III. LA NOUVELLE ORIENTATION DE LA POLITIQUE DE LA VILLE SEMBLE RÉTICENTE À TIRER LES CONSÉQUENCES DE LA SPÉCIFICITÉ DES QUARTIERS SENSIBLES
Votre
commission avait eu l'occasion de souligner dans son avis de l'année
dernière combien l'attentisme du Gouvernement et l'absence
d'orientations claires semblaient souvent préjudiciables, à la
fois, à la
pérennisation
de l'idée même de la
politique de la ville apparue à partir de 1981, mais aussi au
succès du pacte de relance pour la ville
lancé par
M. Alain Juppé le 1
er
janvier 1996.
On ne peut donc que se féliciter que le Gouvernement de M. Lionel
Jospin, nommé le 3 juin 1997, se soit doté d'une ligne de
conduite plus nettement définie au cours de cette année 1998.
Trois étapes successives ont marqué cette évolution :
le rapport de M. Jean-Pierre Sueur de février 1998 ; la nomination d'un
secrétaire d'Etat à la ville le 30 mars dernier ; la
réunion du comité interministériel des villes du 30 juin
1998.
A. LA LENTE MISE EN PLACE DE NOUVELLES ORIENTATIONS
1. Le rapport " Sueur " fait primer les considérations institutionnelles sur l'analyse de la situation des quartiers
M.
Jean-Pierre Sueur, maire d'Orléans et ancien secrétaire d'Etat
aux collectivités locales, a remis le 13 février son rapport
intitulé " Demain, la ville " à Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Dans son introduction, M. Jean-Pierre Sueur estime que si beaucoup a
été fait en vingt ans de politique de la ville, "
il y a
aujourd'hui plus de ségrégation et moins de mixité sociale
dans bien des quartiers
".
Paradoxalement, ce rapport ne présente pas
pour autant la
" photographie " que l'on pourrait attendre de la situation
économique et sociale dans les zones en difficulté
; rejetant
le principe même du " zonage " pour lui substituer la mise en
oeuvre effective du principe de l'égalité républicaine, M.
Jean-Pierre Sueur privilégie l'approche institutionnelle pour
répondre aux défis urbains.
a) L'agglomération est privilégiée dans les réformes institutionnelles
•
Constatant que la politique de la ville dépasse souvent les
contours de la commune, M. Jean-Pierre Sueur propose de
" s'orienter
vers l'élection au suffrage universel direct d'une assemblée
d'agglomérations ".
Corrélativement, il demande que les
futurs contrats concernant la politique de la ville et les politiques urbaines
soient transformés en contrats signés entre l'Etat et
l'agglomération et couvrent une période de
dix ans
.
Simultanément, il préconise une meilleure
" représentation des agglomérations urbaines au sein des
départements "
et propose, à titre expérimental,
un transfert des compétences exercées par le département
en matière d'action sociale et de mise en oeuvre du RMI au sein d'une ou
plusieurs agglomérations candidates.
La volonté réformatrice du rapport s'étend à la
fiscalité locale : ainsi, il est proposé de mettre en oeuvre par
voie législative
" la taxe professionnelle
d'agglomération dans l'ensemble des agglomérations de plus de
100.000 habitants ".
Comme on le voit même s'il ne s'agit pas, selon M. Jean-Pierre Sueur, de
" la mise en cause de la commune qui constitue depuis deux
siècles, la cellule de base de la démocratie "
, les
propositions du rapport aboutiraient bien, si elles étaient
appliquées, à bouleverser assez sensiblement le paysage
institutionnel.
• En dessous du niveau de la commune, il est proposé de
généraliser la création de
conseils de quartiers
associant non seulement les conseillers municipaux élus mais
également
" les représentants des associations ou des
forces vives du quartier "
.
