ARTICLE 33
Intégration du Fonds national de
péréquation (FNP) dans la dotation globale de fonctionnement
(DGF)
Commentaire : le présent article propose
d'intégrer
le Fonds national de péréquation (FNP) dans la dotation globale
de fonctionnement (DGF).
I. LE FONDS NATIONAL DE PÉRÉQUATION
Le Fonds national de péréquation (FNP) a été
créé par l'article 70 de la loi d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire du 4
février 1995.
Son régime est fixé par l'article 1648 B
bis
du code
général des impôts, qui fixe ses ressources et les
modalités de répartition de ses attributions.
A. LES RESSOURCES DU FONDS NATIONAL DE PÉRÉQUATION
En 2003, il dispose de 579 millions d'euros.
Le graphique ci-après synthétise ses ressources, et les grandes
masses de ses charges. Comme on peut le constater,
cette
« tuyauterie » est passablement (sans doute trop) complexe.
Ressources et charges du Fonds national de péréquation (FNP) en 2003
Le FNPTP et la « 1 re ressource » du FNP |
La « seconde ressource » du FNP |
Abondement
exceptionnel (18 millions d'euros)
432,3
« Première ressource » du FNP (solde du FNPTP)
432,3
|
|
Le Fonds national de péréquation (FNP) : 579 millions d'euros |
Source : commission des finances du Sénat
1. Les deux ressources du Fonds national de péréquation
Le FNP est alimenté par
deux ressources
:
- la principale, dite « première ressource », est le
« solde » du Fonds national de péréquation de
la taxe professionnelle (FNPTP) ;
- l'autre ressource, dite « seconde ressource », est une
dotation de majoration issue du gel, en 1995, d'une partie de la progression de
la dotation de compensation de taxe professionnelle des communes (DCTP) et
évolue comme l'indice de variation des recettes fiscales nettes de
l'Etat.
Le FNP étant essentiellement alimenté par le
« solde » du FNPTP, plus les charges du FNPTP sont
élevées, plus les ressources du FNP sont réduites. Ainsi,
depuis 1999, la prise en charge par le FNPTP de la compensation des baisses de
DCTP s'est traduite par un manque à gagner pour le FNP de
64 millions d'euros en 1999, 305 millions d'euros en 2000,
167 millions d'euros en 2001, et 188 millions d'euros en 2002, ainsi qu'en
2003.
C'est pourquoi l'article 129 de la loi de finances pour 1999 prévoit que
cette dotation est majorée annuellement de 22,9 millions d'euros en
1999, 2000 et 2001. Cette majoration prend la forme d'une
« deuxième part » à la deuxième
fraction du FNPTP. Ce dispositif, reconduit par l'article 40 de la loi de
finances pour 2002, l'a été de nouveau par l'article 51 de la loi
de finances pour 2003.
2. La majoration de ces deux ressources par la loi de finances pour 2003
La loi de finances pour 2003 a majoré les deux ressources du FNPTP :
- l'article 55,
résultant d'un amendement de votre commission des
finances
, a
abondé de 18 millions d'euros
la
« première ressource » du FNP ;
- l'article 51 a majoré de 22,9 millions d'euros la « seconde
ressource » du FNP.
Par ailleurs, l'article 52 de la loi de finances pour 2003 a maintenu en 2003
la « deuxième part » de la deuxième fraction
du FNPTP.
Il faut souligner à cet égard que, dans le cadre de la
reconduction du contrat de croissance et de solidarité proposé
à l'article 38 du présent projet de loi de finances,
le
gouvernement ne propose pas de reconduire la majoration de 22,9 millions
d'euros
au sein de la nouvelle « dotation nationale de
péréquation ».
B. LA RÉPARTITION DES CRÉDITS DU FONDS NATIONAL DE
PÉRÉQUATION
Les crédits du Fonds national de péréquation (579 millions
d'euros en 2003) font l'objet de
deux prélèvements
,
destinés respectivement :
- aux compensations des pertes de recettes résultant des
exonérations de taxe professionnelle dans les
zones de revitalisation
rurale (ZRR)
(10,8 millions d'euros en 2003) ;
- à la «
quote-part outre-mer
» (18,6
millions d'euros en 2003).
Les ressources restantes sont réparties entre :
- la
part principale
, destinée aux communes au faible potentiel
fiscal pour les quatre taxes directes locales (427,42 millions d'euros en
2003) ;
- la
majoration du FNP
, destinée aux communes à faibles
bases de taxe professionnelle (122,54 millions d'euros en 2003).
