Directive 90/388/CE de la Commission du 28 juin 1990
relative à la
concurrence dans les marchés des services de
télécommunications
La
Commission des Communautés européennes,
vu le traité instituant la Communauté économique
européenne, et notamment son article 90 paragraphe 3,
(1) considérant que le renforcement des télécommunications
communautaires constitue l'une des conditions essentielles du
développement harmonieux des activités économiques et d'un
marché compétitif dans la Communauté tant du point de vue
des fournisseurs de services que des utilisateurs ; que la Commission a en
conséquence défini, dans son livre vert sur le
développement du marché commun des équipements et services
de télécommunications et dans sa communication sur la mise en
oeuvre du livre vert jusqu'en 1992, un programme d'action pour l'ouverture
progressive du marché des télécommunications à la
concurrence ; que ce programme d'action ne concerne ni la
radiotéléphonie mobile, ni la radiomessagerie ni les services de
communication de masse dans le sens de la radiodiffusion ou de la
télévision ; que le Conseil, par sa résolution du 30 juin
1988 (1), a apporté son soutien aux objectifs de ce programme, et
notamment à la création progressive d'un marché
communautaire ouvert des services de télécommunications ; que, au
cours des dernières décennies, le secteur des
télécommunications a connu une évolution technologique
considérable ; que celle-ci permet l'offre d'une gamme de plus en plus
variée de services et, en particulier, de transmission de données
; qu'elle rend, en outre, techniquement et économiquement possible un
régime où la concurrence entre différents
opérateurs peut s'installer ;
(2) considérant que, dans tous les États membres,
l'établissement et l'exploitation du réseau de
télécommunications ainsi que la fourniture de services y
afférents sont généralement délégués,
par l'octroi de droits exclusifs ou spéciaux, à un ou plusieurs
organismes de télécommunications ; que ces droits sont
caractérisés par le pouvoir discrétionnaire que
l'État exerce à des degrés divers en ce qui concerne
l'accès au marché des services de
télécommunications ;
(3) considérant que les organismes chargés de
l'établissement et de l'exploitation du réseau de
télécommunications sont des entreprises visées par
l'article 90 paragraphe 1 du traité puisqu'ils exercent de façon
organisée une activité économique, à savoir la
fourniture de services de télécommunications ; qu'ils sont soit
des entreprises publiques, soit des entreprises auxquelles les États ont
octroyé des droits exclusifs ou spéciaux ;
(4) considérant que, tout en assurant la tâche de service public,
plusieurs États membres ont déjà
réaménagé le système de droits exclusifs ou
spéciaux jusqu'alors en vigueur dans le domaine des
télécommunications ; que, dans tous les cas, le régime de
droits exclusifs ou spéciaux est maintenu pour l'établissement et
pour l'exploitation du réseau de télécommunications ;
qu'il en va de même dans certains États membres pour tous les
services de télécommunications alors que, dans d'autres, de tels
droits ne couvrent que certains services ; que, en outre, tous les États
membres ont soit adopté eux-mêmes, soit permis aux organismes de
télécommunications d'adopter des mesures administratives et
réglementaires restreignant la libre prestation des services de
télécommunications ;
(5) considérant que l'octroi, dans l'exercice d'un pouvoir
discrétionnaire de l'État membre concerné, de droits
exclusifs ou spéciaux à une ou plusieurs entreprises pour
l'exploitation du réseau restreint la prestation des services
concernés par d'autres entreprises au départ ou à
destination d'autres États membres ;
(6) considérant que, dans la pratique, les restrictions, au sens de
l'article 59 du traité, à la fourniture de services de
télécommunications vers ou au départ d'autres États
membres consistent notamment en l'interdiction de connexion de circuits
loués par l'intermédiaire de concentrateurs, de multiplexeurs et
d'autres installations au réseau téléphonique
commuté, en l'imposition pour cette connexion de charges d'accès
disproportionnées par rapport au service presté, en
l'interdiction d'acheminement de signaux en provenance ou vers des tiers par
voie de circuits loués ou en l'application d'un tarif
proportionné à l'usage sans justification économique ou
dans le refus de laisser accéder certains prestataires de services au
réseau de télécommunications ; que ces restrictions
d'usage et tarifs excessifs par rapport au coût de revient ont pour effet
de faire obstacle à la prestation, au départ ou vers d'autres
États membres, de services de télécommunications tels que:
- des services ayant pour objet l'amélioration des fonctions de
télécommunication, par exemple la conversion de protocole, de
