DEUXIÈME PARTIE :
LES PERSPECTIVES D'UNE RÉFORME
D'ENVERGURE
DE L'ENSEIGNEMENT TECHNOLOGIQUE ET PROFESSIONNEL
Depuis
plus de six mois, les annonces de réforme de l'enseignement
professionnel se sont multipliées : déclarations
ministérielles, installation d'une table ronde, rapport du recteur
Marois, rapport Meirieu, réforme des lycées...
Au-delà de ce foisonnement de propositions qui s'ordonnent autour de
quelques orientations le plus souvent convergentes, apparaît
d'évidence une volonté clairement affirmée de revaloriser
la voie professionnelle en réformant celle-ci en profondeur.
I. LES ORIENTATIONS DE LA RÉFORME ANNONCÉE PAR LE MINISTRE
A. DES ENGAGEMENTS RÉITÉRÉS
1. L'installation de la table ronde sur l'enseignement professionnel : la reconnaissance de la qualité de la voie professionnelle
En
installant le 17 mars 1998 la table ronde animée par le
recteur Marois, le ministre a souligné le bon niveau des
lycées techniques et professionnels, notamment dans les disciplines
fondamentales, la qualité des équipements dans la plupart des
établissements, l'excellence de l'encadrement et le faible
absentéisme de leurs enseignants.
Il a également annoncé l'organisation d'une opération de
promotion pour cet enseignement et son souci d'ouvrir les grandes
écoles, y compris les plus prestigieuses, comme Polytechnique, les
Mines, ou Centrale, aux bacheliers technologiques.
Il a aussi souhaité développer les formations en alternance et la
formation continue au sein des établissements afin de permettre
l'utilisation des machines à plein temps et resserrer les liens avec les
entreprises.
Il a enfin indiqué que des éléments de formation
professionnelle seraient introduits dans les séries
générales, qu'un continuum devrait être assuré entre
les lycées technologiques et professionnels et il a
réaffirmé sa volonté de mettre en place des classes
technologiques dans les grands lycées urbains.
2. L'enseignement professionnel, " priorités des priorités "
Lors de
la rentrée de 1998, qu'il a effectuée dans un lycée
professionnel, le ministre a rappelé que cet enseignement serait cette
année " la priorité des priorités " et a
indiqué qu'il fallait " casser l'image élitiste où
l'on prétend que l'enseignement général est le fin du fin
tandis que le professionnel ne récupère que les recalés du
général alors qu'il est tout aussi valable ".
Il a redit son souci de promouvoir " cet enseignement remarquable qui a
fait la preuve de sa réussite, débouche sur de vrais emplois et
fabrique des jeunes équilibrés en prise et en phase avec la
société ". Il a annoncé la préparation d'une
charte en faveur du développement de l'enseignement professionnel et le
lancement d'une campagne nationale d'information sur le thème
" Enseignement professionnel : la voie de la réussite ".
Il a ajouté que l'alternance serait introduite dans toutes les
filières, précisant que celle-ci signifiait " au moins la
moitié du temps en entreprise et non plus de simples stages ", et a
souligné qu'il fallait laisser aux jeunes la liberté de leur
choix de formation mais bien les avertir s'il débouche ou non sur un
créneau porteur.
B. LES PRÉCISIONS APPORTÉES PAR LE MINISTRE DEVANT LA COMMISSION
Auditionné le 28 octobre dernier par la commission, le ministre a apporté un certain nombre de précisions sur ses projets de réforme de l'enseignement professionnel.
1. Une distinction nécessaire entre l'enseignement professionnel et l'enseignement technologique
Après avoir reconnu la grande qualité de
l'enseignement professionnel qui permet notamment aux deux tiers des
élèves trop souvent orientés par défaut à la
suite d'un échec dans les filières générales,
d'acquérir un métier, le ministre a stigmatisé au
contraire le caractère de plus en plus théorique des formations
technologiques, en raison de leur dérive vers l'enseignement
général, qui ne permettent plus aux bacheliers technologiques de
poursuivre de manière satisfaisante des études supérieures
en IUT ou à l'université, ni d'assurer une insertion
professionnelle convenable à leurs élèves.
Il a indiqué à cet égard que le recteur Forestier avait
été chargé d'une réflexion sur la
professionnalisation de l'enseignement technologique, qui ne devrait pas
toutefois porter atteinte à un équilibre souhaitable entre la
formation générale et la formation professionnelle.
2. Les incidences de la réforme des lycées sur la voie professionnelle
Le ministre a confirmé que la réforme des lycées s'appliquera très largement à l'enseignement professionnel, et qu'une campagne de promotion de cet enseignement sera engagée à partir du début de 1999. Il a cependant indiqué que l'allégement des horaires très lourds se heurtait cependant aux réticences des professeurs de lycée professionnel qui étaient attachés à leur maintien, et qu'un tel allégement devra faire l'objet d'une concertation avec les enseignants.
3. Les conditions de développement de la formation en alternance
Si la
formation en alternance est souhaitée par les partenaires sociaux, le
ministre a indiqué que son développement dans l'enseignement
professionnel supposait que les formations existantes soient modernisées
et que les sections de lycée professionnel, qui délivrent trop
souvent des formations désuètes, soient adaptées à
l'environnement économique des lycées et aux besoins du tissu
industriel ou des services.
A cet égard, il serait souhaitable, par exemple que l'orientation des
élèves de l'enseignement professionnel vers des sections qui
offrent des débouchés et qui souffrent d'un manque de candidats,
telles les sections de mécanique, du bâtiment ou de
l'hôtellerie, soit encouragée.
Il a également préconisé l'institution d'un
véritable tutorat et la transformation des lycées professionnels
en plates formes technologiques pour les entreprises locales permettant de
rentabiliser des équipements scolaires sous utilisés.
4. La définition de formations adaptées à l'emploi
Afin d'adapter les formations professionnelles à l'emploi, aussi bien sur le plan qualitatif que sur le plan quantitatif, le ministre a indiqué qu'une mission éducation-économie-emploi sera créée au sein de la nouvelle direction de la programmation et du développement du ministère et qu'une concertation sera engagée avec les directions de la prévision concernées du ministère des finances et de l'emploi et de la solidarité.