B. LES CRÉDITS TRADITIONNELLEMENT ALLOUÉS AU COMMERCE ET À L'ARTISANAT SONT DÉSORMAIS NULS
1. Malgré l'attachement des acteurs locaux à son maintien, le FISAC est désormais éteint
Le FISAC représentait un outil de soutien et de protection des services commerciaux et artisanaux de proximité auquel l'ensemble des acteurs interrogés par le rapporteur a indiqué être attaché. Non exempt de défauts, il a néanmoins fait la preuve de son efficacité, permettant à des collectivités et entreprises de bénéficier de subventions pour l'animation, la promotion commerciale et la signalétique commerciale, la rénovation des halles et marchés, des équipements et locaux professionnels ou encore la restructuration de centres commerciaux de proximité.
Fonctionnant selon une logique d'appel à projets à partir de critères de sélection transparents, il permettait en outre aux élus locaux de s'inscrire dans une politique de développement économique de long terme, centrée depuis 2015 sur les zones rurales et les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Le Gouvernement justifie sa décision de mettre le Fonds en gestion extinctive à partir de 2019 en arguant de la compétence économique des régions 1 ( * ) , de la création de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et de la mise en place du programme « Action coeur de ville » et « Petites villes de demain ».
Le rapporteur conteste cette analyse. Premièrement, aucun autre dispositif au bénéfice des petits commerces de proximité, notamment en zone rurale, n'est aujourd'hui prêt à prendre la relève du FISAC. En effet, tant l'ANCT 2 ( * ) (créée au 1 er janvier 2020) que le programme « Petites villes de demain » ( cf. infra ), dont le rapporteur se félicite du lancement, doivent encore monter en puissance. Deuxièmement, le programme Action coeur de ville concerne 222 villes moyennes et n'est donc pas destiné à pallier la vacance commerciale dans les zones rurales 3 ( * ) . Troisièmement, les régions n'ont pas encore achevé la montée en puissance de leur compétence économique qui, en tout état de cause, est jugée trop éloignée du terrain, selon les acteurs de proximité.
Face aux multiples crises subies par les commerçants et artisans, notamment de proximité, le rapporteur rappelle l'importance de maintenir cet outil bien établi, connu des élus et acteurs locaux, ciblé et efficace.
Sur proposition du rapporteur pour avis, la commission a adopté à l'unanimité un amendement destiné à rétablir le FISAC en le dotant de 30 millions d'euros en AE et CP.
2. Le transfert de l'EPARECA vers la nouvelle ANCT
La création de l'ANCT 4 ( * ) au 1 er janvier 2020 a résulté de la fusion des missions jusqu'ici dévolues à Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA), à l'Agence du numérique ainsi qu'au Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET). L'objectif de ce regroupement est le décloisonnement des politiques publiques de soutien aux territoires. Le rapporteur s'associe en effet au constat que la redynamisation des centres-villes et centres-bourgs, notamment ruraux, ne peut être conduite en « silos », tant les leviers d'action et les enjeux sont nombreux et intriqués : logement, services publics, accessibilité, vitalité commerciale, développement durable, etc.
Au titre des actions d'aménagements commerciaux, l'ANCT est désormais chargée d'intervenir sur ses fonds propres auprès des collectivités :
• en ingénierie d'appui, pour les aider à définir une stratégie en matière de revitalisation commerciale ;
• en maîtrise d'ouvrage ou comme investisseur, à défaut d'initiative privée ou locale pour mener à bien leur projet immobilier de redynamisation, notamment commerciale ou artisanale.