code, de format ou de débit,
- des services basés sur l'information ayant pour objet l'accès
à des bases de données,
- des services informatiques à distance,
- des services d'enregistrement et de retransmission de messages, par exemple
le courrier électronique,
- des services de transaction, par exemple des transactions
financières, transfert électronique de données à
usage commercial, téléachat et
téléréservation,
- des services de téléaction, par exemple
télémesure et télécontrôle ;
(7) considérant que l'article 66, en liaison avec les articles 55 et 56
du traité, autorise des exceptions à la liberté de
prestation de services pour des raisons non économiques ; que les
restrictions admises à ce titre sont, d'une part, l'exercice, même
à titre occasionnel, de l'autorité publique et, d'autre part,
l'ordre public, la sécurité publique et la santé publique
; que, s'agissant d'exceptions, elles doivent être
interprétées de manière restrictive ; qu'aucun service de
télécommunications ne constitue une participation à
l'exercice de l'autorité publique impliquant la faculté d'user de
prérogatives exorbitantes par rapport au droit commun, de
privilèges de puissance publique et d'un pouvoir de coercition qui
s'imposent aux citoyens ; que l'offre de services de
télécommunications ne peut en soi porter atteinte à
l'ordre public et ne peut affecter la santé publique ;
(8) considérant que la jurisprudence de la Cour de justice admet, en
outre, des restrictions à la liberté de prestation de services
lorsqu'elles répondent à des exigences essentielles
nécessitées par l'intérêt général,
sont appliquées sans effets discriminatoires et sont
proportionnées à l'objectif visé ; que la protection des
consommateurs ne rend pas indispensable des restrictions à la libre
prestation de services en matière de télécommunications,
car cet objectif peut également être atteint dans un régime
de libre concurrence ; que la protection de la propriété
intellectuelle ne peut pas non plus être invoquée en la
matière ; que les seules exigences essentielles dérogeant
à l'article 59 du traité qui peuvent justifier des restrictions
à l'usage du réseau public sont l'intégrité de ce
dernier, la sécurité de son fonctionnement et, dans les cas
justifiés, l'interopérabilité et la protection des
données ; que les restrictions imposées doivent toutefois
être proportionnées aux objectifs poursuivis par ces exigences
légitimes ; que les États membres devront rendre publiques et
notifier ces restrictions à la Commission afin de permettre à
cette dernière d'apprécier cette proportionnalité ;
(9) considérant que, dans ce contexte, la sécurité de
fonctionnement du réseau vise à assurer la disponibilité
du réseau public en cas d'urgence ; que l'intégrité
technique du réseau public vise à assurer son fonctionnement
normal et l'interconnexion des réseaux publics dans la Communauté
basée sur des spécifications techniques communes ; que la notion
d'interopérabilité des services vise le respect de ces
spécifications techniques minimales mises en place pour accroître
la prestation de services et le choix de l'usager ; que la protection de
données vise à garantir la confidentialité des
communications et la protection des données personnelles ;
(10) considérant également que, outre les exigences essentielles
qui peuvent être incluses comme conditions dans les procédures
d'autorisation ou de déclaration, les États membres peuvent
inclure, en ce qui concerne le service de commutation de données, des
conditions relatives à des obligations de service public qui constituent
des réglementations de commerce objectives, sans effets discriminatoires
et transparentes concernant les conditions de permanence, de
disponibilité et de qualité du service ;
(11) considérant enfin que, lorsqu'un État membre a
chargé un organisme de télécommunications de fournir des
services de commutation de données par paquets ou par circuits pour le
public et lorsque ce service pourrait être mis en échec du fait de
la concurrence d'opérateurs privés, la Commission peut autoriser
cet État membre à imposer des conditions additionnelles, y
compris au niveau de la couverture géographique, pour la fourniture de
ce service ; que, pour l'appréciation de ces mesures, la Commission,
dans le cadre de la mise en oeuvre des objectifs fondamentaux du traité,
prévus à l'article 2 de celui-ci, y compris celui de renforcer la
cohésion économique et sociale de la Communauté
visée à l'article 130 A du traité, prendra en compte
également la situation des États membres dont le réseau
pour la fourniture de services de commutation de données par paquets ou
par circuits n'est pas encore suffisamment développé et qui
pourrait justifier, pour ces États membres, un maintien jusqu'au 1er
janvier 1996 de la date prévue pour la simple revente de capacité
