CHAPITRE III -
AIDER LE SECTEUR DU TOURISME À
S'ADAPTER AUX
ÉVOLUTIONS DE SON TEMPS
La place
et le rôle du tourisme dans l'économie nationale ne sauraient
être maintenus, voire renforcés, sans que les pouvoirs publics
n'accordent à ce secteur un
soutien sans faille
. Celui-ci est au
demeurant d'autant plus nécessaire que
la concurrence internationale
se durcit
, rendant plus volatile la demande touristique, et que
la
conjoncture se retourne
, ce qui pourrait conduire les consommateurs
étrangers et nationaux à réduire le poste
« vacances » de leurs budgets, lequel est une
variable
d'ajustement
plus malléable que d'autres catégories de
dépenses.
En cette période troublée et incertaine, les attentes de
l'industrie touristique sont naturellement nombreuses et le recensement de
toutes les mesures susceptibles d'être initiées ou
accompagnées par l'Etat prendrait rapidement la forme d'une liste
« à la Prévert ». Qu'il s'agisse de la
poursuite de la réhabilitation de l'immobilier de tourisme
, du
développement de la politique des filières
, du
soutien
à certains secteurs
, chaque ligne aurait au demeurant sa
légitimité et son intérêt.
Dans ce contexte, qui est aussi celui d'un
changement politique
ouvrant de nouvelles perspectives
, il a semblé opportun à
votre rapporteur, d'une part, de signaler tout particulièrement deux
directions qui lui paraissent indispensables pour
conforter la santé
économique du secteur et l'emploi
, en particulier dans
l'
hôtellerie-restauration
, activité transversale dont
les performances conditionnent celles de toutes les autres branches du
tourisme, et, d'autre part, de présenter, à l'orée de
cette législature, les
réformes législatives
que
M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme, envisage de
soumettre au Parlement dans les prochaines années.
I. FAVORISER L'EMPLOI POUR RENFORCER LA QUALITÉ DU SERVICE
Les
deux priorités
à mettre en oeuvre (réduction du
taux de TVA dans la restauration traditionnelle et assouplissement de certaines
règles pour favoriser l'emploi) ont déjà été
exposées par votre rapporteur dans son avis budgétaire de l'an
dernier, tant il est vrai qu'elles
concernent des problèmes
lancinants que la précédente majorité ne semblait pas
particulièrement disposée à prendre en compte
et
qu'elles
conditionnent toutes deux la préservation de l'emploi dans
le secteur
.
Or, au-delà de l'intérêt manifeste que constituent pour
l'ensemble de la société française le maintien d'un
important taux d'activité et la lutte continue contre le chômage,
la question de l'emploi présente dans le secteur du tourisme une
signification toute particulière
. En effet, les
facteurs de
sélectivité et de différenciation qui participent du jeu
de la concurrence
dans cette activité tournent de plus en plus
autour de la problématique de la
qualité du service
.
C'était évidemment déjà vrai au plan national,
depuis toujours, mais ça l'est aujourd'hui devenu au plan
européen avec l'
instauration
de l'euro
: en
supprimant les effets de change, en permettant aux consommateurs de
réaliser facilement des comparaisons tarifaires, et en contraignant de
la sorte les professionnels à pratiquer la vérité des
prix,
la monnaie unique européenne aura pour effet de rapprocher les
prix des prestations à mesure que le marché intérieur va
s'intégrer
.
Dans ces conditions,
le facteur discriminant deviendra la qualité du
service
qui, dans cette activité qu'est le tourisme, est
étroitement conditionnée par
le nombre des personnels et le
niveau de leur formation
. Quelle que soit la gamme de produits ou de
prestations proposée, le consommateur, devenu plus exigeant et ayant
perdu sa « myopie de change », distinguera à l'aune
de ce critère les bons professionnels, à qui il renouvellera
ultérieurement sa confiance, des autres. La
fidélisation d'une
clientèle
par un prestataire, mais aussi plus largement, au niveau
d'une région voire d'un pays, passera dorénavant par la
qualité du service. Ce facteur, devenu
déterminant pour les
politiques du tourisme
, notamment en
matière de promotion
internationale
, doit donc faire l'objet d'une attention soutenue de la part
des pouvoirs publics, comme le réclament au demeurant les professionnels
depuis de nombreuses années.
C'est d'ailleurs ce qu'a bien compris le Gouvernement de Jean-Pierre
Raffarin, qui a immédiatement pris à bras le corps les
difficultés que connaissent depuis quelques années les employeurs
pour tenter de les résoudre, soit immédiatement, soit dès
que cela sera juridiquement possible.
A. RÉDUIRE LE TAUX DE LA TVA DANS LA RESTAURATION
L'
impact
économique
qu'aurait
la
diminution
de 19,6 % à 5,5 %
du taux de la TVA dans l'ensemble de la
restauration, à l'instar du taux dont bénéficie la
restauration rapide,
n'est plus à démontrer
. La
réduction de ce taux pour les
travaux dans les logements
privés
, mise en oeuvre depuis le 1
er
janvier 2000
en application d'une directive européenne de 1999 autorisant les pays
qui le souhaitent à appliquer, à titre expérimental, des
taux réduits dans certains services à forte intensité de
main-d'oeuvre pendant la période 2000-2002, aurait ainsi
été à l'origine de la
création nette de
55 000 emplois
nouveaux en dix-huit mois dans le secteur du
bâtiment
, grâce au transfert de 750 millions d'euros de
l'économie souterraine vers l'économie formelle. C'est d'ailleurs
pourquoi la Commission européenne a, le 25 septembre dernier,
autorisé la
prolongation d'une année de cette
expérimentation
.
S'agissant de la
restauration
, une enquête publiée en
septembre 2001 évaluait à près de
160 000 le
nombre d'emplois
qu'une baisse de la TVA permettrait de
créer en
dix-huit mois dans le secteur
. En outre, les
marges des entreprises
s'amélioreraient
, les
investissements pourraient reprendre
,
les
salaires augmenteraient
et
l'Etat et la sécurité
sociale eux-mêmes y trouveraient leur compte
.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Président Jacques
Chirac avait, lors de la campagne électorale, pris
l'engagement
très ferme
de répondre favorablement à la demande
pressante des restaurateurs. Il s'est toutefois avéré que
la
réglementation européenne en vigueur n'a pas permis d'appliquer
aussi rapidement qu'espéré cette mesure
.
