II. DES PRINCIPES CLASSIQUES

L'accord cadre de l'Union européenne sur le statut des forces est comparable dans ses grandes lignes et ses principes aux autres accords du même type.

Il y déroge sur les points qui tiennent au caractère intégré de l'Union européenne, notamment en matière d'entrée, de séjour et de circulation sur le territoire de l'Union. La libre circulation des personnes dans l'Union est étendue aux personnels visés par l'Accord à la seule condition de disposer d'un ordre de mission individuel ou collectif ou d'une décision de détachement auprès des institutions de l'Union européenne.

L'article 3 de l'Accord pose le principe général du respect des lois de l'Etat de séjour, tandis que les articles 4 à 6 prévoient un certain nombre de facilités pour l'ensemble des personnels concernés par l'Accord : la reconnaissance des permis de conduire délivrés par les autorités militaires de l'Etat d'origine sur le territoire de l'Etat de séjour, l'accès aux soins médicaux et dentaires dispensés par les personnels des autres Etats membres, le port de l'uniforme selon les règles de l'Etat d'origine et l'identification par une marque distincte de la nationalité des véhicules.

A. LE RÉGIME DES IMMUNITÉS DES PERSONNELS DÉTACHÉS AUPRÈS DES INSTITUTIONS DE L'UNION EUROPÉENNE

La deuxième partie de l'Accord prévoit que les personnels détachés auprès des institutions de l'Union peuvent détenir et porter des armes lorsqu'ils travaillent pour des quartiers généraux ou de forces dans le cadre de la préparation ou de l'exécution de missions de Petersberg, dans les conditions fixées par la troisième partie.

Cette précision apportée, la deuxième partie est consacrée au régime des immunités du personnel militaire ou civil détaché auprès des institutions de l'Union européenne. Ainsi qu'évoqué précédemment, ceux ci ne sont pas couverts par le protocole sur les privilèges et immunités des communautés européennes de 1965, ils continuent à être employés par leur Etat d'origine.

Le personnel visé par la deuxième partie jouit de l'immunité de toute juridiction pour les paroles prononcées ou écrites et pour les actes qu'il accomplit dans l'exercice de ses fonctions ; il continue à bénéficier de cette immunité après la fin de son détachement.

L'article 8 précise que cette immunité est accordée dans l'intérêt de l'Union européenne et non dans l'intérêt du personnel concerné ; elle peut donc être levée par l'autorité compétente de l'Etat d'origine et par les institutions de l'Union européenne concernées. Les institutions de l'Union doivent « faciliter la bonne administration de la justice » et l'accord prévoit des consultations avec les Etats membres en cas d'abus d'une immunité. En dernier ressort, les modalités de règlement des différends sont arrêtées par l'institution compétente de l'Union européenne, le Conseil statuant à l'unanimité.

B. LES DISPOSITIONS APPLICABLES AUX QUARTIERS GÉNÉRAUX ET AUX FORCES

La troisième partie de l'Accord règle les questions relatives au séjour des personnels travaillant pour les quartiers généraux et les forces.

L'article 11 prévoit que l'Etat de séjour assume seul la responsabilité de la mise à disposition des immeubles et terrains ainsi que des équipements et services nécessaires. Des arrangements spécifiques peuvent être conclus pour régler les questions liées aux droits et obligations naissant de l'occupation ou de l'utilisation des équipements ainsi mis à disposition, à défaut, la législation de l'Etat de séjour s'applique.

L'article 12 est relatif au droit de police. Son exercice doit faire l'objet d'un accord avec l'Etat de séjour. Dans les camps, établissements, quartiers généraux ou autres installations occupés exclusivement par les personnels militaires ou civils, la police de ces unités peut prendre toute mesure utile pour le maintien de l'ordre et la sécurité. A l'extérieur de ces enceintes, elle n'intervient que pour l'ordre et la discipline des unités.

La détention et le port d'armes de service doivent faire l'objet d'un arrangement spécifique avec l'Etat de séjour, qui pourra prendre la forme d'un échange de lettres.

L'article 15 prévoit l'inviolabilité des archives d'un quartier général.

