ARTICLE 25
Mesures de financement du budget annexe des prestations
sociales agricoles (BAPSA)
Commentaire : le présent article vise, d'une
part,
à fixer le montant de la contribution de solidarité à la
charge des sociétés (C3S) affecté au BAPSA en 2004,
d'autre part, à modifier la structure des taxes affectées au
BAPSA.
I. LA FIXATION DU MONTANT DE C3S AFFECTÉ AU BAPSA EN 2004
Le
I
du présent article dispose que le montant de la contribution
sociale de solidarité à la charge des sociétés
(C3S) mentionnée à l'article L. 651-1 du code de la
sécurité sociale, affecté au régime d'assurance
vieillesse des professions agricoles, est fixé à 775 millions
d'euros en 2004.
A. LE FONDEMENT JURIDIQUE DU RECOURS À LA C3S
La contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S)
Ses
principales caractéristiques
La C3S a été instituée par la loi du 3 janvier 1970.
D'après les dispositions de l'article L. 651-1 du code de la
sécurité sociale, elle est acquittée par les
sociétés commerciales au régime d'assurance
maladie-maternité des travailleurs non-salariés des professions
non agricoles et aux régimes d'assurance vieillesse des professions
artisanales, industrielles et commerciales, et agricoles afin de compenser les
pertes de recettes subies par ces régimes du fait du
développement de l'exercice sous forme sociale des professions
artisanales et commerciales. Elle a fait l'objet d'une réforme en 1995
destinée à augmenter son rendement (loi du 4 août 1995
portant loi de finances rectificative pour 1995) : extension du champ de
recouvrement, de l'assiette et augmentation du taux. Son taux est fixé
par décret à 0,13 % du chiffre d'affaires des
sociétés redevables. Elle n'est pas perçue lorsque le
chiffre d'affaires est inférieur à 760.000 euros.
La répartition de son produit
En application de l'article L. 651-2-1 du code de la sécurité
sociale, le produit de la C3S est réparti, au prorata et dans la limite
de leurs déficits comptables, entre trois régimes
prioritaires : le régime d'assurance maladie des travailleurs non
salariés des professions non agricoles (CANAM), le régime
d'assurance vieillesse des professions industrielles et commerciales (ORGANIC)
et le régime d'assurance vieillesse des artisans (CANCAVA).
Le cas échéant, le solde du produit de la C3S était
jusqu'en 1998 réparti entre les autres régimes de
non-salariés déficitaires, parmi lesquels le BAPSA. Aujourd'hui,
ce solde est versé soit au Fonds de solidarité vieillesse (FSV),
soit au Fonds de réserve pour les retraites (FRR) (loi n° 2001-624
du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social,
éducatif et culturel).
Ces montants de répartition sont fixés par un arrêté
conjoint du ministre chargé de la sécurité sociale et du
ministre chargé du budget.
L'affectation d'une partie du produit de la C3S au BAPSA a été
évolutive voire instable au cours du temps, et n'a pas toujours eu de
fondement juridique fiable.
Historique de l'affectation d'un montant de C3S au BAPSA
En 1992,
la contribution sociale de solidarité sur les sociétés,
destinée à financer les régimes sociaux des
non-salariés non-agricoles, et la cotisation similaire
prélevée sur les sociétés agricoles ont
été fusionnées. Le BAPSA est devenu, dès lors, l'un
des affectataires de la nouvelle contribution unique.
L'affectation au BAPSA a été opérée en 1992 et 1993
au-delà du produit annuel de la contribution, conduisant à
épuiser rapidement les réserves constituées sur le produit
de la C3S.
De 1994 à 1996, le BAPSA, bien que demeurant attributaire d'une partie
du produit de la contribution, a cessé, en pratique, d'en recevoir une
fraction.
La loi n° 96-314 du 12 avril 1996 a exclu le BAPSA de la liste des
bénéficiaires de la C3S. Il semblait donc acquis que
désormais le BAPSA ne pourrait plus être
bénéficiaire d'une fraction de la C3S.
Toutefois, en 1999 et en 2000, 150 millions d'euros ont été
prélevés forfaitairement sur le produit de la C3S au profit du
BAPSA alors même que les projets de BAPSA pour 1999 et pour 2000 ne
prévoyaient aucun versement au titre de cette contribution. En
exécution, pourtant, les versements pour 1999 et 2000
s'élèvent chacun à 150 millions d'euros avec pour objet le
financement de la revalorisation des petites retraites agricoles.
En outre, l'article 4 de la loi n° 2000-1353 du 30 décembre
2000 de finances rectificative pour 2000, a majoré de 53,4 millions
d'euros le prélèvement opéré sur le produit de la
C3S au profit du BAPSA.
L'article 38 de la loi de finances pour 2001 quant à lui fixé le
prélèvement sur la C3S à 279 millions d'euros dans le
but de financer la revalorisation des retraites agricoles ainsi que diverses
mesures d'ordre social en faveur des non-salariés agricoles.
En outre, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2001, en
nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, il a été
décidé que le prélèvement sur la C3S au profit du
BAPSA devait retrouver un caractère pérenne dans la mesure
où le coût de l'élargissement du champ des personnes
bénéficiaires de l'exonération de CRDS était
supporté par l'Etat et non par la CADES. Pour compenser cette
participation de l'Etat à l'exonération de CRDS, une diminution
de la subvention budgétaire de l'Etat au BAPSA a été
décidée, diminution elle-même compensée par une
augmentation du prélèvement sur le produit de la C3S au profit du
BAPSA.