des lignes louées ;
(12) considérant que l'article 59 du traité prévoit la
suppression de toute autre restriction à la libre prestation des
services à l'intérieur de la Communauté à
l'égard des ressortissants des États membres établis dans
un État de la Communauté autre que celui du destinataire de la
prestation ; que le maintien ou l'introduction de tout droit exclusif ou
spécial ne répondant pas aux critères
précités constitue de ce fait une infraction à l'article
90 en liaison avec l'article 59 ;
(13) considérant que l'article 86 du traité déclare
incompatible avec le marché commun tout comportement d'une ou de
plusieurs entreprises qui constituerait une exploitation abusive d'une position
dominante sur le marché commun ou dans une partie substantielle de
celui-ci ; que les organismes de télécommunications sont des
entreprises au sens de cet article, parce qu'ils exercent des activités
économiques et en particulier la fourniture du service que constitue la
mise à disposition des usagers du réseau et de services de
télécommunications ; que cette mise à disposition du
réseau constitue un marché de services distinct étant
donné qu'il n'est pas interchangeable avec d'autres services ; que la
mise à disposition du réseau de télécommunications
et les autres services de télécommunications sont fournis
à des conditions de concurrence suffisamment homogènes dans
chacun des marchés nationaux pour permettre à la Commission
d'apprécier la puissance économique des entreprises qui les
fournissent sur ces territoires ; que les territoires des États membres
constituent autant de marchés géographiques distincts ; que ceci
est dû à la différence entre les réglementations
visant les conditions d'accès et de fonctionnement technique, relatives
à la fourniture du réseau et de ces services de
télécommunications ; que, en outre, chacun d'entre eux constitue
une partie substantielle du marché commun ;
(14) considérant que ces entreprises détiennent sur chacun de
leurs marchés nationaux, individuellement ou collectivement, une
position dominante pour l'établissement et l'exploitation du
réseau de télécommunications parce qu'elles sont les
seules à disposer dans chaque État membre d'un réseau
couvrant l'ensemple du territoire de ceux-ci et parce que leur gouvernement
leur a octroyé le droit exclusif d'exploiter le réseau, seules ou
conjointement avec d'autres entreprises ;
(15) considérant que, lorsque les droits exclusifs ou spéciaux
sont octroyés en matière de services de
télécommunications par l'État à des organismes qui
disposent déjà d'une position dominante pour
l'établissement et l'exploitation du réseau, ces droits ont pour
effet de renforcer cette position dominante en l'étendant aux services ;
(16) considérant que, en outre, les droits exclusifs ou spéciaux
octroyés par l'État aux organismes de
télécommunications en ce qui concerne la fourniture de certains
services de télécommunications ont pour effet que ces organismes:
a) excluent du marché ou restreignent l'accès des concurrents au
marché des services de télécommunications en limitant
ainsi le libre choix des utilisateurs, ce qui est susceptible de limiter le
progrès technologique au préjudice des consommateurs ;
b) imposent aux utilisateurs du réseau d'avoir recours aux services qui
font l'objet des droits exclusifs et subordonnent ainsi la conclusion des
contrats d'utilisation du réseau à l'acceptation de prestations
supplémentaires qui n'ont pas de liens avec l'objet de ces contrats ;
que chacun de ces comportements constitue un abus de position dominante
distinct, susceptible d'affecter d'une manière sensible le commerce
entre États membres ; que, en effet, tous les services en question
peuvent, en principe, être offerts par des fournisseurs établis
dans d'autres États membres ; que la structure de la concurrence
à l'intérieur du marché commun en est modifiée dans
une mesure substantielle ; que, en tout état de cause, les droits
spéciaux exclusifs accordés pour ces services ont pour effet de
créer une situation contraire à l'objectif de l'article 3 point
f) du traité, qui prévoit l'établissement d'un
régime assurant que la concurrence ne soit pas faussée dans le
marché commun et donc, a fortiori, que la concurrence ne soit pas
éliminée ; que les États membres sont tenus, en vertu de
l'article 5 du traité, de s'abstenir de toute mesure susceptible de
mettre en péril la réalisation des objectifs du traité, y
compris celui de l'article 3 point f) ;
(17) considérant donc que les droits exclusifs octroyés en
matière de services de télécommunications aux entreprises
publiques ou aux entreprises auxquelles les États membres ont
accordé des droits spéciaux ou exclusifs pour
l'établissement du réseau de télécommunications
sont incompatibles avec l'article 90 paragraphe 1 en liaison avec l'article 86
