2. La position de votre commission pour avis
Votre rapporteur pour avis souhaite que le Gouvernement présente lors du prochain projet de loi de finances initiale un document de politique transversale (DPT) sur la Mer. La France possède en effet le deuxième domaine maritime au monde, grâce à ses 5 000 kilomètres de côtes et ses 10 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive (ZEE), ce qui confère au monde maritime une importance particulière. Il s'agit là d'une demande forte des acteurs professionnels concernés, que partage notre collègue Mme Odette Herviaux, co-rapporteur pour avis sur la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ». Elle s'inscrit en outre dans le prolongement des travaux du Grenelle de la Mer, et reprend l'une des préconisations d'un audit du Comité Interministériel d'Audit des Programmes (CIAP) en 2007. Les crédits liés au monde maritime sont aujourd'hui éclatés dans de multiples programmes : programme « sécurité et affaires maritimes » bien sûr, mais également le programme 113 « urbanisme, paysages, eau et biodiversité » , le programme 203 « infrastructures et services de transport », ou encore le programme 154 « développement durable de l'agriculture, de la pêche et des territoires » pour ne citer que les plus significatifs. A défaut, compte tenu de la réforme en cours de la politique européenne de la pêche, il serait utile de disposer au moins d'un DPT sur la politique de la pêche.
Votre rapporteur pour avis s'interroge sur l'efficacité du contrôle des pêches, exposée par l'objectif 3 du programme « Sécurité en affaires maritimes ». En effet, les 300 agents en charge de contrôler et de surveiller les affaires maritimes effectueront en 2011 et 2012 moins de 15 000 contrôles annuels des pêches, contre 24 000 environ en 2010. Le document budgétaire ne fournit guère d'explications sur cette diminution des contrôles. On ignore également la répartition géographique des contrôles, ainsi que la nationalité des navires contrôlés. Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement 18 ( * ) , a indiqué lors de son audition devant votre commission que les contrôles effectués étaient en nombre nettement supérieur à ceux qui étaient prévus et qu'il ne serait donc pas inutile de repenser cet indicateur. La Cour des comptes est d'ailleurs en train d'effectuer une évaluation du contrôle des pêches et votre rapporteur sera vigilant sur ses conclusions. Dans son rapport d'audit de mars 2010, le CIAP préconisait de rattacher l'objectif 3 au programme 154 cité plus haut, estimant que cet objectif constituait davantage le reflet d'une politique de développement durable de la pêche plutôt qu'une politique de sécurité maritime. Cette proposition n'a pas été suivie d'effet, mais votre rapporteur considère que la création d'un document de politique transversale sur la mer répondrait justement aux préoccupations du CIAP.
Par ailleurs, votre rapporteur pour avis souhaite que la réforme de l'enseignement supérieur maritime soit menée à son terme. L'École nationale supérieure maritime (ENSM) a été créée suite à l'adoption de l'article 53 de la loi dite ORTF du 8 décembre 2009 19 ( * ) , et à la publication du décret du 28 septembre 2010. L'École regroupe actuellement les quatre sites du Havre, Marseille, Nantes et Saint-Malo : il convient de poursuivre la rationalisation du fonctionnement de ces quatre sites. Votre rapporteur estime qu'une attention particulière doit être accordée au transfert de l'établissement du Havre à Sainte-Adresse. L'État s'est en effet engagé à mobiliser 7 millions d'euros pour ce transfert, dont 300 000 euros pour l'étude de préfiguration. Plus globalement, la réforme du cursus des élèves de la filière académique (filière A) va permettre d'intégrer l'ENSM dans le réseau des grandes écoles avec la délivrance du titre d'ingénieur aux élèves et l'intégration dans le dispositif de droit commun de licence-master-doctorat (LMD). Ce changement en profondeur va permettre une plus grande ouverture et reconnaissance de l'École ainsi qu'une stabilité accrue dans le recrutement.