Dès lors il est apparu justifié de rendre son caractère
permanent à l'affectation d'une partie du produit de la C3S au BAPSA.
C'est pourquoi, l'article 38 de la loi de finances pour 2001 a modifié
l'article L. 651-1 du code de la sécurité sociale, qui mentionne
désormais les régimes d'assurance vieillesse des professions
agricoles comme destinataires d'une partie du produit de la C3S, et non pas
explicitement le BAPSA. En outre, l'article 38 précité a
également modifié l'article L. 651-2-1 du même code de
telle sorte que le produit affecté au régime vieillesse des
exploitants agricoles, de fait au BAPSA, soit calculé après le
versement de leur dû aux régimes maladie et vieillesse des
non-salariés non agricoles, mais avant le versement du solde au FSV.
Cependant, six mois plus tard, l'article 7 de la loi n° 2001-624 du
17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social,
éducatif et culturel supprimait dans l'article L. 651-2-1
précité la référence explicite au versement du
produit affecté au régime vieillesse des professions agricoles,
et donc, de fait, celui du produit attribué au BAPSA.
Enfin, la loi de finances pour 2002 fixe le montant de C3S affecté au
BAPSA à 520 millions d'euros, montant destiné à
financer le déficit du régime vieillesse des exploitants
agricoles et notamment la dernière étape du plan pluriannuel de
revalorisation des petites retraites agricoles.
Désormais, le caractère pérenne de l'affectation d'un
montant de C3S au BAPSA est acquis puisque l'article L. 651-1 du code de la
sécurité sociale définit clairement les
bénéficiaires de la C3S. Il s'agit :
- du régime d'assurance maladie-maternité des travailleurs
non-salariés des professions non-agricoles ;
- des régimes d'assurance vieillesse des professions artisanales,
industrielles et commerciales, et agricoles ;
- du Fonds de solidarité vieillesse et du Fonds de réserve
pour les retraites.
Pour autant, l'article L. 651-2-1 du même code, qui définit la
clé de répartition du prélèvement sur la C3S entre
les différents bénéficiaires ne fait plus
référence, depuis la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001
portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel, aux
régimes d'assurance vieillesse des professions agricoles et donc au
BAPSA.
Dès lors, les exploitants agricoles peuvent demeurer
bénéficiaires de la C3S, mais il n'existe plus de texte
précisant suivant quelles modalités est arrêté le
montant de ce prélèvement à leur profit.
S'agissant d'une recette du BAPSA, ce montant de C3S ne saurait
qu'être déterminé par une disposition de la loi de
finances
.
B. POUR 2004, UN MONTANT DE C3S DE 775 MILLIONS D'EUROS AFFECTÉ AU
BAPSA
D'après les dispositions du présent article, en 2004, le montant
de C3S affecté au BAPSA devrait s'élever à 775 millions
d'euros, soit une augmentation de 19,23 % par rapport au
prélèvement sur la C3S effectué en 2003 (650 millions
d'euros).
Le
I
du présent article propose que ce montant soit
affecté au régime d'assurance vieillesse des professions
agricoles. Traditionnellement, en effet, le recours au
prélèvement sur la C3S affecté au BAPSA devait permettre
de financer la mise en oeuvre du plan quinquennal (1997-2002) de revalorisation
des petites retraites agricoles.
En outre, en matière de retraite agricole, il faut noter, depuis le
1
er
avril 2003, l'entrée en vigueur des dispositions de
la loi n° 2002-308 du 4 mars 2002 tendant à la création
d'un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les
non-salariés agricoles. Ce nouveau régime n'est cependant pas
intégré au BAPSA, la seule conséquence de sa
création pour celui-ci étant l'inscription dans ses
dépenses, au chapitre 46-96 «
Prestations vieillesse
versée aux non-salariés du régime
agricole
», d'une subvention de 142 millions d'euros en 2004
au titre de la participation de l'Etat au financement du régime
complémentaire obligatoire, en application de l'article L. 732-58 du
code rural, contre 28 millions d'euros en 2003.
Le recours croissant au produit de la C3S a, de fait, constitué une
solution pour couvrir une partie du besoin de financement global du BAPSA, au
même titre que la traditionnelle subvention d'équilibre du budget
général, qui est cependant réduite à zéro
dans le présent projet de loi de finances
.
Évolution respective du montant de C3S affecté au BAPSA et de la subvention d'équilibre budgétaire entre 1997 et 2004
(en millions d'euros)
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
||
C3S affectée au BAPSA |
0 |
0 |
150 |
205,81 |
278,98
|
514,06
|
520 |
650 |
775 |
|
Part du produit de C3S affectée au BAPSA rapportée au produit total de C3S (en %) |
0 |
0 |
6,15 % |
9,12 % |
11,1 % |
20,45 % |
22,34 % |
36,3 % |
25,8 % |
|
Subvention d'équilibre du budget général |
1.109,7 |
1.190 |
1.204,8 |
539,1 |
823,7 |
270,2
|
560,2
|
522,7 |
0 |
II.
LA PROFONDE MODIFICATION DE LA STRUCTURE DES TAXES AFFECTÉES AU BAPSA EN
2004
A. LA MONTÉE EN PUISSANCE DES DROITS SUR LES TABACS AFFECTÉS
AU RÉGIME DE PROTECTION SOCIALE DES NON-SALARIÉS AGRICOLES
Le
I
du présent article modifie le taux de la taxe sur les tabacs
fabriqués définie à l'article 1609
unvicies
du code
général des impôts.
