6. La suppression du dispositif d'exonérations ciblées en faveur des organismes d'intérêt général ayant leur siège en zone de revitalisation rurale (article 12)
Dans sa rédaction initiale, l'article 12 du présent projet de loi de financement avait pour objet d'abroger les articles 15 et 16 de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, et, à travers eux, de supprimer le dispositif d'exonération de charges sociales spécifique institué au profit des organismes d'intérêt général 35 ( * ) ayant leur siège en zone de revitalisation rurale (ZRR).
On rappellera que ce dispositif spécifique :
- bénéficie à l'ensemble des salariés, sans limitation, et non pas aux nouvelles embauches, contrairement au dispositif de droit commun applicable en ZRR ;
- consiste en une franchise de cotisations quel que soit le niveau de salaire, et non pas limitée à 1,5 SMIC, et s'applique donc sans dégressivité en fonction de la rémunération ;
- n'est assorti d'aucune condition de durée, alors que pour les autres employeurs en ZRR, elle est limitée à un an ;
- est cumulable avec d'autres aides, sauf interdictions prévues par les textes qui les instituent.
L'exposé des motifs du présent projet de loi justifiait cette suppression en indiquant que « ce dispositif ne répond que faiblement à son objet , qui est d'inciter à la création d'emplois en milieu rural. Il s'applique par ailleurs à l'ensemble des salariés des organismes concernés et non aux seules nouvelles embauches comme le régime de droit commun . Son coût (environ 185 millions d'euros par an) est disproportionné par rapport aux avantages attendus ».
M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, a rappelé devant l'Assemblée nationale que « le coût de la mesure - et on ne peut pas y être totalement insensible, nous en avons d'ailleurs discuté pendant des heures - s'élève à 185 millions d'euros, pour un impact très faible sur l'emploi. Elle est, de plus, extrêmement diluée et les effets d'aubaine sont nombreux ». Selon des données fournies lors des débats à l'Assemblée nationale par notre collègue député Yves Bur, rapporteur du présent projet de loi de financement pour les recettes et l'équilibre général, seuls 2.000 nouveaux emplois ont été créés grâce à ce dispositif, sur les 28.000 emplois concernés.
Les articles en cause Article 15 I. - Les gains et rémunérations, au sens de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, versés au cours d'un mois civil aux salariés employés dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A du code général des impôts par des organismes visés au I de l'article 200 du même code qui ont leur siège social dans ces mêmes zones susvisées sont exonérés des cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales, des allocations familiales, des accidents du travail ainsi que du versement de transport et des contributions et cotisations au Fonds national d'aide au logement, dans la limite du produit du nombre d'heures rémunérées par le montant du salaire minimum de croissance majoré de 50 %. II. - Les pertes de recettes pour les collectivités territoriales sont compensées par un relèvement de la dotation globale de fonctionnement. III. - La perte de recettes pour l'Etat est compensée, à due concurrence, par une augmentation des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. IV. - Les pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du même code. Article 16 Les gains et rémunérations, au sens de l'article L. 741-10 du code rural, versés au cours d'un mois civil aux salariés employés dans les zones de revitalisation rurale mentionnées à l'article 1465 A du code général des impôts par des organismes visés au 1 de l'article 200 du même code qui ont leur siège social dans les zones susmentionnées sont exonérés des cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales, des allocations familiales, des accidents du travail ainsi que du versement de transport et des contributions et cotisations au Fonds national d'aide au logement, dans la limite du produit du nombre d'heures rémunérées par le montant du salaire minimum de croissance majoré de 50 %. |
Toutefois, afin de prendre en compte les difficultés qu'aurait représenté une suppression pure et simple de ces dispositions, l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de notre collègue député Yves Bur, rapporteur du présent projet de loi de financement pour les recettes et l'équilibre général, et avec l'avis favorable du gouvernement, un dispositif transitoire.
D'une part, le I de l'article 12 a broge, à compter du 1 er novembre 2007, les articles 15 et 16 de la loi précitée relative au développement des territoires ruraux sont abrogés, mais précise que les dispositions de ces articles continuent à s'appliquer aux contrats de travail conclus avant cette date et jusqu'au terme de ceux-ci.
D'autre part, le II de l'article 12 fixe le régime applicable à compter du 1 er novembre 2007, en prévoyant que les nouvelles embauches auxquelles procéderont ces organismes d'intérêt général seront éligibles au dispositif d'exonération en ZRR qui était jusqu'alors réservé aux entreprises. Ce dispositif, régi par les articles L. 322-13 du code du travail et L. 131-4-2 du code de la sécurité sociale, est nettement plus restrictif , puisqu'il s'applique, pour une durée limitée à 12 mois , aux seules nouvelles embauches n'ayant pas pour effet de porter l'effectif total de l'organisme à plus de 50 salariés , et dès lors que l'employeur n'a procédé à aucun licenciement au cours des 12 mois précédant l'embauche.
Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale assouplit toutefois ce dernier point : en cohérence avec d'autres dispositifs d'exonération et afin de ne pas pénaliser injustement les employeurs de bonne foi, il précise que la condition de non-licenciement à laquelle est subordonné le bénéfice de l'exonération ne porte que sur les seuls cas de licenciement pour motif économique.
En outre, le droit commun s'appliquant, le bénéfice de cette exonération ne pourra être cumulé, pour l'emploi d'un même salarié, avec celui d'une aide de l'Etat à l'emploi ou d'une autre exonération totale ou partielle de cotisations patronales de sécurité sociale, ni avec l'application de taux spécifiques, d'assiettes ou de montants forfaitaires de cotisations.
Enfin, le II de cet article prévoit également la remise au Parlement, avant le 30 juin 2009, d'une évaluation du dispositif prévu par les articles 15 et 16 de la loi précitée relative au développement des territoires ruraux, tel qu'il continue de s'appliquer aux contrats en cours.
Votre rapporteur pour avis rappelle que votre commission des finances avait fait part de ses réserves et demandé la suppression de cette disposition 36 ( * ) lors de l'examen du projet de loi en faveur du développement des territoires ruraux. Il considère toutefois que la disposition adoptée par l'Assemblée nationale, fruit d'un compromis, permet de mettre fin, pour l'avenir, à ce dispositif dérogatoire et qu'il en permettra le réexamen sur la base d'éléments objectifs d'évaluation.
Il note, toutefois, que le dispositif adopté par l'Assemblée nationale nécessite une adaptation du montant des compensations versées par l'Etat, déterminé par l'article 17 du présent projet de loi de financement.
* 35 L'article 200 du code général des impôts, auquel ces articles se réfèrent, concerne, en particulier, les fondations ou associations reconnues d'utilité publique, les oeuvres ou d'organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises, des établissements d'enseignement supérieur ou d'enseignement artistique, publics ou privés, à but non lucratif, agréés par le ministre chargé du budget, ainsi que par le ministre chargé de l'enseignement supérieur, ou par le ministre chargé de la culture, d'associations cultuelles et de bienfaisance autorisées à recevoir des dons et legs, des établissements publics des cultes reconnus d'Alsace-Moselle.
* 36 Se reporter sur ce point au commentaire de notre collègue Joël Bourdin sur l'article 1 er terdecies du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, rapport pour avis n° 264 (2003-2004).