Suite à la fusion, 20 % du budget total de l'agence est alloué aux opérations de revitalisation commerciale, d'ingénierie, d'investissement et d'exploitation, soit environ 15 millions d'euros. Le contrat d'objectif et de moyens de l'EPARECA prévoyant un budget de 80 millions d'euros sur cinq ans, le budget alloué à ses missions dans la nouvelle agence est relativement stable. Le rapporteur note toutefois que cette stabilité du budget dédié à la revitalisation commerciale s'accompagne d'une extension du périmètre des actions autrefois remplies par l'EPARECA. En effet, ces dernières pourront désormais être mises en oeuvre sur tout territoire fragilisé, et non plus uniquement dans les quartiers prioritaires de la ville ou dans les zones sous opération de revitalisation territoriale (ORT). Une augmentation du budget qui leur est dédié au sein de l'ANCT sera donc vraisemblablement nécessaire dans les années à venir.
3. Des crédits de soutien à l'Institut national des métiers d'art (INMA) qui ne tiennent pas compte de l'impact de la crise sur ses ressources propres
Le PLF 2021 prévoit une dotation de 900 000 euros à destination de l'Institut national des métiers d'art (INMA), qui s'ajoute à une dotation de 600 000 euros versée par la direction générale de la création artistique du ministère de la Culture. La subvention totale allouée à l'INMA, association d'utilité publique chargée notamment de promouvoir les métiers d'art et du patrimoine vivant et de gérer un label national (« Entreprise du patrimoine vivant ») et un titre national (« Maître d'art »), devrait donc passer de 1,9 million d'euros en 2020 à 1,5 million d'euros en 2021, soit une baisse de 21 %. En 2022, la dotation ne devrait atteindre que 300 000 euros.
Le rapporteur s'étonne du choix fait par le Gouvernement de diminuer son soutien à l'INMA, alors que ce dernier exerce une activité d'intérêt général et est un acteur de la mise en oeuvre de la politique publique en faveur des métiers d'art.
Interrogée à ce sujet, la DGE a indiqué viser un quasi-autofinancement de la structure à partir de 2022. Ce calendrier est contestable à double titre :
• d'une part, la crise actuelle va mécaniquement impacter les ressources propres 5 ( * ) de l'INMA. Elles ne devraient ainsi atteindre en 2020 que 150 000 euros, contre une budgétisation initiale à hauteur de 300 000 euros. Pour 2021, leur montant est particulièrement incertain, car dépendant des mesures prises pour lutter contre l'épidémie, mais il ne devrait pas augmenter. L'annulation des salons nationaux et internationaux ralentit en outre le développement de la notoriété de l'institut. Par ailleurs, la crise va également entraîner une baisse du mécénat, qui représente 35 % des ressources totales de l'INMA, ainsi qu'en témoigne le retrait déjà annoncé pour 2021 de certains mécènes ;
• d'autre part, la restructuration de l'INMA, qui s'est transformé en Agence française des métiers d'art et du patrimoine vivant en 2020, a pris du retard du fait de la crise et ne peut être considérée comme entièrement achevée. En particulier, la question du traitement fiscal des ressources propres d'une association reconnue d'utilité publique est en cours d'expertise ; il serait particulièrement dommageable que le projet gouvernemental d'un autofinancement entraîne l'assujettissement des ressources propres à la TVA et, potentiellement, la perte du statut associatif.
Outre son caractère contestable, l'objectif d'un autofinancement de l'INMA en 2022 semble donc irréaliste à l'heure actuelle.
Sur proposition du rapporteur pour avis, la commission a donc adopté à l'unanimité un amendement abondant le programme 134 de 300 000 euros de crédits en AE et CP supplémentaires, afin de rétablir, au profit de l'INMA, une dotation budgétaire de 1,2 million d'euros en 2021.
* 1 Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.
* 2 Loi n° 2019-753 du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires.
* 3 64 % des subventions accordées par le Fisac bénéficiaient à des opérations en zone rurale.
* 4 60,9 millions d'euros en AE et CP sont prévus pour le financement de l'ANCT dans le PLF 2021.
* 5 Parmi ces ressources propres figure par exemple la sous-location aux professionnels des métiers d'art de stands loués par l'INMA dans les salons nationaux et internationaux qui se tiennent en France. Les ressources propres incluent également les recettes engrangées lors de la tenue de boutiques éphémères dédiées à la promotion de ces métiers.