L'état du droit communautaire
Les
règles communautaires en matière de TVA obéissent à
des procédures très strictes. Elles sont adoptées, sur
proposition de la Commission, par le
Conseil des ministres
,
à
l'unanimité
des Etats membres. La première législation
communautaire concernant les taux de TVA remonte ainsi à 1977 (directive
CEE/77/388), ces règles générales ayant été
complétées ou modifiées depuis par d'autres directives
(notamment en 1992 et 2001).
La sixième directive de 1977 autorise les Etats membres à
appliquer
un ou deux taux réduits
qui ne
peuvent être
inférieurs à 5 %
ni s'appliquer à d'autres
biens
que ceux visés par l'
annexe H
à cette
directive, au nombre de
dix-sept
: produits alimentaires,
distribution d'eau, livres, journaux et périodiques, etc. Si la vente de
menus à emporter, dans le cadre de la restauration rapide, est
considérée comme une vente de produits alimentaires et peut donc
bénéficier du taux réduit, il n'en est pas de même
de
la restauration traditionnelle
, qui
ne figure pas dans la liste de
l'annexe H
. En 1992, un
accord dérogatoire
a en outre
autorisé sept pays (Autriche, Espagne, Irlande, Italie, Luxembourg,
Pays-Bas et Portugal) qui, au 1
er
janvier 1991, appliquaient d'ores
et déjà un taux réduit de TVA à la restauration,
à le maintenir de manière transitoire, mais cependant durable.
Le 22 octobre 1999, le Conseil a adopté une nouvelle directive
autorisant les pays qui le souhaitent à appliquer, à
titre
expérimental et temporaire
, des taux réduits à
trois grandes catégories de services à forte intensité
de main-d'oeuvre
, à choisir dans une liste fixée par une
annexe K : petits services de réparation, services de soins
à domicile, coiffure, lavage de vitres et rénovation et
réparation de logements privés.
La restauration traditionnelle
ne figure pas dans l'annexe K
.
Il convient de relever que la proposition initiale de la Commission
était conçue de manière à laisser aux Etats
membres, dans le choix des secteurs visés, un
maximum de
flexibilité
dès lors que ces secteurs répondaient aux
conditions prévues, et que
c'est le Conseil des ministres qui a
préféré une liste courte et précise, plusieurs pays
refusant d'y inclure la restauration traditionnelle
.
Dans les circonstances actuelles, la France ne peut donc pas, sauf à
rompre ses engagements européens, décider de manière
unilatérale de diminuer le taux de TVA dans la restauration à
5,5 %.
En revanche, depuis six mois, le Gouvernement, en particulier le Premier
ministre lui-même, qui a fait de cet engagement un dossier personnel, n'a
pas ménagé ses efforts pour
convaincre la Commission et les
partenaires européens de la France de la nécessité de
procéder à une adaptation du droit communautaire sur ce
point
.
Pendant longtemps, la Commission européenne s'en est tenue à
prévoir qu'une
évaluation globale des effets
économiques
, sur l'emploi et sur la concurrence, du dispositif
temporaire institué en 1999, serait
entreprise au premier semestre
2003
sur la base de rapports présentés par les Etats membres
avant le 1
er
octobre 2002, afin de proposer, si nécessaire,
les mesures adéquates permettant de décider définitivement
du taux de TVA applicable aux services à forte intensité de
main-d'oeuvre.
Pour votre rapporteur pour avis, cette
« concession » était bien le moins puisqu'il
s'agissait d'une expérience qui rendait à l'évidence
nécessaire une évaluation
. La Commission a ensuite
laissé entendre de manière plus ouverte, durant
l'été 2002, qu'à l'issue de cette évaluation,
la
problématique pourrait être ouverte non seulement aux secteurs
visés par l'annexe K, mais aussi à des secteurs nouveaux si les
Etats membres en faisaient la demande
.
Enfin, le 21 octobre dernier, M. Romano Prodi, le Président de
la Commission européenne, s'est montré encore plus
compréhensif lors d'une visite à Paris
en assurant au Premier
ministre que l'exécutif européen ferait une proposition au
début de l'année 2003
, sur la base des dossiers
présentés par les Etats membres. C'est la première fois
que la Commission fait des déclarations aussi précises,
qui
permettent d'espérer que la mesure attendue pourra être mise en
oeuvre à compter du 1
er
janvier 2004
.
Certes, votre commission des affaires économiques ne
méconnaît pas que la
procédure européenne en
matière fiscale est terriblement lourde
et que la satisfaction de la
demande française sera soumise à la nécessité de
recueillir l'assentiment unanime de nos partenaires
sur ce que proposera
la Commission. Reste qu'elle ne peut manquer de se réjouir que
les
efforts diplomatiques déployés sans relâche depuis six mois
par le Gouvernement, dont l'activité et le sens de la persuasion
tranchent heureusement avec ceux du passé, commencent à porter
leurs fruits, pour le plus grand bénéfice du secteur de la
restauration et, plus largement, de la branche du tourisme tout
entière
.
B. DESSERRER LES CONTRAINTES PESANT SUR LES ENTREPRENEURS
En
attendant la mise en oeuvre de cette disposition éminemment favorable
pour l'emploi dans le secteur de l'hôtellerie-restauration, d'autres
mesures peuvent contribuer à
diminuer les charges des entrepreneurs
de l'industrie du tourisme
et à
favoriser l'emploi dans le
secteur
.
Plusieurs
engagements
avaient été pris à cet
égard par le Président de la République et les candidats
de la majorité présidentielle aux élections
législatives, qui
commencent à entrer en application
. S'il
ne revient pas à votre rapporteur pour avis de les recenser tous ni de
s'y attarder, car la plupart relèvent de la
politique et sociale
générale du Gouvernement
, il convient toutefois d'en
citer
les principaux et les plus immédiats
, qui vont redonner confiance et
espoirs aux entrepreneurs et aux salariés de ce pays en
restaurant un
environnement plus propice aux développement de leurs
activités
.