Ils seraient dotés d'un rôle important : "
outre un
pouvoir de proposition sur l'ensemble du champ communal, ces conseils devraient
obligatoirement être consultés pour toute décision
concernant le quartier considéré, préalablement à
l'inscription de ladite question à l'ordre du jour du conseil
municipal ".
b) Un jugement sévère sur la politique de discrimination positive
L'idée de discrimination territoriale positive qui
consiste
à accorder un régime dérogatoire, notamment sur les plans
fiscal et social à des zones urbaines en difficulté, est remise
en question par le rapport de M. Jean-Pierre Sueur au profit de la
" mise en oeuvre effective du principe de l'égalité
républicaine "
.
Un jugement souvent sévère est porté sur la politique,
qualifiée de " politique de zonage ", qui est pourtant, en
quelque sorte, à l'origine historiquement de la politique de la ville
que nous connaissons aujourd'hui : c'est en 1981 qu'apparaissent les
premières conventions de développement social des quartiers (DSQ)
qui ont fourni le socle de la création du ministère de la ville
en 1991.
M. Jean-Pierre Sueur considère que la discrimination territoriale
positive à l'oeuvre à travers la géographie prioritaire de
la politique de la ville est inflationniste, complexe, souvent
incohérente et qu'elle provoque une stigmatisation préjudiciable
des populations concernées.
En outre, le choix des territoires d'intervention serait contestable parce
qu'il dépendrait des critères de sélection, reposerait sur
les données dépassées du recensement de 1990 et induirait
des effets de seuil : il apparaît pourtant que les critères ont
été relativement affinés et diversifiés -de
manière analogue au demeurant à ce qui se fait en matière
de répartition de la DGF- pour aboutir à des modèles qui
font l'objet d'un relatif consensus.
Enfin, il est souligné que le périmétrage isolerait
artificiellement les zones cibles de la géographie prioritaire et
créerait ainsi des risques de " déport ".
Partant de ce postulat, il propose de substituer le concept de
rétablissement de l'égalité républicaine à
celui de discrimination positive, c'est-à-dire d'assurer à
l'ensemble des habitants des quartiers en difficulté les services
publics auxquels ils ont droit dans les mêmes conditions que l'ensemble
de la population.
Souhaitant favoriser " la sortie du zonage ", M. Jean-Pierre
Sueur admet qu'il est essentiel que les engagements de l'Etat soient
respectés : "
cela suppose le maintien des zones de
redynamisation urbaine (ZRU) et des zones franches urbaines (ZFU)
jusqu'aux
termes prévus dans le dispositif ayant entraîné leur
création
".
Au-delà, M. Jean-Pierre Sueur pose le principe "
qu'en cas de
non-reconduction, les sommes afférentes seront affectées à
la structure d'agglomération pour être employée à la
politique de la ville ".
c) Des objectifs de financement ambitieux
Concernant les moyens financiers, le rapport
" Sueur "
préconise un effort financier minimum mené sur dix ans au moins
" à la hauteur de celui accompli pour la mise en oeuvre des
emplois-jeunes ",
ce qui correspondrait à 35 milliards de
francs par an.
Conscient des conséquences de l'annualité budgétaire, il
propose un effort public pour la ville qui couvrirait une
période de
dix ans
.
L'action de l'Etat irait de pair avec un
engagement accru des
collectivités locales
dont l'effort actuel, qui est pourtant loin
d'être négligeable -le jaune budgétaire en convient-, est
considéré comme
" très inégal et souvent
insuffisant ".
En d'autres termes, les collectivités locales seraient appelées
à " financer plus " et
" aucun contrat de plan ne
devrait être signé par l'Etat sur la base du statu
quo ".
2. La nomination du ministre délégué à la ville rattaché à l'emploi et à la solidarité
La
nomination de M. Claude Bartolone en tant que ministre
délégué à la ville est intervenue le 30 mars
dernier, soit près d'un an après la nomination du Gouvernement de
M. Lionel Jospin.
Il a ainsi été donné raison à une demande de votre
commission lors de la discussion du projet de budget pour 1998 : elle avait
souligné que, -quelles que soient les qualités personnelles de
Mme Martine Aubry-, l'emploi du temps d'un ministre chargé de l'emploi
et de la solidarité était sans doute trop astreignant pour lui
permettre de jouer un rôle de pilotage à part entière de la
politique de la ville.
