5. La sécurité portuaire

Le CIM du 27 février 2000 avait décidé de la création de 30 postes d'officiers de ports, qui ont effectivement été créés par les trois dernières lois de finances. Le dernier CIM qui s'est tenu le 29 avril 2003 a pris la décision de poursuivre dans cette voie en prévoyant la création, dans les trois années à venir, de 40 nouveaux postes d'officiers de port et officiers de port adjoint. Le projet de loi de finances pour 2004 traduit ces orientations en prévoyant la création de 2 postes d'officiers de port et de 13 postes d'officiers de port adjoint , soit au total 15 emplois destinés à renforcer la sécurité et la sûreté portuaire .

La sécurité dans les ports semble cependant menacée par le projet de directive européenne sur l'accès au marché des services portuaires, publié le 13 février 2001 par la Commission européenne . Le principe de ce texte consiste à autoriser plusieurs prestataires à réaliser les mêmes services techniques délivrés lors des escales des navires dans les ports. Le gouvernement français considère que ces services répondent à une double logique : économique par la fourniture d'une prestation, mais également d'intérêt général, puisqu'ils requièrent un savoir-faire dont dépend la sécurité des interventions. C'est pourquoi ils sont délivrés en France par un prestataire unique. La France a cependant obtenu de Bruxelles que le pilotage puisse continuer par dérogation à être assuré par un prestataire unique. Mais les questions relatives à l'auto assistance et au lamanage ne sont pas réglées aujourd'hui et les inquiétudes de votre rapporteur spécial sont importantes . Elles sont confortées par les évidentes difficultés que soulève ce texte au sein même des institutions européennes , qui ont mis presque trois ans à élaborer un compromis qui doit encore être soumis, en décembre prochain au Parlement, avant de revenir devant le Conseil.

Le projet de directive européenne sur l'accès au marché des services portuaires

Le projet de directive relative à l'accès au marché des services portuaires est le principal élément du « paquet portuaire » publié par la Commission le 13 février 2001. L'objectif affiché par la commission est de clarifier le régime des droits exclusifs et/ou des monopoles de droit ou de fait, de nature publique ou privée . La Commission cherche simultanément à concilier des exigences de sécurité maritime, de protection de l'environnement et d'obligations de service public. D'où l'affirmation des principes de liberté de prestation, de reconnaissance de l'auto-assistance (non-recours à un prestataire externe), mais aussi la possibilité pour les autorités compétentes de soumettre les prestataires à des autorisations, de limiter leur nombre, et d'appliquer des réglementations prises au niveau national pour ces activités. Le Conseil des ministres européens des Transports a présenté en novembre 2002 une position commune, qui a fait l'objet d'un avis en seconde lecture du Parlement européen en mars 2003. Plusieurs points restent pendants (notamment les questions de l'auto-assistance, des autorisations et compensations obligatoires, de la sélection des personnels et plus généralement de l'emploi, des dispositions en matière de transparence, et l'inclusion du pilotage) et la présidence italienne du Conseil a décidé d'ouvrir une procédure de conciliation, début septembre 2003 .

Dans la conception française , qui n'est pas partagée par tous les Etats membres, les services techniques nautiques délivrés lors des escales des navires dans les ports répondent en effet à une double logique, économique par la fourniture d'une prestation destinée à faciliter les manoeuvres des navires et d'intérêt général par les considérations de sécurité vis-à-vis des équipages, des navires et des installations. Ceci justifie l'intervention de l'autorité publique pour organiser ces services à l'échelle de l'ensemble d'un port, ou de plusieurs ports. La rédaction actuelle de la position commune améliore la prise en compte de ces aspects pour le pilotage. Les aspects concrets de l'application des règles du lieu de prestation doivent être confirmés au niveau français, notamment pour ce qui est du remorquage et du lamanage.

Actuellement, le remorquage et le lamanage ne font l'objet que d'une mention succincte dans le code des ports maritimes : la nécessité d'une modification est liée à la gestion des situations locales, que ce soit pour répondre à d'éventuelles demandes d'implantation ou en raison de l'ouverture du marché organisé par le projet de directive européenne. Le principe fondamental en serait le maintien de la délivrance d'un agrément pour l'exercice du lamanage . Pour le remorquage, une procédure de sélection serait instaurée en cas de limitation du nombre des entreprises autorisées sur un site pour une durée déterminée.

Le remorquage portuaire bénéficie par ailleurs d'une protection de pavillon (article 260 du code des douanes), à laquelle il serait souhaitable de substituer la mise en place des règles du lieu de prestation pour l'exploitation des navires. Un travail complémentaire d'actualisation de la convention collective étendue est engagé dans le but d'assurer des conditions loyales de concurrence.

S'agissant du lamanage , la situation de la profession ne nécessite pas de s'écarter du dispositif actuel de délivrance d'un agrément. Quant à la possibilité d'employer le personnel de son choix, l'association professionnelle du lamanage des ports français (APLPF), représentant principalement les sociétés coopératives ouvrières de production (SCOP de lamanage), rappelle sa demande constante que le lamanage à terre soit réservé aux marins. Ceci étant, l'institution d'une attestation de qualification, organisée par l'Etat, semble mieux adaptée. Enfin, l'application sans transition de possibilités d'auto-assistance autres que celle réalisée par les marins du bord, aujourd'hui acceptée, présenterait un risque préjudiciable à l'équilibre économique de plusieurs SCOP de lamanage.

Le pilotage est soumis au niveau central à de nombreux textes (loi de 1928, décrets de 1929, 1969 et 1970 modifiés, nombreux arrêtés) et au niveau local aux arrêtés du préfet de région, regroupés dans les règlements locaux des stations de pilotage. Le Conseil d'Etat avait souligné la nécessité de toiletter l'ensemble du dispositif réglementaire régissant la profession ; il est préférable d'entreprendre cette opération avant la réalisation prévue de la codification générale des transports. Ce faisant, il faudra tenir compte des orientations visant à améliorer la transparence que contient le projet de directive « services portuaires », et être vigilant sur les modalités d'accès aux fonctions de pilote. Le dispositif français n'autorise pas, depuis la loi de 1928, la coexistence de plusieurs stations de pilotage dans un même port, afin que toutes les conditions d'équité et de sécurité soient garanties aux usagers comme aux pilotes. Fondée sur le savoir-faire local acquis par compagnonnage, cette particularité fait l'objet d'une mention spéciale dans le projet de directive « services portuaires » qui autorise à ce stade, port par port, que l'exercice de la profession demeure une activité pratiquée au sein d'une structure administrée, pour laquelle l'obligation de durée limitée n'a pas lieu d'être.

La procédure nécessaire à l'évolution des textes régissant ces professions doit être lancée au second semestre 2003 par la consultation des professionnels et du Conseil supérieur de la marine marchande sur des propositions de loi (pilotage) et de décret (remorquage et lamanage).

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