le II de l'article L. 1331-28 vise à simplifier et à harmoniser diverses procédures concernant les situations dans lesquelles l'insalubrité est remédiable. Il précise ainsi que les travaux imposés au propriétaire par l'arrêté d'insalubrité sont définis par référence aux caractéristiques du logement décent (équipements sanitaires et autres éléments permettant l'usage d'habitation) et assure une coordination avec les dispositions du CSP relatives à la lutte contre la présence de plomb.
Enfin, le III oblige le propriétaire à informer le préfet, dans un délai fixé par celui-ci dans l'arrêté, des offres de relogement qu'il a faites aux occupants quand les locaux se sont vus appliquer une interdiction définitive ou temporaire d'habiter.
- Le paragraphe VIII porte une mesure de coordination relative à la publicité foncière en Moselle et en Alsace.
- Le paragraphe IX réécrit les articles L. 1331-28-2, L. 1331-28-3, L. 1331-29, L. 1331-30 et L. 1331-31.
Organisant les conséquences d'une interdiction temporaire ou définitive d'habiter ou d'utiliser des locaux ou d'une impossibilité temporaire de le faire lors de travaux, le nouvel article L. 1331-28-2 impose au propriétaire de reloger ou d'héberger les occupants dans les conditions prévues par l'article L. 521-3-1 (I), rend applicables les règles fixées en matière de bail d'habitation par l'article L. 521-2 et interdit toute location ou mise à disposition des locaux vacants dès la notification de l'arrêté d'insalubrité (II), et soumet à l'existence effective d'une offre d'hébergement ou de relogement faite par le propriétaire la faculté pour le préfet de demander, à la place et aux frais de celui-ci, l'expulsion des occupants d'un immeuble frappé d'un arrêté d'interdiction d'habiter (III).
L'actuel régime de mainlevée d'un arrêté d'insalubrité, lorsque les travaux prescrits ont été réalisés ou que les travaux effectués ont mis fin à toute insalubrité qualifiée d'irrémédiable, est repris, sous réserve de simple modifications rédactionnelles, sous le nouvel article L. 1331-28-3.
Concernant la réalisation des travaux d'office lorsque le propriétaire est défaillant, l'article L. 1331-29 autorise le préfet, ou le maire agissant au nom de l'Etat, à intervenir :
- en urgence pour assurer la santé et la sécurité des occupants ou des voisins dans des logements dont l'insalubrité irrémédiable a été déclarée, voire à faire procéder à la démolition prescrite par l'arrêté sur autorisation du juge judiciaire statuant par ordonnance en référé (I) ;
- dans le cas où le propriétaire n'ayant pas exécuté les travaux dans le délai prescrit par l'arrêté ne répond pas à la mise en demeure qui lui aura été faite de les réaliser dans un délai d'un mois, c'est-à-dire réduit par rapport au droit actuel (II).
Par ailleurs, le III de cet article institue une nouvelle disposition destinée à favoriser la mise en oeuvre de travaux de sortie d'insalubrité sur les parties communes d'un immeuble en copropriété lorsque la situation est bloquée par un ou quelques copropriétaires : dans cette hypothèse, l'Etat pourra se substituer aux seuls copropriétaires défaillants en étant subrogé dans les droits et actions du syndicat de la copropriété à concurrence des sommes par lui versées.
S'agissant des effets juridiques et financiers des travaux d'office, le I de l'article L. 1331-30 rappelle tout d'abord que les travaux exécutés d'office par l'autorité administrative en lieu et place du propriétaire défaillant sont réalisés pour le compte de ce dernier et à ses frais. Toutefois, il ouvre au propriétaire bénéficiant d'un jugement d'expulsion non exécuté à l'encontre de « squatteurs » de demander au tribunal administratif que tout ou partie des travaux exécutés d'office soit mis à la charge de l'Etat, le sommes ainsi engagées venant en déduction de l'indemnité à laquelle il pourra prétendre au titre du préjudice financier né de la décision portant refus de prêter le concours de la force publique à l'exécution du jugement d'expulsion. Par ailleurs, le II reprend les actuelles dispositions applicables aux créances des collectivités publiques.
Enfin, l'article L. 1331-31 prévoit les dispositions réglementaires d'application à prendre par décret en Conseil d'Etat, en reprenant le contenu de l'actuel article L. 1331-32, abrogé, et en visant, en tant que de besoin, les articles L. 1331-22 à L. 1331-30 modifiés par l'ordonnance.
L'article 3 regroupe sous l'article L. 1337-4 les sanctions pénales en matière d'insalubrité actuellement prévues par les articles L. 1337-2 à L. 1337-4, en les structurant, en les précisant et, pour certaines, en les aggravant, afin d'harmoniser l'échelle des peines avec celles prévues par le code pénal. Par coordination, les articles L. 1337-2 et L. 1337-3 sont par ailleurs abrogés.