C'est ainsi que,
au plan fiscal
et dans le cadre du présent
projet de loi de finances pour 2003, la branche du tourisme va directement
bénéficier de la
suppression des droits de licence des
débits de boissons
(pour 23 millions d'euros), qui sera
compensée non pas directement aux communes concernées mais par
l'intermédiaire d'un abondement des dotations de solidarité
urbaine et rurale (DSU et DSR). En outre, et comme les autres secteurs
professionnels, le tourisme sera intéressé par la
suppression
définitive de la part salariale dans l'assiette de la taxe
professionnelle
(à hauteur de 1,83 milliard d'euros), ainsi que
par les
allégements de charges sociales sur les bas salaires
(jusqu'à 1,7 SMIC, pour 800 millions d'euros) induits par les deux
projets de loi défendus, l'été dernier et en ce moment
même, par le ministre des affaires sociales, du travail et de la
solidarité.
A cet égard, ces deux textes vont également permettre aux
chefs d'entreprises artisanales et de PME, particulièrement nombreux
dans le secteur du tourisme, de recruter et de
voir levées certaines
contraintes de gestion absurdes et inadaptées qui pesaient sur leur
activité
. La
loi n° 2002-1095 du
29 août 2002 portant création d'un dispositif de soutien
à l'emploi des jeunes en entreprise
permettra sans doute
l'
embauche
de jeunes
, certes peu qualifiés, mais dont on
peut penser qu'ils bénéficieront de l'expérience de leur
employeur pour progressivement acquérir « sur le
tas » la formation qui leur est nécessaire.
Quant à la
future loi relative aux salaires, au temps de travail et
au développement de l'emploi
, actuellement en cours d'examen par le
Parlement, elle mettra notamment
fin au caractère uniforme et
obligatoire du processus de réduction du temps de travail
imposé « aux forceps », notamment dans le secteur de
l'hôtellerie-restauration où il générait
d'importantes difficultés compte tenu des spécificités de
cette activité. Pour y avoir consacré un long
développement dans son avis budgétaire de l'an passé,
votre rapporteur pour avis ne fera que rappeler qu'il était illusoire et
extrêmement pénalisant de vouloir contraindre les PME et artisans
de secteurs où le temps de travail est actuellement supérieur
à 42, voire à 45 heures hebdomadaires, à
parvenir aux
35 heures dans les délais fixés par les « lois
Aubry »
. C'est d'ailleurs ce qu'avait finalement reconnu le
gouvernement précédent en reculant de deux ans la date
initialement prévue. C'est aussi ce dont témoignaient les refus
successifs, à deux reprises, en juillet 2001 puis en octobre suivant,
opposés par l'ensemble de l'interprofession et trois
confédérations de salariés à l'extension de
l'accord de réduction du temps de travail signé le 15 juin
précédent, qui illustraient bien le caractère
insupportable des contraintes qu'il imposait, par un
« parisianisme » excessif, à l'ensemble des
entreprises de l'hôtellerie et de la restauration de province.
Enfin, et même si ces mesures contribuant à desserrer les
carcans qui entravent quotidiennement les activités des artisans et des
petits et moyens entrepreneurs sont encore pour le moment à
l'état d'ébauche, il convient de citer les
projets du
gouvernement pour 2003
en matière de
simplifications
administratives
, de
création et de transmission des
entreprises
, et de
développement de la petite entreprise
. Le
Premier ministre a rappelé le 24 octobre dernier, au congrès
de l'Union professionnelle artisanale, l'intérêt tout particulier
qu'il portait à ces trois textes, qui concerneront naturellement au
premier chef les professionnels du tourisme.
C. ATTIRER LES JEUNES VERS LES EMPLOIS DU TOURISME
Tout en
se félicitant de ces dispositions, qui vont à l'évidence
dans le bon sens,
votre rapporteur pour avis estime indispensable que les
pouvoirs publics aident spécifiquement les employeurs du tourisme
à attirer les jeunes vers leur spécialité
.
Le secteur est en effet confronté à d'importants
problèmes de recrutement
, qui concernent en particulier la
branche hôtellerie-restauration
7(
*
)
,
et de formation
,
problème au demeurant lié au précédent. Ces
difficultés devraient en outre s'
aggraver
dans un futur
relativement proche
puisque, d'une part,
le nombre des patrons et
salariés du secteur du tourisme qui vont partir à la retraite
sera supérieur à celui des jeunes arrivant sur ce segment du
marché du travail
et, d'autre part,
les partants seront en
général qualifiés alors que les nouveaux venus seront peu
ou mal formés
.
Deux raisons majeures expliquent la
désaffection des jeunes pour
certains emplois du tourisme
: des
revenus moins
élevés
et des
conditions de travail plus rudes
qu'ailleurs. Dès lors, ils répugnent à s'engager dans les
voies de formation professionnelle menant à ces métiers, et
les chefs d'entreprises ne sont plus en mesure de recruter le personnel
qualifié
dont ils ont besoin.
Pour
rendre les emplois du tourisme plus attractifs
, il faut en
premier lieu
les payer davantage
sans
toutefois
altérer
plus encore qu'elles ne le sont déjà
les
marges des entreprises
. La réduction du taux de TVA à
5,5 % dans l'hôtellerie-restauration devrait, on l'a vu, y
contribuer, de même que la réduction des charges sociales sur les
bas salaires. Toutefois, c'est vers un
élargissement de la diminution
des charges
qu'il faut continuer d'avancer (au moins jusqu'à 2,2
SMIC, comme le prévoit le programme de la majorité), pour que les
améliorations de salaires directs qu'elle permettrait
de
générer concernent également les
emplois les plus
qualifiés
du secteur du tourisme, dont il a cruellement besoin.