Cet article dispose, dans sa rédaction actuelle, qu'il est
institué, au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles,
une
taxe de 0,74 % sur les tabacs fabriqués
. Cette taxe est
perçue en addition à la taxe sur la valeur ajoutée sur les
produits fabriqués à l'intérieur et sur les produits
importés, qui font l'objet d'une acquisition intracommunautaire. Elle
est assise et perçue sous les mêmes règles, les mêmes
garanties et les mêmes sanctions que cette dernière.
Principales caractéristiques de la taxe sur les tabacs fabriqués défini à l'article 1609 unvicies du code général des impôts
L'article 85 de la loi de finances pour 1964, codifié
à l'actuel article 1609
unvicies
du code général
des impôts, a substitué, à compter du 1
er
janvier 1964, à la taxe sur les tabacs en feuilles perçue au
profit du budget annexe des prestations sociales agricoles en application de
l'ordonnance du 26 mai 1945, une taxe de 2 % sur les tabacs
fabriqués, assise et perçue dans les mêmes conditions que
la TVA. Le produit de cette taxe est affecté au BAPSA.
Les produits imposables sont tous les tabacs fabriqués, importés
ou qui font l'objet d'une acquisition intracommunautaire en France continentale
et en Corse : cigarettes, cigares ou cigarillos, tabacs à fumer,
à priser, etc.
La base d'imposition de cette taxe est constituée par le prix de vente
au détail hors TVA et hors BAPSA.
A compter du 1
er
février 1970, le taux de la taxe a
été fixé à 2,75 % par l'article 9 de la loi de
finances pour 1970 (n° 69-1161 du 24 décembre 1969) qui
précise que la TVA et les cotisations perçues dans les
mêmes conditions que celle-ci s'appliquent à des bases hors taxe.
Ce taux a été ramené à 0,80 % par l'article 16
de la loi n° 76-448 du 24 mai 1976. Depuis 1979, la taxe était
donc perçue au taux de 0,80 % sur une base comprenant la taxe
spéciale elle-même mais non la TVA.
Les taux successifs de la taxe depuis le 1
er
janvier 1990 ont
été les suivants :
- 0,781 % du 1
er
janvier 1990 au 31 décembre 1990 ;
- 0,762 % du 1
er
janvier 1991 au 17 janvier 1993 ;
- 0,74 % à compter du 18 janvier 1993.
Afin de calculer le taux de la taxe « BAPSA » à
appliquer au prix de vente au détail des produits, on utilise un taux de
conversion, qui est actuellement de 83 %. Dès lors le montant de la
taxe BAPSA exigible se calcule de la manière suivante :
Taxe BAPSA exigible = prix de vente au détail taux de conversion taux
de taxe BAPSA fixé par le Code général des impôts.
La taxe BAPSA exigible s'élève donc actuellement à
0,6142 % du prix de vente au détail.
En revanche, la base de la taxe sur les tabacs fabriqués est
demeurée inchangée.
Cette taxe est perçue par la douane à l'importation et par la
direction générale des impôts dans tous les autres cas.
Le
II
du présent article propose d'augmenter le taux de cette
taxe de 0,74 % à 3,17 %, soit une augmentation de
2,43 points. Dès lors,
d'après les évaluations de
recettes figurant dans le projet de budget annexe des prestations sociales pour
2004, le produit de cette taxe passerait de 82,32 millions d'euros en 2003
à 382,55 millions d'euros en 2004, soit une augmentation de plus de 300
millions d'euros (+ 364,72 %)
.
Du traditionnel statut de « micro-taxe » affectée au
BAPSA, la taxe sur les tabacs fabriqués passerait au statut de ressource
fiscale importante du BAPSA, au même titre que la C3S et que le nouveau
prélèvement sur le droit de consommation sur les tabacs,
institué par l'article 24 du présent projet de loi de finances.
En effet, d'après les dispositions de cet article, sur les sommes
à percevoir à compter du 1
er
janvier 2004 au titre du
droit de consommation sur les tabacs mentionné à l'article 575 du
code général des impôts, une fraction de 50,16 % est
affectée au BAPSA. L'évaluation des recettes figurant dans le
projet de BAPSA pour 2004 fait ainsi état d'une affectation de
4.815 millions d'euros au titre du nouveau prélèvement sur
le droit de consommation sur les tabacs.
Au total, les recettes issues des droits sur les tabacs (taxe sur les tabacs
fabriqués et prélèvement sur le droit de consommation sur
les tabacs fabriqués) représenteront donc pour le BAPSA en 2004
près de 5,2 milliards d'euros, soit près de 35 % du total
des recettes du budget annexe
.
B. LA SUPPRESSION DE DEUX RECETTES FISCALES TRADITIONNELLEMENT
AFFECTÉES AU BAPSA
Le
III
du présent article vise à abroger les articles 1609
septdecies
et 1615
bis
du code général des
impôts.
1. La suppression de l'affectation d'une part du produit de la TVA au
BAPSA
L'article 1609
septdecies
du code général des impôts
dispose qu'il est institué au profit du budget annexe des prestations
sociales agricoles une cotisation de 0,70 % incluse dans les taux de la
taxe sur la valeur ajoutée fixés aux articles 278 à 281
nonies
et 297 du même code.
Le
III
du présent article visant à abroger l'article 1609
septdecies
du code général des impôts,
désormais le budget annexe des prestations sociales agricoles, et plus
généralement le régime de protection sociale des
non-salariés agricoles, ne sera plus bénéficiaire d'une
part du produit de la TVA.