Les paragraphes I à III de l'article L. 1337-4 définissent les sanctions (un, deux ou trois ans d'emprisonnement et 50.000, 75.000 ou 100.000 euros d'amende selon la gravité de l'infraction) applicables aux personnes physiques qui ne défèrent pas à une injonction ou à une mise en demeure, qui se livrent à des dégradations, qui ne respectent pas les interdictions d'utiliser ou de mettre à disposition des locaux, etc. Le paragraphe IV détermine par ailleurs les peines complémentaires les concernant éventuellement (confiscation du fonds de commerce ou de l'immeuble et interdiction d'exercer certaines activités professionnelles ou sociales). Enfin, le paragraphe V prévoit la responsabilité pénale des personnes morales tandis que le paragraphe VI concerne spécifiquement les exploitants de fonds de commerce aux fins d'hébergement, c'est-à-dire les hôtels meublés.
B. Titre II (quatre articles) - Dispositions relatives aux immeubles menaçant ruine
Comme le rappelle le rapport au Président de la République accompagnant l'ordonnance, la procédure des immeubles menaçant ruine date de 1898 et n'a été modifiée depuis que de manière très marginale. Or, cette législation est aujourd'hui critiquée dans la mesure où :
- l'arrêté de péril, qui est pris par le maire, constitue le seul acte juridique de cette autorité qui soit obligatoirement soumis à homologation par le tribunal administratif pour devenir exécutoire en cas de silence du propriétaire ;
- la longueur et la complexité de la procédure de péril ordinaire est largement inadaptée à la réalité du danger, ce qui a pu conduire certains maires à recourir soit au dispositif de péril imminent, au risque de susciter des contentieux et de placer les occupants dans une incertitude juridique, soit à leur pouvoir de police générale, qui peut s'avérer insuffisant en cas de danger ;
- les arrêtés de péril sont soumis à une double compétence juridictionnelle, juge judiciaire en cas de péril imminent et juge administratif pour les autres, ce qui constitue une complexité inutile.
Les dispositions du titre II ont donc pour objet de simplifier ces procédures pour les rendre plus opérationnelles.
L'article 4 clarifie, à l'article L. 511-1 du CCH, les champs respectifs des situations de péril imminent et de péril « ordinaire » et prévoit que, dans la première situation, le maire ordonne les mesures provisoires indispensables, et qu'à un arrêté de péril imminent doit normalement succéder un arrêté de péril ordinaire. Par ailleurs, il apporte des améliorations rédactionnelles à l'article L. 511-1-1 et complète les mesures de publicité communes aux deux procédures.
L'article 5 réécrit les articles L. 511-2 et L. 511-3 définissant les deux procédures de péril. Il convient d'observer qu'en application de l' article 14 de l'ordonnance, le nouveau texte entrera en vigueur à une date fixée par décret et, au plus tard, le 1 er octobre 2006, ceci afin de permettre la rédaction du décret en Conseil d'Etat définissant les modalités de la nouvelle procédure contradictoire préalable à l'édiction de l'arrêté de péril par le maire créée par l'article L. 511-2.
- Composé de quatre paragraphes, cet article L. 511-2 traite de la situation de péril ordinaire.
Le paragraphe I comporte plusieurs innovations par rapport au droit antérieur. Il institue tout d'abord une procédure contradictoire préalable à l'édiction de l'arrêté de péril par le maire. Il précise ensuite que l'arrêté devra indiquer si les travaux sont de réparation ou de démolition et qu'il pourra fixer les mesures indispensables pour préserver les bâtiments mitoyens et interdire, en cas de danger, l'habitation ou l'utilisation temporaire ou définitive des lieux. L'arrêté devra aussi préciser la date d'effet de l'interdiction ainsi que celle à laquelle le propriétaire devra avoir informé le maire de l'offre d'hébergement ou de relogement faite aux occupants, ceci pour permettre à la commune d'assurer, en cas de défaillance du propriétaire, leur hébergement ou leur relogement dans les délais prévus.
Le paragraphe II reprend les dispositions traditionnelles prévoyant que le propriétaire peut se libérer de son obligation de réaliser les travaux prescrits par la conclusion d'un bail à réhabilitation, d'un bail emphytéotique ou d'un contrat de vente particulier.
De même, le paragraphe III ne modifie pas les dispositions préexistant à l'ordonnance relatives à la levée de l'arrêté de péril et à sa publicité, cette dernière étant identique à celle applicable à l'arrêté lui-même.
