D. CONCLUSION : LA NÉCESSITÉ D'APPROFONDIR LA CONNAISSANCE DE LA DÉLINQUANCE
Dans son rapport consacré à l'organisation et à la gestion des forces de sécurité publique, la Cour des comptes relève plusieurs dysfonctionnements dans l'utilisation des statistiques par les forces de police et de gendarmerie. Elle constate ainsi que le pilotage des services territoriaux de la DCSP est assuré par le biais d'objectifs de plus en plus nombreux assortis de leviers d'action pour les atteindre, qui réduise beaucoup la marge d'initiative et d'arbitrage des DDSP. Elle note en particulier que la lutte contre le trafic de stupéfiants a été orientée principalement vers l'interpellation des consommateurs « sans amélioration significative des résultats en matière de revente ou de trafics. Elle a joué un rôle de variable d'ajustement pour rehausser le taux moyen d'élucidation [en effet, en la matière, un fait constaté équivaut à un fait élucidé] ».
La Cour des comptes constate par ailleurs que « de manière générale, la DGPN et la DGGN sont rarement en mesure de relier les évolutions statistiques des principales catégories de délits aux actions engagées par les forces de sécurité ». Cela ne doit pas forcément susciter l'étonnement, au regard de la complexité des phénomènes étudiés. Comme le souligne Alain Bauer dans l'ouvrage précité, il est indispensable que les statistiques soient considérées davantage comme un point de départ vers des études plus approfondies sur la criminalité que comme des indicateurs immédiats de l'efficacité des forces de police et de gendarmerie. L'évolution des faits constatés de violences aux personnes fournit un bon exemple de cette nécessité de recherches plus approfondies : leur nombre augmente depuis 10 ans mais il reste difficile de savoir si un meilleur taux de déclaration n'explique pas une partie de cette hausse ; en outre l'augmentation est-elle davantage celle des violences entre gens sous l'emprise de l'alcool, des violences au sein des couples ? Or, la connaissance de ces éléments est indispensable pour orienter l'activité des forces de l'ordre de manière à obtenir des résultats positifs. Dans le même ordre d'idées, il semble absurde de valoriser de la même manière l'élucidation d'un vol simple et celle d'un trafic de stupéfiants qui aura peut-être demandé plusieurs mois ou années d'enquête.