1. La part principale du FNP
a) Eligibilité à la part principale du FNP
(1) Eligibilité de droit commun
Pour être éligibles à la part principale du FNP, les
communes doivent, selon le droit commun :
1° soit satisfaire cumulativement aux deux conditions suivantes :
- avoir un potentiel fiscal 4 taxes par habitant inférieur de 5 %
à la moyenne de la strate démographique correspondante ;
- avoir un effort fiscal
186(
*
)
supérieur à la
moyenne de la strate démographique correspondante ;
2° soit, pour les communes de plus de 10.000 habitants, satisfaire
cumulativement aux deux conditions suivantes :
- avoir un potentiel fiscal 4 taxes par habitant inférieur ou
égal aux 2/3 du potentiel fiscal de la strate démographique
correspondante ;
- avoir un effort fiscal supérieur à 80 % de la moyenne de la
strate démographique correspondante.
(2) Eligibilité à titre dérogatoire
Sont également éligibles les communes qui ont un potentiel fiscal
par habitant inférieur de 5 % ou plus de la strate démographique
correspondante et répondent à l'une des conditions
dérogatoires suivantes :
- avoir un taux de taxe professionnelle égal en 2002 au taux plafond
(soit 29,7 %) ;
- avoir un effort fiscal compris entre l'effort moyen des communes de la
même strate démographique et 90 % de cet effort fiscal moyen.
(3) Les fonds départementaux de péréquation de la taxe
professionnelle
En outre, l'article 46 de la loi de finances rectificative pour 1998
prévoit que les fonds départementaux de péréquation
de la taxe professionnelle (FDPTP) peuvent bénéficier du FNP si,
à la suite d'un changement d'exploitant intervenu après le
1
er
janvier 1997 et concernant des entreprises exerçant une
partie de leur activité en dehors du territoire national, à
savoir principalement les compagnies aériennes, ils enregistrent une
perte de ressources supérieure au quart des ressources dont ils
bénéficiaient l'année de survenance du changement.
En 1999, 2000 et 2001, seul le département de l'Essonne était
concerné par cette mesure. Aucun département n'en a
bénéficié en 2002 et 2003.
b) Répartition des ressources entre les strates et les communes
Le montant total des crédits destinés aux communes de
200.000 habitants et plus a été
« gelé » en 1995 au niveau de 1994 : depuis
cette date, il est égal au produit de leur population par le montant
moyen de l'attribution perçue l'année précédente.
Au sein de chaque strate, les attributions sont calculées, selon la
situation de la commune, selon trois modalités :
- attribution de droit commun ;
- attribution minorée (pour les communes bénéficiant du
régime dérogatoire) ;
- attribution de garantie (empêchant l'attribution d'une commune de
baisser en 2003 de plus de moitié par rapport à celle de 2002, y
compris en cas d'inéligibilité).
2. Eligibilité à la majoration du FNP
Dans le cas de la majoration du FNP, sont éligibles les communes qui
répondent cumulativement aux trois conditions suivantes :
- être éligibles à la part principale du FNP ;
- compter moins de 200.000 habitants ;
- avoir un potentiel fiscal par habitant inférieur de 20 % à la
moyenne de la strate démographique à laquelle elles appartiennent.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article propose
d'intégrer le FNP dans la dotation
globale de fonctionnement (DGF).
Le FNP serait en conséquence
dénommé
dotation nationale de péréquation
(DNP).
La schéma ci-après rappelle les grandes lignes de la nouvelle
architecture de la DGF proposée par le présent projet de loi de
finances, et indique la manière dont la DNP s'y intègrerait.
La dotation nationale de péréquation au sein de la nouvelle architecture de la DGF
|
DGF des communes |
|
|
Dotation forfaitaire |
Dotation forfaitaire |
|
|
Dotation de compensation de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle |
|
Dotation forfaitaire |
|
Dotation de compensation des baisses de DCTP entre 1999 et 2001 |
|
|
|
Dotation d'aménagement |
DGF des groupements à fiscalité propre |
|
|
Dotation d'intercommunalité |
|
Dotation d'intercommunalité |
|
Dotation de compensation de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle |
|
Dotation de compensation |
|
Dotation de compensation des baisses de DCTP entre 1999 et 2001 |
|
||
|
Dotation de péréquation communale |
|
|
FNP (hors exonérations ZRR) |
|
Dotation nationale de péréquation (DNP) |
|
DSU |
|
DSU |
|
DSR |
|
DSR |
Le
5° du I du présent article propose d'insérer à la
sous-section du code général des collectivités
territoriales relative à la dotation d'aménagement
187(
*
)
un article L. 2334-14-1,
prévoyant que
la DNP remplace à compter de 2004 le FNP
, et
est répartie selon les modalités prévues par l'article
1648 B
bis
du code général des impôts pour le FNP.