Enfin, le paragraphe IV concerne l'exécution des travaux d'office, dont le régime est simplifié puisque le maire pourra, après mise en demeure, se passer de l'intervention du juge pour faire réaliser les travaux prescrits. Ce n'est qu'en cas de difficulté pour les effectuer, ainsi que, comme auparavant, pour la procédure de démolition, que le maire pourra solliciter le juge judiciaire, qui statuera en référé. Enfin, il est prévu, à l'instar des dispositions propres aux situations d'insalubrité introduites aux articles L. 1331-29 et L. 1331-30 du CSP par l'article 2 de l'ordonnance, que la commune pourra ne se substituer qu'aux seuls copropriétaires défaillants lorsque les travaux prescrits dans l'arrêté portent sur les parties communes d'un immeuble en copropriété et que, lorsque des travaux seront réalisés d'office dans des locaux squattés, la charge financière finale sera reportée sur l'Etat.
- L'article L. 511-3, quant à lui, définit le régime du péril imminent. La principale modification qui lui est apportée par l'ordonnance consiste à opérer une unification de l'ordre juridictionnel compétent en confiant au juge administratif, statuant en référé, plutôt qu'au juge d'instance, comme jusqu'ici, la désignation de l'expert appelé à faire un rapport sur l'état de péril, ce choix étant cohérent avec la responsabilité du juge administratif en matière de contentieux des arrêtés de péril. En outre, l'article prévoit explicitement que, sauf si un arrêté de mainlevée du péril a été pris pour constater que les travaux réalisés par le propriétaire ont mis fin à tout péril, tout arrêté de péril imminent doit être suivi d'un arrêté de péril ordinaire, ce dernier étant seul susceptible d'y mettre durablement fin.
L'article 6 modifie l'article L. 511-5 afin, d'une part, de rappeler l'obligation à hébergement ou relogement des occupants à laquelle est tenu le propriétaire de locaux frappés d'une interdiction définitive ou temporaire d'habiter ou d'utiliser, et, d'autre part, de clarifier et d'unifier le régime des droits des occupants pour les deux types d'arrêtés de péril, ordinaire ou imminent, en précisant notamment qu'aucun local vacant concerné par un arrêté de péril ne peut être loué.
De manière similaire à ce que l'article 3 de l'ordonnance a prévu pour le nouvel article L. 1337-4 du CSP en matière d'habitat insalubre, l'article 7 réécrit l'article L. 511-6 du CCH afin :
- dans deux paragraphes I et II, de définir plus précisément les infractions en matière d'immeubles menaçant ruine et d'harmoniser avec celles prévues par le code pénal les sanctions pénales applicables aux personnes physiques qui ne défèrent pas à une mise en demeure, qui se livrent à des dégradations et qui ne respectent pas les interdictions d'utiliser ou de mettre à disposition des locaux, etc. (un ou trois ans d'emprisonnement et 50.000 ou 100.000 euros d'amende selon la gravité de l'infraction) ;
- dans un paragraphe III, de déterminer les éventuelles peines complémentaires (confiscation du fonds de commerce ou de l'immeuble et interdiction d'exercer certaines activités professionnelles ou sociales) ;
- dans un paragraphe IV, de prévoir la responsabilité pénale des personnes morales ;
- et enfin, dans un paragraphe V, de viser spécifiquement les exploitants de fonds de commerce aux fins d'hébergement.
C. Titre III (deux articles) - Dispositions relatives au relogement
Composé des articles 8 et 9, ce titre vise à clarifier les obligations respectives des maires et des préfets en matière de relogement des occupants de logements insalubres, menaçant ruine ou des établissements d'hébergement, et de conforter les droits des occupants de bonne foi.
L'article 8 apporte aux articles L. 521-1, L. 521-2 et L. 521-4 du CCH diverses améliorations rédactionnelles qui n'en modifient pas la portée. En revanche, l'article L. 521-3 est scindé en deux articles L. 521-3-1 et L. 521-3-2, qui comportent des innovations et assurent une meilleure distinction entre les responsabilités respectives des propriétaires et exploitants, d'une part, et des personnes publiques, d'autre part.
- L'article L. 521-1 fixe les principes généraux des obligations d'hébergement ou de relogement auxquelles sont assujettis les propriétaires ou les exploitants de locaux d'hébergement dans les différentes situations concernées par des mesures de police (insalubrité, péril, insécurité dans les établissements d'hébergement).
- L'article L. 521-2 est relatif aux droits des occupants.
Son paragraphe I précise que les loyers et redevances d'occupation cessent d'être dus dans les locaux concernés dès le premier jour du mois suivant la publicité des arrêtés de police, y compris dans les établissements d'hébergement, tels que les hôtels meublés. En outre, dans les locaux faisant l'objet des nouvelles mesures d'urgence instituées en matière d'insalubrité, le loyer sera suspendu rétroactivement à compter de la mise en demeure si un arrêté d'insalubrité est pris ultérieurement : en conséquence, il est expressément prévu que tout loyer ou somme versée en contrepartie de l'occupation du logement indûment perçu par le propriétaire sera soit restitué, soit déduit des loyers futurs.