;
(18) considérant que l'article 90 paragraphe 2 du traité permet
de déroger à l'application des articles 59 et 86 du traité
dans les cas où celle-ci ferait échec à l'accomplissement
en droit ou en fait de la mission particulière impartie aux organismes
de télécommunications ; qu'une telle mission consiste en
l'établissement et l'exploitation d'un réseau universel,
c'est-à-dire ayant une couverture géographique
générale et étant fourni, sur demande et dans un
délai raisonnable, à tout fournisseur de services ou utilisateur
; que les moyens financiers pour le développement de ce réseau
proviennent encore principalement de l'exploitation du service de
téléphonie vocale ; que, par conséquent, l'ouverture de ce
service à la concurrence pourrait menacer l'équilibre financier
des organismes de télécommunications ; que le service de
téléphonie vocale, qu'il soit offert à partir du
réseau téléphonique actuel ou faisant partie du service
RNIS (réseau numérique à intégration de services),
constitue en outre le moyen actuellement le plus important de notification et
d'appel des services d'urgence responsables de la sécurité
publique ;
(19) considérant que la fourniture des circuits loués constitue
un élément essentiel de la mission des organismes de
télécommunications ; qu'il existe à présent, dans
la quasi-totalité des États membres, une différence
substantielle entre les tarifs pour l'usage du service de transmission de
données sur le réseau commuté et pour l'usage de circuits
loués ; qu'un réequilibrage sans délai de ces tarifs
serait de nature à porter atteinte à cette mission
économique générale ; que l'établissement de
l'équilibre de ces tarifs doit pouvoir intervenir progressivement d'ici
au 31 décembre 1992 ; que, entre-temps, il doit pouvoir être
imposé aux opérateurs privés de ne pas offrir au public un
service qui consisterait en la simple revente de capacités de circuits
loués, c'est-à-dire comportant seulement le traitement, la
commutation, le stockage ou la conversion de protocole dans la mesure
nécessaire à la transmission en temps réel ; que les
États membres peuvent dès lors établir un système
de déclaration par lequel les opérateurs privés
s'engageraient à ne pas effectuer une telle revente ; que, toutefois,
aucune autre obligation ne peut être mise à la charge de ces
opérateurs pour faire respecter cette mesure ;
(20) considérant que ces restrictions n'affectent pas le
développement des échanges dans une mesure contraire à
l'intérêt de la Communauté ; que, dans ces conditions, ces
restrictions sont compatibles avec l'article 90 paragraphe 2 du traité ;
que ceci peut également être le cas pour les mesures
adoptées par les États membres pour assurer que l'action des
fournisseurs de services privés ne fasse pas échec au service
public de la commutation de données ;
(21) considérant que les règles du traité, y compris
celles relatives à la concurrence, s'appliquent au service télex
; que l'importance de ce service subit une érosion progressive dans tous
les États membres du fait de l'émergence de moyens de
télécommunications concurrents comme le téléfax ;
que l'abolition des restrictions actuelles sur l'utilisation du réseau
téléphonique commuté et des circuits loués
permettra la retransmission de messages télex ; que, vu cette
évolution, une approche spécifique est nécessaire ; que,
dès lors, la présente directive ne doit pas s'appliquer au
service télex ;
(22) considérant que, en tout état de cause, la Commission
réexaminera au cours de l'année 1992 tout droit spécial ou
exclusif qui subsisterait en tenant compte du développement
technologique et de l'évolution vers une infrastructure numérique
;
(23) considérant qu'il convient de donner la possibilité aux
États membres d'élaborer des procédures équitables
d'autorisation en vue du respect des exigences essentielles, sans
préjudice d'une harmonisation de celles-ci prévue sur le plan
communautaire dans le cadre des directives du Conseil concernant la fourniture
d'un réseau ouvert (open network provision - ONP) ; que, en ce qui
concerne la commutation de données, les États membres doivent
pouvoir inclure dans ces procédures l'obligation de respect de
réglementations de commerce portant sur les conditions de permanence, de
disponibilité et de qualité du service et des mesures visant
à sauvegarder la mission d'intérêt économique
général qu'ils ont confiée à un organisme de
télécommunication ; que ces procédures doivent être
fondées sur des critères objectifs précis et
appliquées sans effets discriminatoires ; que ces critères
doivent être, en particulier, justifiés et proportionnés
à l'intérêt général visé ainsi que
dûment motivés et publiés ; que la Commission doit pouvoir
les examiner de façon approfondie au regard des règles de