Il n'est pas inutile de rappeler qu'en janvier dernier, à la suite
d'événements survenus dans les banlieues, le Président de
la République avait reçu à l'Elysée onze maires de
toutes tendances politiques pour faire le point sur la question de la
sécurité dans les zones urbaines sensibles.
Comme le rappelle le rapport " Sueur ", plusieurs solutions
institutionnelles ont été expérimentées depuis 1981
pour assurer la conduite de la politique de la ville au sein des structures
gouvernementales :
- un ministre, ayant éventuellement rang de ministre d'Etat,
chargé exclusivement de la ville (M. Michel Delebarre, M. Bernard Tapie)
;
- un ministre chargé de la ville dans un portefeuille plus large :
ville et aménagement du territoire (deuxième ministère de
M. Delebarre, 1992), affaires sociales, santé et ville (Mme Simone Veil,
1993), ministre de l'emploi et de la solidarité,
" également chargé de la politique de la
ville ",
aux termes du décret d'attribution (Mme Martine Aubry)
;
- un ministre chargé de la ville dans un portefeuille plus large,
et doublé d'un ministre délégué :
aménagement du territoire, ville et intégration (M. Jean-Claude
Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de
l'intégration, et M. Eric Raoult, ministre délégué
à la ville et à l'intégration) ;
- un secrétaire d'Etat à la ville, sous l'autorité du
Premier ministre (M. François Loncle) ;
- un secrétaire d'Etat à la ville, sous l'autorité du
ministre chargé de l'intégration et de la lutte contre les
exclusions (Mme Françoise de Veyrinas, secrétaire d'Etat aux
quartiers en difficulté).
Parmi les multiples évolutions connues en matière de structure
gouvernementale pour la ville, la formule actuellement choisie qui consiste
à rattacher la ville au ministère des affaires sociales
présente l'avantage de mettre l'accent sur le
caractère
essentiel de la dimension sociale
.
Il reste que le choix d'un rattachement au ministère de
l'équipement et de l'aménagement du territoire -qui avait
été celui du Gouvernement de M. Alain Juppé-, permet
d'insister sur la notion d'aménagement du territoire car
le
traitement des quartiers urbains sensibles doit aller de pair avec le soutien
aux zones rurales défavorisées
.
Selon le décret n° 98-242 du 2 avril 1998, M. Claude Bartolone
"
exerce par délégation de la ministre de l'Emploi et de
la Solidarité, les attributions de celle-ci relatives à la
ville "
. Pour cela, il dispose de la délégation
interministérielle à la ville et au développement social
urbain.
Il dispose également
" en tant que de besoin "
des
autres directions et services placés sous l'autorité de Mme
Martine Aubry, notamment la direction de l'administration
générale, du personnel et du budget, le service de l'information
et de la communication, de l'inspection générale des affaires
sociales, ainsi que des directions et services des autres ministères qui
concourent à la préparation et à la mise en oeuvre de la
politique de la ville.
3. Le comité interministériel des villes du 30 juin 1998 définit des orientations générales
Enfin,
la troisième étape du lancement de
" la nouvelle ambition
pour les villes ",
pour reprendre la terminologie gouvernementale,
s'est tenue avec le comité interministériel des villes du 30 juin
1998, présidé par le Premier ministre.
Ce comité a donné lieu à l'adoption d'orientations
politiques, du programme du Gouvernement et de programmes d'action pour chaque
ministère. Le contenu des trois parties est largement repris dans le
" jaune " budgétaire relatif à la ville. C'est pourquoi
votre rapporteur ne le reprendra pas dans le détail.