Il convient en deuxième lieu d'
améliorer les conditions de
travail
, en particulier celles des salariés. A cet égard, la
reprise de négociations sur la réduction du temps de travail, sur
des bases plus raisonnables et dans le contexte plus responsable de
primauté de l'accord sur la loi créé par le projet de loi
Fillon, pourrait être de nature à réduire les tensions
pesant sur la
durée du travail
. Il n'est en effet pas tenable sur
le long terme que celle-ci soit, parfois largement, supérieure à
40 heures par semaine dans certaines branches d'activité (telle
l'hôtellerie-restauration), quand les 35 heures sont devenues la
norme chez les salariés (même si les nouvelles règles
concernant les heures supplémentaires augmentent en définitive de
quelques heures le niveau moyen de la durée du travail).
Au-delà de cette problématique transversale qui concerne
l'ensemble des PME et des artisans, le secteur du tourisme est en outre
confronté au
problème particulier des saisonniers
,
catégorie de salariés qui lui est spécifique
et
dont votre rapporteur pour avis a longuement abordé les
difficultés dans ses deux précédents avis
budgétaires. Il ne reviendra par conséquent pas sur celles-ci, ni
sur les mesures mises en oeuvre depuis deux ans pour commencer à y
apporter des réponses, sauf pour rappeler que la très grande
difficulté de trouver pour les saisonniers des
logements
à
des prix abordables interdit aux professionnels, notamment les hôteliers
et les restaurateurs, de
renforcer leurs équipes avec du personnel
qualifié pendant la haute saison touristique
.
Si ce phénomène perdure, les
standards d'accueil et de
service
qui font la réputation touristique de la France ne pourront
être maintenus, et notre
tourisme perdra des parts de
marché
. Aussi votre rapporteur pour avis souhaite-t-il que le
comité interministériel de pilotage des actions des services de
l'Etat en matière de travail saisonnier, que l'inspection
générale du tourisme, à qui revient la
responsabilité de tirer le bilan de la mise en oeuvre du plan
gouvernemental de quinze mesures arrêté en février 2000 et
d'impulser et soutenir les initiatives locales, et que la chargée de
mission
« logement des saisonniers »
au
secrétariat d'Etat au tourisme,
coordonnent
leurs actions
de manière à faire progresser la situation en la matière
dans les meilleurs délais.
En regard de ces efforts à approfondir pour accroître
l'attractivité des emplois, il convient de
renforcer la
qualification
en favorisant la
formation
tant
initiale
que
continue
des
professionnels
et de leurs
salariés
.
Le secteur du tourisme a en effet besoin d'
entrepreneurs
et
de
personnels qualifiés
. A cet égard, le dispositif de
soutien à l'emploi des jeunes en entreprise ne peut à lui seul
constituer une réponse satisfaisante aux difficultés de
recrutement : il s'agit davantage d'une mesure complémentaire et
participant d'une politique globale de lutte contre le chômage que d'une
solution propre à répondre aux préoccupations des chefs
d'entreprises touristiques.
Sur le plan de la
formation initiale
, il est littéralement
consternant de constater le
nombre important d'offres d'emplois de niveau V
de qualification (CAP) non-satisfaites dans le secteur touristique
, alors
que tant de jeunes sortent du système scolaire sans formation. Votre
rapporteur pour avis estime à cet égard que
les pouvoirs
publics devraient favoriser davantage les formations en alternance
, qui
sont
particulièrement bien adaptées aux métiers du
tourisme
. Certes, l'hôtellerie-restauration reste le premier
signataire de
contrats d'apprentissage
, et offre aussi de nombreux
contrats de qualification
, ouverts aux jeunes ou aux adultes sans
qualification ou ayant une qualification inadaptée. Toutefois, le nombre
des candidats est notoirement insuffisant pour répondre aux besoins,
comme en témoignent notamment les places ouvertes dans les centres de
formation d'apprentis et qui ne sont pas pourvues.
Aussi votre rapporteur pour avis se félicite-t-il de la prochaine
nomination d'un parlementaire en mission, chargé de réaliser un
état des lieux et de préparer des propositions afin de valoriser
les professions du tourisme et d'attirer de jeunes recrues.
Quant au taux d'accès à la
formation continue
, il est
également faible dans le domaine du tourisme, de l'ordre de 20 %
contre 33 % en moyenne nationale. La majorité des entreprises du
secteur étant des PME, beaucoup de
salariés
éprouvent des difficultés à se libérer et à
se déplacer pour suivre un cycle de formation continue. Les
patrons
indépendants
eux-mêmes sont confrontés à ces
difficultés, alors que le
renforcement de leurs compétences
constitue une condition essentielle pour leur permettre de rester
compétitifs dans une activité de plus en plus
concurrentielle
. Face aux mutations liées à
l'évolution des attentes de la clientèle, à la croissance
et à la mondialisation du tourisme, à l'irruption de nouvelles
technologies, les chefs d'entreprises comme les salariés ressentent un
besoin profond d'évoluer.
II. PRÉPARER LES MODIFICATIONS LÉGISLATIVES À VENIR
Au-delà de ces mesures de nature à favoriser l'activité du tourisme, en cours de mise en oeuvre ou que votre rapporteur pour avis appelle de ses voeux, mais qui, pour beaucoup, ne relèvent pas de la responsabilité du secrétaire d'Etat au tourisme, celui-ci a fixé les lignes directrices de son action législative pour les prochaines années dans le but de moderniser plusieurs pans du secteur touristique .
A. ÉLABORER LE CODE DU TOURISME
Le
Code du tourisme
devrait être un outil permettant de mieux
identifier le secteur du tourisme au plan juridique et institutionnel, de
renforçer les relations réunissant l'ensemble des secteurs
concernés par les politiques touristiques, ce qui soulignera le
caractère transversal de l'activité
, et de mettre à
disposition de chacun un instrument clair et maniable de conduite des actions
correspondantes.
Le principe de l'élaboration d'un tel code a été retenu
lors d'une réunion interministérielle du 26 septembre 2000. Son
pilotage a été confié à l'inspection
générale du tourisme, chargée d'organiser ses travaux
autour de
quatre livres
portant respectivement sur l'
organisation
générale du tourisme
, les
activités et professions
du tourisme
, les
équipements et aménagements du
tourisme
, et enfin l'
accès aux vacances
et la
fiscalité du tourisme
.