Enfin , votre rapporteur pour avis s'inquiète des tensions sur le budget de l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM) . Cet établissement gère le régime spécial de sécurité sociale des marins, qui couvre d'une part la branche maladie, maternité, invalidité, décès, accidents du travail, et d'autre part la branche vieillesse. Les dépenses prévues en 2012 sont relativement stables, et estimées à 1,6 milliard d'euros, soit 45 millions de moins qu'en 2010. Mais les recettes propres de l'ENIM ne s'élèvent qu'à 437 millions d'euros en 2012, du fait de la forte baisse de la compensation inter-régimes, qui passe de 380 millions en 2010 à 163 millions en 2012. Par conséquent, le besoin global de financement pour équilibrer le budget de l'Établissement s'établit à 1,165 milliard d'euros, dont 856,4 millions au titre de la subvention versée par l'État et 284,7 millions au titre de la contribution de la CNAM à l'équilibre de la branche maladie du régime des marins 20 ( * ) . L'État voit donc sa subvention s'accroître car elle était seulement de 778 millions en 2010. Compte tenu des évolutions démographiques de ce secteur, il est à craindre que les besoins de financement pour équilibrer le budget de l'ENIM soient croissants dans les années à venir.
RECETTES ET DÉPENSES DE L'ÉTABLISSEMENT NATIONAL DES INVALIDES DE LA MARINE (ENIM) ENTRE 2010 ET 2012
Récapitulatif des dépenses |
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DEPENSES |
EXECUTION 2010 |
BUDGET PRIMITIF 2011 |
Projet de budget 2012 |
PENSIONS VIEILLESSE |
1 073 351 873 |
1 081 400 000 |
1 088 100 000 |
PENSIONS INVALIDITE/AMIANTE |
58 703 932 |
59 057 000 |
59 648 000 |
PRESTATIONS MALADIE-MATERNITE -ACCIDENTS DU TRAVAIL-MALADIES PROFESSIONNELLES+DIVERS |
334 438 669 |
336 445 000 |
339 809 000 |
ACTION SANITAIRE ET SOCIALE |
9 318 580 |
10 077 000 |
9 675 000 |
CONTRIBUTIONS PARTICIPATIONS ET REGULARISATIONS DIVERSES |
87 871 436 |
16 300 000 |
17 119 000 |
DEPENSES DE FONCTIONNEMENT COURANT ET DE GESTION
|
35 605 494 |
38 271 115 |
39 122 549 |
CHARGES EXCEPTIONNELLES ET PROVISIONS |
47 638 371 |
48 683 000 |
49 054 000 |
TOTAL DEPENSES |
1 646 928 355 |
1 590 233 115 |
1 602 527 549 |
Récapitulatif des recettes |
|||
RECETTES |
EXECUTION 2010 |
BUDGET PRIMITIF 2011 |
Projet de budget 2012 |
COTISATIONS ET CONTRIBUTIONS |
151 467 294 |
152 940 000 |
154 115 000 |
Prise en charge de cotisations au titre du RIF |
40 958 297 |
41 356 000 |
41 674 000 |
Prise en charge de cotisations autres titres |
27 710 785 |
27 980 000 |
28 195 000 |
COMPENSATIONS INTER REGIMES - TRANSFERTS CSG - FSV-FSI |
380 343 184 |
209 217 016 |
163 610 000 |
AUTRES PRODUITS
|
57 137 506 |
49 977 115 |
50 516 000 |
Subvention reçue de l'Etat |
778 418 247 |
797 278 279 |
856 456 092 |
Subvention versée par le régime général |
211 732 000 |
279 953 592 |
284 772 102 |
TOTAL RECETTES |
1 647 767 313 |
1 558 702 002 |
1 579 338 194 |
Source : questionnaire budgétaire
* 18 Audition du 9 novembre 2011.
* 19 Cf. la loi n° 2009-1503 du 8 décembre 2009 relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports.
* 20 Cette contribution se distingue donc de la compensation inter-régime et elle découle de l'article 42 de la loi de finances pour 2006 relatif à l'adossement financier du régime de l'assurance maladie des marins au régime général d'assurance maladie.