L'action gouvernementale est articulée autour de quatre objectifs :
- tout d'abord,
" garantir le pacte
républicain "
sur tout le territoire en particulier
" en redonnant au service public son rôle d'intégration du
corps social "
tout en "
réaffirmant le sens de la
citoyenneté dans les droits qu'elle ouvre mais aussi dans les
obligations qu'elle crée "
;
- puis,
" renforcer la cohésion sociale dans les
villes "
par la recherche de la mixité urbaine et sociale
à travers la politique de l'habitat, de l'intégration des
populations et du développement économique gage du progrès
social ;
- ensuite,
" mobiliser l'auteur d'un projet
collectif ",
l'Etat affichant sa détermination à
assurer l'égalité devant le service public et les
collectivités locales devant être en mesure d'assurer pleinement
leurs responsabilités
" par un meilleur partage de la
fiscalité locale, en particulier de la taxe professionnelle, une
implication et un effort financier plus conséquent des conseils
régionaux et généraux et un redéploiement des
dotations de l'Etat " ;
- enfin,
" construire un nouvel espace
démocratique "
avec les habitants.
Il est frappant de constater que
ces déclarations de principe ne
concernent pas seulement les quartiers sensibles en difficulté
mais
fournissent
des objectifs généraux à l'action des
différentes politiques ministérielles valables pour l'ensemble du
territoire
.
Cette démarche est confirmée dans le compte rendu diffusé
par le secrétariat général du Gouvernement : on peut ainsi
noter que Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité indique que
" la politique de la ville ne peut plus être, seulement, celle
des quartiers en difficulté "
et que
" les actions en
faveur de la mixité sociale, de l'ouverture des quartiers en
difficulté vers le reste de la ville sont aussi
déterminantes ".
La même logique se retrouve dans la déclaration du ministre de
l'intérieur, reprise par M. Claude Bartolone au cours de ses auditions,
indiquant que
" la politique de la ville ne saurait être ce qui
demeure lorsque les autres politiques publiques ont
échoué "
et dans la synthèse finale du Premier
ministre soulignant que
" la politique de la ville ne peut être
ni le solde de ce qui est mené lorsque les autres politiques publiques
ont échoué, ni la somme de toutes les politiques publiques
existantes ".
Votre rapporteur souligne que, s'il est certes commode de définir la
politique de la ville par ce qu'elle n'est pas,
il reste à se
demander si certaines mesures spécifiques ne demeurent pas
nécessaires lorsque les politiques publiques ne parviennent plus
à faire la preuve de leur efficacité, notamment en matière
d'emploi et de sécurité
.
B. LA SPÉCIFICITÉ DES QUARTIERS EN DIFFICULTÉ JUSTIFIE TOUJOURS LA GÉOGRAPHIE PRIORITAIRE DE LA POLITIQUE DE LA VILLE
Il est indéniable que certaines zones présentent des indicateurs sociaux très dégradés ce qui justifie que le Gouvernement, malgré les réticences exprimées, n'ait pas démantelé les dispositifs mis en place dans le cadre de la géographie prioritaire de la politique de la ville.
1. Des quartiers qui concentrent les difficultés
a) Des indicateurs spécifiques
En 1997,
la délégation interministérielle à la ville a fait
réaliser par l'institut national des statistiques et des études
économiques (INSEE) une exploitation particulière du recensement
général de la population de 1990 pour préciser et
réactualiser la situation socio-démographique des zones urbaines
sensibles (ZUS), des zones de redynamisation urbaine (ZRU) et zones franches
urbaines (ZFU) instituées par la
loi n° 96-987 du 14 novembre
1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville
.
Il est à noter que
quatre régions
représentent
à elles seules
plus de la moitié de la population
résidant dans un quartier prioritaire
: l'Ile-de-France (30 %
des habitants des ZUS de la métropole), le Nord-Pas-de-Calais
(9,2 %), Provence-Alpes-Côte d'Azur (8,6 %) et
Rhône-Alpes (8,5 %).
La population
des quartiers identifiés dans les contrats de ville
est de
6,5 millions de personnes
, pour 17 millions d'habitants
dans les communes signataires des contrats de ville.
En métropole, la population des quartiers est de 4.688.000 habitants
dans les ZUS (soit 8,2 % de la population française), 3.238.000
dans les ZRU (soit 5,6 % de la population française) et 724.000
dans les ZFU (soit 1,4 % de la population française).