concurrence et de celles concernant la libre prestation de services ; que, en
tout état de cause, les États membres qui n'auraient pas
notifié à la Commission de projet de critères et de
procédures d'autorisation après un délai
déterminé ne pourront plus imposer aucune restriction à la
libre prestation du service de transmission de données pour le grand
public ;
(24) considérant que les États membres doivent pouvoir disposer
d'un délai complémentaire pour élaborer des règles
générales visant les conditions de prestation de ces services de
commutation de données par paquets ou par circuits, pour le grand public
;
(25) considérant que, par ailleurs, les services de
télécommunications ne peuvent faire l'objet d'aucune restriction
ni en ce qui concerne le libre accès des utilisateurs à ces
services, ni en ce qui concerne le traitement des informations qui peut
être effectué avant la transmission des messages par le
réseau de télécommunications, ou après que les
messages aient été reçus, qui ne serait pas
justifiée par une exigence essentielle proportionnelle à
l'objectif poursuivi ;
(26) considérant que la numérisation du réseau de
télécommunications et l'amélioration technologique des
appareils terminaux qui y sont connectés ont accru le nombre de
fonctions qui étaient précédemment effectuées
à l'intérieur du réseau, de telle sorte que ces fonctions
peuvent être effectuées par les usagers eux-mêmes par le
moyen d'appareils terminaux de plus en plus sophistiqués ; qu'il
convient d'assurer que les fournisseurs des services de
télécommunications, notamment de téléphonie et de
transmission de données par commutation par paquets ou par circuits,
permettent aux opérateurs économiques d'utiliser ces fonctions ;
(27) considérant que, en attendant l'établissement de normes
communautaires en vue de la fourniture d'un réseau ouvert (ONP), la
publication des interfaces techniques utilisées d'ores et
déjà dans les États membres est nécessaire pour
permettre aux entreprises qui envisagent de s'établir sur les
marchés des services de télécommunications de prendre les
mesures nécessaires afin d'adapter les caractéristiques de leurs
services aux exigences techniques des réseaux ; que, dans la mesure
où ces interfaces techniques ne sont pas encore établies par les
États membres, il importe que celles-ci soient établies dans les
meilleurs délais ; que tout projet élaboré à cet
égard devra être communiqué à la Commission
conformément à la directive 83/189/CEE du Conseil (2),
modifiée par la directive 88/182/CEE (3) ;
(28) considérant que, généralement, les
législations nationales attribuent à des organismes de
télécommunications une fonction de réglementation des
services de télécommunications concernant plus
particulièrement l'attribution d'autorisations, le contrôle des
agréments et des spécifications obligatoires d'interfaces,
l'attribution des fréquences et la surveillance des conditions
d'utilisation ; que ces législations ne définissent parfois que
des principes généraux pour l'exploitation des services
autorisés tout en laissant aux organismes de
télécommunications le pouvoir de définir les conditions
spécifiques d'application ;
(29) considérant que cette activité à la fois
réglementaire et commerciale des organismes de
télécommunications a une incidence directe sur l'activité
des opérateurs économiques qui offrent des services de
télécommunications en concurrence avec les organismes en question
; que, en effet, par cette double activité, lesdits organismes
déterminent ou, à tout le moins, influencent substantiellement la
fourniture de services offerts par leurs concurrents ; que le fait de
déléguer à une entreprise qui dispose d'une position
dominante pour l'établissement et l'exploitation du réseau le
pouvoir de réglementation de l'accès au marché des
services de télécommunications constitue un renforcement de la
position dominante que cette même entreprise détient sur ce
marché ; que ce fait, vu le conflit d'intérêts, est de
nature à restreindre l'accès des concurrents aux marchés
des services de télécommunications et à limiter la
liberté de choix des utilisateurs ; que, en outre, ces mesures sont
susceptibles de limiter les débouchés de matériels
destinés au traitement de signaux de télécommunications
et, partant, du progrés technologique en ce domaine ; que, dès
lors, le cumul de ces activités constitue un abus de position dominante
des organismes de télécommunications en cause au sens de
l'article 86 du traité ; que, dans la mesure où ces comportements
résultent d'une mesure instaurée par l'État, cette
dernière est aussi incompatible avec l'article 90 paragraphe 1, en
liaison avec l'article 86 ;
(30) considérant que, pour accomplir de manière efficace son
devoir de surveillance en application des dispositions de l'article 90