Le III du présent article propose de modifier l'article 1648 B
bis
précité, afin :
- au I, de remplacer la référence à la première et
à la seconde ressource du FNP par une référence à
une « part principale » et à une
« majoration » ;
- au II, de supprimer la référence au prélèvement
ZRR, seule étant maintenue celle à la « quote-part
outre-mer » (dont le mode de répartition ne serait pas
modifié).
Le mode de répartition de la DNP serait identique à celui de
l'actuel FNP.
Le 1° du I du présent article propose de modifier le premier
alinéa de l'article L. 2334-13 du code général des
collectivités territoriales, fixant le régime de la dotation
d'aménagement, de manière à prévoir que
la
dotation d'aménagement comprend, outre la dotation au
bénéfice des groupements de communes, la DSU et la DSR, une
« dotation nationale de péréquation »,
qui
s'insérerait dans le dispositif actuel sans en bouleverser
l'architecture, comme l'indique le schéma ci-après.
La
répartition de la dotation d'aménagement
(article L.
2334-14-1 du code général des collectivités
territoriales)
Répartition actuelle |
Répartition proposée |
|||||
|
|
|
|
|||
|
Dotation d'intercommunalité |
|
Dotation d'intercommunalité |
|||
|
Quote-part destinée aux communes d'outre-mer |
|
Quote-part destinée aux communes d'outre-mer |
|||
DSU* |
DSR* |
|
DSU** |
DSR** |
Dotation nationale de péréquation (DNP) |
|
* L'augmentation annuelle du solde de la dotation d'aménagement est actuellement répartie par le CFL entre la DSU et la DSR de manière à ce que chacune reçoive 55 % au moins et 45 % au plus de cette augmentation. |
** Le 2° du I du présent article propose que l'augmentation annuelle du solde de la dotation d'aménagement sera librement répartie par le CFL entre la dotation nationale de péréquation, la DSU et la DSR. |
Les
pouvoirs du comité des finances locales (CFL) en matière de
répartition de la dotation d'aménagement seraient accrus.
En
effet, l'augmentation annuelle du solde de la dotation d'aménagement est
actuellement répartie par le CFL entre la DSU et la DSR de
manière à ce que chacune reçoive 55 % au moins et
45 % au plus de cette augmentation.
Le 2° du I du présent article propose de compléter l'article
L. 2334-13 précité par un alinéa prévoyant
qu'à compter de 2004, l'augmentation annuelle du solde de la dotation
d'aménagement sera
librement
répartie par le comité
des finances locales entre la dotation nationale de péréquation,
la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité
rurale.
Les 3°, 4° et 6° du I et le II du présent article sont de
coordination :
- le 3° du I tend à compléter l'article L. 2334-14 du code
général des collectivités territoriales, afin de
prévoir que la DNP fait l'objet, comme la DSU et la DSR, d'un versement
annuel ;
- le 4° du I propose de modifier la numérotation des paragraphes
consacrés à la DSU et à la DSR dans la sous-section du
code général des collectivités territoriales
consacrée à la dotation d'aménagement ;
- le 6° du I tend à supprimer le dernier alinéa de l'article
L. 2334-21 du code général des collectivités
territoriales, relatif aux modalités de répartition par le CFL de
l'augmentation annuelle de la DSR ;
- le II vise, dans l'article L. 2334-3 du code général des
collectivités territoriales relatif au classement des communes par
groupes démographiques, à remplacer la référence
à l'article 1648 B
bis
du code général des
impôts, relatif au FNP, par une référence à
l'article L. 2334-14-1 du code général des collectivités
territoriales, relatif à la DNP.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission des finances se félicite de la réforme
proposée, qui simplifie et rend plus lisible le système des
dotations de l'état en faveur des collectivités territoriales les
plus démunies.
Elle estime cependant nécessaire de faire
plusieurs remarques
.
A. UN DISPOSITIF ENCORE INSATISFAISANT
1. Un montant insuffisant
Le présent projet de loi de finances propose de doter la DNP de
seulement
545,7 millions d'euros
en 2004, alors que le FNP est
doté de
579,4 millions d'euros
en 2003.