Le taux de chômage
moyen est de 18,9 % dans les ZUS, de
20,6 % dans les ZRU et de 21,3 % dans les ZFU. Le chômage
touche particulièrement les jeunes : en mars 1990, le taux de
chômage des jeunes de 15 à 24 ans s'élevait à
28,5 % dans les ZUS, 30,2 % dans les ZRU et 31,2 % dans les ZFU
alors que ce même taux était de 21,1 % dans l'ensemble des
agglomérations où se situent ces quartiers et de 19,9 % pour
la France métropolitaine.
Taux de chômage dans les quartiers prioritaires
(En pourcentage)
|
ZUS |
ZRU |
ZFU |
Agglomérations ayant une ZUS |
Taux de chômage des 15 à 59 ans (hommes) |
15,4 |
16,6 |
17,0 |
7,9 |
Taux de chômage des 15 à 59 ans (femmes |
23,5 |
25,8 |
27,0 |
10,4 |
Taux de chômage des 15 à 24 ans (hommes |
24,1 |
25,4 |
26,3 |
17,2 |
Taux de chômage des 15 à 24 ans (femmes) |
33,5 |
35,6 |
36,1 |
24,7 |
Taux de chômage (ensemble) |
18,9 |
20,6 |
21,3 |
11,6 |
Source : recensement de la population de 1990, INSEE
Enfin, la part des ménages dont la personne de référence
est de
nationalité étrangère
est en moyenne de
16 %, soit le double du taux prévalant dans l'ensemble des
agglomérations.
Toutefois, cette moyenne recouvre une grande variabilité des situations
locales, allant d'une absence de surreprésentation par rapport à
la réalité communale (pour environ une ZUS sur 10) à des
situations où la proportion de ménages étrangers dans la
ZUS est plus de
trois fois plus élevée
que sur l'ensemble
de la commune (dans un peu plus de 10 % des cas).
b) La dimension sociale des handicaps dont souffrent les quartiers
Par
ailleurs en 1993-1994, l'INSEE a réalisé une étude sur
500 quartiers dits " sensibles " qui dresse un inventaire des
handicaps économiques sociaux et culturels concentrés dans ces
quartiers et montrent que l'exclusion est un phénomène social
avant d'être urbain
2(
*
)
.
Tous les indicateurs sociaux ne sont pas " alarmants " dans chacun
des quartiers mais ces derniers présentent bien, en moyenne,
un
profil dégradé
aussi bien par rapport à
l'agglomération dont ils font partie qu'en comparaison de la moyenne
nationale : ainsi, 45 % des jeunes de 16 à 25 ans vivent dans
un ménage touché par le chômage contre 24 % en moyenne
nationale ; l'habitat est souvent de médiocre qualité : la
mauvaise isolation acoustique concerne 59 % des habitations dans les
quartiers contre 31,6 % en moyenne nationale.
Le poids de l'aide sociale dans les revenus est particulièrement
important : pour 26,1 % des ménages, les prestations sociales
représentent plus du quart des revenus déclarés contre
13,6 % en moyenne nationale.
Enfin, il est frappant de constater que 66 % des habitants se sentent en
sécurité dans un quartier sensible contre 86,2 % en moyenne
nationale.
Dix indicateurs sur la vie dans les quartiers
(en pourcentage)
|
Quartiers prioritaires |
Agglomérations incluant ces quartiers |
France métropolitaine |
||||
Taux de chômage déclaré (parmi les actifs de 15 ans et plus) |
24,2 |
15,0 |
13,6 |
||||
Jeunes de 16 à 25 ans vivant dans un ménage touché par le chômage |
45,0 |
24,7 |
24,4 |
||||
Pauvreté visible de l'immeuble |
17,7 |
6,8 |
6,7 |
||||
Mauvaise isolation acoustique |
58,8 |
40,3 |
31,6 |
||||
Jugent le quartier bien desservi par les transports en commun |
90,0 |
81,0 |
57,3 |
||||
Aucun dépôt ou compte-chèques régulièrement débiteur (% de ménages/répondants) |
18,3 |
11,8 |
12,2 |
||||
Faible niveau de vie (2.500 F par unité de consommation) |
11,7 |
5,5 |
6,1 |
||||
Importance des prestations institutionnelles dans le revenu (prestations > 25 % parmi les déclarés) |
26,1 |
15,3 |
13,6 |
||||
A rendu de menus services à au moins un voisin |
44,7 |
50,6 |
55,5 |
||||
Se sentent en sécurité dans leur quartier |
66,0 |
80,7 |
86,2 |
2. Les interventions graduées dans les zones relevant de la géographie prioritaire de la politique de la ville
Les 214
contrats de ville conclus dans le cadre du XI
ème
Plan
(1994-1999), ont concerné 771 communes signataires et 1.300 quartiers,
dont 930 quartiers prioritaires périphériques, 112 centres
villes, 195 quartiers sensibles à traiter préventivement et 71
quartiers d'action thématique ciblée.