Le paragraphe II précise que le bail d'occupation est suspendu dès la notification de l'arrêté d'insalubrité, de la mise en demeure d'urgence en matière d'insalubrité, de l'arrêté de péril ou des prescriptions de sécurité dans les établissements d'hébergement, et non plus seulement si une interdiction temporaire d'habiter est prononcée, et que cette suspension court jusqu'à la réalisation des travaux prescrits ou à la limite de l'interdiction définitive d'habiter.
S'agissant de la durée du bail, le paragraphe III ajoute aux dispositions existantes relatives au maintient de plein droit des effets du contrat, exception faite de l'obligation de paiement du loyer, deux mesures nouvelles visant à renforcer la protection des occupants :
- la première qualifie d'occupants de bonne foi les personnes qui, aucune offre de relogement ne leur ayant été faite, sont restées dans des logements interdits à l'habitation, et les protège expressément de toute expulsion, le droit au relogement étant d'ordre public ;
- la seconde indique qu'aucune mesure de police ne peut entraîner la résiliation de plein droit d'un bail ou d'un autre contrat d'occupation, de manière à mettre un terme à la jurisprudence définissant une telle mesure (telle un arrêté de péril) comme un cas fortuit au sens de l'article 1722 du code civil et entraînant, de ce fait, la résiliation de plein droit du bail.
- L'article L. 521-3-1 nouveau fixe les obligations des propriétaires et exploitants de locaux d'hébergement lorsque est prononcée soit une interdiction temporaire d'habiter (paragraphe I), soit une interdiction définitive d'habiter ou une évacuation définitive (paragraphe II).
En cas d'interdiction temporaire, ils sont tenus d'assurer aux occupants un hébergement décent correspondant à leurs besoins. A défaut, l'hébergement est organisé, à leurs frais, par le maire. Dans l'hypothèse où le logement insalubre est manifestement surpeuplé, le relogement ultérieur doit être assuré par le maire ou le préfet.
En cas d'interdiction ou d'évacuation définitive, les propriétaires et exploitants sont assujettis à une obligation de relogement des occupants et de versement d'une indemnité égale à trois mois de loyer, pour couvrir les frais de réinstallation, y compris en cas d'interruption du bail. A défaut, l'hébergement est organisé, à leurs frais, par le maire ou le préfet.
- L'article L. 521-3-2, qui organise la substitution des personnes publiques aux propriétaires et exploitants n'assurant pas leurs obligations en matière d'hébergement et de relogement, apporte au droit antérieur résultant de l'article L. 521-3 une opportune clarification des rôles respectifs du maire et du préfet dans les différentes situations d'exercice des pouvoirs de police.
Ainsi, en cas de défaillance du propriétaire ou de l'exploitant, l'hébergement ou le relogement des occupants incombe au maire pour les locaux visés par un arrêté de péril et pour les établissements d'hébergement concernés par des prescriptions de sécurité (paragraphe I de l'article) et au préfet - ou au maire s'il est délégataire de tout ou partie des droits de réservation de l'Etat - pour les locaux déclarés insalubres (paragraphe II).
Toutefois, le paragraphe III prévoit que si le traitement de l'insalubrité s'inscrit dans une opération d'ensemble prévoyant l'aménagement ou la revalorisation d'une zone délimitée (comme une opération programmée d'amélioration de l'habitat) ou une opération d'aménagement (telle qu'une zone d'aménagement concerté), il revient à la personne publique à l'initiative de cette opération d'assurer l'hébergement ou le relogement en cas de défaillance du propriétaire ou de l'exploitant.
Par ailleurs, le montant de l'indemnité représentative de la contribution au relogement exigée du propriétaire ou de l'exploitant défaillant antérieur à l'ordonnance (de 305 à 610 euros par personne relogée) étant sans caractère incitatif ou dissuasif, et son prélèvement présentant des difficultés d'application telles que peu de communes procédaient à son recouvrement, le paragraphe IV prévoit, d'une part, que cette contribution est désormais évaluée dans la limite d'une somme égale à un an du loyer prévisionnel et, d'autre part, qu'elle est directement versée à la personne publique ou à l'organisme (HLM, SEM ou association) ayant effectivement assuré le relogement.
Le paragraphe V précise que la commune ayant hébergé ou relogé des occupants de locaux déclarés insalubres, soit de façon occasionnelle, soit dans le cadre d'une convention passée avec l'Etat, est subrogée dans les droits de celui-ci pour le recouvrement de sa créance.
Le paragraphe VI comporte, sans changement par rapport au droit antérieur, les dispositions concernant le recouvrement des créances.
Quant au paragraphe VII, il autorise la saisine du juge d'instance d'une demande tendant à la résiliation du bail et à l'expulsion d'un occupant qui aurait refusé trois offres de relogement faites par la personne publique compétente, de manière à mettre fin aux refus abusifs de relogement parfois opposés par certains occupants.
