II. LE SOUTIEN AU DÉVELOPPEMENT DES ÉNERGIES RENOUVELABLES

Le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte créé ou réforme plusieurs outils de soutien aux énergies renouvelables : instauration d'un complément de rémunération au prix de marché, investissement participatif dans les sociétés porteuses de projets, regroupement des concessions hydroélectriques par vallées ou encore possibilité de créer des sociétés d'économie mixte hydroélectriques .

A. LE COMPLÉMENT DE RÉMUNÉRATION AU PRIX DU MARCHÉ DE L'ÉLECTRICITÉ

Depuis la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, la production d'énergies renouvelables est soutenue par le régime dit de « l'obligation d'achat » qui garantit à tout producteur d'électricité le rachat par EDF 25 ( * ) de sa production à un niveau supérieur aux prix du marché 26 ( * ) .

En compensant le coût des investissements de départ 27 ( * ) et grâce, notamment, à la simplicité du dispositif pour les particuliers, ces tarifs d'achat garantis, fixés réglementairement, ont permis de porter la part de l'électricité d'origine renouvelable dans le mix énergétique à 15 %, en ligne avec l'objectif fixé à 23 % en 2020. Malgré ce succès, ce mécanisme présente cependant deux inconvénients :

- La décorrélation avec l'état réel du marché : la fixation de tarifs administrés a parfois conduit à la création de « bulles » artificielles, principalement dans le domaine photovoltaïque ; en outre, le soutien public devient inutile une fois l'investissement initial financé lorsque la compétitivité-coût d'une filière lui permettrait de concurrencer les énergies classiques ;

- L'apparition de prix négatifs : quelle que soit l'état de la demande réelle, fortement cyclique selon l'heure et la saison, les producteurs, étant assurés de vendre la totalité de leur électricité, sont incités à injecter l'énergie produite même lorsque le prix devient négatif, ce qui entraîne des distorsions du marché électrique et conduit à une destruction de valeur 28 ( * ) .

Afin d'éviter une distorsion de concurrence sur le marché européen liée à ce type de mesures de soutien, assimilées à des aides d'État 29 ( * ) , l'Union européenne a adopté, en avril 2014, de nouvelles lignes directrices qui, tout en préservant la possibilité de recourir à des tarifs d'achat garantis pour les petites installations 30 ( * ) , imposent, à compter du 1 er janvier 2016, une vente directe sur le marché assortie d'une prime.

Tel est l'objet du mécanisme de « complément de rémunération » prévu par l'article 23 du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte qui vise à intégrer progressivement la logique du marché sans nuire au développement des énergies renouvelables. Il s'agit d'un dispositif alternatif au régime de l'obligation d'achat - la liste des installations éligibles à l'un ou l'autre des mécanismes, incompatibles entre eux, devant être fixée par voie réglementaire - et prévoit le versement d'une aide financière en complément du prix reçu sur le marché . La nature - « prime ex post », ou « contrat pour différence », ou prime fixée « ex ante » - et les modalités de fixation de la prime, variable suivant les filières et les installations et régulièrement révisée, sera fixée par un décret en Conseil d'État pris après avis de la Commission de régulation de l'énergie (CRE). Elle devra tenir compte, en particulier, des investissements consentis et assurer une rentabilité qui n'excède pas  une rémunération raisonnable des capitaux.


* 25 Ou, le cas échéant, par une entreprise locale de distribution d'électricité.

* 26 Le régime de l'obligation d'achat a été codifié à l'article L. 314-1 du code de l'énergie. La charge correspondante est intégralement compensée dans le cadre du paiement de la contribution au service public de l'électricité (CSPE).

* 27 Les contrats d'achat peuvent être conclus une seule fois - sauf dérogation pour la filière hydroélectrique - pour une durée qui varie selon la filière : 12 ans pour la cogénération, 15 ans pour l'éolien, la géothermie ou le biogaz, 20 ans pour le photovoltaïque ou la biomasse, etc.

* 28 Comme précisé dans l'étude d'impact, l'apparition de prix négatifs « peut engendrer d'une part une baisse de rentabilité importante pour les moyens de production non subventionnés (ceux-ci devant par ailleurs parfois continuer à produire compte tenu des coûts d'arrêt trop élevés par rapport à la rémunération apportée par ailleurs par le marché) et d'autre part une augmentation de la CSPE (la charge à compenser entre le prix du marché et le tarif d'achat fixe étant plus élevée) ».

* 29 Voir par exemple Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), 19 décembre 2013, aff. C-262/12 Assoc. Vent de colère : la cour déclare que le dispositif français d'obligation d'achat de l'électricité éolienne relève du régime juridique de l'aide d'État au sens de l'article 107.1 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

* 30 Inférieure à 500 kilowatts, ou 3 mégawatts ou 3 unités de production pour la filière éolienne.

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