Conformément aux dispositions de la circulaire du Premier ministre du 30
mai 1996 relative à la codification des textes législatifs et
réglementaires, un groupe de travail a été
constitué pour associer à l'élaboration du projet les
différentes administrations concernées ainsi que des
personnalités qualifiées. Enrichissant et précisant les
documents préparatoires, ce groupe de travail a élaboré,
en mai et juin 2001, un plan détaillé qui a fait l'objet d'un
premier examen par la
Commission supérieure de codification
lors
de sa séance du 2 octobre 2001.
Ce projet de codification n'ayant pas significativement avancé depuis,
le secrétaire d'Etat a souhaité le
relancer
afin qu'il
soit mené à terme et sans tarder,
ce dont se félicite
votre rapporteur pour avis, qui souligne toutefois qu'il conviendra de veiller
à ce que le Code du tourisme intègre le cadre institutionnel
rénové résultant de la nouvelle étape en
matière de décentralisation initiée par le
Président de la République et que le Premier ministre proposera
prochainement au Parlement.
B. FAVORISER LA DÉCENTRALISATION
C'est
qu'en effet, la vaste entreprise décentralisatrice qui sera menée
l'an prochain concernera également le tourisme. A cette occasion,
l'Etat devrait se recentrer sur ses missions essentielles
,
c'est-à-dire la promotion mondiale, l'établissement de
références de qualité et l'information technique des
acteurs locaux.
Dans cette perspective,
la loi n° 92-1341 du 23 décembre
1992 relative à la répartition des compétences dans le
domaine du tourisme
sera naturellement appelée à être
modifiée
pour tenir compte de ce nouvel équilibre. A cet
égard, l'
accroissement des compétences des
collectivités territoriales en matière touristique
pourrait
s'apparenter à ce qu'a d'ores et déjà prévu pour la
collectivité territoriale de Corse la loi n° 2002-92 du
22 janvier 2002 relative à la Corse. L'article 18 de cette loi
a ainsi renforcé les attributions confiées en 1991 à
l'Assemblée de Corse en matière de
promotion et de
développement touristique
, tandis que son article 19 lui
permettra d'exercer concrètement cette compétence en lui
conférant la charge du
classement des stations et de l'ensemble des
organismes de tourisme
.
C. RÉFORMER LE RÉGIME DES STATIONS CLASSÉES
S'agissant précisément des stations
classées,
et en complémentarité avec les travaux menés tant sur la
codification que sur la décentralisation, le secrétaire d'Etat au
tourisme se propose d'aboutir sur le dossier de la
réforme d'ensemble
du régime des stations classées
, laissé en suspens
depuis plusieurs années. En effet, après avoir
bénéficié à environ un
millier de communes
françaises
, le
processus d'attribution du classement est
aujourd'hui extrêmement ralenti
. Une dizaine de communes à
peine se sont vues attribuer ce label depuis 1995, alors même que nombre
d'entre elles ont accompli ces dernières années d'importants
efforts, en matière d'équipement ou de services, qui leur
permettraient d'y prétendre. L'une des raisons du
« gel » progressif du dispositif tient sans aucun doute au
caractère centralisé de la procédure
.
Or, le classement est important pour les
communes concernées
qui,
si elles
ne perçoivent pas de concours particulier à ce
titre
, bénéficient toutefois d'
avantages
spécifiques
, et notamment
financiers
. Outre la perception
de la
taxe de séjour
, qui leur était initialement
réservée, les stations classées peuvent ainsi :
- percevoir une
taxe additionnelle aux droits d'enregistrement
dès lors qu'elles comptent moins de 5 000 habitants (article 1584
du code général des impôts) ;
- bénéficier du
taux réduit des droits de
mutation
si elles possèdent plus de 2 500 lits (article 44-II
de la loi du 4 février 1995 modifiée d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire) ;
- ouvrir des
casinos
si elles sont classées stations
balnéaires, thermales ou climatiques (loi du 15 juin 1907
réglementant les jeux dans les casinos) ;
- majorer les
rémunérations des cadres municipaux
, au
titre du surclassement démographique, s'il s'agit de petites
communes ;
- majorer les
indemnités du maire et des adjoints
(article
L. 2123-22 du code général des collectivités locales).
Une réforme de grande ampleur paraît donc désormais
nécessaire. D'ailleurs, le
Conseil national du tourisme
(section
des politiques territoriales touristiques) a été chargé en
2001 d'étudier la
détermination des critères de
classement afin d'en proposer la révision
.
Rappel des critères d'éligibilité au classement des stations
Les
dispositions législatives relatives aux stations classées sont
codifiées aux articles L. 2231-1 à L. 2231-8 du code
général des collectivités territoriales (CGCL) et, pour la
partie réglementaire, à ses articles R. 2231-1 à
R. 2231-63. Les principaux textes ainsi codifiés concernant les
stations classées sont les lois des 24 septembre 1919 et 3 avril
1942 ainsi que le décret du 14 novembre 1968.
A l'exception des stations de sports d'hiver, cette réglementation ne
comporte pas de véritables critères de classement, la
sélection s'effectuant essentiellement à partir de
critères jurisprudentiels, qu'il s'agisse de l'examen des demandes par
les différents conseils et commissions consultatifs prévus par
les textes ou de l'examen du projet de décret par le Conseil d'Etat.
Comme l'a rappelé la circulaire du 20 juin 1991 destinée aux
préfets de département et relative aux stations classées
et communes touristiques, ces critères jurisprudentiels impliquent, pour
qu'une commune soit classée dans les catégories de stations qui
relèvent de la compétence du secrétariat d'Etat au
tourisme, que soient réunies les conditions suivantes : une
situation sanitaire irréprochable, un plan d'occupation des sols
approuvé, soixante-quinze chambres au moins en hôtellerie
classée et un office de tourisme classé par l'autorité
administrative.
Les conditions demandées pour le classement permettent de
conférer à ce régime un rôle incitateur, conduisant
les communes candidates à se doter des infrastructures d'accueil
suffisantes et de qualité, afin de se constituer en station et de se
promouvoir comme produit attractif. En ce qui concerne les petites communes, le
regroupement dans le cadre de l'intercommunalité doit être la voie
à privilégier afin d'atteindre le seuil indispensable à la
constitution d'une station considérée comme pôle de
développement touristique.