- De manière similaire à ce que les articles 3 et 7 de l'ordonnance ont prévu pour les articles L. 1337-4 du CSP en matière d'habitat insalubre et L. 511-6 du CCH pour les immeubles menaçant ruine, l'article L. 521-4 est réécrit de manière à :
- dans un paragraphe I, définir plus précisément les infractions aux droits des occupants et harmoniser leur sanction avec celles prévues par le code pénal (trois ans d'emprisonnement et 100.000 euros d'amende) ;
- dans un paragraphe II, déterminer les éventuelles peines complémentaires (confiscation du fonds de commerce ou de l'immeuble et interdiction d'exercer certaines activités professionnelles ou sociales) ;
- dans un paragraphe III, prévoir la responsabilité pénale des personnes morales et viser spécifiquement les exploitants de fonds de commerce aux fins d'hébergement.
L'article 9 complète les articles L. 353-15 et L. 442-6 afin que le droit au maintien dans les lieux dont bénéficient les locataires d'organismes soumis à la réglementation HLM ne puisse être opposé par les personnes qui, relogées à titre temporaire dans le cadre d'une procédure d'insalubrité ou de péril, refuseraient de réintégrer leur logement à l'issue des travaux ou une offre de relogement correspondant à leurs besoins et à leurs possibilités.
D. Titre IV (un article) - Dispositions relatives à l'expropriation
L'article 10 modifie plusieurs des articles de la loi n° 70-612 du 10 juillet 1970 tendant à faciliter la suppression de l'habitat insalubre, dite « loi Vivien », laquelle institue, pour l'expropriation des immeubles insalubres, des modalités dérogatoires au code de l'expropriation pour cause d'utilité publique (CECUP). Outre des aménagements formels destinés à en harmoniser le texte avec ce code, l'article comporte diverses dispositions de nature à accélérer les procédures et à favoriser le traitement définitif de l'habitat insalubre.
- Le paragraphe I procède à la réécriture de l'article 13 de la loi pour mieux définir le champ de l'expropriation dérogatoire de droit commun : à titre principal, les immeubles déclarés insalubres à titre irrémédiable, ainsi que, à titre exceptionnel, les immeubles dont l'expropriation est indispensable à la démolition des précédents (ancien article 20 de la loi) et les terrains supportant à la fois des locaux insalubres à titre irrémédiable et des locaux salubres lorsque leur acquisition est nécessaire à la résorption de l'insalubrité constatée. Ainsi, l'expropriation des terrains contigus ou voisins lorsque leur utilisation est indispensable à la réalisation des opérations en vue desquelles la déclaration d'utilité publique (DUP) est prononcée, qui figurait dans ce champ d'application avant l'ordonnance, n'est désormais plus possible. De même, contrairement au passé, l'expropriation n'est plus conditionnée à la construction de nouveaux logements ou à un objet d'intérêt collectif relevant d'une opération d'urbanisme.
- Le paragraphe II apporte une modification rédactionnelle à l'article 14.
- Le paragraphe III abroge l'article 16, qui autorisait les propriétaires à s'engager auprès de l'expropriant à procéder eux-mêmes tant à la suppression des immeubles insalubres visés dans l'arrêté de DUP qu'au relogement des occupants. Cette faculté contrariait les opérations de résorption de l'habitat insalubre en ralentissant les expropriations de un, voire de deux ans, délai pendant lequel était suspendu le caractère exécutoire de l'arrêté de DUP. Or, outre qu'un propriétaire peut toujours réaliser des travaux de réhabilitation d'un immeuble insalubre afin de l'exclure de la DUP, le CSP et le CCH lui imposent désormais, pour les immeubles déclarés insalubres irrémédiables, le relogement des occupants, les travaux (qui rendent inhabitables lesdits logements), voire la démolition.
- Le paragraphe IV tire les conséquences, à l'article 17, de la codification de l'ordonnance n° 58-997 du 23 octobre 1958 dans le CECUP.
- Le paragraphe V réécrit l'article 18, qui organise les modalités de fixation des indemnités d'expropriation des biens insalubres et impropres à l'habitation. Dans sa nouvelle rédaction, cet article :
- rend applicable à la fixation des indemnités d'expropriation la procédure prévue au CECUP ;
- applique, comme jusqu'alors, le principe dit de la « récupération foncière » (valeur du terrain nu, frais de démolition déduits) pour évaluer les biens insalubres et impropres à l'habitation ;
- exclut de cette méthode -et par conséquent, retient les modalités de droit commun-, les biens expropriés mais non insalubres irrémédiables ainsi que les biens insalubres et impropres à l'habitation occupés par leur propriétaire au moins deux ans avant la notification de l'arrêté d'insalubrité irrémédiable (cette seconde catégorie venant remplacer la précédente, qui étaient les propriétaires occupant les lieux avant le 10 juin 1970, devenue obsolète) ;
- prévoit la déduction de l'indemnité d'expropriation du montant de l'indemnité due, en application de l'article L. 521-3-2 du CCH, par le propriétaire n'ayant pas assuré le relogement des occupants ;
- interdit, comme jusqu'alors, le versement d'une indemnité en dédommagement de la suppression d'un commerce portant sur l'utilisation comme habitation de terrains ou de locaux impropres à cet usage (sont notamment visés les hôtels meublés déclarés insalubres et interdits à l'habitation).