En 2003, le montant de cette recette affectée au BAPSA avait
été fixé par la loi de finances initiale pour 2003
à 4,463 milliards d'euros, hors restitutions, soit un montant
représentant 95 % du produit de l'ensemble des taxes
affectées au BAPSA et 35 % de l'ensemble des recettes
affectées au BAPSA.
La part de TVA jusqu'ici affectée au BAPSA sera, à l'avenir,
intégralement réaffectée au budget
général
.
En outre, l'Assemblée nationale a adopté un amendement,
présenté par notre collègue député Gilles
Carrez, rapporteur général du budget, visant à abroger le
10° de l'article 1697 du code général des impôts qui
aligne les modalités de recouvrement de la cotisation au profit du BAPSA
incluse dans la TVA sur celles relatives à cette taxe. Devenu sans objet
en raison de l'abrogation de l'article 1609
septdecies
du code
général des impôts par le présent article, ces
dispositions ont vocation à être abrogées.
Evolution des recettes de TVA, nettes de restitutions, affectées au BAPSA depuis 2000 en loi de finances initiale
(en millions d'euros)
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
4.004,5 |
4.205,3 |
4.454 |
4.463 |
0 |
2. La
suppression du prélèvement sur le droit de consommation sur les
alcools affecté au BAPSA
L'article 1615
bis
du code général des impôts
dispose qu'il est effectué au profit du BAPSA un
prélèvement de 16 euros par hectolitre d'alcool sur le produit du
droit de consommation sur les alcools perçu dans les départements
métropolitains.
L'abrogation de cet article par le
III
du présent article a pour
conséquence la suppression de l'affectation de ce
prélèvement au BAPSA dès 2004.
En 2003, la recette affectée au BAPSA au titre de ce
prélèvement s'était établie à 18,9 millions
d'euros.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
A. SUR LA FIXATION DU MONTANT DE C3S AFFECTÉ AU BAPSA
Le régime juridique de l'affectation d'une partie du produit de la C3S
au BAPSA s'est amélioré grâce à la modification de
l'article L. 651-1 du code de la sécurité sociale qui mentionne
désormais explicitement le régime de protection sociale des
exploitants agricoles comme affectataire direct de la C3S, ce qui permet de
donner un caractère pérenne à cette affectation.
La procédure suivie de fixation du montant de C3S chaque année
en loi de finances a permis d'assainir les conditions du
prélèvement désormais traditionnel sur le produit de la
C3S au profit du BAPSA.
Il convient toutefois de souligner que le prélèvement croissant
sur le produit de la C3S au profit du BAPSA a eu pour conséquence de
détourner des régimes des commerçants et des artisans
ainsi que du FSV et du FRR, une partie des sommes qui leur sont normalement
dues au titre de la C3S.
Le solde de C3S après attribution aux régimes des
non-salariés non-agricoles est en effet affecté au FSV au cours
de l'exercice suivant, une fois déduites les éventuelles
affectations de C3S au BAPSA
. Cette fraction de C3S versée au BAPSA
dans le cadre des lois de finances n'a cessé de progresser ces
dernières années.
Le compte emploi-ressources de la C3S entre 2001 et 2004
(en millions d'euros)
|
2001 |
2002 |
% |
2003 |
% |
2004 |
% |
EMPLOIS |
2.513,9 |
2.328,0 |
- 7,4 % |
1.790,0 |
- 23,11 % |
3.001,5 |
67,7 % |
Affectation de la CSSS |
|
|
|
|
|
|
|
CANAM |
598,4 |
703,5 |
17,6 % |
909,4 |
29,3 % |
1.328,0 |
46,0 % |
CANCAVA |
476,5 |
321,5 |
- 32,5 % |
259,8 |
- 19,2 % |
312,0 |
20,1 % |
ORGANIC |
818,4 |
730,6 |
- 10,7 % |
- 81,0 |
- 998,0 % |
532,0 |
756,8 % |
CBREBTP |
43,2 |
40,0 |
- 7,4 % |
39,4 |
- 1,5 % |
42,0 |
6,6 % |
BAPSA |
567,4 |
520,0 |
- 8,4 % |
650,0 |
25,0 % |
775,0 |
19,2 % |
Gestion administrative |
9,7 |
12,4 |
27,8 % |
12,4 |
- |
12,5 |
0,8 % |
Autres charges |
0,3 |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
RESSOURCES |
3.080,6 |
3.249,5 |
5,5 % |
3.294,0 |
1,37 % |
3.382,0 |
2,7 % |
Contributions |
3.043,6 |
3.220,7 |
5,8 % |
3.269,0 |
1,50 % |
3.357,0 |
2,7 % |
Produits financiers |
37,0 |
28,8 |
- 22,2 % |
25,0 |
- 13,19 % |
25,0 |
- |
RESULTAT |
566,6 |
921,5 |
62,6 % |
1.504,0 |
63,21 % |
380,5 |
- 74,7 % |
Transfert vers le FSV |
551,4 |
566,6 |
2,76 % |
921,5 |
62,63 % |
1.504,0 |
63,21 % |
Source : commission des comptes de la
sécurité
sociale
B. SUR LA MODIFICATION DE LA STRUCTURE DES TAXES AFFECTÉES AU
BAPSA
1. Le fondement juridique contestable de la suppression de l'affectation de
TVA au BAPSA
Le rapport
163(
*
)
sur les
conditions générales de l'équilibre financier du projet de
loi de finances pour 2004 de notre collègue député Gilles
Carrez, rapporteur général du budget, précise que
«
le ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie a indiqué que
«
compte tenu de la
perspective de réforme du BAPSA conduisant à la création
d'un établissement public national à caractère
administratif, il n'était pas envisageable d'affecter une recette de
l'Etat à un établissement public
». Telle aurait
été la raison de la suppression de l'affectation d'une part du
produit de la TVA au BAPSA dès 2004, et, par conséquent, au futur
Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles
à compter du 1
er
janvier 2005.
