D. L'APPLICATION DE LA LOI ORGANIQUE DU 1ER AOÛT 2001 RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES
Depuis la publication de la loi organique n° 2001-471 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, une révolution budgétaire et administrative est en marche qui, à terme, bouleversera les modes de gestion publique. Cette réforme, qui fera passer d'un budget de moyens à un budget orienté vers les résultats, nécessite un travail d'adaptation considérable. Votre rapporteur spécial a souhaité examiner en quoi le ministère de la santé et de la solidarité se prépare à ce chantier qui aboutira avec la loi de finances pour 2006, même s'il est conscient que le nouveau texte organique n'est en vigueur que depuis quatre mois.
La préparation de l'application de la loi organique du 1 er août 2001
Comment
le ministère compte-t-il mettre en place la présentation des
crédits prévue par la loi organique relative aux lois de
finances ? Quels pourraient être les missions, programmes et actions
envisagés, ainsi que les objectifs et les indicateurs associés
à chacune de ces unités budgétaires ?
Le secteur santé-solidarité du ministère de l'emploi et de
la solidarité a engagé ces dernières années une
profonde réforme de son organisation et de ses modes de gestion. On peut
notamment citer : la réforme de l'administration centrale avec les
décrets du 21 juillet 2000, surtout la
généralisation d'un dialogue de gestion avec les services
déconcentrés, dans le cadre des comités techniques
régionaux et interdépartementaux rassemblant la DRASS et les
DDASS d'une région, nourrissant la directive nationale d'orientation,
laquelle tient également compte des enseignements du système de
contrôle de gestion déconcentré grâce à
l'application informatique GLB. A partir de ces acquis solides, de nouvelles
perspectives s'ouvrent pour l'amélioration de la gestion publique au
ministère grâce aux actions mises en oeuvre au niveau
interministériel dans le contexte de la réforme de l'Etat qui
appellent la rénovation du système d'information financier :
budgétaire, comptable et de gestion.
La loi organique du 1
er
août 2001 relative aux lois de
finances constitue une mutation très profonde du cadre de la gestion
publique pour l'orienter vers les résultats et la recherche de
l'efficacité tout en donnant sa portée à l'autorisation
parlementaire. A ce stade, le ministère a engagé :
1°) Une communication vis-à-vis de l'encadrement supérieur
de l'administration centrale et des services déconcentrés pour
bien faire comprendre les origines, le contenu et les incidences de la
réforme. Il est en effet capital d'associer dès l'origine les
fonctionnaires dans la mise en oeuvre de la réforme, très
au-delà de ceux actuellement chargés de la préparation
budgétaire ou de la gestion de crédits. Il s'agit bien de
réussir une profonde mutation de la gestion publique et pas seulement de
la gestion budgétaire qui mobilisera notamment les ressources
d'évaluation (DRESS, IGAS, etc.)
2°) La désignation d'un haut fonctionnaire d'expérience pour
être la cheville ouvrière de la mise en oeuvre de la
réforme.
3°) Une structuration de son organisation. Cette organisation sera
pilotée par un comité de planification stratégique. Le
travail de définition des missions et des programmes, puis pour chacun
d'entre eux la définition des objectifs, des indicateurs associés
et des actions envisagées commencera dès 2001. Il tiendra compte :
- des spécificités du ministère en terme de
définition de programmes, par exemple le fait qu'il soit rarement dans
une situation purement régalienne dans ses domaines et doive tenir
compte de l'action de multiples acteurs pour obtenir des résultats ou
encore de l'importance des dépenses fiscales ou de
sécurité sociale dans ses domaines d'action ;
- de la nécessaire association à la définition de ces
programmes de nombreux autres départements ministériels, des
partenaires sociaux fortement impliqués dans la politique menée
par le ministère, de même que les multiples réseaux
professionnels et de façon générale la
société civile.