Par rapport au texte antérieur de l'article 18, outre les modifications précisées ci-dessus, sont ainsi supprimées les dispositions relatives :
- à la réfaction du montant de l'indemnité d'expropriation des loyers encaissés depuis l'interdiction définitive d'habiter ou des loyers perçus dans les locaux impropres par nature à l'habitation, devenues sans objet dès lors que l'article L. 521-2 du CCH prévoit la suspension des loyers à compter de l'arrêté d'insalubrité et que les locaux visés à l'article L. 1331-22 du CSP (caves, combles, sous-sols et autres locaux) n'entrent pas dans le champ de l'expropriation visée par la loi ;
- au calcul de l'indemnisation intéressant les locaux visés aux articles L. 1331-23 et L. 1331-24 du CSP (respectivement, locaux sur-occupés et locaux ou installations présentant un danger pour la santé ou la sécurité de leurs occupants), qui ne relèvent pas non plus de ce champ.
- Le paragraphe VI modifie l'article 19 de la loi, lequel autorise l'expulsion des occupants ayant refusé des offres de relogement, afin de remplacer l'expulsion par arrêté préfectoral par le droit commun de l'expulsion et de substituer la référence aux conditions de relogement dans les opérations d'aménagement prévue par l'article L. 314-2 du code de l'urbanisme à la référence aux conditions de relogement à prendre en compte.
- Enfin, le paragraphe VII abroge l'article 20, par coordination avec le nouveau texte de l'article 13.
E. Titre V (cinq articles) - Dispositions diverses et finales
L'article L. 111-6-1 du CCH interdit la division par appartements d'immeubles déclarés insalubres, frappés d'une interdiction d'habiter ou d'un arrêté de péril. Toute justifiée qu'elle soit, cette mesure rend toutefois impossibles les opérations de restauration d'un immeuble par plusieurs propriétaires ou investisseurs qui, pour des raisons notamment fiscales, voudraient diviser le bien foncier en parts. Aussi, pour éviter de renoncer à certains travaux indispensables, l'article 11 complète l'article L. 111-6-1 du CCH afin d'autoriser ces opérations dès lors qu'elles sont prescrites sous DUP en application de l'article L. 313-4 du code de l'urbanisme, le contrôle l'autorité publique résultant du caractère obligatoire de la DUP apportant les garanties nécessaires.
L'article 12 complète l'article L. 123-3 du CCH, relatif au régime des établissements d'hébergement recevant du public et soumis au règlement de sécurité, par des dispositions de coordination portant notamment sur les travaux, la récupération des créances publiques et le droit des occupants.
L'article L. 651-10 du CCH fixe les procédures applicables en cas de poursuites pénales fondées sur l'article 225-14 du code pénal, c'est-à-dire lorsque les conditions d'hébergement sont contraires à la dignité humaine, à l'encontre d'établissements d'hébergement exploités sous forme commerciale. Par souci d'harmonisation, l'article 13 complète cet article L. 651-10 afin de viser également les cas où les poursuites sont engagées sur le fondement de l'article L. 1337-4 du CSP et des articles L. 511-6 et L. 521-4 du CCH.
Ainsi que cela a été précisé précédemment, l'article 14 prévoit que les dispositions de l'article 5 de l'ordonnance, relatif à la nouvelle procédure de péril, entreront en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1 er octobre 2006.
L'article 15 est l'article d'exécution.
II. Les propositions de votre commission
Outre la ratification de l'ordonnance , proposée au I de l'amendement, votre commission vous propose d'apporter des modifications rédactionnelles ou des clarifications à certaines des dispositions qu'elle a introduites dans notre droit. Par ailleurs, elle préconise d'insérer de nouveaux dispositifs, en lien direct avec son objet, qui ne pouvaient l'être par l'ordonnance faute de relever du champ de l'habilitation de l'habilitation consentie par le Parlement au Gouvernement.
Le paragraphe II de l'amendement regroupe toutes les propositions de modifications du code de la santé publique .
Les 1° , 3° ainsi que les a) et b) du 4° opèrent une harmonisation rédactionnelle aux articles L. 1331-26-1, L. 1331-28-3 et L. 1331-29 afin que les prescriptions édictées par le préfet pour mettre fin à l'insalubrité des immeubles soient plus justement qualifiées de « mesures » et non de « travaux ».