Votre rapporteur général s'interroge toutefois sur la
validité de cette argumentation juridique. En effet, d'après la
décision du Conseil constitutionnel du 29 décembre 1999 sur la
loi de finances pour 2000
164(
*
)
, «
l'affectation
de contributions de nature fiscale à un établissement public
n'est contraire à aucune règle, ni à aucun principe de
valeur constitutionnelle
». En outre, s'agissant d'une
recette de l'Etat, cette affectation ne peut être faite que dans une loi
de finances, conformément à l'article 36, dès aujourd'hui
applicable, de la loi organique du 1
er
août 2001 relative aux
lois de finances (LOLF) qui dispose que «
l'affectation, totale ou
partielle, à une autre personne morale d'une ressource établie au
profit de l'Etat ne peut résulter que d'une disposition de loi de
finances
».
En droit, une part du produit de la TVA aurait donc pu être
affectée au nouveau fonds de financement des prestations sociales des
non-salariés agricoles.
La TVA constituait pour le BAPSA une recette stable, à évolution
régulière. La suppression de l'affectation de cette recette au
nouveau fonds de financement pourrait fragiliser le financement du nouvel
établissement public.
2. Un recours massif aux droits sur les tabacs qui pourrait se
révéler problématique
a) Un rendement aléatoire, à terme dégressif ?
A compter de 2004, les sources de financement du budget annexe des prestations
sociales agricoles et du futur Fonds de financement des prestations sociales
des non-salariés agricoles, appelé à se substituer
définitivement au BAPSA au 1
er
janvier 2005, connaissent une
profonde évolution. La principale caractéristique de cette
évolution consiste dans l'affectation massive au régime de
protection sociale des non-salariés agricoles de recettes issues des
droits sur les tabacs.
A ce titre, il convient de distinguer
deux recettes
différentes
:
- la
taxe sur les tabacs fabriqués
, définie à
l'article 1609
unvicies
du code général des impôts
et dont le relèvement du taux de 0,74 % à 3,17 % fait l'objet du
présent article ;
- le
prélèvement sur le droit de consommation sur les
tabacs
mentionné à l'article 575 du code
général des impôts et dont l'affectation au BAPSA et au
futur Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés
agricoles fait l'objet des
dispositions de l'article 24 du présent
projet de loi de finances
selon lesquelles sur les sommes à
percevoir à compter du 1
er
janvier 2004, au titre du droit de
consommation sur les tabacs mentionné à l'article 575 du code
général des impôts, une fraction égale à
50,16 % est affectée au BAPSA et une fraction égale à 0,31
% est affectée au Fonds de financement des prestations sociales des
non-salariés agricoles.
D'après l'évaluation des recettes du budget annexe des
prestations sociales agricoles contenue dans le présent projet de loi de
finances, la taxe sur les tabacs fabriqués visée à
l'article 1609
unvicies
du code général des impôts
devrait rapporter, en 2004, 382 millions d'euros, contre 82,32 millions d'euros
en 2003, tandis que le nouveau prélèvement institué sur le
droit de consommation sur les tabacs au profit du BAPSA devrait rapporter, en
2004, 4.815 millions d'euros, soit un total de près de 5,2 milliards
d'euros affectés au BAPSA au titre des taxes diverses sur les tabacs.
Toutefois,
le rendement de ces deux taxes pourrait à terme se
révéler aléatoire, voire dégressif
, pour
plusieurs raisons, parmi lesquelles notamment la
baisse de la consommation
de tabac
, objectif de santé publique explicitement associé
à la hausse de la fiscalité sur les tabacs, et le
développement d'un marché parallèle des cigarettes
(détournement des sources d'approvisionnement légales au profit
de la contrebande ou achat légal de cigarettes dans les pays
européens frontaliers de la France).
(1) Un rendement des droits de consommation sur les tabacs revu à la
baisse en 2003
La commission des comptes de la sécurité sociale
annonçait, dans son rapport de septembre 2003, que la
prévision des droits de consommation sur les tabacs
était
revue à la baisse en 2003
. La loi de financement de la
sécurité sociale pour 2003 avait en effet prévu une hausse
de la fiscalité sur les tabacs qui devait se traduire par une forte
augmentation des prix de vente des cigarettes et une majoration des droits de
consommation sur les tabacs. La prévision de la loi de financement de la
sécurité sociale pour 2003 s'agissant du produit de la recette
tabac s'élevait ainsi à 9.600 millions d'euros contre
8.751 millions d'euros en 2002
. Cette prévision pour 2003 a
été revue à la baisse de 800 millions d'euros
et
devrait atteindre 8.845 millions d'euros seulement.