4°) Parallèlement à ce travail de rédaction des
programmes, 6 sous-projets seront menés :
- la gestion budgétaire : détermination des nouvelles
nomenclatures de vote et d'exécution, règles de gestion de la
fongibilité, de la limitativité et de la pluriannualité
des crédits, articulation entre les objectifs de résultat et les
moyens budgétaires associés ;
- le système d'information financier (budgétaire, comptable et de
gestion) : implantation d'ACCORD en administration centrale en 2003,
réflexion engagée sur la globalité du système
d'information ;
- les conséquences à tirer, en matière de gestion de
personnel, de la fongibilté des emplois au niveau du ministère ;
- les relations avec les services déconcentrés
(expériences de la contractualisation / globalisation,
généralisation aux deux secteurs du ministère de la
démarche « Directive nationale d'orientation » d'une part,
avec les organismes sous tutelle d'autre part) ;
- les procédures de travail à modifier, compte-tenu des nouvelles
règles de globalisation des crédits et des emplois, de
pluriannualisation, de la plus grande responsabilité
ministérielle ;
- les conditions d'évaluation
a posteriori
des résultats :
articulation entre inspection générale, Cour des comptes,
procédure d'évaluation publique externe, Parlement.
5°) L'ensemble de ces actions converge dans un plan triennal de
développement et de généralisation du contrôle de
gestion en cours d'élaboration.
Source : ministère de l'emploi et de la solidarité
Or, sur plusieurs points, le ministère de la santé et de la
solidarité aura des efforts très importants à
réaliser. La Cour des comptes a ainsi relevé dans son rapport sur
l'exécution des lois de finances 2000 les défauts du
ministère en matière de contrôle de gestion et de
connaissance de ses coûts, clef pourtant de la réforme.
Par ailleurs, même si un effort appréciable a été
accompli pour agrémenter le « bleu
budgétaire » d'informations et d'indicateurs autour des
agrégats, la future structuration par missions et par programmes n'a pas
encore été esquissée. Le ministère risque cependant
de se retrouver confronté à un défi important puisque la
mesure de la performance et le concept même de programme y seront plus
délicats à mettre en oeuvre qu'ailleurs, ne serait-ce qu'en
raison de l'absence de maîtrise complète du ministère sur
nombre de ses actions. Il est, de plus, frappant de constater que les
crédits augmentent, que les mesures nouvelles s'accumulent chaque
année sans que ne soient communiqués des éléments
permettant d'évaluer du bon emploi de ces sommes. Les indicateurs
communiqués recouvrent le coût ou l'activité de services,
mais n'esquissent que très rarement une mesure de la performance. Nulle
part ne figurent des objectifs, des priorités, des moyens d'en mesurer
le respect. Votre rapporteur spécial considère qu'il y a
là une situation regrettable qui nécessitera de la part du
ministère une réaction vive et une mobilisation forte. L'examen
du budget de la santé et de la solidarité représente en
effet l'exemple même de ce que devra apporter la loi organique relative
aux lois de finances du 1
er
août 2001 : la
possibilité de s'interroger non pas sur l'évolution des moyens
mais sur les finalités de l'action publique.
De même, la réflexion sur les emplois devrait être
entamée au plus vite, dans la mesure où la substitution du
concept d'autorisation des emplois rémunérés par
l'État à celle d'emploi budgétaire nécessitera un
recensement précis des personnels employés au sein du
ministère, mais aussi dans certains établissements publics, en
fonction de leur situation réelle.
Pour les établissements publics relevant du ministère, un travail
devra aussi être accompli en matière d'impositions de toute
nature. De ce point de vue, votre rapporteur ne peut que s'étonner de la
parution pour le moins tardive - octobre 2001 - des textes d'application
nécessaires à l'entrée en vigueur des taxes
créées par la loi de finances pour 2001 en faveur de l'AFSSAPS et
de l'ANAES, alors même que la création des ces taxes avaient
été présentée en 2001 comme urgente (les articles
avaient été introduits au cours de la discussion
budgétaire) et nécessaires au bouclage du budget 2001 de ces
établissements.