3. Des interrogations qui subsistent
Le dépôt du présent projet a suscité certaines interrogations, voire certaines craintes, notamment au sein du monde associatif.
Aussi, votre rapporteur a-t-il souhaité, malgré des délais limités, organiser un large programme d'auditions permettant de recueillir l'appréciation sur ce texte de l'ensemble des parties prenantes à la politique d'insertion.
Ces auditions lui ont permis d'identifier non une opposition totale à la philosophie de ce texte, mais quatre types de préoccupations principales.
Première préoccupation : l'articulation du nouveau contrat avec les autres dispositifs d'insertion et plus largement avec la politique de l'emploi qui reste de la responsabilité de l'Etat.
Sur ce point, votre commission reste persuadée que le nouveau dispositif introduit plus de complémentarité que de concurrence. Il s'adresse en effet à un public qui ne bénéficie pas des contrats d'insertion classiques (CIE, CES, CEC...) et comble ainsi une faille dans nos politiques d'insertion.
Il est vrai que la lisibilité de l'ensemble du dispositif est pour l'instant un peu brouillée par la perspective d'une réforme prochaine des autres dispositifs, et notamment de la fusion entre le CES et le CEC dans un contrat unique d'insertion dont l'architecture n'est pas encore définitivement établie.
Il reste que l'articulation du dispositif avec les actions menées par les structures d'insertion par l'activité économique mériterait d'être précisée. Votre rapporteur ne manquera pas d'interroger le Gouvernement à ce sujet et de formuler des propositions le moment venu.
Il ne faudrait pas non plus que ce nouveau dispositif piloté et financé par les départements ne conduise l'Etat à contingenter plus drastiquement les contrats aidés qu'il continuera à financer, au risque de fragiliser les perspectives de « sortie » du RMA et de faire supporter de fait au département la charge de la politique de l'emploi.
Deuxième préoccupation : la « rigidité » du dispositif
Nombreux sont ceux qui craignent que le paramétrage du dispositif (condition d'ancienneté de deux ans au RMI, 20 heures par semaine, durée maximale de 18 mois) ne soit trop strict pour prendre en compte la diversité des situations et l'hétérogénéité des besoins d'insertion.
Il est vrai que ces différentes conditions peuvent apparaître contraignantes au moment même où le pilotage de l'ensemble du dispositif RMI est confié au département pour permettre justement son adaptation au plus près du terrain.
Troisième préoccupation : les garanties offertes aux salariés, notamment en matière de protection sociale.
Le Gouvernement a fait le choix, pour garantir l'attractivité du dispositif, de retenir une assiette dérogatoire au droit commun pour le calcul des cotisations et contributions sociales. Seul le « différentiel » pris en charge directement par l'employeur serait ici pris en compte. Dès lors, les droits sociaux différés seraient réduits d'autant, notamment en matière d'assurance vieillesse et d'assurance chômage.
Mais votre commission observe aussi que le projet de loi prévoit parallèlement le maintien des droits connexes au RMI, à savoir principalement la CMU et la CMU complémentaire. Elle observe également qu'il prévoit une couverture maladie et accidents du travail plus avantageuse que le droit commun : le salarié aura en effet droit au maintien de la totalité de son salaire dès le premier jour de congé, l'employeur prenant alors à sa charge ce qui ne sera pas financé directement par la sécurité sociale.
Il reste effectivement que l'accès à l'assurance vieillesse et à l'assurance chômage sera moins favorable que le droit commun du fait d'une contribution, il est vrai, inférieure.
Sur ce point, il n'a pas paru possible à votre commission d'élargir l'assiette retenue au risque de déséquilibrer le bouclage financier du dispositif. Toutefois, par la modification d'un des paramètres du contrat, il lui est apparu possible d'augmenter l'effort contributif et par là même de majorer le montant de ces prestations différées.
Dernière préoccupation : la sortie du dispositif
Se pose en effet la question de l'avenir des salariés à l'issue des 18 mois de contrat.
Sur ce point, votre commission insiste sur le fait que le RMA ne constitue pas une fin en soi, mais doit marquer la première étape d'un processus d'insertion professionnelle. Il est donc nécessaire de l'articuler avec les autres dispositifs de la politique de l'emploi. Des pistes, qui ne relèvent pas du domaine législatif, peuvent ainsi être utilement explorées.
Il pourrait être prévu, par exemple, que soit menée, avant la fin du CIRMA, une orientation professionnelle qui prépare alors très en amont la sortie du dispositif et qui pourrait être réalisée par l'ANPE.
A l'issue du RMA, et en l'absence de solution trouvée en amont, le salarié devrait pouvoir bénéficier d'un bilan de compétences. Au vu de ce bilan, il pourrait se voir proposer soit un contrat aidé de la politique de l'emploi dans le secteur marchand (CIE, contrat de qualification adulte) ou dans le secteur non marchand (CES, CEC) ou dans une structure d'insertion par l'activité économique, soit une formation qualifiante ou préqualifiante.
Il est donc clair que la réussite du RMA exigera une mobilisation particulière des moyens de la politique de l'emploi.
Il reste que, sans offrir nécessairement de garanties totales, le dispositif constitue pour beaucoup un préalable indispensable au retour à l'emploi, sans lequel les perspectives d'une insertion professionnelle durable seraient très faibles.