D'après la commission des comptes de la sécurité sociale,
cette révision à la baisse s'explique par :
-
une hausse du prix des cigarettes inférieure à ce qui
était prévu
, ce qui a réduit le supplément de
recette attendue. La prévision pour 2003 reposait en effet sur une
hausse du prix des cigarettes de l'ordre de 17 %, elle ne serait que de 11 % en
réalité ;
-
un volume de cigarettes consommées plus faible que prévu en
2003
: traditionnellement, on considère qu'une hausse du prix
du tabac de x % entraîne une baisse médiane de la consommation de
tabac de 0,3x % au bout d'un an
165(
*
)
, soit une élasticité
prix de la consommation de tabac de - 0,3. Or, on constate sur les mois connus
de l'année 2003 une élasticité plus forte : celle-ci
devrait avoisiner - 0,8 pour l'année 2003. Cette baisse de volume aurait
pu être plus importante si la revalorisation des prix avait
été aussi forte qu'attendue, soit + 17 %.
Afin de renchérir à nouveau le prix des cigarettes et
conformément aux orientations du plan de lutte contre le cancer,
une
nouvelle hausse de la fiscalité du tabac a été
décidée en juillet 2003 dans le cadre du vote de la loi visant
à restreindre la consommation de tabac chez les jeunes
166(
*
)
dont une disposition
prévoit le relèvement du taux normal du droit de consommation sur
les tabac de 58,99 % à 62 % et l'augmentation du minimum de perception
de 106 à 108 euros.
Ces mesures ont été appliquées dans le courant du mois
d'octobre 2003. D'après le rapport de la commission des comptes de la
sécurité sociale, elles devraient avoir très peu
d'incidence sur la recette de l'année 2003, les premiers effets
n'apparaissant que sur la recette du mois de décembre 2003
correspondant aux ventes d'octobre 2003 (la recette est rattachée
à l'exercice lors de sa mise en recouvrement qui intervient avec deux
mois de retard sur les ventes aux consommateurs).
Evolution du prix du paquet de cigarettes et de la fiscalité du tabac depuis janvier 2002
Année |
Prix de vente du paquet standard de cigarettes en euros |
Augmentation moyenne du prix de vente en % |
Montant des taxes perçues par paquet, en euros |
Augmentation des taxes perçues en % |
Taux fiscal par paquet sur le prix de vente |
Janvier 2002 |
3,60 |
7 % |
2,74 |
7 % |
76 % |
Janvier 2003 |
3,90 |
8,3 % |
2,96 |
8 % |
76 % |
Octobre 2003 |
4,60 |
18 % |
3,63 |
22,6 % |
79 % |
Prévision possible janvier 2004* |
5,50 à 5,65 |
19,6 à 22,8 % |
4,46 |
23 % |
81 % |
* en considérant que la hausse du taux de la
taxe sur
les tabacs fabriqués sera entièrement répercutée
par les fabricants sur le prix de vente au détail
Les hausses successives de la fiscalité du tabac concentrées sur
un laps de temps aussi court pourraient donc avoir pour conséquence un
rendement dégressif de cet impôt et compromettre, à terme,
l'équilibre financier du régime de protection sociale des
non-salariés agricoles.
Il convient toutefois de souligner que
le rendement attendu pour 2004 du
droit de consommation sur les tabacs, fixé à 9,6 milliards
d'euros, soit une augmentation de 800 millions d'euros par rapport au produit
de ce droit en 2003, a été calculé sur la base d'une
hypothèse d'élasticité prix de la consommation de tabac de
- 0,7
. Comparée à l'élasticité de - 0,8 pour
l'année 2003 figurant dans le rapport de la commission des comptes de la
sécurité sociale, l'hypothèse d'élasticité
pour 2004 semble somme toute prudente, dans la mesure notamment où
l'effet de détournement du trafic vers le marché transfrontalier
n'a pas vocation à être linéaire entre 2003 et 2004 :
la captation de cette clientèle
« transfrontalière » est a priori acquise pour 2004
mais le volume de cette clientèle ne devrait pas s'amplifier entre 2003
et 2004 et ainsi ne pas accentuer encore la baisse de la consommation
liée à ce détournement de trafic.
On peut en conclure que
les prévisions de rendement pour 2004 du
droit de consommation sur les tabacs sont plus réalistes qu'elles ne
l'avaient été pour 2003
.
Caractéristiques du droit de consommation sur les tabacs et évolution récente de son taux
Le droit
de consommation est une accise frappant les tabacs manufacturés.
Le taux du droit de consommation sur les cigarettes comporte une part
spécifique par unité de produit et une part proportionnelle au
prix de vente au détail. Il ne peut être inférieur à
un minimum de perception fixé pour 1000 unités.
Afin de déterminer le montant de la part spécifique et le taux de
la part proportionnelle, on prend comme référence les cigarettes
de la classe de prix la plus demandée, soit à l'heure actuelle la
Marlboro, vendue à 4,60 euros.
Le montant du droit de consommation qui est applicable aux cigarettes
vendues à 4,60 euros est déterminé globalement en
appliquant le seul taux normal du droit, actuellement de 62 %, à leur
prix de vente au détail
.
Pour les cigarettes qui ne sont pas vendues à 4,60 euros le paquet de 20
cigarettes, le droit de consommation se compose d'une part spécifique
égale à 5 % de la charge fiscale totale afférente aux
cigarettes de la classe de prix la plus demandée, soit actuellement 0,18
euros pour 20 cigarettes, et d'une part proportionnelle égale
à 58,05 %. Le taux réel de taxation d'un paquet vendu à
4,10 euros est ainsi de 62,43 %.
Par ailleurs, le montant total du droit de consommation (part proportionnelle +
part spécifique) ne peut être inférieur à un minimum
de perception actuellement fixé à 108 euros pour
1.000 unités.