paragraphe 3 du traité, la Commission doit disposer de certaines
informations essentielles ; que ces informations doivent assurer en particulier
la transparence des mesures prises par les États membres pour que la
Commission puisse veiller à ce que l'accès au réseau et
les différents services y afférents soient offerts par chaque
organisme de télécommunications à des tarifs et autres
conditions non discriminatoires pour tous ses clients ; qu'il y a lieu que ces
informations concernent:
- les mesures prises pour abolir les droits exclusifs en application de la
présente directive,
- les conditions dans lesquelles sont octroyées les autorisations
d'exploitation des services de télécommunications ; que la
Commission doit disposer de ces informations pour pouvoir veiller, notamment,
à ce que tous les utilisateurs du réseau et des services, y
compris les organismes de télécommunications lorsqu'ils sont
prestataires de services, soient traités de manière
équitable ;
(31) considérant que, pour la fourniture de services de
télécommunications dorénavant ouverts à la
concurrence, les détenteurs de droits exclusifs ou spéciaux en
question ont, dans le passé, pu imposer à leurs clients des
contrats de longue durée ; que de tels contrats limiteraient de facto la
possibilité pour de nouveaux concurrents éventuels d'offrir leurs
services à ces clients et, pour ceux-ci, d'en bénéficier ;
que, dès lors, il doit être prévu que l'utilisateur puisse
obtenir la résiliation de son contrat dans un délai raisonnable ;
(32) considérant, que, actuellement, chaque État membre
réglemente la fourniture de services de télécommunications
selon des conceptions propres ; que même la définition de certains
services diffère d'un État membre à l'autre ; qu'il en
résulte des distorsions de concurrence de nature à rendre plus
difficile pour les opérateurs économiques l'offre de services
transfrontaliers de télécommunications ; que, pour cette raison,
le Conseil a, dans sa résolution du 30 juin 1988,
considéré qu'un des objectifs d'une politique de
télécommunications était la création d'un
marché communautaire ouvert des services de
télécommunications, notamment par la définition rapide,
grâce à des directives du Conseil, des conditions techniques, des
conditions d'utilisation et de principes de tarification pour la fourniture
d'un réseau ouvert (ONP) ; que la Commission a soumis au Conseil une
proposition à cet effet ; qu'une harmonisation des conditions
d'accès n'est toutefois pas le moyen adapté pour mettre fin aux
entraves aux échanges qui résultent d'infractions à des
dispositions du traité ; que la Commission a le devoir de veiller
à l'application des dispositions du traité de manière
efficace et globale ;
(33) considérant que l'article 90 paragraphe 3 du traité impose
des devoirs clairs et octroie des compétences bien définies
à la Commission en ce qui concerne la surveillance des relations entre
les États membres et leurs entreprises publiques et les entreprises
auxquelles ils ont octroyé des droits exclusifs ou spéciaux et,
en particulier, en matière d'élimination des obstacles à
la libre prestation des services, en matière de discriminations entre
ressortissants des États membres et en matière de concurrence ;
que, d'autre part, une approche globale s'impose pour mettre fin aux
infractions qui persistent dans certains États membres et pour donner
des indications claires aux États membres qui réexaminent leur
législation afin d'éviter de nouvelles infractions ; que, par
conséquent, une directive au sens de l'article 90 paragraphe 3 du
traité constitue le moyen le plus approprié à cette fin,
A arrêté la présente directive:
Article premier
1. Aux
fins de la présente directive, on entend par:
- "organismes de télécommunications", les entités
publiques ou privées - y compris leurs filiales contrôlées
- auxquelles un État membre octroie des droits spéciaux ou
exclusifs pour l'établissement de réseaux publics de
télécommunications et, le cas échéant, la
fourniture de services de télécommunications,
- "droits spéciaux ou exclusifs", les droits octroyés par un
État membre ou une autorité publique à un ou plusieurs
organismes publics ou privés au moyen de tout instrument
législatif, réglementaire ou administratif leur réservant
la fourniture d'un service ou l'exploitation d'une activité
déterminée,
- "réseau public de télécommunications", l'infrastructure
publique de télécommunications qui permet le transport de signaux
entre des points de terminaison définis, par fils, par faisceaux
hertziens, par moyens optiques ou par d'autres moyens
électromagnétiques,
- "services de télécommunications", les services qui consistent,
en tout ou en partie, en la transmission et l'acheminement de signaux sur le
réseau public de télécommunications par des
procédés des télécommunications, à
