C. UN PROJET DE LOI ATTENDU
A ces
lacunes législatives, liées à l'indécision du
Parlement et à la censure du juge constitutionnel, est venu s'ajouter un
autre élément rendant nécessaire la présentation,
devant le Parlement, du présent projet de loi consacré à
l'encadrement juridique des nouvelles technologies en général et
à celui du commerce électronique en particulier.
En effet, l'adoption définitive de la loi du
1
er
août 2000 a coïncidé avec la
publication, le 8 juin 2000, de la directive 2000/31/CE
relative
à certains aspects juridiques des services de la société
de l'information, et notamment du commerce électronique
, dans le
marché intérieur, dont la limite de transposition était
officiellement fixée au 17 janvier 2002.
Il y avait donc urgence à agir, tant pour mettre en place, après
des années de tâtonnements, un cadre favorable au
développement du commerce électronique que pour transposer
efficacement la directive du 8 juin 2000.
• La communication publique en ligne, un sous-ensemble de la
communication audiovisuelle
Rompant avec l'attentisme des précédents textes, le projet de loi
définit explicitement la communication publique en ligne comme
« toute communication audiovisuelle transmise sur demande
individuelle formulée par un procédé de
télécommunication ».
Ce faisant, la communication publique en ligne devient un sous-ensemble de la
communication audiovisuelle, se distinguant de cette dernière par le
simple fait d'être transmise sur demande individuelle.
Un tel rattachement entraîne nécessairement un organe de
régulation commun, à savoir le CSA, désormais
explicitement chargé de « surveiller » les millions
de pages personnelles accessibles par l'intermédiaire d'Internet et de
réguler l'ensemble du secteur de la communication publique en ligne.
Si le rattachement de la communication publique en ligne à la
communication audiovisuelle peut se justifier au regard des nombreux points
communs qui caractérisent ces deux types de communication, les
conséquences qu'il emporte en termes de régulation sont
difficilement acceptables. En effet, le CSA ne semble pas être
l'autorité la mieux adaptée à la surveillance de sites aux
contenus composés de données essentiellement
alphanumériques.
• La mise en place d'une responsabilité limitée des
prestataires techniques
L'article 2 du projet de loi redéfinit les obligations des
prestataires intermédiaires des services de communication en ligne.
Il revient essentiellement sur l'encadrement de la responsabilité des
hébergeurs qui assurent « le stockage direct et
permanent » des contenus diffusés par les services de
communication publique en ligne.
En effet, les dispositions relatives à ce sujet, telles qu'elles avaient
été adoptées par le Parlement lors de la discussion de la
loi du 1
er
août 2000, ont été
partiellement censurées par le Conseil constitutionnel. Les dispositions
ayant échappé à l'annulation qui ont été
promulguées ne rendent que très partiellement compte de
l'équilibre souhaité par le législateur. Par ailleurs, en
leur état actuel, elles apparaissent en retrait par rapport à la
directive 2000/31/CE.
Les modifications proposées visent à limiter la mise en cause de
la responsabilité civile des hébergeurs au seul cas dans lequel,
ayant la connaissance effective d'une activité ou d'une information
illicite, ou la connaissance de faits ou de circonstances selon lesquelles
l'information ou l'activité illicite est apparente, ils s'abstiennent
d'agir promptement pour retirer les données en cause ou rendre
l'accès à celles-ci impossible. En matière de
responsabilité pénale, les hébergeurs ne pourront voir
leur responsabilité engagée que si, en connaissance de cause, ils
n'ont pas agi promptement pour faire cesser la diffusion d'une information ou
d'une activité dont ils ne pouvaient ignorer le caractère
illicite.
• Protéger la propriété intellectuelle sur les réseaux numériques
Dans son
rapport publié en 1998, le Conseil d'Etat avait indiqué
qu'en tout état de cause «
une solution qui paraît
devoir être écartée d'emblée, c'est l'idée de
créer un régime spécifique pour les oeuvres dites
« multimédia », en s'inspirant de ce qui a
été fait pour les oeuvres audiovisuelles, les logiciels et les
bases de données. En effet, cet
« émiettement » progressif du droit d'auteur
altère profondément la lisibilité du code de la
propriété intellectuelle et la clarté de ses principes, du
fait de l'empilement de régimes dérogatoires. Surtout, ces
dispositions propres à des types d'oeuvres très particuliers,
correspondant à l'état de l'art et de la technologie à un
moment donné, sont difficiles à adapter par la jurisprudence
à l'évolution extrêmement rapide des technologies de
l'information
».
Le projet de loi s'inscrit dans cette veine en matière de protection de
la propriété intellectuelle sur Internet.
Alors que l'environnement numérique se prête
particulièrement au risque de piratage, la copie numérique d'une
oeuvre étant strictement identique à l'original, le Gouvernement
a décidé de lutter contre ce véritable fléau, non
pas en créant un régime dérogatoire pour les services de
communication en ligne, mais en adaptant à ces derniers la
législation en vigueur, en l'occurrence l'article L. 332-1 du code
de la propriété intellectuelle.
L'article 3 du projet de loi, conformément aux dispositions de
l'article 8 de la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001
relative à l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et
des droits voisins, dans la société de l'information
,
étend par conséquent les pouvoirs du président du Tribunal
de Grande Instance, statuant par ordonnance sur requête, selon la
procédure de saisie-contrefaçon prévue à l'article
L. 332-1 du CPI, au contenu d'un service de communication publique en
ligne portant atteinte au droit d'auteur ou aux droits voisins.
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- III. COMBLER LES LACUNES DU PROJET DE LOI