Réponse à la question écrite de M.
Georges
Mouly
JO Sénat (Q) du 15 mars 2001, p. 951.
Dès lors, votre rapporteur estime qu'en même temps qu'il serait procédé à la définition d'un cadre modernisé, rigoureux et cohérent des critères d'éligibilité , la procédure d'attribution du label devrait être simplifiée , clarifiée et rendue plus rapide et proche du terrain . Le régime des stations classées pourrait ainsi faire l'objet d'un transfert de compétences en faveur des collectivités territoriales dans le cadre du projet de loi de décentralisation.
D. REFONDRE LE DISPOSITIF DE LA TAXE DE SÉJOUR
Outre ce chantier législatif des stations classées, le secrétaire d'Etat au tourisme souhaite également, en associant les élus des stations et communes touristiques et les professionnels du tourisme, procéder à une refonte d'ensemble du dispositif de la taxe de séjour , au-delà des améliorations qui y ont été apportées par la loi de finances pour 2002 .
Le dispositif de la taxe de séjour
La taxe
de séjour a été instituée par la loi du 13 avril
1910 et généralisée à l'ensemble des stations
classées par la loi du 24 septembre 1919. Etendu ensuite aux communes de
montagne et littorales, son champ d'application a été
généralisé, par la loi du 5 janvier 1988, aux communes
désireuses de développer leur promotion touristique, et, par la
loi du 2 février 1995, aux communes et groupements de communes qui
réalisent des actions de protection et de gestion de leurs espaces
naturels. Les dispositions relatives à la taxe de séjour sont
aujourd'hui codifiées aux articles L. 2333-26 à
L. 2333-46 et R. 2333-43 à R. 2333-69 du CGCL.
La taxe de séjour,
acquittée par les touristes
, permet de
financer une partie des dépenses publiques nécessaires à
la compétitivité touristique des stations et villes touristiques
en évitant de faire supporter à la seule population permanente,
par le biais des impôts locaux (taxe d'habitation notamment), les moyens
financiers que le développement du tourisme exige des
municipalités. Son
produit est d'ailleurs obligatoirement
affecté au financement des dépenses dont l'objet principal est le
développement touristique de la commune
, et dont le montant
particulièrement élevé est imputable à la
fréquentation touristique. Il s'agit certes des dépenses
afférentes à
l'accueil et à l'information des
touristes
(office de tourisme) ou à la
promotion des ressources
touristiques
de la commune, mais aussi de celles nécessaires
à l'
aménagement et à l'embellissement des lieux de
promenade
, à l'
agrandissement d'une station
d'épuration
, à la
construction de parcs de stationnement
supplémentaires
, etc.
La taxe de séjour est
prélevée dans tous les modes
d'hébergement
, au profit des
communes
. Elle est
encadrée par un tarif minimal (0,15 euro en 2002) et un tarif
maximal (1,07 euro) par nuitée et par personne. Il faut ajouter
qu'en application de l'article 106 de la loi du 26 mars 1927, les
départements
peuvent instituer une
taxe additionnelle
de
10 % à la taxe de séjour, dont l'
affectation
est
identique à la taxe communale
.
La taxe peut être
perçue à la nuitée
, ce qui
est son mode traditionnel de perception (1 614 communes en 2000),
ou
, depuis 1989,
de façon forfaitaire
(304 communes en
2000). Si cette seconde méthode présente l'avantage de faciliter
la perception de la taxe et de simplifier la comptabilité de
l'hébergeur, une estimation excessive de la fréquentation peut
cependant indûment grever les charges d'exploitation de ce dernier, en
particulier en cas d'institution d'un acompte, correspondant à 50 %
du produit prévisible de la taxe, que le conseil municipal est
autorisé à demander aux logeurs de verser à une date
déterminée.
En cas de perception à la nuitée, la taxe doit obligatoirement
figurer sur la facture remise au touriste, alors qu'en cas de perception
forfaitaire, son montant, calculé annuellement à partir d'une
estimation de la fréquentation de l'établissement assujetti, ne
doit pas apparaître sur la facture. Cependant, afin d'éviter que
la taxe forfaitaire ne soit nécessairement une charge directe pour le
prestataire de service, son coût peut être répercuté
sur le prix de vente de la prestation d'hébergement, l'hébergeur
pouvant faire alors figurer sur la facture la mention
« taxe de
séjour forfaitaire comprise »
.
La
perception et la fixation des tarifs de la taxe relèvent de
l'initiative des collectivités locales
(au moins quatre communes et
un département y ont ainsi renoncé en 2000, ce qui a interrompu
pour la première fois la croissance annuelle des communes y ayant
recours), dans le cadre de barèmes établis par mode
d'hébergement et par niveau de confort fixés par la
réglementation.
Source : Direction du tourisme
En 2000,
la taxe de séjour a été perçue par
1 918
communes
et son produit total a été de
106,84 millions
d'euros
, dont 73,95 millions d'euros pour la taxe perçue à la
nuitée et 32,89 millions d'euros pour la taxe forfaitaire.
Onze
départements
ont par ailleurs perçu la taxe additionnelle,
pour un produit total de
2,13 millions d'euros
. Ce système existe
non seulement en France, mais aussi en Allemagne (0,31 à
1,07 euro), en Autriche (0,46 à 1,52 euro), en Belgique
(0,46 euro), en Grèce (1,52 euro), aux Pays-Bas (0,23 à
0,38 euro) ou encore en Suisse (0,15 à 1,52 euro).
Lors de l'examen du projet de
loi de finances pour 2002
, le
dispositif a été modifié
sur plusieurs points
importants (les
tarifs
, les
exemptions
et les
modalités
de perception
des taxes simples et forfaitaires) pour en améliorer
le rendement et le fonctionnement.
Les articles 101 à 106 de la loi de finances pour 2002
L'article 101 a fixé de nouvelles valeurs minimale (0,2
euro)
et maximale (1,5 euro) à la taxe.
L'article 102 en a exempté les enfants de moins de 13 ans.
