II. LE RAPPORT MAROIS
Chargé par le ministre de présider une table ronde intitulée " Un plan de qualité pour l'enseignement technique ", le recteur de l'académie de Rennes, M. William Marois a formulé en juillet 1998 cinquante propositions ordonnées principalement autour d'une réorganisation des diplômes, la mise en place de l'alternance dans les formations et le développement de relations entre les établissements et les entreprises.
A. LES PRINCIPES DIRECTEURS DU RAPPORT
Le
rapport Marois est ordonné autour de huit principes directeurs tendant
d'abord à développer le partenariat entre l'éducation
nationale et les représentants du monde économique afin de
définir des périodes de formation en milieu professionnel.
Ces formations devraient à la fois permettre une insertion
professionnelle et favoriser la poursuite d'études ultérieures.
Si elles ont pour objet de déboucher sur une insertion professionnelle,
elles doivent aussi permettre une adaptabilité des connaissances afin
que les salariés puissent s'adapter aux changements technologiques.
Tout en réaffirmant le caractère national des diplômes, il
est proposé de dissocier les modes de formation des certifications, de
développer une pédagogie de l'alternance et de renforcer le
rôle des régions en matière d'enseignement professionnel.
Autour de ces principes, le rapport formule cinquante propositions.
B. LES CINQUANTE PROPOSITIONS DU RAPPORT
Ces propositions peuvent être résumées autour des cinq axes suivants :
1. La promotion de l'image de la voie professionnelle
Une
campagne nationale pour " promouvoir les réussites de
l'enseignement professionnel et technologique " devra être mise en
oeuvre entre novembre et mars lors de l'orientation des élèves.
Cette campagne s'appuiera sur des initiatives académiques telles que des
journées portes ouvertes. Les branches professionnelles, les chambres
consulaires et les partenaires sociaux devront être étroitement
associés à ces manifestations.
Dans le cadre du développement d'une éducation à
l'orientation au collège, les professeurs principaux devront être
" formés et informés ", notamment grâce à
des visites d'établissements professionnels et technologiques, et par
des rencontres avec des professionnels. Par ailleurs, chaque académie
devra mettre en place des procédures de formation pour les conseillers
d'orientation psychologues. Le rapport envisage pour ceux-ci l'organisation de
stages dans les services de recrutement ou de gestion des ressources humaines.
Les plans académiques seront aussi relancés pour favoriser la
diversification de l'orientation des jeunes filles.
Les classes de quatrième technologique de lycée professionnel
seraient progressivement supprimées. Deux options sont envisagées
pour les classes de troisième technologique : leur suppression ou
une redéfinition de leurs objectifs. Dans ce dernier cas, elles
deviendraient des classes de sensibilisation à différents champs
professionnels et les élèves n'y entreraient que sur leur seule
demande, ou celle de leur famille.
Un groupe de travail national devrait être constitué pour examiner
les possibilités d'amélioration des conditions d'affectation des
élèves dans les différentes sections professionnelles. Le
rapport estime qu'il est nécessaire que des aides particulières
puissent être apportées aux élèves les plus
défavorisés.
2. Un partenariat plus étroit entre le système éducatif et les entreprises
Le
rapport relève le besoin de structures nationales pour définir
les besoins en matière de formation professionnelle et suggère de
créer une instance de concertation regroupant les ministères
chargés de l'éducation nationale, de l'emploi, de la formation
professionnelle, de l'agriculture, de la santé, de la fonction publique
mais aussi les employeurs et les salariés des entreprises, les
représentants des personnels du système éducatif, les
parents d'élèves, les élèves, les étudiants,
les conseils régionaux, les universités et les grandes
écoles.
Cette instance commune au secondaire et au supérieur aurait pour mission
d'analyser le marché de l'emploi et l'évolution des besoins en
matière d'enseignement professionnel. Il est également
proposé que soit mis en place dans chaque rectorat un pôle
" formation professionnelle et relations avec les entreprises "
chargé de définir des contrats d'objectifs, et des conventions
d'application des plans régionaux de développement des formations
professionnelles des jeunes.
Une structure permanente devrait, en outre, dans chaque établissement,
assurer la coordination et l'animation des relations entre
l'établissement et les entreprises.
3. L'optimisation du système actuel de formation et de certification
L'individualisation des parcours de formation grâce
à
des pédagogies différenciées, du niveau V (CAP-BEP) au
niveau III (BTS-DUT) doit être favorisée ainsi que le
mélange des publics (statut scolaire, apprentissage, formation
continue), l'architecture générale des diplômes ne devant
pas être remise en cause.
Il est également souhaité que pour certains diplômes
professionnels comme le CAP, les connaissances générales soient
évaluées pour partie dans des épreuves professionnelles.
La formation dispensée dans les CAP devrait pouvoir être
découpée par unités pour favoriser la capitalisation,
système qui permet aux jeunes d'avoir un accès progressif au
diplôme et facilite la reprise d'études.
Il est proposé de rénover les BEP en y introduisant plus ou moins
d'alternance ou de remplacer le BEP par un DEP (diplôme d'études
professionnelles) à forte alternance et un certificat d'études
professionnelles (CEP) à alternance allégée qui
précéderait l'accès au bac professionnel. Le DEP
deviendrait ainsi le seul diplôme d'insertion de niveau V, et serait
préparé sur deux ans.
Tout bachelier technologique qui le souhaite devrait être accueilli en
STS ou en IUT.
La transformation en unités de certification de la majorité des
diplômes professionnels constituerait ainsi une étape importante
vers une définition des diplômes mieux adaptée. Il est
proposé en particulier que le droit à la validation des acquis
professionnels soit intégré dans le code du travail.
4. L'amélioration du fonctionnement de l'alternance
Cet
objectif passe par un développement des contrats d'objectifs
territoriaux passés entre les régions et les rectorats et une
évaluation des partenariats entre les académies, les chambres
consulaires, les unions patronales et les branches professionnelles.
Le rapport souligne la nécessité pour chaque filière
d'étaler les périodes de formation en entreprise sur l'ensemble
de l'année scolaire.
La présence des lycées professionnels devrait en outre être
encouragée sur le marché de la formation continue afin de
favoriser l'accueil de publics diversifiés dans les
établissements scolaires.
La création d'un contrat pédagogique liant les entreprises, les
jeunes et leurs établissements est envisagée afin de mieux
préparer le jeune à sa période de formation en entreprise.
De plus, la formation des tuteurs au sein des entreprises d'accueil pourrait
être améliorée en partenariat avec les conseils
régionaux.
5. La formation et le statut des personnels
Les
voies d'accès menant au professorat devraient être
multipliées et des mesures spécifiques devraient être
prises pour certaines spécialités industrielles et les
métiers d'arts, pour lesquels il n'existe pas de formation universitaire
au professorat.
Il est aussi proposé d'inclure un ensemble de stages effectués
durant l'année de formation pour tous les enseignants des disciplines
technologiques et professionnelles. Ces stages devraient être d'une
durée minimum de dix semaines. Des congés de formation-entreprise
de six mois ou un an devraient être créés au plan national
et cofinancés par l'éducation nationale et l'entreprise
concernée.
Le ministère procède actuellement à un examen de la
faisabilité de ces propositions qui doivent également s'inscrire
dans la réforme plus générale des lycées qui sera
mise en oeuvre à la suite de la consultation nationale dite
" Meirieu ".