L'article 16 est relatif aux questions fiscales. Les personnels employés par les quartiers généraux ne bénéficient pas de l'immunité fiscale mais l'Accord évite la double imposition des revenus qui ne sont imposés que dans l `état d'origine, la période de présence sur le territoire de l'Etat de séjour n'étant pas considérée comme une résidence. Les personnels restent assujettis aux autres impôts prévus par la législation de l'Etat de séjour ainsi qu'aux droits de douane et tous autres droits et taxes.

C. LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE JURIDICTIONS

L'article 17 de l'Accord organise la répartition des compétences entre les juridictions de l'Etat du séjour et de l'Etat d'origine.

Il réaffirme la compétence de l'Etat d'origine en matière pénale et disciplinaire à l'égard de ses personnels et celle de l'Etat de séjour en ce qui concerne les infractions commises sur son territoire et punies par sa législation.

L'Etat d'origine a compétence exclusive pour les infractions qui ne tombent pas sous le coup de la législation de l'Etat de séjour mais qui sont punies par sa législation. De façon symétrique, l'Etat de séjour a compétence exclusive pour les infractions punies par sa législation qui ne tombent pas sous le coup de la législation de l'Etat d'origine.

Dans les cas de juridiction concurrente, les autorités compétentes de l'état d'origine exercent par priorité leur juridiction pour les infractions portant atteinte uniquement à la sûreté ou à la propriété de cet Etat ou les infractions portant atteinte uniquement à la personne ou à la propriété d'un membre du personnel militaire ou civil de cet Etat ou d'une personne à charge ou pour les infractions résultant de tout acte ou négligence commis dans l'exercice des fonctions.

D. LA RÉPARATION DES DOMMAGES

L'article 18 énonce un principe général de renonciation à indemnités des Etats membres pour tout dommage causé aux biens de l'Etat utilisés dans le cadre des missions de Petersberg ainsi que pour le sauvetage maritime, si le dommage est causé dans l'exercice des fonctions.

Lorsque des dommages surviennent à l'égard d'autres biens d'un Etat membre, la détermination de la responsabilité et le montant du dommage sont fixés par négociation entre Etats. Si le montant du dommage est inférieur à un montant fixé par décision du Conseil statuant à l'unanimité, chaque Etat membre renonce à demander une indemnité 1 ( * ) .

Chaque Etat membre renonce à demander une indemnité à un autre Etat membre dans le cas où un membre du personnel militaire ou civil a subi des blessures ou est mort dans l'exercice de ses fonctions.

Lorsque des dommages ont été causés à un tiers autre que l'un des Etats membres, l'Etat de séjour instruit la demande d'indemnités conformément à ses lois et règlements, il statue et procède au paiement des indemnités qui sont ensuite réparties entre les Etats membres, selon les règles définies par l'Accord.

Selon les termes de l'Accord, « aucune voie d'exécution ne peut être pratiquée sur un membre du personnel militaire ou civil lorsqu'un jugement a été prononcé contre lui dans l'Etat de séjour s'il s'agit d'une affaire résultant de l'exercice de ses fonctions ».

Les demandes d'indemnité, fondées sur des actes dommageables qui n'ont pas été commis dans l'exercice des fonctions sont instruites par les autorités de l'Etat du séjour en vue d'une indemnisation à titre gracieux par l'Etat d'origine ; à défaut, les juridictions de l'Etat de séjour sont compétentes.

Les différends sont réglés par voie de négociation ou, à défaut par une procédure d'arbitrage.

* 1 D'après les informations fournies à votre rapporteur, ce montant n'est pas encore déterminé. Néanmoins, ce type de seuil existe dans le cadre de l'accord entre les Etats membres de l'Union européenne concernant les demandes d'indemnités présentées par un Etat membre à l'encontre d'un autre Etat membre en cas de dommages causés aux biens lui appartenant, qu'il utilise ou qu'il exploite, ou de blessure ou de décès d'un membre du personnel militaire ou civil de ses services dans le cadre d'une coopération de gestion de crises menée par l'Union européenne signé le 28 avril 2004. En effet, suite à une décision du Conseil à l'unanimité, les Etats membres ont renoncé, dans le cadre de cet accord, aux demandes de dommages et intérêts s'élevant à moins de 10 000 euros.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page