Les articles 103 et 104 ont simplifié les modalités de versement
en laissant aux collectivités territoriales le soin de les
déterminer par délibération.
L'article 105 a prévu l'exemption de la taxe de séjour
forfaitaire pour les établissements exploités depuis moins de
deux ans.
L'article 106 a institué un dispositif de dégrèvement en
cas de pollution grave ou d'une situation de catastrophe naturelle.
Il convient de relever que le Conseil constitutionnel a par ailleurs
déclaré non conformes à la Constitution, car ne pouvant
relever de la loi de finances, trois autres articles du projet de loi de
finances pour 2002 relatifs aux taxes de séjour, et qui
concernaient :
- la présentation, par le maire ou le président de
l'établissement public de coopération intercommunale, d'un
rapport sur la perception des taxes et sur l'utilisation de leur produit ;
- l'annonce, dans le cadre dudit rapport, des éventuelles
augmentations de tarifs qui pourraient intervenir lors du prochain exercice
budgétaire ;
- une définition plus précise des conditions d'utilisation
du produit des taxes.
Enfin, on notera que l'article 107 supprime en outre la taxe sur les
entreprises spécialement intéressées à la
prospérité des stations, taxe qui, à l'exception de la
taxe sur les remontées mécaniques, n'avait pas fait l'objet de
mesures d'application depuis sa création.
Le
nouveau régime
, tel que modifié par la loi de finances
pour 2002,
entrera en vigueur à compter du
1
er
janvier 2003
. Le décret d'application de
l'article 101 a été examiné par le
Comité des
finances locales
lors de sa séance du 9 juillet 2002 et devrait
être publié d'ici la fin de l'année, après avoir
été examiné par le Conseil d'Etat dans le cadre de sa
codification. Par ailleurs, une
circulaire ministérielle
devrait
reprendre, sous forme de
recommandations
adressées aux
collectivités locales concernées
, les dispositions
annulées par le Conseil constitutionnel.
Si ces
améliorations
, qui résultent notamment des
conclusions d'une mission conjointe menée en 2001 par les inspections
générales du tourisme et de l'administration (ministère de
l'intérieur), ainsi que des propositions de notre collègue
député Michel Bouvard
8(
*
)
, étaient
attendues
,
elles ne paraissent cependant toujours pas suffisantes pour donner au
régime de la taxe de séjour les caractères de
modernité nécessaires pour assurer sa totale
efficacité
.
Depuis plusieurs années, de nombreuses initiatives ont d'ailleurs
été prises par les collectivités locales pour tenter
d'
améliorer
le rendement de la taxe de séjour
et de
lier le dispositif à une
politique dynamique d'accueil et de
fidélisation des stations
. Témoignant d'une volonté
d'améliorer l'acceptation de cette taxe locale par les assujettis
(logeurs et clients), notamment en l'accompagnant de facilités offertes
aux touristes (informations sur les stations, visites gratuites de monuments,
accès à des activités de loisirs, etc.),
ces
initiatives demeureront néanmoins limitées dans leurs effets tant
qu'une modernisation plus profonde de la taxe de séjour n'aura pas
été assurée
.
C'est pourquoi
votre rapporteur se félicite que le secrétaire
d'Etat ait
manifesté l'ambition d'aller au-delà de la
réforme adoptée l'an dernier par le Parlement et
décidé de poursuivre plus avant la réflexion
entreprise depuis deux ans afin d'être prochainement en mesure de
soumettre aux parlementaire un
dispositif profondément
rénové
.
E. ADAPTER LES CONDITIONS D'EXERCICE DES ACTIVITÉS RELATIVES À L'ORGANISATION ET À LA VENTE DE VOYAGES ET DE SÉJOURS
Le
dernier axe législatif du secrétariat d'Etat concerne la
réforme de la loi n° 92-645 du 13 juillet 1992 fixant les
conditions d'exercice des activités relatives à l'organisation
et à la vente de voyages et de séjours
.
Cette loi, qui a transposé en droit national les dispositions de la
directive n° 90/314/CE du Conseil du 13 juin 1990 concernant les
voyages, vacances et circuits à forfait, avait pour objectif
de
protéger les consommateurs
tout en favorisant le
développement des différents modes de commercialisation
,
en particulier le tourisme d'accueil. En effet, si ce texte
a
conforté
le
rôle des agences de voyage titulaires d'une
licence
, il a également
ouvert l'organisation et la vente de
voyages et de séjours à d'autres opérateurs
: les
associations
, qui peuvent être
agréées
pour
fournir des prestations à leurs adhérents, les
organismes
locaux de tourisme
, tels les offices de tourisme, qui peuvent être
autorisés
à commercialiser des produits touristiques, et
enfin des
professionnels
, comme les hôteliers ou les autocaristes,
qui peuvent être
habilités
à proposer des
prestations touristiques à titre complémentaire ou accessoire de
leur activité principale.
La multiplication des acteurs intervenant dans ce secteur s'est
accompagnée de politiques de partenariat afin que les règles
nouvelles soient respectées dans un esprit de consensus et de saine
émulation, mais aussi que la commercialisation des voyages et
séjours, désormais juridiquement accessible à un grand
nombre d'opérateurs, débouche sur une
meilleure mise en
marché de l'offre dans l'intérêt des consommateurs
. A
cet égard, le premier bilan de cette loi, huit ans après sa mise
en oeuvre (son décret d'application datant de décembre 1994),
s'avère positif : près de
7 000 acteurs touristiques
sont aujourd'hui titulaires d'une des quatre autorisations
préfectorales
(licence, agrément, autorisation et
habilitation) et ce
secteur est très dynamique
, tant au plan
quantitatif
(plusieurs centaines d'entreprises nouvelles se sont
créées chaque année jusqu'en 2001, le mouvement
s'étant alors retourné en raison de la crise du secteur
consécutive au 11 septembre) qu'au plan
qualitatif
(les
produits se diversifient et sont très innovants, et le
développement du commerce en ligne
y est particulièrement
intense).
Reste qu'
une nouvelle étape
est sans doute aujourd'hui
nécessaire
, d'autant que les incertitudes nées de la
conjoncture politique et économique internationale pèsent
particulièrement sur ce secteur, comme en témoignent ses
résultats depuis septembre 2001.
