B. LA POURSUITE DU TRAVAIL DE CODIFICATION PAR ORDONNANCE

La codification est un processus ancien qui, depuis l'élaboration de cinq codes sous le Consulat et l'Empire 12 ( * ) , a connu des avancées plus ou moins importantes. Le droit français a en effet connu de grandes vagues de codification ce qui permet aujourd'hui à la commission supérieure de codification de constater que près des deux tiers de nos lois sont aujourd'hui codifiés. 13 ( * )

Comme votre commission l'avait déjà souligné l'an dernier lors de l'examen du projet de loi habilitant le gouvernement à simplifier le droit 14 ( * ) , la codification constitue un accès essentiel à la règle de droit. Dans sa décision n° 99-421 DC du 16 décembre 1999 relative à la loi portant habilitation du Gouvernement à procéder, par ordonnances, à l'adoption de la partie législative de certains codes, le Conseil constitutionnel a érigé l'accessibilité et l'intelligibilité de la loi en objectif de valeur constitutionnelle. Il a en outre affirmé que la codification, constitutionnellement consacrée à cette occasion, permettait d'atteindre cet objectif et la satisfaction de l'intérêt général.

En 1999, le processus de codification a été relancé alors qu'il connaissait un important ralentissement depuis plusieurs années, en partie dû à l'encombrement du calendrier législatif. Afin de contourner cette difficulté, la loi n°  du 16 décembre 1999 habilita le gouvernement à adopter par ordonnance les parties législatives de nombreux codes. Pour la première fois la technique des ordonnances est employée pour faciliter la codification. Ainsi, l'année 2000 a vu l'adoption des parties législatives de neufs codes 15 ( * ) et la publication des parties réglementaires de trois codes 16 ( * ) , représentant une oeuvre sans précédent de codification.

La loi du 2 juillet 2003 a poursuivi cet effort en habilitant le gouvernement à adopter la partie législative de quatre codes 17 ( * ) à droit constant et à inclure les dispositions législatives non encore codifiées et remédier aux erreurs ou insuffisances de rédaction dans trois codes 18 ( * ) . Elle a en outre autorisé le Gouvernement à codifier à droit non constant les réglementations dans les secteurs des métiers et de l'artisanat, des propriétés publiques, de la défense et à modifier et compléter le code monétaire et financier.

Le présent projet de loi constitue une nouvelle étape. Comme dans la loi du 2 juillet 2003 habilitant le gouvernement à simplifier le droit, le présent projet de loi permet à la fois de la codification à droit constant et à droit non constant.

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements, présentés par la commission des Lois et ayant reçu un avis favorable du Gouvernement, afin de regrouper à l' article 56 l'ensemble de la codification à droit constant et de déplacer en conséquence l'adaptation du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et du code rural à l'article 57 .

S'agissant de la codification à droit constant, l' article 56 prévoit l'adoption de la partie législative de cinq nouveaux codes : code de l'administration, code des sports, code des transports, code de la commande publique et code général de la fonction publique.

Il envisage également la refonte du code de justice militaire afin de réactualiser la partie de ce code consacrée aux situations en temps de guerre au regard des nouvelles dispositions applicables en temps de paix depuis la loi n° 99-929 du 10 novembre 1999 portant réforme du code de justice militaire.

Enfin, il adapte les parties législatives des codes de l'action sociale et des familles, de la santé publique, de la sécurité sociale et du travail afin d'inclure les dispositions législatives non encore codifiées et remédier aux éventuelles erreurs ou insuffisances de codification.

L'ensemble de ces mesures de codification serait effectué à droit constant . Par conséquent, seules seraient autorisées les modifications nécessaires pour « assurer le respect de la hiérarchie des normes, la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés harmoniser l'état du droit, remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions devenues sans objet. » Votre commission remarque que deux nouvelles réserves à la codification à droit constant sont prévues par le projet de loi (remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions devenues sans objet) au regard de celles « traditionnellement » prévues par la loi précitée du 16 décembre 1999, la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ainsi que la loi précitée du 2 juillet 2003 qui retenaient uniquement la possibilité de modifier les dispositions codifiées pour, d'une part, harmoniser le droit et, d'autre part, assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes concernés. Ces nouvelles hypothèses visent à préciser la marge de manoeuvre dont disposent les services en matière de codification à droit constant. Il est en effet indispensable qu'une erreur de référence puisse être corrigée et une disposition obsolète supprimée.

A droit non constant, l' article 57 autorise le gouvernement, d'une part, à modifier le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique afin d'inclure des dispositions législatives non encore codifiées et de donner compétence en appel à la juridiction de droit commun et, d'autre part, à achever la codification de la partie législative du code rural en y intégrant les dispositions non encore codifiées et « en adaptant la législation des céréales compte tenu notamment des évolutions économiques, techniques et juridiques. »

L'Assemblée nationale a, par un sous-amendement du Gouvernement à l'amendement présenté par sa commission des Lois, complété l'article 57 afin de donner force de loi à la partie législative du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. En effet, depuis sa codification par décrets, ce code n'avait jamais fait l'objet d'une consécration législative.

Une habilitation est également prévu à l' article 59 afin que le Gouvernement puisse modifier les dispositions du code minier afin de les harmoniser avec celles du code de l'environnement relatives à l'eau et d'abroger celles qui sont devenues sans objet.

Enfin, l' article 58 propose de prolonger de dix-huit mois le délai de l'habilitation initialement prévu par l'article 33 de la loi du 3 juillet 2003 tendant à procéder à la refonte du code de l'organisation judiciaire, l'échéance ne pouvant être respectée au regard de l'état des travaux et des difficultés rencontrées pour la détermination du périmètre de ce code.

* 12 Les cinq « grands » codes : le code civil (1804), le code de procédure civile (1806), le code de commerce (1807) le code d'instruction criminelle (1808) et le code pénal (1810).

* 13 Voir le treizième rapport annuel pour 2003 de la Commission supérieure de codification, p. 19.

* 14 Voir le rapport n° 266 (Sénat, session 2002-2003) de M. Bernard Saugey fait au nom de la commission des Lois pp. 72-78 (article 3 du projet de loi).

* 15 Adoption des parties législatives du code de l'éducation, code de la santé publique, code de commerce, ceode de l'environnement, code de justice administrative, code de la route, code de l'action sociale, code monétaire et financier ainsi que l'adoption des livres VII et IX et la mise à jour des livres Ier, III et VI du code rural.

* 16 Code général des collectivités territoriales, code des juridictions financières et code de justice administrative.

* 17 Code du patrimoine, code de la recherche, code du tourisme et code de l'organisation judiciaire.

* 18 Code rural, code général des collectivités territoriales et code de l'environnement.

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