Le droit de consommation applicable aux autres produits (cigares, tabacs fine
coupe destinés à rouler les cigarettes, autres tabacs à
fumer, tabacs à priser, tabacs à mâcher) est uniquement
proportionnel au prix de vente au détail. Des minima de perception
fixés par 1.000 unités ou 1.000 grammes sont
également applicables aux cigares, aux tabacs fine coupe destinés
à rouler les cigarettes et aux autres tabacs à fumer.
La loi n° 2003-75 du 31 juillet 2003 visant à restreindre la
consommation de tabac chez les jeunes a porté le taux normal de
perception pour les cigarettes de 58,99 % à 62 % et le minimum
de perception de 106 euros à 108 euros. Les taux et les minima de
perception concernant les autres produits n'ont en revanche pas
été relevés.
L'article 4 du projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 2004
complète la loi précitée du 31
juillet 2003 :
-
il modifie les taux normaux
comme suit :
Groupes de produits |
Taux normal actuel en % |
Taux normal proposé en % |
Cigarettes |
62 |
62 |
Cigares |
20 |
25 |
Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes |
51,69 |
56 |
Autres tabacs à fumer |
47,43 |
49,85 |
Tabacs à priser |
40,89 |
43 |
Tabacs à mâcher |
28,16 |
29,6 |
-
il
porte le minimum de perception pour les cigarettes de 108 euros à 128
euros
;
- il porte les minima de perception de 56 euros à 68 euros pour les
tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes, de 45 euros
à 60 euros pour les autres tabacs à fumer et de 55 euros
à 89 euros pour les cigares.
(2) Un rendement issu de l'augmentation du taux de la taxe sur les tabacs
fabriqués soumis à aléas
Le présent article prévoit une augmentation du taux de la taxe
sur les tabacs fabriqués.
Dans un premier temps,
la question de la nécessité de
recourir au relèvement du taux de cette taxe se pose
.
En effet, dans la mesure où le BAPSA est bénéficiaire en
2004 d'un prélèvement sur le droit de consommation sur les tabacs
à hauteur de 4.815 millions d'euros, pourquoi n'avoir pas
décidé d'affecter un prélèvement total de 5.115
millions d'euros sur le droit de consommation sur les tabacs, ce qui aurait
permis d'éviter le relèvement du taux de la taxe sur les tabacs
fabriqués affectée au BAPSA, relèvement dont le produit
attendu s'élève en effet à quelques 300 millions d'euros
en 2004 ?
Plusieurs raisons peuvent être évoquées à ce sujet.
Tout d'abord, le gouvernement a fait le choix d'une affectation de
l'intégralité du surplus de recettes attendues en 2004 issues du
droit de consommation sur les tabacs, soit 800 millions d'euros, à
l'assurance maladie. En outre, et compte tenu de la clé de
répartition du droit de consommation sur les tabacs définie
à l'article 24 du présent projet de loi de finances, il
apparaît que l'équilibre du budget général pourrait
être compromis si l'on décidait d'affecter une fraction plus
importante de ce droit au BAPSA, au détriment de la part affectée
au budget général. Telles sont, en tout état de cause, les
explications fournies à votre rapporteur général par le
ministère de l'économie, des finances et de l'industrie sur les
raisons ayant motivé le recours à une augmentation du taux de la
taxe « BAPSA » sur les tabacs fabriqués.
Dans un deuxième temps, il convient de s'interroger sur les
hypothèses ayant présidé à l'évaluation du
rendement attendu du relèvement du taux de la taxe sur les tabacs
fabriqués, affectée au BAPSA, estimée à 300,23
millions d'euros en 2004
.
En effet, lors de l'examen de cet article par l'Assemblée nationale, le
ministre délégué au budget et à la réforme
budgétaire a indiqué que le rendement attendu du
relèvement du taux de cette taxe, soit plus de 300 millions
d'euros, était indispensable à l'équilibre du BAPSA, en
reconnaissant cependant la possibilité d'un rendement dégressif,
à terme, de l'impôt. Il a toutefois
ajouté : «
cela étant, les fabricants ne
vont peut-être pas répercuter toute la hausse de la
fiscalité sur les prix. (...) nous avons déjà fait un
effort pour les buralistes, et nous resterons très attentifs à la
situation de ces auxiliaires de l'Etat qui jouent un rôle de
proximité très important
».
Le relèvement du taux de la taxe sur les tabacs fabriqués
n'implique pas en effet, de façon mécanique, une augmentation des
prix du tabac à la consommation, les fabricants pouvant décider
de « rogner » un peu sur leurs marges pour ne pas faire
exploser le prix de vente des cigarettes
167(
*
)
. Toutefois, si tel était le
cas, il faudrait sans doute s'attendre à une moindre recette totale
issue de l'ensemble des droits sur les tabacs.
Dans l'hypothèse d'une faible répercussion voire d'une absence
de répercussion sur le prix de vente au détail du
relèvement de la taxe « BAPSA », deux facteurs
jouent en sens inverse
:
- d'une part, l'absence d'augmentation du prix du paquet de cigarettes, par le
biais d'une intégration du relèvement du taux de la taxe dans les
marges des fabricants, permettra de stabiliser le niveau de la
consommation ;
- d'autre part, la base d'imposition du taux de la taxe
« BAPSA » étant constituée par le prix de
vente au détail, l'absence d'augmentation du prix du paquet devrait
réduire à due concurrence le rendement attendu de l'augmentation
de ce taux, et mécaniquement celui attendu du droit de consommation sur
les tabacs.
