B. DES FORÊTS GÉRÉES POUR DES FORÊTS DURABLES

1. Des forêts gérées...

La commission des affaires économiques s'efforce de défendre la réalité d'une forêt gérée par l'homme. En effet, le rôle de puits de carbone de la forêt s'exerce aussi via les produits bois, et pas uniquement via les arbres sur pied :

• d'abord, les arbres en croissance captent le carbone par la photosynthèse ;

• puis, le carbone est séquestré par les arbres sur pied et par les sols forestiers, plus profondément grâce aux racines que par les sols agricoles ;

• ensuite, le carbone est séquestré par les produits issus du bois récolté , notamment de façon durable par le bois d'oeuvre ;

• enfin, par un effet de substitution à des matériaux plus émissifs, que ce soit dans la construction ou dans l'énergie.

Il faut certes préserver les espaces boisés d'une exploitation forestière intensive et de ses dommages potentiels sur la biodiversité et le stockage du carbone par les sols ; mais dans le même temps, il faut pouvoir prélever du bois pour séquestrer du carbone dans le bois d'oeuvre et ainsi répondre à l'objectif de la « RE2020 » d'une augmentation des matériaux biosourcés dans la construction neuve. Il faut aussi développer une filière bois compétitive pour éviter de perdre tout le bénéfice du stockage de carbone par l'exportation des grumes pour leur première transformation en Chine .

Il ne faut pas oublier, enfin, que dans le cadre du régime forestier, pour la forêt publique, c'est l'exploitation de la forêt qui finance son entretien et sa protection.

2. ... pour des forêts durables

La commission des affaires économiques du Sénat a toutefois abordé l'examen du texte issu de l'Assemblée nationale avec pour fil conducteur la promotion d'une gestion durable et multifonctionnelle de la forêt , conciliant logiques économique, environnementale et sociale. C'est en restant sur cette ligne de crête qu'on préservera les écosystèmes forestiers tout en stockant plus de carbone.

Les forêts sont des écosystèmes complexes, qui reposent sur des équilibres fragiles et remplissent plusieurs fonctions à la fois. En cela , elles s'accommodent mal d'une logique de spécialisation ou de sectorisation, avec d'un côté des forêts en libre évolution et de l'autre des forêts industrialisées .

C'est pourquoi il faut veiller à ce que la stratégie nationale des aires protégées codifiée à l'article 56, qui ambitionne notamment de classer 10 % du territoire sous protection forte d'ici 2030, contre 1,76 % aujourd'hui, ne conduise pas à une forme de « mise sous cloche » de ces espaces.

Elle pourrait en effet freiner le développement d'activités bien souvent conciliables avec leur protection - les forêts jouent un rôle d'équilibre territorial, avec à la clé de nombreux emplois ruraux. Surtout, les effets d'une mise sous protection forte, et notamment de la « pleine naturalité » ou de la « libre évolution », sur la résilience des écosystèmes sont incertains, à l'heure où le dérèglement climatique fait évoluer les risques à une vitesse inédite (incendie en l'absence de débroussaillage, dégâts de gibier sur les jeunes arbres) . La commission des affaires économiques souhaite s'assurer que réduire l'empreinte de l'homme sur les espaces naturels ne conduira pas à livrer la nature à elle-même.

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