l'exception de la radiodiffusion et de la télévision,
- "point de terminaison du réseau", l'ensemble des connexions physiques
et des spécifications techniques d'accès qui font partie du
réseau public de télécommunications et sont
nécessaires pour avoir accès à ce réseau public et
communiquer efficacement par son intermédiaire, - "exigences
essentielles", les raisons d'intérêt général et de
nature non économique qui peuvent amener un État membre à
limiter l'accès au réseau public de
télécommunications ou aux services publics de
télécommunications. Ces raisons sont la sécurité du
fonctionnement du réseau, le maintien de son intégrité et,
dans les cas où elles sont justifiées,
l'interopérabilité des services et la protection des
données. La protection des données peut comprendre la protection
des données personnelles, la confidentialité des informations
transmises ou stockées, ainsi que la protection du domaine privé,
- "service de téléphonie vocale", l'exploitation commerciale pour
le public du transport direct et de la commutation de la voix en temps
réel au départ et à destination des points de terminaison
du réseau public commuté, permettant à tout utilisateur
d'utiliser l'équipement connecté à un tel point de
terminaison pour communiquer avec un autre point de terminaison,
- "service télex", l'exploitation commerciale pour le public du
transport direct de messages télex, conformément à la
recommandation pertinente du comité consultatif international
télégraphique et téléphonique (CCITT), au
départ et à destination des points de terminaison du
réseau public commuté, permettant à tout utilisateur
d'utiliser l'équipement connecté à un tel point de
terminaison pour communiquer avec un autre point de terminaison,
- "service de commutation de données par paquets ou par circuits",
l'exploitation commerciale pour le public du transport direct de données
au départ et à destination des points de terminaison du
réseau public commuté, permettant à tout utilisateur
d'utiliser l'équipement connecté à un tel point de
terminaison pour communiquer avec un autre point de terminaison,
- "simple revente de capacité", l'exploitation commerciale pour le
public de l'offre du transport de données sur des circuits loués
comme service distinct, comprenant seulement la commutation, le traitement, le
stockage de données ou la conversion de protocole, dans la mesure
nécessaire à la transmission en temps réel au
départ et à destination du réseau public commuté.
2. La présente directive ne s'applique pas au service télex,
à la radiotéléphonie mobile, à la radiomessagerie
et aux communications par satellite.
Article 2
Les
États membres assurent, sans préjudice de l'article 1er
paragraphe 2, l'abolition des droits exclusifs ou spéciaux pour la
fourniture de services de télécommunications autres que le
service de téléphonie vocale et prennent les mesures
nécessaires afin de garantir le droit de tout opérateur
économique de fournir lesdits services de
télécommunications.
Les États membres qui soumettent la fourniture de ces services à
une procédure d'autorisation ou de déclaration visant le respect
des exigences essentielles assurent, sans préjudice des dispositions de
l'article 3, que les autorisations soient accordées selon des
critères objectifs, transparents et sans effets discriminatoires. Les
refus éventuels doivent être dûment motivés et il
doit exister une procédure de recours à l'encontre de tels refus.
Sans préjudice des dispositions de l'article 3, les États
membres communiquent à la Commission, le 31 décembre 1990 au plus
tard, les mesures prises pour se conformer au présent article et
l'informent de toute réglementation existante ou de tout projet tendant
à instituer de nouvelles procédures d'autorisation ou modifier
celles qui existent.
Article 3
En ce
qui concerne le service de commutation de données par paquets ou par
circuits, les États membres peuvent, dans le cadre des procédures
d'autorisation visées à l'article 2, exiger, jusqu'au 31
décembre 1992, que les opérateurs économiques n'offrent
pas au public la simple revente de capacité de circuits loués.
Les États membres communiquent à la Commission sous forme de
projet, au plus tard le 30 juin 1992, toutes procédures d'autorisation
ou de déclaration pour la fourniture du service de commutation de
données par paquets ou par circuits au public qui visent le respect:
- soit des exigences essentielles,
- soit des réglementations de commerce portant sur les conditions de
permanence, de disponibilité et de qualité du service,
- soit des mesures visant à sauvegarder la mission
d'intérêt économique général qu'ils ont
confié à un organisme de télécomunication en ce qui
concerne la commutation de données, si l'action de prestataires de
services privés risque de faire échec à l'accomplissement
de cette mission.