D'une part, en effet,
les professionnels
demandent une
simplification
et une
clarification du dispositif
afin de
garantir une
meilleure application des règles de la concurrence
et de
renforcer la protection des consommateurs
.
Ainsi les
associations
et les organismes sans but lucratif, qui prennent
une place de plus en plus importante dans l'activité du secteur,
souhaiteraient
pouvoir proposer et vendre des prestations à d'autres
clients que leurs seuls membres adhérents
. Les plus importantes de
ces associations interviennent en tout état de cause sous un
régime de fiscalité
, fixé par une instruction
fiscale de 1999, qui, tout en préservant la spécificité du
secteur associatif, est désormais
identique à celui des
sociétés commerciales
. La satisfaction de cette demande
passerait dès lors nécessairement par une adaptation de la loi de
1992, et en particulier de son article 8, pour autoriser les associations
à faire de la publicité lorsqu'elles exercent dans le secteur
concurrentiel.
En ce qui concerne le
régime des autorisations administratives
,
les professionnels dénoncent d'une part un manque de moyens au niveau
préfectoral, qui
ralentit les procédures de
délivrance
, ainsi que, d'autre part, la
complexité
née de la
superposition des dispositifs dérogatoires
au
régime de droit commun que constitue la licence. Ils réclament
ainsi une
simplification,
qui présenterait en outre l'avantage
d'assurer un
meilleur
équilibre concurrentiel entre les
différentes formes de voyage
. A cet égard, l'accord des
représentants des agences de voyage à l'extension des
capacités publicitaires des grandes associations serait en tout
état de cause subordonné à la résolution favorable
de cette problématique.
Enfin, les professionnels font part de difficultés quant à la
mise en oeuvre du régime de responsabilité de plein droit de
l'agent de voyage
ou de l'opérateur touristique, et à
l'application de la
garantie financière
. En conclusion d'une
étude menée en 2000 sur l'adéquation de ce dispositif, la
direction du tourisme estime certes que l'équilibre financier est
globalement satisfaisant : le
nombre de sinistres est de l'ordre de
1,5 %
et la
garantie financière s'avère suffisante
dans les trois-quarts d'entre eux
. Elle reconnaît toutefois qu'un
approfondissement de l'étude serait nécessaire pour
établir une comparaison avec le niveau de protection des consommateurs
qu'offrent les autres systèmes applicables dans l'Union
européenne.
A cet égard, il convient de rappeler que le Parlement européen,
dans un rapport de décembre 2001, a recommandé aux Etats membres
d'assurer la plus grande clarté en matière de
responsabilité de l'organisateur ou du distributeur, et de
définir très précisément le dédommagement
dont doit bénéficier le consommateur
en cas d'annulation du
contrat.
D'autre part, et en tout état de cause,
les prévisibles
évolutions de la réglementation européenne rendront
prochainement nécessaire un toilettage de la loi de 1992
.
En effet, l'ensemble des directives européennes ayant trait à la
protection des consommateurs a récemment fait l'objet d'un
Livre
vert
de la Commission européenne
9(
*
)
. Cette communication a ouvert une
vaste consultation des partenaires européens et de leurs organisations
professionnelles et associations, qui doit porter à la fois sur les
objectifs d'une politique spécifique des consommateurs de l'Union
européenne
et sur les
outils juridiques à mettre en oeuvre
pour y parvenir
. Afin d'offrir aux consommateurs une protection maximale
tout en limitant les coûts des entreprises, le champ de réflexion
du
Livre vert
couvre l'ensemble des pratiques commerciales en
général,
y compris par conséquent l'organisation et la
vente des voyages, vacances et circuits à forfait
. Dans ce cadre
sont ainsi posées des questions relatives à la nature des
barrières commerciales auxquelles consommateurs et commerçants
sont confrontés, à la définition de ce que sont les
pratiques commerciales loyales (qui devraient répondre à un
test général de loyauté
), au contenu et au mode de
communication des informations destinées aux consommateurs, etc.
L'examen des conclusions de cette démarche de consultation et des
mesures législatives et réglementaires qui seront
proposées à son issue au Parlement européen et au Conseil
est ainsi inscrit à l'ordre du jour des travaux de la Commission
européenne en 2003.
En outre, en matière de politique concurrentielle, le
secteur des
ventes de voyages demeure soumis à des distorsions de concurrence
au plan européen
résultant soit du contenu même de
la directive du 13 juin 1990, soit de divergences d'interprétation quant
à celui-ci. C'est en particulier le cas au
plan fiscal
, le
régime particulier de TVA des agents de voyages calculée sur la
marge n'étant pas appliqué de façon uniforme par les Etats
membres, notamment parce que l'article 28 de la directive autorise
explicitement ces derniers à en exonérer les prestations de
services des agents de voyages. Une nouvelle proposition de directive est donc
à l'étude au niveau du Conseil
« Marché
intérieur »
pour
préciser le champ d'application
du régime particulier
et
abroger les possibilités de
dérogation existantes
.
Ainsi, le
dispositif actuel
fixant les conditions d'exercice des
activités relatives à l'organisation et à la vente de
voyages et de séjours mérite d'être
simplifié
afin, tout en maintenant un haut niveau de protection des consommateurs, de
favoriser le développement de ce secteur d'activité
qui
est constitué de nombreuses PME et soumis à un environnement
fortement concurrentiel au plan international.
C'est pourquoi votre rapporteur pour avis se félicite que le
secrétaire d'Etat au tourisme ait indiqué qu'une réflexion
serait engagée en association avec les professionnels concernés
dans le but de soumettre, d'ici quelques mois, un projet de loi au
Parlement.
*
* *
La commission des affaires économiques a examiné ce rapport le mercredi 30 octobre 2002 et, après avoir entendu M. Gilles de Robien, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, et M. Léon Bertrand, secrétaire d'Etat au tourisme, a donné un avis favorable, sur proposition de son rapporteur pour avis, à l'adoption des crédits consacrés au tourisme inscrits dans le projet de loi de finances pour 2003 lors de sa réunion du 27 novembre 2002.