Le dispositif issu du Pacte de relance pour la ville a distingué trois
niveaux de quartiers :
a) Les zones urbaines sensibles
Les
zones urbaines sensibles (ZUS) correspondent à des grands ensembles et
des quartiers d'habitat dégradé souffrant d'un
déséquilibre accentué entre l'habitat et l'emploi.
Elles sont d'abord apparues dans la loi du
4 février 1995
d'orientation pour l'aménagement du territoire
qui faisait
référence à la liste des grands ensembles et des quartiers
d'habitat dégradé mentionnée par le décret du 5
février 1993
3(
*
)
.
Une nouvelle liste de 780 ZUS (dont 34 dans les départements
d'outre-mer) situées sur le territoire de 490 communes dans 87
départements, a été sélectionnée parmi :
- les quartiers inscrits dans les contrats de ville ;
- les quartiers inscrits au décret du 5 février 1993
précité, mais ne bénéficiant pas de contrat de
ville,
- quelques quartiers hors des procédures précitées,
mais dont les caractéristiques sociales étaient fortement
dégradées.
Cette liste résulte du décret
n° 96-1156 du 26
décembre 1996 pris en application de la loi n° 96-987 du 14
novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance.
Les habitants des ZUS bénéficient :
- des emplois de ville (article 8 de la loi n° 96-376 du 6 mai 1996
relative à la réforme du financement de l'apprentissage),
- d'une dérogation aux plafonds de ressources du PLA,
- d'une exonération du supplément de loyer de
solidarité en HLM,
- d'un développement du programme " Ecole ouverte ",
- d'une extension des zones d'éducation prioritaire (ZEP).
Les entreprises peuvent y être exonérées par le conseil
municipal de taxe professionnelle (exonération non compensée par
l'Etat à la charge des communes).
Les fonctionnaires travaillant en ZUS bénéficient de la nouvelle
bonification indiciaire (NBI). Ces zones bénéficient aussi
d'avantages en termes d'équipement et d'aménagement urbain
(prêts projets urbains, transformation des grands logements,
...).
b) Les zones de redynamisation urbaine
Les
zones de redynamisation urbaine (ZRU) avaient été définies
par la loi du 4 février 1995 précitée en ne prenant en
compte que les ZUS comprises dans une commune éligible à la
dotation de solidarité urbaine (DSU).
La loi du 14 novembre 1996 de mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville
affine considérablement la sélection en se référant
à une
sélection de critères
avalisés par le
Parlement et tirés de plusieurs éléments
représentatifs de la dégradation des conditions de vie dans les
ZRU à savoir, la
population
, le taux de
chômage
, la
proportion de
jeunes
de moins de 25 ans, la proportion de jeunes
sortis du système scolaire
sans diplôme
et le
potentiel
fiscal
des communes de rattachement.
Les 416 ZRU actuelles (dont 20 dans les DOM) ont été
sélectionnées dans 343 communes et 76 départements parmi
les 750 ZUS
4(
*
)
.
Le dispositif visant à conforter ou à recréer de
l'activité économique dans ces quartiers très
défavorisés, est constitué pour l'essentiel
d'exonérations fiscales et sociales accordées aux entreprises.