Dans l'hypothèse inverse d'une répercussion totale du
relèvement du taux de cette taxe sur le prix de vente au détail,
les deux mêmes facteurs continuent de jouer en sens inverse
:
l'augmentation du prix de vente peut avoir une influence négative sur le
niveau de la consommation et ainsi fragiliser le niveau des recettes issues des
droits sur les tabacs, tandis que l'élargissement de la base taxable
devrait permettre un rendement plus important de ces droits. Il est toutefois
impossible de déterminer à l'avance lequel de ces facteurs aura
le plus d'influence
in fine
sur le rendement de ces droits.
Il convient toutefois de souligner que, d'après les informations
recueillies par votre rapporteur général auprès du
ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, et
conformément aux déclarations du ministre
délégué au budget et à la réforme
budgétaire lors de l'examen du présent article à
l'Assemblée nationale,
aucune hausse du prix de vente au
détail n'est en fait anticipée par le gouvernement suite à
l'augmentation du taux de la taxe sur les tabacs fabriqués
affectée au BAPSA au 1
er
janvier 2004
. Si bien que,
in
fine
, l'impact de cette hausse sur le rendement de la taxe en 2004 demeure
incertain.
Votre rapporteur général est conscient du besoin
impérieux de trouver des sources de financement au budget annexe des
prestations sociales agricoles. Toutefois, il estime que le recours massif aux
droits sur les tabacs, dans leur ensemble, pourrait fragiliser les sources de
financement du régime de protection sociale des agriculteurs
.
b) La question de la conformité de la taxe sur les tabacs
fabriqués à la législation communautaire
Comme indiqué précédemment, la taxe sur les tabacs
fabriqués institué par l'article 1609
unvicies
du code
général des impôts au profit du budget annexe des
prestations sociales agricoles, est perçue en addition à la taxe
sur la valeur ajoutée sur les produits fabriqués à
l'intérieur et sur les produits importés, qui font l'objet d'une
acquisition intracommunautaire. Les produits imposables sont donc tous les
tabacs fabriqués, importés ou qui font l'objet d'une acquisition
intracommunautaire en France continentale et en Corse.
Cette taxe, dont le rendement était minime jusqu'en 2003
(82,32 millions d'euros attendus en 2003), devrait voir son rendement
augmenter de plus de 300 millions d'euros en 2004.
La question de la conformité de cette taxe au droit communautaire se
pose
.
En effet, l'article 3 de la directive 92/12/CEE du Conseil, du
25 février 1992, relative au régime général,
à la détention, à la circulation et au contrôle des
produits soumis à accise, applicable aux huiles minérales,
à l'alcool et aux boissons alcooliques ainsi qu'aux tabacs
manufacturés, dispose que les produits précités
«
peuvent faire l'objet
d'autres impositions indirectes
poursuivant des finalités spécifiques
, à condition que
ces impositions respectent les règles de taxation applicables pour les
besoins des accises ou de la taxe sur la valeur ajoutée pour la
détermination de la base d'imposition, le calcul, l'exigibilité
et le contrôle de l'impôt
»
.
Il importe dès lors de savoir si la taxe sur les tabacs fabriqués
affectée au BAPSA poursuit bien une
finalité
spécifique
.
La jurisprudence communautaire permet d'éclairer cette question.
En effet, selon les conclusions de l'avocat général dans
l'affaire «
Evangelisher Krankenhausverein
Wien
»
168(
*
)
,
«
peuvent être qualifiées d'impôts indirects
ayant des finalités spécifiques toutes les taxes qui
poursuivent des objectifs différents de celui de répondre aux
exigences générales des dépenses publiques et qui ne sont
pas contraires aux objectifs communautaires.
Selon ce critère,
relèvent, par exemple, de cette catégorie les taxes ayant pour
but de protéger l'environnement et la santé publique, de
même que celles destinées à promouvoir le tourisme, le
sport, la culture et les spectacles
».
On peut dès lors s'interroger sur la pertinence de la notion de
finalité spécifique au regard de la
taxe « BAPSA ». L'affectation de cette taxe à
un budget annexe, fût-il des
prestations sociales
agricoles, donne
de facto
à celle-ci une finalité budgétaire,
répondant par là-même à des exigences de
dépenses publiques.
En revanche, on pourrait faire valoir que cette taxe poursuit bien une
finalité spécifique de protection de la santé publique, si
cette hausse se répercutait dans les prix et entraînait ainsi une
diminution de la consommation du tabac.
Toutefois, il faut souligner que les hypothèses de rendement de la taxe
« BAPSA » pour 2004 retenues par le gouvernement reposent
notamment sur l'absence de prise en compte d'une hausse du prix de vente au
détail suite au relèvement du taux de cette taxe.
Dès lors, on pourrait arguer du fait qu'aucune finalité de
santé publique n'est sous-jacente à l'augmentation du taux de
cette taxe et à son affectation au BAPSA, puisque le gouvernement n'en
attend vraisemblablement aucun impact sur le niveau de la consommation de tabac.
En outre, il semble que l'objectif principal de cette taxe soit de nature
budgétaire, au regard des arguments développés tant par
notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur
général du budget, que par le ministre
délégué au budget et à la réforme
budgétaire, qui déclarait lors de l'examen du présent
article à l'Assemblée nationale, le lundi 20 octobre 2003, que ne
pas voter la hausse de cette taxe «
serait mettre le budget en
difficulté
».
La conformité de la taxe « BAPSA » au regard du
droit communautaire peut être ainsi être contestée, sans
qu'il soit possible aujourd'hui de présager de la décision de la
Cour de justice des communautés européennes à cet
égard.
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.