Afin d'encadrer les principaux effets des déclarations d'insalubrité irrémédiable et remédiable, le 2° apporte une précision à l'article L. 1331-28, qui dispose dans sa rédaction actuelle que le préfet prononce, s'il y a lieu, « l'interdiction temporaire d'habiter et d'utiliser les lieux ». L'interprétation des ces dispositions ayant pour conséquence non souhaitable de lier nécessairement, pour le préfet, une interdiction d'utiliser les lieux à l'interdiction temporaire d'habiter, ce qui n'est pas souhaitable, il est proposé de permettre au préfet de prononcer seulement la première de ces deux interdictions.
Les c) et d) du 4° clarifient, quant à eux, le régime juridique et financier des mesures effectuées d'office par l'autorité publique sur les immeubles insalubres, en cas de défaillance des propriétaires, car la rédaction résultant de l'ordonnance ne précise pas l'autorité administrative compétente en la matière. Aussi votre commission préconise-t-elle la clarification de ce régime, lorsque le maire y procède pour le compte de l'Etat. En effet, compte tenu de leur connaissance des dossiers locaux, il apparaît plus opportun que les communes assurent la réalisation des travaux d'office, sous réserve d'être garanties contre les débiteurs insolvables ou indélicats.
En outre, il est indispensable de déterminer le régime applicable lorsque la commune ou l'Etat se substitue aux seuls copropriétaires défaillants pour réaliser les travaux d'office dans une copropriété. Il est précisé que la défaillance des copropriétaires s'apprécie suite au vote par l'assemblée générale des copropriétaires de la nature et du montant des travaux à réaliser, tels que prescrits par l'arrêté d'insalubrité ou de péril, déterminant les quotes-parts dues par chaque copropriétaire, ainsi que leur date d'exigibilité. Si, à cette date, certains copropriétaires n'ont pas versé les sommes appelées, ils seraient considérés comme défaillants. Cette précision permet à la commune, ou à l'Etat, de répondre pour leur compte à l'appel de fonds du syndic, ce qui permet à la copropriété d'engager les travaux. Dans ce cas, la collectivité publique est subrogée de plein droit dans les droits dont bénéficie le syndicat de copropriétaires vis à vis des copropriétaires défaillants, et, notamment du privilège spécial immobilier.
Le paragraphe III de l'amendement de votre commission porte des modifications au code de la construction et de l'habitation .
Le 1° complète l'article L. 111-6-1 relatif aux sanctions pénales applicables en cas de division d'immeubles contraire aux prescriptions dudit article. Les corrections suggérées permettent d'aligner ce régime sur les dispositions adoptées en matière d'insalubrité (article L. 1337-4 du CSP), de péril (article L. 511-6 du CCH) et de relogement (article L. 521-4 du même code).
Cette modification n'ayant pas été prévue par l'habilitation de la loi de programmation pour la cohésion sociale, il convient de réaliser les coordinations nécessaires au moment de la présente ratification. En outre, le 1° harmonise le régime des peines complémentaires des personnes physiques et des personnes morales. Enfin, il supprime la mention selon laquelle les personnes morales sont pénalement responsables, précision qui n'est plus nécessaire depuis l'entrée en vigueur des dispositions de la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité 27 ( * ) .
Les 2°, 3°, 4°et 5° harmonisent la procédure relative aux prescriptions de sécurité que les maires peuvent imposer aux équipements communs défectueux des immeubles collectifs à usage principal d'habitation avec la nouvelle procédure, simplifiée, intéressant les immeubles menaçant ruine. Le régime de la sécurité des immeubles collectifs à usage principal d'habitation, défini aux articles L. 129-1 à L. 129-7 du CCH est issu de l'article 18 de la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.
Ce texte a permis au maire, agissant au nom de l'Etat, de prescrire aux propriétaires ou au syndicat de copropriétaires les mesures nécessaires pour assurer la sécurité des équipements communs, dont la liste a été précisée par un décret du 23 décembre 2004 28 ( * ) , des immeubles collectifs d'habitation, suite à la carence des propriétaires. La procédure est actuellement identique à celle qui prévalait pour les immeubles menaçant ruine avant la publication de l'ordonnance (dispositif d'urgence et u arrêté exécutoire après homologation par le tribunal administratif). Aussi paraît-il pertinent d'harmoniser ces dispositions avec la nouvelle procédure s'attachant aux arrêtés de péril, tout en renvoyant la définition de leurs détails d'application à un décret en Conseil d'Etat.
Le 6° aligne le régime applicable aux immeubles menaçant ruine sur celui de l'insalubrité lorsque la commune se substitue aux seuls copropriétaires défaillants pour réaliser les travaux d'office dans une copropriété. Par analogie avec le 4° du II de l'amendement, il détermine les dispositions applicables en cas de défaillance des copropriétaires.
Les a) et b) du 7° sont relatifs aux conditions de suspension des baux et loyers dans les locaux frappés d'un arrêté d'insalubrité ou de péril (article L. 521-2). Dans la rédaction actuelle de cet article, il est prévu que le loyer en principal ou toute autre somme versée en contrepartie de l'occupation cesse d'être dû dès la mise en demeure du préfet. Concernant le cas particulier des locaux impropres par nature à l'habitation, il paraît judicieux de ne laisser aucune somme à la charge de l'occupant puisqu'il s'agit de locaux qui n'auraient jamais dû être loués. Pour cette raison, il est proposé de supprimer les mots « en principal ».
