N° 390

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 4 mars 2025

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation
des
personnes,

Par M. Hervé MAUREY,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Michel Canévet, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; Mmes Marie-Carole Ciuntu, Frédérique Espagnac, MM. Marc Laménie, Hervé Maurey, secrétaires ; MM. Pierre Barros, Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mmes Florence Blatrix Contat, Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Claire Carrère-Gée, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek, Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) :

529, 631 et T.A. 53

Sénat :

352 et 389 (2024-2025)

L'ESSENTIEL

La commission des finances a examiné le 4 mars 2025 le rapport pour avis de M. Hervé Maurey sur le projet de loi n° 352 (2024-2025) portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne (DDADUE) en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes, adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 17 février 2025. Le texte a été envoyé à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

Le chapitre 1er du titre Ier du projet de loi comporte des dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière bancaire, monétaire et financière. Par suite, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a délégué à la commission des finances l'examen des articles 1 à 8 et 10 à 12 du projet de loi.

La commission des finances a adopté 30 amendements du rapporteur dont :

deux amendements à l'article 1er pour compléter la transposition en droit national des dispositions de la directive 2011/61/UE relative aux gestionnaires de fonds alternatifs ;

quatre amendements de simplification prévoyant en premier lieu, à l'article 1er, de revenir à la rédaction proposée par le Haut Comité juridique de la place financière de Paris (HCJP) en matière de règle de conflit de lois applicable aux titres numériques et en second lieu, à l'article 7 et en créant un article additionnel après l'article 12 (devenu l'article 12 bis) de revenir sur la création d'une nouvelle condition pour recevoir des aides du plan France 2030, de dépénaliser certaines sanctions relatives à l'application de la directive CSRD et de rationaliser les modalités de consultation du comité social et économique (CSE) ;

un amendement de suppression d'une habilitation à légiférer par ordonnance et deux autres tendant à réduire la durée de l'habilitation initialement prévue par cohérence avec le calendrier d'examen du projet de loi ;

vingt-et-un amendements de précision, dont cinq ayant pour objet de supprimer des dispositions d'entrée en vigueur différée devenues sans objet au regard du calendrier d'examen du projet de loi.

Parallèlement, le rapporteur a rendu un avis favorable sur deux amendements dont l'un identique à un amendement du rapporteur et l'autre diffère l'entrée en vigueur des obligations de la directive CSRD pour certaines petites et moyennes entreprises (PME).

I. LE DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE EN MATIÈRE ÉCONOMIQUE ET FINANCIÈRE A LARGEMENT ÉVOLUÉ LORS DE LA PRÉCÉDENTE LÉGISLATURE DU PARLEMENT EUROPÉEN ENTRE 2019 ET 2024

A. LE CADRE EUROPÉEN APPLICABLE EN MATIÈRE DE DROIT BANCAIRE, MONÉTAIRE ET FINANCIER A ÉTÉ MODIFIÉ PAR PLUSIEURS TEXTES TRANSVERSAUX ET SECTORIELS ADOPTÉS RÉCEMMENT

Le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne (DDADUE) est le premier de cette nature examiné par la commission des finances depuis la loi du 9 mars 20231(*), le dernier texte législatif d'adaptation au droit de l'Union ayant été renvoyé à une commission spéciale.

Il permet d'assurer la transposition de plusieurs actes législatifs adoptés en matière économique et financière durant la neuvième législature du Parlement européen entre 2019 et 2024.

Le projet de loi permet, à ce titre, de transposer dans le droit national plusieurs évolutions du cadre européen en matière de droit bancaire, économique et financier, dont notamment quatre initiatives prises par la Commission européenne pendant la neuvième législature.

Principaux actes législatifs transposés par le projet de loi
en matière économique et financière

Source : commission des finances du Sénat

En premier lieu, le règlement 2023/1114 ou « règlement MiCA2(*) », proposé par la Commission européenne en septembre 2020, a permis de fixer cadre uniforme applicable à l'échelle européenne pour les émetteurs de crypto-actifs et les prestataires de services sur crypto-actifs.

En deuxième lieu, la directive 2022/2464 ou « directive CSRD3(*) », proposé par la Commission européenne en avril 2021, a permis de fixer un cadre commun à l'échelle européenne sur la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises.

En troisième lieu, plusieurs actes législatifs ont été adoptés dans le cadre du « paquet législatif » en matière bancaire proposé par la Commission européenne en octobre 2021 et ont pour objet de consolider la résilience du secteur bancaire européen en mettant en oeuvre le « cadre de Bâle III finalisé », lequel a été négocié à l'échelle internationale.

Enfin en quatrième lieu, plusieurs actes législatifs ont été adoptés dans le cadre du « paquet législatif » sur l'Union des marchés de capitaux de novembre 2021 et ont pour objet de renforcer l'intégration transfrontalière des marchés de capitaux et de soutenir la relance économique après la crise économique et sanitaire.

B. LES ACTES LÉGISLATIFS ADOPTÉS PENDANT LA NEUVIÈME LÉGISLATURE DU PARLEMENT EUROPÉEN (2019-2024) PERMETTRONT EN PARTICULIER DE RENFORCER L'INTÉGRATION FINANCIÈRE DU MARCHÉ INTÉRIEUR

Les différents actes législatifs adoptés par l'Union européenne en matière de droit bancaire et financier lors de la neuvième législature (2019-2024) ont pour objectif commun de renforcer l'efficacité du marché intérieur et l'intégration financière entre les États membres en facilitant le financement de l'économie et en maintenant un niveau de protection élevé pour les épargnants.

Les adaptations prévues par le projet de loi permettent notamment la mise en place de trois dispositifs concrets qui mettent en application le droit de l'Union européenne.

