B. LA NÉCESSITÉ D'UNE LOI DE SANTÉ MENTALE

Comme l'a montré le rapport de l'Opeps 17 ( * ) , la prévalence des troubles psychiatriques en France impose une action résolue des pouvoirs publics. Si 1,2 million de personnes bénéficient d'un suivi psychiatrique, ce chiffre n'est qu'un faible indicateur des besoins en santé mentale. On estime que 635 000 personnes souffrent de schizophrénie, 750 000 de troubles bipolaires, 5 millions de dépression. 6 % de la population aurait connu un épisode de troubles anxieux. Des pathologies comme la démence qui touche 860 000 personnes, risquent aussi de s'accroître en raison du vieillissement de la population : elle pourrait ainsi toucher 2,1 millions de personnes en 2040. Face à cette situation, la reconnaissance de la psychiatrie comme une discipline médicale à part entière, dotée de capacités de recherche et de moyens pour assurer la prise en charge et le suivi des malades, demeure trop lente. La priorité doit être de faire émerger un consensus afin d'aboutir à un projet de réforme.

1. Une reconnaissance trop lente de la psychiatrie comme discipline médicale à part entière

Les spécificités de la psychiatrie liées à l'absence de traitement curatif ont pu ralentir son évolution par rapport aux autres disciplines médicales. Les découvertes, tant en matière de médicaments que de connaissance des processus cérébraux et génétiques de la maladie, placent néanmoins aujourd'hui la psychiatrie parmi les disciplines de pointe. Elle n'est pas suffisamment reconnue comme telle. Comme l'indique l'étude comparative menée par la fondation FondaMental 18 ( * ) , la prévalence des troubles psychiatriques en France est vingt fois supérieure à celle des cancers et la recherche en ce domaine est vingt fois moins financée.

La difficulté à mettre en place une tarification à l'activité en ce domaine maintient également la perception selon laquelle la psychiatrie serait une discipline coupée du reste de la médecine. Il faut donc saluer l'engagement pris par le ministère de la santé de faire aboutir cette question d'ici à 2014.

Assurer des modalités de financement de la recherche et des soins psychiatriques qui soient les mêmes que pour les autres branches de la médecine est une nécessité, tant pour parvenir à répondre aux besoins que pour changer la perception négative, encore trop répandue, qu'elle est une discipline à part.

2. Faire émerger un consensus

Contrairement à une idée généralement répandue, la HAS a déjà, dans le cadre du plan santé mentale 2005-2008, élaboré ou programmé des recommandations de bonnes pratiques professionnelles sur de nombreuses pathologies en santé mentale : troubles dépressifs, schizophrénie, troubles des conduites alimentaires, troubles obsessionnels compulsifs, psychopathie, expertise psychiatrique pénale, auteurs d'infractions sexuelles, prescriptions de benzodiazépines chez les personnes âgées, notamment. Un groupe de travail réunissant des médecins psychiatres travaille au sein de la HAS au prolongement de ces travaux, ainsi qu'à la certification des unités en psychiatrie. Un consensus entre praticiens est donc possible. Il faut parvenir non seulement à l'étendre, mais aussi à intégrer l'ensemble des acteurs de la santé mentale dans une réflexion sur l'évolution de l'organisation des soins. Les états généraux de la santé mentale, préconisés par l'Opeps, seraient un moyen de dégager des solutions communes.

Une action sur la perception sociale de la maladie doit également être conduite par les pouvoirs publics. Après une campagne intéressante sur le trouble dépressif, l'Inpes a interrompu l'élaboration de campagnes sur la santé mentale pour des raisons scientifiquement fondées. Il est effectivement à craindre que certaines campagnes ne renforcent la stigmatisation au lieu de l'atténuer et que des sujets comme le suicide n'aient un effet d'entraînement. On peut toutefois noter que des actions à destination du grand public, comme la série de reportages diffusés au Royaume-Uni 19 ( * ) sur le trouble bipolaire, ont eu des effets bénéfique en termes de prise de conscience et d'augmentation des connaissances dans l'opinion publique. Des campagnes sont donc utiles en ce domaine et la perspective ouverte par l'Inpes de campagnes à destination des professionnels pour favoriser la détection précoce de la maladie constitue un premier pas nécessaire.

Mobiliser l'ensemble des pouvoirs publics et les acteurs de la santé mentale eux-mêmes impliquera nécessairement une loi de santé mentale. Votre commission souhaite qu'elle puisse être discutée rapidement par le Parlement.

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Réunie le mercredi 25 novembre 2009, la commission des affaires sociales a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Santé » pour 2010.

* 17 Rapport précité, pp. 44-45.

* 18 Présentée lors du colloque organisé sur ce thème au Sénat le 4 juin 2009.

* 19 Stephen Fry : the life of a manic-depressive, BBC, septembre 2006.

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