V. UN SUIVI INSUFFISANT DE LA COOPÉRATION POLICIÈRE EUROPÉENNE
Votre
commission a eu maintes fois l'occasion de souligner l'importance essentielle
de la coopération policière internationale, et notamment
européenne, comme instrument de lutte contre une criminalité qui,
depuis longtemps, sait tirer le meilleur parti de toutes les
opportunités qu'offre la libre circulation des personnes et des capitaux.
Le traité d'Amsterdam apportera de profondes modifications dans le
déroulement du processus européen de coopération
policière. La commission des Lois s'est inquiétée de la
capacité de la France à répondre à ce nouvel enjeu
et à rester une force de proposition et de contrôle, face à
la commission européenne qui, dès l'entrée en vigueur du
traité, disposera de nouveaux pouvoirs.
Dans son rapport établi en juin dernier au nom de la mission de la
commission des Lois, présidée par M. Paul Masson, sur le suivi,
par les ministères intéressés, du processus
européen de coopération policière, M. Alex Türk
a fait ressortir la nécessité d'une prise en charge directe par
le ministère de l'intérieur de la responsabilité de la
politique de sécurité dans le cadre européen
3(
*
)
.
Cette prise en charge impliquerait notamment que ce ministère
représente la France dans les instances de décision
européennes, principalement au Comité exécutif de Schengen
et au comité K4 de l'Union européenne, à la place
respectivement du ministre des Affaires européennes et du préfet
coordonnateur du Secrétariat général du comité
interministériel pour les questions de coopération
économique européenne (SGCI). Mais il serait également
essentiel que le ministère de l'intérieur favorise
l'émergence en son sein d'une véritable culture
européenne, en promouvant la formation du personnel aux questions
européennes et aux langues étrangères, et qu'il se dote
d'une structure administrative d'impulsion adaptée.
Sur ce dernier point, lors de son audition par votre commission des Lois, le 5
novembre 1997, le ministre de l'intérieur avait annoncé la
création au sein du ministère d'une
délégation
aux
affaires internationales
. Votre rapporteur regrette que cette
délégation, qui a été créée de fait
en décembre 1997,
n'ait toujours pas été
officialisée dans le décret d'organisation du ministère
n° 85-1057 du 2 octobre 1985
. Il rappelle la
nécessité, à terme, de la création d'une
véritable direction des affaires internationales au ministère
de l'intérieur
.
La coopération policière européenne a été
marquée en 1998 par l'entrée en vigueur, au 1er avril, de la
convention d'application de la convention d'application de l'accord de Schengen
avec l'Italie et l'Autriche.
Les projets de loi de ratification de l'adhésion à la convention
d'application de l'accord de Schengen des trois pays nordiques, Danemark,
Finlande et Suède, et de l'association de l'Islande et de la
Norvège, ont, quand à eux, été
déposés devant le Sénat.
Plusieurs conventions de coopération policière et
douanière transfrontalières ont été conclues avec
nos partenaires européens en application de la convention de Schengen
(conventions du 3 octobre 1997 avec l'Italie, du 9 octobre 1997 avec
l'Allemagne et du 7 juillet 1998 avec l'Espagne).
Votre rapporteur, constatant que
les projets de loi de ratification
n'ont toujours pas été déposés devant le
Parlement,
insiste sur la nécessité de ratifier au plus vite
ces conventions,
de manière à ne pas laisser perdurer des
situations intermédiaires, préjudiciables à l'instauration
d'une coopération efficace entre les services aux frontières des
différents pays concernés.
Votre rapporteur regrette enfin que la convention
Europol,
entrée
en vigueur le 1er octobre 1998 sans qu'un accord ait pu encore être
trouvé concernant la mise en place de l'autorité de
contrôle, ne puisse encore être véritablement
appliquée, sept pays, dont la
France
, n'ayant pas ratifié
le
protocole sur les privilèges et immunités des
fonctionnaires
.
*
* *
La
priorité annoncée par le Gouvernement pour la politique de
sécurité ne trouve pas sa pleine traduction dans le budget de la
police pour 1999 qui augmente à peine plus que l'ensemble du budget de
l'Etat.
L'augmentation constatée est en effet en grande partie, dans une
administration qui gère 133 000 agents, le résultat
mécanique de l'accord salarial de la fonction publique du mois de
février dernier.
Plusieurs objectifs définis par la loi du 21 janvier 1995 ont
été abandonnés.
Sans un effort important de formation du personnel et d'équipement des
services, et faute de recrutements anticipés pour pallier le grand
nombre de départs à la retraite à venir, la police est en
passe de ne plus pouvoir remplir correctement ses missions.
La politique suivie repose pour l'essentiel sur des emplois-jeunes dont
l'avenir est incertain et sur un projet de redéploiement territorial des
forces de police et de gendarmerie dont la mise en oeuvre est contestée.
Ces observations conduisent la commission des Lois à ne pas souscrire
aux crédits figurant dans la section police-sécurité du
projet de loi de finances pour 1999 et à s'en remettre sur ce plan
à l'appréciation de la commission des finances.