Cet écart s'explique par un
double phénomène
:
- la compensation des exonérations de taxe professionnelle dans le cadre
des
ZRR
(de 10,8 millions d'euros) serait
intégrée
à la dotation globale d'équipement (DGE) inscrite au budget du
ministère de l'intérieur ;
- la «
deuxième part
» de la deuxième
fraction du FNPTP, servant à la compensation des baisses de DCTP, et qui
avait été maintenue par l'article 52 de la loi de finances pour
2003,
ne serait pas reconduite
en 2004 au sein de la DNP.
Ainsi,
le dispositif proposé susciterait une diminution nette des
concours financiers de l'Etat de 22,9 millions d'euros.
C'est pourquoi
votre rapporteur général vous propose par ailleurs, à
l'article 39 du présent projet de loi de finances, un amendement visant
à abonder la DNP de 22,9 millions d'euros.
2. Placer l'ensemble des dispositions relatives à la DNP dans le code
général des collectivités territoriales
Le présent article ne propose pas de
déplacer dans le code
général des collectivités territoriales
les
dispositions relatives à la DNP (ex-FNP) figurant à l'article
1648 B
bis
du code général des impôts. Il n'est
pourtant pas justifié de maintenir ces dispositions dans le code
général des impôts, alors que l'on crée une
dotation, d'autant plus que, les dispositions relatives au FNP n'ayant aucun
caractère fiscal, leur présence dans le code
général des impôts était contestable.
En outre, il serait absurde que le code général des
collectivités territoriales prévoie l'existence d'une dotation en
renvoyant vers un autre code la détermination des critères de sa
répartition.
Votre commission des finances vous propose un
amendement
afin de combler
cette lacune, et d'améliorer ainsi la lisibilité du régime
des dotations aux collectivités territoriales.
3. La nécessité d'un amendement de précision
Enfin, un
amendement de précision
serait utile.
Comme on l'a indiqué, le présent article prévoit que
«
l'augmentation
annuelle
» du solde
de la dotation d'aménagement est répartie par le comité
des finances locales entre la DNP, la DSU et la DSR. Or, il arrive que ce solde
diminue. Il serait donc souhaitable de prévoir que le CFL ne
répartit pas «
l'augmentation annuelle
»,
mais la «
variation
annuelle
» de la
dotation d'aménagement. Ainsi, la règle rejoindrait la pratique.
Votre commission des finances vous propose un
amendement
en ce sens.
B. LA NÉCESSITÉ D'ALLER PLUS LOIN
A moyen terme, les dotations de solidarité (DSR, DSU et FNP) doivent
être
réformées.
1. « Ventiler » la DNP entre la DSU et la DSR
Lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2003, votre rapporteur
général estimait que la réforme de la DGF devait
être l'occasion d'une «
refonte profonde de l'architecture
des dotations de l'Etat, dans le sens d'une plus grande simplicité et
d'une meilleure lisibilité
».
Dans cette perspective, il serait envisageable de
« ventiler » la DNP entre la DSU et la DSR. En effet, on
voit mal en quoi une troisième dotation serait nécessaire.
2. Davantage concentrer ces dotations
Par ailleurs, il serait sans doute souhaitable de
concentrer davantage la
DSU, la DSR et la DNP
, afin d'éviter un phénomène de
« saupoudrage ».
En effet, ces trois dotations sont d'un faible montant par habitant, comme
l'indique le graphique ci-après.
DSU, DSR et FNP par habitant
(en euros)
Source : ministère de l'intérieur
Le montant de ces dotations est compris en 2003 entre 5,4 euro par habitant
pour le FNP majoration et 25 euros par habitant pour la DSU.
La DSU serait donc « moins inefficace » que les autres
dotations de solidarité. Pourtant,
les deux tiers des 801 communes
bénéficiaires reçoivent moins que la dotation moyenne de
25 euros par habitant, et seulement 39 reçoivent plus de 60 euros par
habitant
, comme l'indique le graphique ci-après.
La progressivité de la dotation de solidarité urbaine (2003)
(en euros)
Montant par habitant
Rang de la
commune au titre
du bénéfice de la DSU
Source : ministère de l'intérieur
Il serait sans doute souhaitable, à moyen terme, de
concentrer
davantage la DSU, mais aussi la DSR et la DNP, sur les communes qui en ont le
plus besoin.
Ainsi, ces dotations pourraient jouer un rôle efficace en matière
de
politique de la ville
ou
d'aménagement du territoire.
On peut rappeler à cet égard que la DSU, la DSR et le FNP
s'élèvent chacune à environ 500 millions d'euros. A
titre de comparaison, les crédits des budgets de la ville et de
l'aménagement du territoire sont de l'ordre de respectivement
300 millions d'euros et 200 millions d'euros : l'enjeu est donc
considérable.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article ainsi modifié.