Le c) du 7° intéresse le dernier alinéa du III de ce même article L. 521-2. Celui-ci précise, dans sa rédaction actuelle, que les occupants qui sont demeurés dans les lieux faute d'avoir reçu une offre de relogement sont des occupants de bonne foi qui ne peuvent être expulsés . Cette disposition a pour objet d'empêcher l'expulsion d'occupants restés dans des locaux au delà de la date d'effet de l'interdiction définitive d'habiter précisée par l'arrêté préfectoral ou municipal, alors qu'aucun relogement ne leur a été proposé. Pour autant, si l'expulsion ne peut être ordonnée du fait de cette situation de droit particulière, d'autres motifs d'expulsion, tels que les troubles de voisinage, pourraient être légitimement soulevés devant le juge. Aussi pour ne pas empêcher cette éventualité, est-il proposé de corriger cet article en ce sens.
Le 8° modifie le IV de l'article L. 521-3-2 qui précise le montant de l'indemnité représentative des frais engagés pour le relogement, due par le propriétaire d'un immeuble en interdiction définitive d'habiter, lorsque la collectivité publique ou un organisme a relogé les occupants. Ce montant est défini dans la limite d'une somme égale à un an du loyer prévisionnel . L'application de cette disposition s'est avérée, dans les faits, délicate et risque d'entraîner des contentieux de la part de propriétaires indélicats qui pourraient contester le montant de l'indemnité demandée au regard des frais engagés pour le relogement. Aussi est-il proposé de fixer le montant de l'indemnité à un an de loyer du nouveau logement de l'occupant relogé .
Le paragraphe IV de l'amendement modifie la loi du 10 juillet 1970 tendant à faciliter la suppression de l'habitat insalubre .
Le a) du 1° et le b) du 2° simplifient la rédaction des articles 13 et 14 de cette loi, qui traitent des organismes pouvant être bénéficiaires de l'expropriation des immeubles insalubres irrémédiables pour pouvoir mener les opérations de résorption nécessaires. Afin d'éviter l'énumération d'une liste, incomplète à chaque fois qu'une nouvelle structure est créée, il est proposé de viser tous organismes y ayant vocation, ce qui inclut, notamment, les nouvelles sociétés publiques locales d'aménagement, dont la création est proposée par l'article 4 ter B du présent projet de loi. Ces dispositions introduisent également dans la liste des personnes morales bénéficiaires de ce dispositif d'expropriation, exorbitant du droit commun, les sociétés d'économie mixte à participation majoritaire de l'Etat et ayant vocation à construire des logements sociaux, comme la Sonacotra.
Les autres dispositions figurant aux 1°, 2° et 3° étendent les modalités particulières d'expropriation des immeubles insalubres irrémédiables aux immeubles d'habitation sous arrêté de péril et sous ordonnance de démolition ou d'interdiction définitive d'habiter. Il s'agit d'une proposition figurant dans le rapport Pelletier/Doutreligne 29 ( * ) .
Dans les faits, si ces immeubles peuvent être expropriés selon la procédure de droit commun, ils ne peuvent bénéficier des procédures spécifiques créées par la loi du 10 juillet 1970, dont l'objet est limité aux immeubles insalubres. En conséquence, dans le cadre d'une opération d'ensemble de résorption de l'habitat insalubre, il est actuellement nécessaire, soit de mener les expropriations nécessaires selon deux procédures différentes, ce qui allonge les délais et les risques contentieux, soit d'instruire un arrêté d'insalubrité sur un immeuble menaçant ruine déjà sous arrêté de péril, avec un risque de détournement de procédure. Dans les deux cas, la complication procédurale ne se justifie pas et allonge les délais opérationnels. Aussi est-il pertinent de prévoir explicitement l'expropriation de ces immeubles dans le cadre de la loi du 10 juillet 1970, s'agissant d'immeubles interdits à l'habitation et dont la valeur vénale est identique qu'ils soient insalubres ou en péril.
Votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel. |
* 26 Les dispositions relatives au relogement des occupants des logements insalubres, menaçant ruine ou dans les établissements d'hébergement dangereux (articles L. 521-1 à L. 521-4 du CCH) sont modifiées par l'article 8 de l'ordonnance et seront analysées par le commentaire de cet article.
* 27 Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.
* 28 Décret n° 2004-1442 du 23 décembre 2004 pris pour l'application de l'article 18 de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine et relatif à la sécurité des immeubles collectifs à usage principal d'habitation.
* 29 « Propositions pour une meilleure sécurité des personnes dans leur habitat ». Rapport remis au ministre de la cohésion sociale et du logement en octobre 2005.