Les mesures applicables en ZRU sont les suivantes :
- exonération, compensée par l'Etat, de taxe
professionnelle, pour les établissements nouveaux, ou déjà
existants, pendant cinq ans sur la totalité de la base imposable,
plafonnée à 1 million de francs pour la création ou
l'extension, et à 500.000 francs pour les établissements
existants
(art. 1466 A I ter, du code général des
impôts),
- exonération d'impôt sur les bénéfices, totale
les deux premières années puis dégressive les
troisième, quatrième et cinquième années, sans
plafonnement, pour les entreprises nouvelles
(article 44 sexies du code
général des impôts),
- exonération de taxes foncières sur les
propriétés bâties, pendant deux ans, pour les entreprises
nouvelles ou les établissements créés ou repris à
une entreprise en difficulté
(article 1383 du code
général des impôts),
- exonération sur douze mois des charges sociales patronales du
quatrième au cinquantième salarié pour les entreprises
nouvelles ou existantes sur une fraction de salaire n'excédant pas 1,5
fois le SMIC.
Selon le " jaune budgétaire ", le coût total
estimé de ce dispositif pour 1998 est de 1.267,13 millions de francs et
se décline de la façon suivante :
- impôt sur le bénéfice : 530 millions de francs
- droit de mutation : 150 millions de francs
- taxe professionnelle : 525 millions de francs
- exonérations de charges patronales
pour les 50 premiers salariés 62,13 millions de francs
c) Les zones franches urbaines
Enfin,
les zones franches urbaines (ZFU) ont été
déterminées, après appel à projet, parmi les
quartiers de plus de 10.000 habitants présentant les
caractéristiques les plus dégradées en termes de
chômage des jeunes, de qualification professionnelle ou de ressources des
communes.
Les ZFU, qui bénéficient des exonérations fiscales et de
charges sociales les plus importantes, sont au nombre de 44, dont 38 en
métropole et 6 dans les départements d'outre-mer. Elles sont
déterminées par le législateur qui en a fixé la
liste en annexe à la
loi n° 96-987 du 14 novembre 1996.
La délimitation de ces zones a été fixée par deux
décrets du 26 décembre 1996
4(
*
)
. Le périmètre d'une ZFU
peut inclure une ou plusieurs ZRU en totalité ou en partie.
L'effort de l'Etat est particulièrement concentré et repose sur
des mesures d'exonération fiscale et sociale renforcées :
- exonération compensée par l'Etat de taxe professionnelle
pour les établissements nouveaux ou déjà existants ou
étendus, pendant cinq ans, sur la totalité de la base imposable,
plafonnée à 3 millions de francs
(article 1466 A I quater du
code général des impôts),
- exonération d'impôt sur les bénéfices totale
pendant cinq ans, avec plafonnement à 400.000 francs par an, pour les
entreprises nouvelles ou existantes
(article 44 octies du code
général des impôts),
- exonération de taxes foncières sur les
propriétés bâties pendant cinq ans
(article 1383 A du
code général des impôts),
- exonération des charges sociales sur douze mois des charges
sociales patronales du quatrième au cinquantième salarié
pour les entreprises nouvelles ou existantes sur une fraction de salaire
n'excédant pas 1,5 fois le SMIC.
Selon le " jaune budgétaire ", l'effort financier de l'Etat
peut être estimé à 1,3 milliard de francs dans les ZFU
en 1998, soit :
- exonération de l'impôt sur le bénéfice 180
millions de francs
- exonération de la taxe professionnelle 191,5 millions de francs
- exonération de la taxe foncière sur les
propriétés bâties 40,8 millions de francs
- exonération patronale 50 premiers emplois 350 millions de francs
Toutes ces exonérations font l'objet de compensations versées le
cas échéant par l'Etat aux municipalités concernées
et aux organismes sociaux.
d) Les grands projets urbains
En matière de grandes opérations de restructuration urbaine, il convient de souligner que 13 sites relèvent d'un grand projet urbain (GPU), c'est-à-dire d'une opération très lourde visant à transformer radicalement sur dix ou quinze ans de grands ensembles d'habitat pour améliorer le cadre de vie, réorganiser le tissu urbain, désenclaver et améliorer l'accessibilité.