L'ensemble de ces conditions doit former un cahier des charges de service
public et doivent être objectives, transparentes et sans effets
discriminatoires.
Les États membres assurent, au plus tard le 31 décembre 1992, la
publication des procédures d'autorisation ou de déclaration
adoptées pour ces services.
Il appartient à la Commission de veiller avant leur mise en oeuvre
à la compatibilité de ces projets avec les dispositions du
traité.
Article 4
Les
États membres qui maintiennent des droits exclusifs ou spéciaux
pour l'établissement et l'exploitation des réseaux publics de
télécommunications prennent les mesures nécessaires pour
rendre publiques, objectives et sans effets discriminatoires les conditions en
vigueur pour l'accès aux réseaux.
Ils assurent notamment que les opérateurs qui en font la demande
puissent obtenir des circuits loués dans un délai raisonnable et
que leur usage ne fasse l'objet d'aucune restriction, hormis celles qui sont
justifiées conformément aux dispositions de l'article 2.
Les États membres communiquent à la Commission, le 31
décembre 1990 au plus tard, les mesures prises pour se conformer
à cet article.
Lors de chaque augmentation des tarifs applicables aux circuits loués,
ils communiquent à la Commission les éléments permettant
d'apprécier le bien-fondé de ces augmentations.
Article 5
Les
États membres assurent que les caractéristiques des interfaces
techniques nécessaires pour l'utilisation des réseaux publics de
télécommunications soient publiées au plus tard le 31
décembre 1990, sans préjudice des conventions internationales
applicables en la matière.
Les États membres communiquent à la Commission,
conformément à la directive 83/189/CEE, tout projet
élaboré à cet égard.
Article 6
Les
États membres assurent, en ce qui concerne la prestation de services de
télécommunications, l'abrogation des restrictions existantes en
ce qui concerne le traitement des signaux avant leur transmission sur le
réseau public ou après leur réception, à moins que
la nécessité de ces restrictions pour assurer le respect de
l'ordre public ou des exigences essentielles ne soit démontrée.
Sans préjudice des règles communautaires harmonisées
adoptées par le Conseil pour la fourniture d'un réseau ouvert,
les États membres assurent qu'il n'y ait entre les prestataires de
services, y compris les organismes de télécommunications, aucune
discrimination en ce qui concerne les conditions d'utilisation et les tarifs
pratiqués.
Les États membres communiquent à la Commission les mesures
prises ou les projets déposés afin de se conformer aux
dispositions du présent article pour le 31 décembre 1990 au plus
tard.
Article 7
Les
États membres assurent que, à partir du 1er juillet 1991,
l'attribution des autorisations d'exploitation, le contrôle des
agréments et des spécifications obligatoires, l'attribution des
fréquences et la surveillance des conditions d'utilisation soient
effectués par une entité indépendante des organismes de
télécommunications.
Ils communiquent à la Commission, au plus tard le 31 décembre
1990, les mesures prises ou les projets déposés à cet
effet.
Article 8
Les États membres assurent que les organismes de télécommunications donnent, à dater de l'abrogation des droits exclusifs ou spéciaux concernés, la possibilité à leurs clients, liés pour une durée supérieure à un an par un contrat de fourniture de services de télécommunications qui faisait au moment de sa conclusion l'objet de tels droits, de résilier celui-ci avec un préavis de six mois.
Article 9
Les États membres communiquent à la Commission les informations nécessaires pour lui permettre d'établir pendant une période de trois ans, à la fin de chaque année, un rapport d'ensemble sur l'application de la présente directive. La Commission communique ce rapport aux États membres, au Conseil, au Parlement européen et au Comité économique et social.
Article 10
Au
cours de l'année 1992, la Commission procède à une
évaluation globale de la situation du secteur des services de
télécommunications par rapport aux objectifs poursuivis par cette
directive.
Au cours de l'année 1994, la Commission dresse le bilan des effets des
mesures visées à l'article 3 afin d'examiner si des
aménagements sont à apporter aux dispositions de cet article,
compte tenu notamment de l'évolution technologique et du
développement des échanges dans la Communauté.
Article 11
Les
États membres sont destinataires de la présente directive.
Fait à Bruxelles, le 28 juin 1990.
Par la Commission
Leon BRITTAN
Vice-président
(1) JO no C 257 du 4. 10. 1988, p. 1.
(2) JO no L 109 du 26. 4. 1983, p. 8.
(3) JO no L 81 du 26. 3. 1988, p. 75.