En premier lieu, depuis l'arrêt WM c/ Luxembourg Business Register de novembre 20224(*), la Cour de justice de l'Union européenne a invalidé les dispositions de la « 5directive anti-blanchiment » qui prévoyait l'accessibilité du registre des bénéficiaires effectifs (RBE) au grand public. Conformément aux dispositions de la « 6directive anti-blanchiment », l'article 4 du projet de loi fixe un régime de présomption d'intérêt légitime à accéder aux données du RBE pour certaines catégories de personnes, afin de garantir l'efficacité du dispositif de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB-FT).

En deuxième lieu, depuis le 9 janvier 2025 et en application du règlement du 13 mars 2024 sur les virements instantanés en euros, les virements bancaires instantanés en euros sont devenus obligatoirement gratuits au sein de l'espace unique de paiement en euros (SEPA5(*)). L'article 2 du projet de loi prévoit de transposer dans le droit national le régime de contrôle du respect par les prestataires de cette nouvelle obligation. L'obligation pour les prestataires de ne pas pratiquer des frais discriminatoires pour les virements instantanés par rapport aux virements différés prévue par le règlement 2024/886 a pour objectif de généraliser le recours à ce moyen de paiement, qui représente 13 % des virements en euros dans l'Union européenne en 2022.

Un montant total de

Une croissance annuelle de

Une proportion de

 
 
 

de virements instantanés en France en 2023

en valeur des virements instantanés en 2023

des virements en euros dans l'Union européenne qui sont instantanés en 2022

Enfin en troisième lieu, le règlement 2023/2859 ou « règlement ESAP6(*) » prévoit la création, en plusieurs étapes progressives, d'un point d'accès unique européen pour les informations financières et extra-financières publiées par les entreprises européennes. La première phase, dont la mise en oeuvre est prévue en juillet 2026, concerne les sociétés cotées. L'article 1er du projet de loi prévoit notamment d'habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour adapter le droit français à ce projet qui a nécessité la modification de plus de trente actes législatifs de l'Union européenne.

II. LE PROJET DE LOI CONSTITUE UN INSTRUMENT NÉCESSAIRE POUR ASSURER LA CONFORMITÉ DU DROIT NATIONAL AU DROIT DE L'UNION ET À SES ÉVOLUTIONS RÉCENTES EN MATIÈRE DE DROIT ÉCONOMIQUE ET FINANCIER

A. LE PROJET DE LOI PROPOSE À LA FOIS D'ADAPTER LE DROIT NATIONAL À L'ÉVOLUTION DU DROIT DE L'UNION, DE COMPLÉTER LA TRANSPOSITION DE CERTAINES DISPOSITIONS ET D'HABILITER LE GOUVERNEMENT À LÉGIFÉRER PAR ORDONNANCE POUR TRANSPOSER CERTAINS ACTES EUROPÉENS

Le projet de loi contient trois catégories de dispositions pour adapter le droit français au droit de l'Union :

- celles qui adaptent le droit national à des règles de droit de l'Union européenne qui sont fixées par des règlements et qui sont d'application directe, notamment des dispositions des articles 1er et 2 ;

- celles qui complètent ou corrigent des textes de transposition adoptées antérieurement, notamment des dispositions des articles 4 à 8 et 10 à 12 ;

- celles des articles 1er et 2 qui habilitent le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour transposer, dans un délai compatible avec les dates limites fixées par ces textes, trois directives relatives respectivement à l'établissement d'un point d'accès unique européen (ESAP), au crédit à la consommation et aux contrats de services financiers conclus à distance.

B. LA COMMISSION A ADOPTÉ 30 AMENDEMENTS AYANT PRINCIPALEMENT POUR OBJET DE COMPLÉTER LES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI ET DE LES ADAPTER À L'ÉVOLUTION DU CALENDRIER D'EXAMEN DU TEXTE

La commission a adopté 30 amendements du rapporteur ayant pour objet de compléter et de simplifier les dispositions du texte initial, dont 21 amendements de précision des dispositions du projet de loi.

En premier lieu, la commission a adopté deux amendements du rapporteur pour compléter l'article 1er par des dispositions transposant les règles européennes en matière de gestionnaires de fonds d'investissement alternatifs.

En deuxième lieu, la commission a adopté quatre amendements du rapporteur pour simplifier le texte transmis par l'Assemblée nationale en matière de règle de conflit de lois applicable aux titres numériques (article 1er) et en matière de mise en oeuvre de la directive CSRD (articles 7 et 12 bis).

En troisième lieu, la commission a adopté deux amendements du rapporteur de restriction des habilitations à légiférer par ordonnance octroyée au Gouvernement dont une (article 2) supprimant l'habilitation et deux (article 1er et article 2) réduisant le délai d'habilitation par cohérence avec le calendrier d'examen du projet de loi.

En quatrième lieu, la commission a rendu un avis favorable sur un amendement de M. Michallet et plusieurs de ses collègues, ayant pour objet de reporter l'entrée en vigueur des obligations de la directive CSRD pour certaines petites et moyennes entreprises (article 7A).

La commission des finances a proposé à la commission saisie au fond d'adopter les articles ainsi modifiés, en ce compris les deux articles additionnels créés par amendement.


* 1 Loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans les domaines de l'économie, de la santé, du travail, des transports et de l'agriculture.

* 2 Markets in Crypto-Assets.

* 3 Corporate Sustainability Reporting Directive.

* 4 CJUE, Gr. ch., C-37/20, 22 novembre 2022, WM c/ Luxembourg Business Registers.

* 5 Single Euro Payments Area.

* 6 European Single Access Point.

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